Peine de mort en France

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Article principal : peine de mort.

La peine de mort en France existe officieusement depuis le Moyen Âge et a été abolie en 1981, faisant de la France le dernier pays de la Communauté européenne qui appliquait la peine de mort à l'abolir.

Sommaire

[modifier] Historique

[modifier] La peine de mort Sous l'Ancien Régime

Avant 1791, il existait en France une multitude de modalités d'application de la peine capitale, selon le crime et la condition du condamné, par exemple :

  • la décapitation à l'épée (ou à la hache) qui était réservée aux nobles
  • la pendaison pour les voleurs qui n'ont pas eu recours à la violence
  • le bûcher pour les hérétiques et les incendiaires
  • le démembrement du pénis pour les violeurs
  • la roue pour les crimes violents, le condamné est égorgé, ses membres, brisés puis il est achevé par strangulation (la durée avant l'étranglement est déterminée selon la gravité du crime : après quelques coups pour un vol à main armée, après plusieurs heures pour un assassinat (Jean Calas)
  • l'huile bouillante : pour les faux monnayeurs
  • l'écartèlement : pour les parricides, dans la pratique, il n'est utilisé que pour les régicides (le Roi étant le père de la Nation)

[modifier] Adoption de la guillotine

Le premier débat officiel sur la peine de mort en France date du 30 mai 1791, avec la présentation d'un projet de loi visant à l'abolir. Son rapporteur, Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau est soutenu notamment par Maximilien de Robespierre. Cependant, l'Assemblée nationale constituante, promulgue une loi le 6 octobre 1791 refusant d'abolir la peine de mort, mais elle supprime la torture. C'est également avec cette loi qu'est uniformisée la méthode d'exécution, Tout condamné à mort aura la tête tranchée, cette célèbre phrase restera dans le Code pénal français jusqu'à l'abolition, en 1981.

L'usage de la guillotine est alors généralisée pour toute mise à mort de civils. Seuls, les militaires font exception à la règle : ils pourront être fusillés par peloton d'exécution pour les crimes commis dans l'exercice de leurs fonctions.

Le 26 octobre 1795, la Convention nationale abolit la peine capitale, mais seulement à dater du jour de la publication de la paix générale. Avec l'arrivée de Napoléon Bonaparte, la peine de mort, qui n'a en fait pas été abolie, est rétablie le 12 février 1810, dans le Code pénal impérial français, qui prévoit 39 cas d'application dont : l'assassinat, le meurtre, l'attentat, l'incendie volontaire, le faux-monnayage, la trahison, la désertion, etc...

[modifier] Décret Crémieux

Puis, un décret d'Adolphe Crémieux du 25 novembre 1870, réforme l'usage de la guillotine en supprimant l'échafaud sur lequel elle était dressée. Il uniformise aussi la charge de bourreau en supprimant ceux de province (jusqu'ici il en existait un par ressort de cour d'appel). Il n'y eut alors plus qu'un seul "exécuteur en chef" pour tout le territoire national, assisté par cinq "aides" (seul le bourreau de Corse restera en fonction jusqu'en 1875). L'Algérie, alors française, conservera une équipe d'exécuteurs qui lui sera propre, jusqu'à l'indépendance du pays en 1962.

[modifier] Tentatives d'abolition avortées : 1906 - 1908

Pendant cette période, des tentatives d'abolition de la peine capitale voient le jour. Elles échouent toutes, l'opinion publique y était hostile.

Ainsi, la Commission du budget de la Chambre des députés vote en 1906, la suppression des crédits pour le fonctionnement de la guillotine, ce vote vise à gripper la procédure d'exécution des condamnés.

À partir de 1906, le nouveau président de la République Armand Fallières, partisan de l'abolition de la peine de mort, gracie systématiquement tous les condamnés à mort. L'année suivante, la grâce accordée à Soleilland, meurtrier d'une petite fille, est dénoncée par une forte campagne de presse et renforce le camp opposé à l'abolition. En 1908, Aristide Briand, garde des Sceaux du gouvernement Georges Clemenceau, soumet aux députés un projet de loi visant à abolir la peine de mort. Malgré l'appui de Jean Jaurès qui s'oppose à Maurice Barrès, ce projet est repoussé le 8 décembre par 330 voix contre 201. Les exécutions capitales reprennent dès 1909.

Le 24 juin 1939, le président du Conseil Édouard Daladier promulgue un décret-loi abolissant les exécutions capitales publiques, après le scandale de l'exécution d'Eugène Weidmann, quelques jours auparavant.

[modifier] Entre 1940 et 1981

Sous le Régime de Vichy, le maréchal Pétain refuse la grâce à une cinquantaine de condamnés de droit commun (dont huit femmes), sans compter bien sûr les exécutions de résistants.

Dix-neuf personnes ont été guillotinées en France entre 1958 et 1981 (sous la Vème République).

Le 11 mars 1963, l'exécution du lieutenant-colonel Bastien-Thiry responsable de l'attentat du Petit-Clamart contre le général de Gaulle, fera de lui, le dernier condamné à mort à être fusillé[1].

