Peine de mort au Japon

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La peine de mort au Japon est légale et toujours appliquée en 2008. La peine capitale peut être prononcée pour les multiples meurtres ou bien un seul avec des circonstances aggravantes comme le viol ou le vol.

De 1946 à 1993, 766 personnes ont été condamnées à mort et 608 ont été exécutées. Après les exécutions de 2008, près de 100 prisonniers attendraient toujours d'être exécutés. Aujourd'hui le Japon fait parti du cercle restreint des démocraties qui appliquent la peine de mort (avec Singapour ; l'Inde ; Taïwan et l'Indonésie entre autres, ce sont des pays qui comme les Etats-Unis, peuvent politiquement se permettre de ne pas tenir compte des réprimendes de l'Union européenne et de l'Organisation mondiale des nations unies), avec 9 exécutions et 46 condamnations à mort en 2007, le Japon va à contre-courant de la tendance qui pousse de plus en plus de petits pays à abolir la peine capitale.

Sommaire

[modifier] Histoire

Le Japon a une longue tradition de la peine de mort, principalement en temps de guerre. Bien qu'elle s'occidentalise beaucoup, le rapport à la mort est très important dans la société japonaise. Dans certains cas, se donner la mort est une façon noble de mourir.

Depuis que le code pénal japonais s'est occidentalisé sous l'ère Meiji, il autorise la peine de mort pour les crimes "les plus odieux". Les États-Unis ont très peu réformé le code pénal en 1945, lorsqu'ils ont occupé le pays et la peine de mort fut maintenue.

Le pays n'a connu aucune exécution de 1989 à 1993, cela est dû au Ministre de la Justice de l'époque, un abolitionniste, qui refusa de signer les décrets d'exécution des condamnés. Mais elles reprennent avec l'arrivée de Masaharu Gotoda, qui en tant que légaliste considère que pour la crédibilité du système juridique japonais, il faut appliquer les sentences prononcées par les tribunaux.

De 1990 à 1995, l'opinion publique fut sensibilisée, principalement par les médias, sur la question de l'abolition de la peine de mort. Un débat public commença même à être institué. L'attentat au gaz sarin dans le métro de Tokyo en 1995 fit basculer l'opinion. En 2007 selon le Mainichi Shinbun, 90% des japonais sont pour la peine de mort, c'est à ce titre que le gouvernement japonais déclare vouloir maintenir la peine capitale.

Le pays n'est pas signataire du protocole de l'Assemblée générale des Nations unies en faveur de l'abolition de la peine capitale.

[modifier] Les conditions de vie des condamnés

L'attente au sein du couloir de la mort au Japon est en général très longue et dure souvent dix ans, parfois plus. Cette attente est destinée selon l'administration pénitentiaire à permettre le « repos de leur âme ». Toujours pour préserver ce repos, les visites sont strictement limitées, à tel point que des parlementaires japonais, suite à plusieurs dizaines de demandes, se sont vus refuser la rencontre de condamnés. Nobuto Hosaka, député social-démocrate et secrétaire général de la Ligue parlementaire pour l'abolition de la peine de mort déclare que « si on révélait l'horreur des lieux d'exécution, l'opinion vis-à-vis de la peine de mort évoluerait ».

Dans la vie au sein de la prison, à part avec les gardiens, les condamnés vivent isolés, dans une cellule de quatre Tatamis soit deux mètres sur quatre, avec un WC, un évier et une fenêtre obscurcie l'empêchant de contempler le ciel. Quand il n'a pas d'activité, il doit se tenir assis sur le plancher. Il est filmé vingt-quatre heures sur vingt-quatre, la lumière restant allumée de 21 heures à 6 h 30 du matin pour éviter les suicides.

En raison du temps d'incarcération et de la honte qu'inspire le condamné, les liens familiaux sont petit à petit dissous pour être au final, dans la majorité des cas, inexistants [réf. nécessaire]. Il arrive que certaines personnes adoptent des condamnés pour pouvoir leur rendre visite.

