Djerba

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Djerba
Carte topographique de l'île
Pays Tunisie Tunisie
Province Médenine
Principale ville Houmt Souk
Localisation Golfe de Gabès
(mer Méditerranée)
Superficie 514 km²
Côtes 150 km
Point culminant Dhahret Guellala
53 m
Géologie Île continentale
Population 139 517 hab. ((2004)[1])
Densité 271 hab./km²

Djerba, parfois orthographiée Jerba (جربة), est une île de 514 km² (25 kilomètres sur 20 et 125 kilomètres de côtes) située dans le golfe de Gabès[2] au sud-est de la Tunisie. Il s'agit de la plus grande île des côtes d'Afrique du Nord. Sa principale ville, Houmt Souk, compte à elle seule 44 555 habitants[1].

Ulysse l'aurait traversée, les Carthaginois y ont fondé plusieurs comptoirs et, aux alentours de 587 av. J.-C., l'île accueille des réfugiés juifs après la destruction du Temple de Jérusalem. Les Romains y construisent plusieurs villes et y développent l'agriculture et des ports commerciaux. Chrétienne, vandale, byzantine puis arabe, Djerba est depuis les années 1960 une destination touristique populaire. Il s'agit de l'une des dernières régions de Tunisie où une langue berbère est encore parlée.

René Stablo décrit l'île en ces termes :

« Après les vastes horizons dénudés du continent, où la vie n'est présente que par quelques moutons étiques confiés à l'indifférence de jeunes bergers en haillons, quelques chameaux entravés qui sautent gauchement et quelques oiseaux de proie à la recherche d'une rare pâture, c'est une campagne animée qui s'offre maintenant à ses yeux [ceux du voyageur voguant vers Djerba]. Une campagne vraiment inattendue, émaillée de villages tout blancs, de palmiers et d'oliviers au vert feuillage se balançant sous la brise et qui composent, sur l'azur de la mer et du ciel, une harmonieuse symphonie de teintes ! Quel séduisant contraste ![3] »

Elle est reliée au continent par un bac assurant la traversée entre Ajim au sud-ouest de l'île et Jorf — la traversée dure environ 15 minutes — et par une voie de sept kilomètres remontant à l'époque romaine et reliant l'extrémité sud-est de l'île (localité d'El Kantara) à la péninsule de Zarzis.

Sommaire

[modifier] Étymologie

Djerba est connue depuis l'Antiquité par la légende qui veut qu'elle soit l'île des Lotophages décrite dans L'Odyssée d'Homère, ce qui l'amène à être souvent appelée Lotophagitis (du grec ancien Λωτοφαγῖτις ou Λωτοφάγων νῆσος). L'île aurait eu plusieurs noms[4] jusqu'au IIIe siècle : Pseudo-Scylax la nomme Brachion (Βραχείων) ou « Île des hauts-fonds », Hérodote Phlâ, Polybe, Théophraste et tous les auteurs latins Meninx (Μῆνιγξ).

En ce qui concerne son nom actuel, Salah-Eddine Tlatli avance l'explication suivante :

« C'est vers la fin de la période romaine qu'on rencontre pour la première fois le nom de Gerba ou Girba, donné à une ville située sur l'emplacement actuel de Houmt Souk (capitale de l'île). Auparavant, au second siècle ap. J.-C., Ptolémée avait déjà mentionné le nom de Gerra, sans doute lapsus calami de Gerba. C'est en fait Aurelius Victor qui le premier parle de Girba lorsqu'il nous apprend que cette ville a eu l'honneur de donner le jour à deux empereurs romains. Jusque-là, l'île avait connu bien d'autres noms au cours de l'Antiquité[5]. »

[modifier] Géographie

[modifier] Site

L'île, qui dépend administrativement du gouvernorat de Médenine, est située entre 480 et 530 kilomètres de Tunis par la route[6] et à plus de 100 kilomètres de Gabès. Elle très proche du continent par deux avancées de part et d'autre de Jorf et Ajim à l'ouest et de Zarzis et El Kantara à l'est. Par ailleurs, l'extension de la plage de Mezraya (Sidi Mahrez) forme une presqu'île, Ras R'mal, qui est l'un des importants sites touristiques de l'île.

Côte méridionale de l'île
Côte méridionale de l'île

La superficie de l'île est voisine de 514 km². Vue par image satellite, elle présente la forme d'une molaire géante avec ses trois racines : la péninsule d'Ajim, celle de Ras Terbella et celle de Bine El Oudiane[7] ; sa plus grande longueur est de 29,5 kilomètres et sa plus grande largeur de 29 kilomètres[8]. Ses côtes, qui s'étendent sur 125 kilomètres, présentent un tracé très irrégulier avec les trois péninsules qui marquent les points les plus rapprochés du continent dont l'île est séparée par le canal d'Ajim, large de deux kilomètres[9], et celui d'El Kantara large de six kilomètres. Le canal d'Ajim accueille deux îlots qu'on appelle Elgataia Kebira et Elgataia Sghira.