[modifier] Vers l'abolition

Le 28 novembre 1972, Claude Buffet et Roger Bontems sont exécutés, c'est le début de la croisade de Robert Badinter pour l'abolition totale de la peine de mort en France.

Le 12 mai 1973, l'exécution d'Ali Benyanès à Marseille passe quasiment inaperçue. Pour la troisième fois en moins de six mois, Georges Pompidou (pourtant défavorable à la peine capitale) laisse un condamné à mort se faire guillotiner.

Le 28 juillet 1976, Christian Ranucci est exécuté, sa grâce ayant été refusée par le président Valéry Giscard d'Estaing ; des doutes subsistent sur sa culpabilité dans la célèbre affaire du Pull-over rouge ; il a été l'antépénultième condamné à mort exécuté en France.

Après une plaidoirie de Robert Badinter, l'avocat de Patrick Henry, celui-ci échappe à la condamnation à mort le 21 janvier 1977, pour le meurtre d'un enfant. Nombre de journaux pensent que c'est la fin de la peine de mort.

Le 23 juin 1977, Jérôme Carrein est guillotiné à la prison de Douai.

Le 10 septembre 1977, Hamida Djandoubi est guillotiné, il est le dernier condamné à mort à être exécuté en France.

En octobre 1978, un groupe d'étude de l'Assemblée nationale tente, comme en 1906, de supprimer les crédits pour le fonctionnement de la guillotine.

[modifier] Abolition

Le 16 mars 1981, en pleine campagne électorale pour les élections présidentielles, François Mitterrand déclare clairement qu'il est contre la peine de mort. Il est élu Président de la République le 10 mai.

Le 25 mai, François Mitterrand gracie Philippe Maurice, il est le dernier condamné à mort gracié.

Le 26 août, le Conseil des ministres approuve le projet de loi abolissant la peine de mort.

Le 17 septembre, Robert Badinter présente le projet de loi à l'Assemblée nationale[2]. Il est voté le 18 septembre à 18h44 par 369 voix pour, 113 contre (487 votants, 482 suffrages exprimés).

Le 30 septembre, plusieurs amendements du Sénat sont rejetés. Après l'Assemblée nationale, la loi est officiellement adoptée par les sénateurs par 161 voix pour, 126 contre (288 votants, 287 suffrages exprimés).

Le 9 octobre, la loi est promulguée. La France est l'un des derniers pays d'Europe occidentale (avec la Suisse (Code pénal militaire) et le Royaume-Uni qui l'aboliront totalement, respectivement en 1991 et en 1998) à abolir la peine de mort.

De 1984 à 1995, 27 propositions de loi visant à rétablir la peine de mort sont déposées au Parlement.

[modifier] Précautions contre le rétablissement

Aujourd'hui bien que plusieurs responsables politiques français se déclarent en faveur de la peine de mort, son rétablissement ne serait pas possible sans rejeter plusieurs traités internationaux (certaines personnes disent que son rétablissement entraînerait une dégradation de l'image de la France à l'étranger et en particulier au sein de l'Union européenne).

Le 20 décembre 1985, la France ratifie le protocole additionnel numéro 6 à la Convention européenne des droits de l'homme, la France ne peut plus rétablir la peine de mort, sauf en temps de guerre ou, dans une autre optique, en dénonçant l'ensemble de la Convention en suivant les contraintes de l'article 58 de ladite convention.

Le 21 juin 2001, Jacques Chirac envoie une lettre à l'association Ensemble contre la peine de mort : « C'est un combat qu'il faut mener avec détermination et conviction. Car nulle justice n'est infaillible et chaque exécution peut tuer un innocent. Car rien ne peut légitimer l'exécution de mineurs ou de personnes souffrant de déficience mentale. Car jamais la mort ne peut constituer un acte de justice. »

Le 3 mai 2002, la France signe, avec 30 autres pays, le Protocole numéro 13 à la Convention européenne des droits de l'homme. Ce texte interdit la peine de mort en toutes circonstances, même en temps de guerre. Il est entré en vigueur le 1er juillet 2003, après le dépôt de 10 ratifications.

En 2004, une proposition de loi[3] a été déposée par Richard Dell'Agnola devant l'Assemblée nationale, le 8 avril 2004, tendant à rétablir la peine de mort pour les auteurs d'actes terroristes. L'ordre du jour des assemblées étant fixé par le Gouvernement et celui-ci étant « proche » de Jacques Chirac, abolitionniste (voir son vote lors de l'abolition de 1981), la discussion en séance publique de la proposition de loi n'a jamais eu lieu.