En janvier 2006, le Nichibenren prend l'initiative inédite d'envoyer un questionnaire aux 79 condamnés à mort détenus dans sept prisons. Cinquante huit ont répondus, les résultats ont été publiés dans Asahi Shimbun, Tokio, 4 avril 2006. À la question Que souhaiteriez vous ?, les réponses ont été: un besoin d'amélioration immédiate des conditions de vie quotidiennes, comme pouvoir regarder le ciel à travers les fenêtres des cellules, faire plus de sport à l'extérieur, recevoir de la part des familles des légumes ou des fruits (la plupart sont atteints d'avitaminose due aux repas médiocres et sans crudités), pouvoir éteindre la lumière pendant la nuit, parler avec d'autres détenus, ne plus subir la censure sur les correspondances.

[modifier] Déroulement des exécutions

La méthode d'exécution utilisée est la pendaison. Sur les 59 prisons au Japon en 2003, 7 sont habilitées à procéder aux exécutions.

Les condamnés sont avertis de leur exécution environ deux heures avant. En effet, ce fut le cas pour l'un des exécutés de décembre 2006 : il était dans le quartier des condamnés à mort depuis plus de trente ans [1], la famille et les avocats ne sont pas prévenus à l'avance. La famille peut ensuite récupérer le corps ou les cendres. Juste avant son exécution, le condamné rencontre un religieux avec qui il peut parler. Il est ensuite amené sur l'échafaud où on lui bande les yeux, attache les mains et passe la corde au cou.

L'ouverture de la trappe précipitant le condamné dans le vide est actionnée par cinq boutons que les gardiens doivent presser en même temps. Un seul de ces boutons fonctionne, cela est destiné à déculpabiliser les gardiens, comme la balle à blanc des pelotons d'exécution.

[modifier] Condamnations médiatiques

En 2005, Masumi Hayashi, une Japonaise de 43 ans, a vue sa condamnation à mort par pendaison validée par la Haute Cour d'Ōsaka. Elle était accusée d'avoir empoisonné quatre personnes à l'arsenic et intoxiqué soixante-trois autres en 1998[2]. En novembre 2005, le nouveau ministre de la Justice avait annoncé que par « conviction personnelle », il suspendrait la peine de mort au Japon le temps de son mandat, mais en aucun cas il n'était question de l'abolir. Shoko Asahara, le chef de la secte Aum Vérité Suprême, a été condamné à mort le 15 septembre 2006[3]. En 28 mars 2007, Hiroshi Maeue, un Japonais de 38 ans, fut condamné à la peine de mort[4]. Une centaine de condamnés attendent dans les couloirs de la mort japonais. Le Japon devrait augmenter leur nombre d'exécutions par rapport aux années précédentes[1], en raison de la volonté politique du ministre conservateur Kunio Hatoyama. Les Etats-unis sont également dans ce cas de figure pour des raisons différentes.

[modifier] Liste complète des exécutions depuis 2006 (21 en tout)

Les exécutions avaient en moyenne lieu tous les 4 mois (105 à 123 jours) jusqu'en 2008 où cet intervalle s'est réduit à 2 mois (55 à 68 jours).

[modifier] 2006
  • Le lundi 25 décembre, selon Kyodo News, quatre détenus dont deux septuagénaires ont été mis à mort mettant ainsi fin au moratoire jusqu'alors en vigueur[5] [6]. Si le ministère de la Justice s'est refusé, comme à l'accoutumée, à dévoiler l'identité des suppliciés, selon Amnesty International, il s'agirait de Yoshimitsu Akiyama, Yoshio Fujinami, Michio Fukuoka et Hiroaki Hidaka.

[modifier] 2007
  • Le vendredi 27 avril, trois condamnés à mort ont exécutés à la veille de la trêve traditionnelle de la «Golden Week», une semaine de congé national début mai, alors même que le Parlement était en pleine session. Il s'agit, selon l'agence Kyodo, de Yoshikatsu Oda, de Masahiro Tanaka, et de Kosaku Nada, qui étaient respectivement détenus à Fukuoka, Tokyo, et Osaka pour divers meurtres.
  • Le vendredi 24 août, trois condamnés de plus de soixante ans ont été pendus à l'aube [7].
  • Le vendredi 7 décembre, Seiha Fujima, âgé de 47 ans, et Hiroki Fukawa, âgé de 42 ans, ont été pendus à Tokyo, tandis que Noboru Ikemoto, âgé de 75 ans, était pendu à Osaka. La divulgation de l'identité des suppliciés par le ministère de la justice rompt avec la pratique antérieure[8].