Jadis rattachée au continent, Djerba s'apparente beaucoup par la régularité de sa topographie et de sa structure géologique au relief tabulaire qui marque le littoral méridional de la Tunisie[8]. La topographie en escalier alterne des secteurs élevés et d'autres en dépression dont la surface est modelée par une morphologie dunaire[8]. Le littoral est caractérisé pour sa part par des côtes basses, les plages, en grande majorité sablonneuses, s'étendant principalement entre Ras R'mal et Borj El Kastil. Gustave Flaubert nomme Djerba « Île aux Sables d'Or » à cause de ses plages au sable fin et doré[10]. L'île est plate, l'altitude moyenne y est de 20 mètres et c'est dans la partie méridionale que se trouve le point culminant situé à Dhahret Guellala (53 mètres)[8]. À ce niveau, l'île est traversée par un accident topographique majeur (15 mètres de dénivellation sur 15 kilomètres de long). Enfin, l'eau douce y est rare et il n'y existe aucun cours d'eau.

Djerba est entourée de hauts fonds — la bathymétrie à proximité de l'île est presque toujours inférieure à -10 m et l'isobathe de -5 m n'apparaît au large de la côte méridionale et septentrionale qu'au-delà d'une dizaine de kilomètres de la côte[8] — toutefois perturbés au large de la côte méridionale par l'existence d'un certain nombre d'oueds (courants marins) qui sillonnent les canaux d'Ajim et d'El Kantara, les profondeurs dépassant à certains endroits les 20 mètres[8].

[modifier] Climat

Le climat de Djerba est de type méditerranéen mais à tendance semi-aride car il se trouve au carrefour des masses d'air méditerranéennes et sahariennes. Ainsi, la température annuelle moyenne y est-elle de 19,8 °C, les moyennes mensuelles ne dépassant guère 30 °C ni ne descendant au-dessous de 8 °C[8]. En été, la moyenne maximale atteint 32,7 °C mais se trouve atténuée par la brise marine, alors qu'en hiver, les moyennes mensuelles sont supérieures à 12 °C[8]. Emmanuel Grevin parle ainsi de « cinquième saison » à Djerba :

« À Sfax, l'hiver vous aura quittés ; à Gabès vous trouverez le printemps ; à Tozeur l'été ; et à Djerba vous découvrirez la cinquième saison. Mais oui Monsieur, la cinquième saison, ce climat spécial à l'île de Djerba, si étrange, fait de sécheresse extrême, de brise marine, de fraîcheur et de rosées nocturnes, de quelque chose de rationnel, de tempéré en tout[11]. »

Gustave Flaubert fait décrire à Mathó, dans le chapitre IX de son roman Salammbô, cette « île couverte de poudre d'or, de verdure et d'oiseaux, où les citronniers sont hauts comme des cèdres [...] où l'air est si doux qu'il empêche de mourir »[12].

Au niveau des précipitations, Djerba est la région la plus arrosée (248,8 millimètres) de toutes les régions au sud de Sfax, la moyenne des jours pluvieux se montant à 40 par an[8]. Plus de 60 % des précipitations se concentrent entre les mois de septembre et décembre avec un maximum en octobre (28% du total annuel)[8]. Néanmoins, l'essentiel de la moyenne annuelle peut se répartir sur trois à quatre averses seulement[8]. La saison sèche débute en avril et l'été voit rarement la pluie tomber. L'humidité et la rosée nocturne sont deux facteurs vitaux pour la flore de l'île.

Suivant les saisons, Djerba connaît des vents dominants de directions différentes. De novembre à mars, ce sont les vents d'ouest qui dominent avant d'être remplacés de mars à la mi-juin par le sirocco, vent chaud s'accompagnant souvent de tourbillons de poussière[8]. Avec l'arrivée de l'été dominent les vents d'est porteurs de fraîcheur.

[modifier] Histoire

[modifier] Antiquité

Reconstruction du monde de L'Odyssée
Reconstruction du monde de L'Odyssée

Djerba est connue depuis l'Antiquité, notamment par la description qui en serait faite dans L'Odyssée d'Homère où celui-ci « faisait débarquer Ulysse et ses compagnons il y a plus de trente siècles ». Homère parlait du lotos, « fruit doux comme le miel qui plonge tous ceux qui en dégustent dans les délices d'un bienheureux oubli qui efface tous les soucis de l'existence ». Tel aurait été le sort des compagnons d'Ulysse « que ce fruit miraculeux aurait plongé dans une heureuse amnésie »[13]. Ainsi, les habitants de l'île de l'époque furent-ils appelés les Lotophages et Djerba, l'île des Lotophages (mangeurs de lotos)[14].

