Peine de mort en Chine

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La peine de mort en République populaire de Chine est largement pratiquée, faisant de ce pays le premier au monde en nombre de condamnés à mort.

Sommaire

[modifier] Des statistiques incertaines

Il est difficile de donner un chiffre précis des exécutions en Chine, car celui-ci est maintenu secret par Pékin[1]. Les chiffres avancés par les ONG évoquent au moins plusieurs centaines d'exécutions chaque année :

Nombre de condamnations à mort en Chine
Année Nombre Source
2004 3400 Amnesty International
2005 10000 Un membre du Congrès national du Peuple : [1]
2006 1010 Amnesty International [2]
2006 10000 Human Rights Watch[2]
2006 5000 Peine de mort.org
2007 470 Amnesty International [3]
Exécutions en 2006 dans les six principaux pays appliquant la peine de mort
Exécutions en 2006 dans les six principaux pays appliquant la peine de mort

Deux faits demeurent cependant certains : la Chine est le pays qui exécute le plus de prisonniers dans le monde et les exécutions ont tendance à diminuer depuis quelques années. Selon Amnesty International, 2/3 des condamnations à mort du monde sont exécutées en Chine[1] ; l'ONG annonce au moins 1 010 exécutions pour l'année 2006, 10 000 selon Human Rights Watch[2]). Selon le secrétaire général de l'ONU, la Chine, qui a la plus grande population du monde avec 1,3 milliard de personnes, était au septième rang en termes de nombre d'exécutions effectuées par rapport à la population globale entre 1994 et 1999, derrière Singapour, l'Arabie Saoudite, la Biélorussie, le Sierra Leone, le Kirghizistan et la Jordanie[3].

[modifier] Crimes punis par la peine de mort en Chine

Une douzaine de crimes sont passibles de la peine de mort dans le pays. Certaines Organisation Non Gouvernementales et plusieurs gouvernements étrangers s'inquiètent du nombre élevé de crimes punissables par la peine de mort, 68 en tout, y compris certains crimes tels que le détournement et la fraude fiscale. Chine (corruption et fraude fiscale[2]) ;

[modifier] Sursis et perpétuité

Les condamnés à perpétuité chinois sont généralement libérés passé 15 ou 20 ans, la Chine considérant qu'une personne à écarter de la société doit être exécutée plutôt que passer sa vie ou une trop grande partie de celle-ci en prison aux vues des coûts que cela engendre. La Chine est le seul pays du monde à disposer de la « peine de mort avec sursis », le condamné est placé en détention et son comportement durant les deux premières années détermine si sa peine de mort sera commuée en perpétuité ou si elle sera mise à exécution.[réf. nécessaire]

[modifier] Déroulement des exécutions

En Chine, Wang Zhenchuan[4] admet publiquement que « la plupart des erreurs judiciaires en Chine sont la conséquence d'aveux extorqués sous la torture »[5].

Dans son livre Peines de mort (chapitre "La fusillade"), le journaliste Martin Monestier décrit une exécution en Chine à peu près dans ces termes [6].:


Les condamnés à mort sont fréquemment exhibés pendant des heures, avant d'être promenés dans les rues sur des plate-formes de camions découverts, précédés par les sirènes et les gyrophares des voitures de police. Les exécutions sont toujours publiques, généralement organisées dans des stades, comme à Pékin, avec une tribune d'honneur réservées aux officiels.
Le rituel judiciaire est réglé de façon théâtrale : les condamnés sont présentés à la foule entre deux policiers, tête basse, chacun d'eux porte une pancarte au cou, sur laquelle leur nom a été barré d'une croix pour signifier qu'ils n'appartiennent plus au monde des vivants. La nature et le nombre de crimes commis y sont également inscrits (et de surcroît, énumérés par haut-parleurs).
Les suppliciés mis à genoux sont fusillés d'une balle de fusil ou de revolver tirée à bout portant dans la nuque.
Seul exception à la règle : les quelques insurgés de la Place Tiananmen (en 1989), qui furent condamnés à mort, ont été exécutés d'une rafale de mitraillette dans le dos, à hauteur du cœur.
Après la mise à mort, le nom du condamné et les motifs de sa condamnation sont affichés sur les murs, avec une grande marque rouge indiquant que justice est faite.
Sa famille apprend la nouvelle de la mort en recevant une enveloppe contenant les douilles qui ont servi à l'exécution, ainsi que la cordelette qui liait les mains du condamné. Il est joint à cette enveloppe une facture de 80 yuans (environ 8 euros) pour « frais d'exécution » dus à l'État.

En 2007, Zheng Xiaoyu, ancien directeur de l'agence de réglementation de la pharmacologie, a été exécuté pour avoir autorisé, contre un pot de vin, la circulation d'un médicament non-réglementaire qui fit 12 morts[7].