[modifier] 2008
  • Le vendredi 1er fevrier, encore trois exécutions annoncées le ministre de la justice qui veut poursuivre les exécutions d'une « façon méthodique ». Le ministère a divulgué les identités des criminels, Masahiko Matsubara, 63 ans, pendu à Osaka, Takashi Mochida, 65 ans, à Tokyo, et Keishi Nago, 37 ans, à Kagoshima, tous condamnés pour meurtre. Parmi les pendus, Keishi Nago, membre d'un groupe de yakuzas (la mafia japonaise), avait été condamné pour avoir étranglé sa belle-sœur et sa nièce en 2002 pendant l'O-bon, la fête des morts nipponne. Masahiko Matsubara avait été reconnu coupable du meurtre de deux femmes en 1988 au moment où il cambriolait leurs maisons. Le plus vieux des exécutés, Takashi Mochida, avait été condamné pour le meurtre en 1997 d'une femme qu'il avait violée quelques années plus tôt, un premier crime pour lequel il avait déjà purgé une peine de prison.[2]
  • Le jeudi 10 avril, quatre condamnés à mort pour meurtre ont été exécutés [9]. L'un d'entre eux, Kaoru Okashita, 61 ans, avait été condamné pour le meurtre de deux personnes il y a vingt ans, dont une vieille dame de 82 ans. Également appelé M. Akinaga, il s'était lancé depuis sa cellule dans l'écriture d'une forme de poésie japonaise traditionnelle en 31 syllabes, le tanka. Ces poèmes lui avaient permis d'exprimer ses remords et de faire état de sa condition de condamné attendant l'exécution. Outre M. Okashita, les trois autres pendus étaient Masahito Sakamoto, 41 ans, condamné pour avoir violé et tué une lycéenne, Katsuyoshi Nakamoto, 64 ans, pour avoir tué un bijoutier et sa femme afin de les voler, et Masaharu Nakamura, 61 ans, pour avoir tué deux hommes en empoisonnant leurs boissons.
  • Tsutomu Miyazaki fut pendu le 17 juin 2008 pour avoir tué quatre fillettes et pour avoir bu le sang de deux d'entre elles. Deux autres condamnés furent également exécutés se jours là, dont Yoshio Yamasaki (73 ans) qui avait tué deux femmes à des fins pécuniaires et Shinji Mutsudaqui avait tué aussi deux personnes et jeté leurs corps dans la mer, lestés avec du béton.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes

  1. Japon. Après avoir passé des décennies dans le quartier des condamnés à mort, des prisonniers sont exécutés sans préavis | Amnesty International
  2. Le Monde, 28 juin 2005
  3. « Le gourou de la secte Aum sera pendu », dans Libération du 15/09/2006, [lire en ligne]
  4. Le suicide collectif en ligne : un phénomène à la mode au Japon
  5. Le Monde diplomatique juin 2007 Exécutions en série au Japon
  6. Voir aussi l'article de Michel Temman, « Le Japon revient à la mort par pendaison », dans Libération du 26/12/2006, [lire en ligne]
  7. (fr) Le Conseil de l'Europe condamne les USA et le Japon
  8. (en) Dépêche CNN
  9. « 4 pendaisons au Japon » Dépêche AFP, dans Le Figaro du 10-04-2008, [lire en ligne]

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes

[modifier] Bibliographie

  • La Course contre la honte, de Pierre Clavilier- Editions Tribord.

L'historique de l'abolition de la peine de mort depuis ses origines à nos jours comportant des textes majeurs sur le sujet. L'ensemble est suivi d'un entretien avec Robert Badinter.

  • L'autre couloir de la mort, de Philippe Pons, article paru dans le quotidien Le Monde du 28 juin 2003
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