Plusieurs spécialistes, dont Lucien Bertholon[15] et Stéphane Gsell[16], admettent l'existence de plusieurs migrations entre la mer Égée et le golfe des Syrtes, où se trouve Djerba, au cours du IIe millénaire av. J.-C.. Une autre migration, venant surtout du monde hellénique et introduisant la culture de l'olivier et le tour de potier à Djerba se serait produite vers 1500 av. J.-C.. Avant même la fondation de Carthage, au IXe siècle av. J.-C., des Phéniciens de Tyr implantent plusieurs comptoirs le long de la côte de la Libye et de la Tunisie actuelles jusqu'à Utique. Djerba en fait sans doute partie. Le Périple de Pseudo-Scylax, qui remonte approximativement au milieu du IVe siècle av. J.-C., donne sur Djerba les indications les plus anciennes, exception faite de celles d'Homère :

« On y fait beaucoup d'huile, qu'on tire de l'olivier sauvage ; l'île produit d'ailleurs beaucoup de fruits, de blé, d'orge, la terre est fertile[10]. »

D'après Gsell, à l'époque, « Djerba dépendait certainement de Carthage ». Les Carthaginois fondent plusieurs comptoirs, le plus connu étant Meninx, et la transforment en haut lieu d'échanges du bassin méditerranéen en y aménageant des ports pour leurs embarcations et en l'utilisant comme escale dans leurs parcours de la Méditerranée[17]. Outre la culture de l'olivier, l'île carthaginoise abrite plusieurs ateliers de poterie et de teinture de pourpre à base de murex, plusieurs pêcheries et constitue un important relais vers le continent africain. Djerba connaît ainsi plus d'un demi millénaire de prospérité avec les Phéniciens.

Les premiers contacts de l'île avec les Romains ont lieu lors de la Première Guerre punique ; une première expédition contre Carthage y est envoyée en 253 av. J.-C., une véritable expédition navale commandée par Cnaeus Servilius Caepio et Caius Sempronius Blaesus[18]. Une deuxième expédition romaine commandée par le consul Caius Servilius Geminus est envoyée à Djerba en 217 av. J.-C., durant la Deuxième Guerre punique, l'année même de la bataille du lac Trasimène disputée entre Carthaginois et Romains en Italie. Cependant, « ce n'est qu'en l'an 6 ap. J.–C., après la phase des protectorats sur les princes berbères, les reges inservientes, que débute la colonisation directe dans la zone syrtique »[19]. On sait que l'île compte alors deux villes : Meninx et Thoar. Elle abrite par la suite trois centres urbains principaux. L'un d'entre eux, dont le nom moderne est Henchir Bourgou, a été découvert à proximité de Midoun (centre de l'île). On y trouve les vestiges d'une grande ville datant du IVe siècle av. J.-C. signalés par un mausolée numide[20] qui caractérise cet âge — appelés « Roches de Bourgou » — et la présence importante de poteries ainsi que par une imposante tombe appartenant probablement à un membre d'une famille royale numide. Un deuxième centre, sur la côte sud-est, est un important site de production de colorants à base de murex. Il est cité par Pline l'Ancien comme occupant le second rang dans ce domaine derrière la cité de Tyr. De substantielles quantités de marbre coloré découvertes sur place témoignent de la richesse de ce centre. Un troisième centre important, probablement l'ancienne Haribus, se trouve sur la côte méridionale à proximité du village de Guellala.

Les empereurs romains Trébonien Galle et son fils Volusien sont natifs de l'île ; après leur mort, ils sont élevés au rang d'Auguste. Un décret romain de l'an 254 désigne officiellement l'île par l'expression Creati in insula Meninge quae nunc Girba dicitur ; ainsi l'île est-elle appelée pour la première par le nom Girba[21]. Au milieu du IIIe siècle, une basilique est construite dans ce qui est alors l'évêché de Girba. Deux des évêques de l'île ont laissés leurs noms dans l'histoire : Monnulus et Vincent qui assistent aux conciles de Carthage en 255 et 525[22]. Les ruines de leur cathédrale peuvent être identifiées dans le sud-ouest de l'île, près d'El Kantara, d'où provient un beau baptistère cruciforme conservé au Musée national du Bardo à Tunis[23]. Après les Romains, l'île fut envahie par les Vandales puis par les Byzantins. C'est en 665 que Djerba tombe aux mains des Arabes dirigés par Ruwayfa ibn Thâbit Al Ansari (un compagnon du prophète Mahomet) pendant la campagne de Byzacène commandée par Muawiya Ben Hudaydj. L'île est alors le témoin de luttes sanglantes entre factions de l'islam et adopte finalement les croyances kharidjites[24].