[modifier] Critiques

L'Inde a une population semblable a la Chine (1,1 milliard). Elle emploie pourtant rarement la peine de mort. En outre, la nature peu stable et parfois corrompue du système légal en Chine continentale introduisent des interrogations quant à l'application juste de la peine de mort[8]. En Chine, Teng Xingshan a été exécuté pour le meurtre de sa femme en 1989, alors qu’on l’a retrouvée en 2005[9]. De plus, Wang Zhenchuan[10] admet publiquement que « la plupart des erreurs judiciaires en Chine sont la conséquence d’aveux extorqués sous la torture »[11].

[modifier] Réformes

Conscient des problèmes que pose son application massive de la peine de mort vis-à-vis de la communauté internationale, le gouvernement chinois a déclaré sa volonté de réformer certains aspects de l'application de la peine capitale. Cependant, ces réformes ne remettent pas en cause la peine de mort en Chine. Elles visent uniquement à mieux la faire accepter aux yeux de la communauté internationale : dans une entrevue accordée à l'agence de presse chinoise Xinhua, le 12 mars 2006, le président de la Cour populaire suprême de Chine, Xiao Yang - ancien ministre de la Justice de 1993 à 1998 - a indiqué que la Chine n'était pas disposée à abolir la peine de mort pour le moment, même s'il considère qu'elle « doit être appliquée avec prudence ».

Le 31 octobre 2006, il a été adopté une loi disposant que toutes les condamnations à mort prononcées par la justice doivent être approuvées par la Cour suprême du peuple. Cet amendement entra en vigueur le 1er janvier 2007[12].

[modifier] Centralisation

Une des réformes est de centraliser les jugements en appel de condamnation à mort. Actuellement (décembre 2005), ce sont les Cours suprêmes provinciales qui jugent en dernière instance les condamnations à la peine capitale. Ces juridictions sont justement très influencées par la politique locale et les jugements rendus sont donc considérés comme moins objectifs et les juges plus enclins à prononcer des peines sévères.

En centralisant les jugements en appel à la Cour suprême nationale, le gouvernement chinois considère que les examens des affaires seront plus objectifs, car déconnectés du contexte local. Mais pour les affaires de portées nationales, le problème reste le même.

[modifier] Prélèvements d'organes

Alors que depuis plusieurs années des dissidents chinois dénonçaient les prélèvements d'organes sur les condamnées à morts exécutés, en 2005, le gouvernement chinois a confirmé officiellement cette pratique, en la personne du vice-ministre de la santé, Huang Jiufe, lors d'une conférence internationale à Manille. Ces prélèvements représentent 95% des organes greffés, donc seulement 5% des organes proviennent de dons libres[réf. nécessaire].

Longtemps tabou, ce sujet est actuellement à l'étude et une réforme est annoncée visant à réguler ce marché. Les organes étaient vendus par les tribunaux aux hôpitaux. Certains responsables judiciaires avaient donc un avantage pécuniaire (de l'ordre de quelques milliers d'euros à plusieurs dizaines de milliers d'euros pour un rein ou un foie) à prononcer des sentences à la peine de mort.[réf. nécessaire]

[modifier] Référence

  1. ab Pascale Nivelle, « A Pékin, les JO se rapprochent, pas les libertés », dans Libération du 11-04-2008, [lire en ligne]
  2. abc « Peine de mort: la Chine veut généraliser l'injection létale », dans Le Monde du 03-01-2008, [lire en ligne]
  3. SINGAPOUR la pénalité de mort : Un péage caché des réclamations internationales d'amnistie des exécutions
  4. procureur adjoint du parquet suprême de la République Populaire de Chine
  5. Bruno Philip, « Chine : le pouvoir reconnaît l'usage de la torture par la police », dans Le Monde du 22/11/2006, [lire en ligne]
  6. Martin Monestier, Peines de mort, Le Cherche-Midi Éditeur, coll. « Documents », Paris, Octobre 1994 (réimpr. novembre 2004) (ISBN 978-2-86274-332-5)
  7. Former head of China's drug watchdog executed, Xinhua News Agency, 10 juillet 2007.
  8. la peine de mort en 2005
  9. « La Chine réforme sa peine capitale », dans Le Figaro, du 31/10/2006, [lire en ligne]
  10. procureur adjoint du parquet suprême de la République Populaire de Chine
  11. Bruno Philip, « Chine : le pouvoir reconnaît l’usage de la torture par la police », dans Le Monde du 22/11/2006, [lire en ligne]
  12. China changes law to limit death sentence Xinhua 31 octobre 2006

[modifier] Articles connectés

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