Le 13 octobre 2005, le Conseil constitutionnel a estimé que le IIe protocole facultatif [4] du pacte international relatif aux droits civils et politiques ne pouvait être ratifié sans une révision préalable de la Constitution. Ce pacte abolit complètement la peine de mort, avec la possibilité d'émettre une réserve en temps de guerre [5]. Les États signataires n'ont aucune procédure de dénonciation du pacte, et cette abolition revêt donc un caractère définitif, qui selon le Conseil constitutionnel porte atteinte au libre exercice de la souveraineté nationale. Le 3 janvier 2006, Jacques Chirac a donc annoncé une révision de la Constitution visant à inscrire l'abolition de la peine de mort dans un nouvel article 66-1. Celui-ci disposera simplement que "nul ne peut être condamné à la peine de mort". Un an plus tard, mardi 30 janvier 2007, cette modification a été votée par l'Assemblée nationale. L'occasion de constater le degré actuel de l'abolition : le vote s'est fait à main levée, seule une quinzaine de députés UMP conduits par Jacques Myard n'ont pas voté le texte, le jugeant « inutile car personne ne songe, dans la conjoncture actuelle, à rétablir la peine de mort » [6]. Le 9 février 2007, le Sénat vote à son tour la loi. Il ne reste plus qu'un vote des deux chambres réunies en Congrès à Versailles, ce qui a été fait le 19 février 2007 peu avant l'élection présidentielle de 2007.

Le 1er août 2007, la France ratifie définitivement le Protocole 13 de la CEDH interdisant la peine de mort en toutes circonstances, même en temps de guerre, texte qu'elle avait signé en 2002.

[modifier] Opinion française

Au cours du XXe siècle, l'opinion des Français sur la peine de mort a beaucoup évolué. Plusieurs sondages ont montré de grandes différences d'une époque à l'autre. En 1908, le Petit Parisien publiait un sondage dans lequel 77% des interrogés se déclaraient en faveur de la peine de mort. En 1960, un sondage de l'Institut français d'opinion publique (IFOP) montrait que 50% des Français étaient contre la peine de mort et 39% pour. En 1972, dans un autre sondage IFOP, 27% des sondés seulement étaient contre la peine de mort et 63% pour. Enfin, un sondage du Figaro publié le lendemain du vote de la loi d'abolition du 9 octobre 1981 indiquait que 62% des français étaient pour le maintien de la peine de mort.

Selon un sondage de l'institut IFOP en 1998[7], 54 % des français sont hostiles à la peine de mort. D'après un sondage réalisé en septembre 2006 par TNS Sofres, 52 % des Français sont opposés au rétablissement de la peine de mort[8].

Comme tout sondage sur un sujet de société aussi sensible, l'opinion publique (et dans ce cas l'opinion française) est assez changeante en fonction de l'actualité. Les différents sondages réalisés au cours de l'Histoire ont montré que lors de crimes odieux (particulièrement lorsqu'ils touchent des enfants), l'opinion peut vite revenir à une majorité pour le rétablissement de la peine capitale.

[modifier] Exécutions après Mai 1968

Criminel Date Lieu d'exécution Crime Presidence
Jean-Laurent Olivier 11 mars 1969 Amiens Deux infanticides dont un aprés viol, refusa la grâce que lui avait accordé Charles de Gaulle
Roger Bontems 28 novembre 1972 Paris Complicité de meurtres et de prise d'otage Georges Pompidou
Claude Buffet 28 novembre 1972 Paris Meurtres durant une peine de réclusion criminelle à perpétuité Georges Pompidou
Ali Ben Yanes 12 mai 1973 Marseille Infanticide aprés tentative de meurtre Georges Pompidou
Christian Ranucci 28 juillet 1976 Marseille Infanticide aprés enlèvement Valery Giscard d'Estaing
Jerôme Carrein 23 juin 1977 Douai Infanticide aprés viol Valery Giscard d'Estaing
Hamida Djandoubi 10 septembre 1977 Marseille Meurtre après tortures Valery Giscard d'Estaing

[modifier] Abolitionnistes célèbres

[modifier] Partisans célèbres

[modifier] Bibliographie

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes

[modifier] Notes

  1. michalon.fr, Agnès Bastien-Thiry, Mon père le dernier des fusillés, édit. Michalon, 2005, (ISBN 2-84-186-266-6), 220 p
  2. (fr) Discours de Robert Badinter à l'Assemblée nationale, le 17 septembre 1981, 17 septembre 1981, La Documentation française. Consulté le 12 novembre 2007
  3. (fr) Proposition de loi de M. Richard Dell'Agnola tendant à rétablir la peine de mort pour les auteurs d’actes de terrorisme
  4. (fr) Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort
  5. voir l'article 2
  6. (fr) Les députés votent l'inscription de l'abolition de la peine de mort dans la Constitution, dans Le Monde du 30 janvier 2007
    (fr) Adoption en première lecture du projet de loi inscrivant l'abolition de la peine de mort dans la Constitution française, sur Wikinews, 2 février 2007
  7. Sondage IFOP-France Soir réalisé les 5 et 6 février 1998. La question était : « Vous personnellement, souhaitez-vous le rétablissement de la peine de mort en France ? »
  8. Étude TNS Sofres réalisée les 13 et 14 septembre 2006. La question était : « Êtes-vous favorable ou opposé au rétablissement de la peine de mort ? »
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