Des fouilles archéologiques menées sous les auspices de l'Université de Pennsylvanie, l'Académie américaine à Rome et l'Institut national du patrimoine entre 1995 et 2000 ont révélé plus de 400 sites archéologiques incluant de nombreuses villas puniques et romaines.

[modifier] Moyen Âge

Au XIe siècle, l'île devient indépendante — elle l'a d'ailleurs été à plusieurs reprises au cours de l'histoire — suite à l'invasion de l'Ifriqiya par les Hilaliens venus d'Égypte et se convertit à la piraterie. Elle est reprise par Ali Ben Yahya en 1115-1116 (année 509 de l'hégire). Siciliens, Normands, Aragonais, Espagnols et Ottomans s'y succédèrent durant « quatre siècles de lutte (1135-1560) au cours desquels chrétiens et musulmans s'y étaient laborieusement massacrés »[25].

À plusieurs reprises durant le Moyen Âge, les chrétiens de Sicile et d'Aragon disputent leur possession aux kharidjites ibadites locaux. De cette période subsistent de nombreuses petites mosquées (dont des mosquées souterraines), dont les premières datent du XIIe siècle, ainsi que deux forts imposants. L'île est contrôlée à deux reprises par les Normands menés par le roi Roger II de Sicile (1135-1158 et 1284-1333), périodes interrompues par une invasion almohade en 1160. En 1154, les habitants de l'île se rebellent mais les Normands écrasent la révolte dans le sang. Durant la seconde période, l'île devient un domaine féodal dirigé par une succession de seigneurs : Roger Ier (1284-1305), Roger II (1305-1310), Charles (1310) et Francis-Roger III (1310). Des gouverneurs royaux sont également nommés tels que Simon de Montolieu (vers 1305-1308) et Ramon Muntaner (1308-1315). En 1286, les Aragonais prennent les Kerkennah qui deviennent une seigneurie pour la famille de Roger de Lauria. Ce dernier fait construire à Djerba une forteresse en 1289, près de l'antique Meninx, qui est appelée Castelló et plus tard Borj El Kastil.

Les tentatives de révolte de la part des habitants de l'île et des Tunisiens forcent le roi Frédéric II de Sicile à incorporer Djerba à la Sicile en 1309 et à nommer Muntaner comme dirigeant de l'île. En 1311, une famine sévit dans l'île des mois durant et les habitants se révoltent avec l'aide des Tunisiens du continent dont les Hafsides menés par Abû Yahyâ Abû Bakr al-Mutawakkil.

Les Aragons abandonnent l'île pendant leur guerre contre les Castillans (1334-1335). Ils la reprennent en 1383 avec l'aide d'une flotte gênoise mais ne la conservent que jusqu'à la fin de l'année 1392. De nouvelles attaques des Siciliens en 1424 et 1432 sont repoussées avec l'aide du souverain hafside Abû Fâris `Abd al-`Azîz al-Mutawakkil. Les musulmans construisent une forteresse dans le nord de l'île, à côté des ruines de l'antique Girba, qu'ils appellent Borj El K'bir. La ville de Houmt Souk se développera aux alentours.

En 1480, les habitants de l'île se révoltent contre le souverain hafside Abû `Umar `Uthmân et prennent le contrôle de la chaussée romaine qui relie l'île au continent. Les luttes internes entre Wahbiya et Nakkara, deux factions des ibadites, qui dominent dans le nord-ouest et le sud-est de Djerba, n'arrêtent cependant pas le progrès économique de l'île. Les habitants paient alors un tribut au souverain mais restent indépendants.

[modifier] Du XVIe au XIXe siècle

Icône de détail Article détaillé : Bataille de Djerba.

Vers 1500, l'île passe sous occupation ottomane. En 1511, elle est attaquée par les troupes du royaume d'Espagne, placées sous le commandement de Pedro Navarro, pour y établir une forteresse qui assurera les conquêtes d'Oran, Bougie, Alger et Tripoli. En 1513, elle est pillée par les Gênois.

Borj El Ghazi Mustapha de Houmt Souk
Borj El Ghazi Mustapha de Houmt Souk

Djerba est occupée par l'Espagne de 1521 à 1524 et de 1551 à 1560. Elle devient ensuite la base temporaire du corsaire et amiral ottoman Khayr ad-Din Barberousse. De 1524 à 1551, l'île est l'une des principales bases des corsaires ottomans et nord-africains conduits par Dragut. C'est dans ce contexte de rivalité entre Ottomans et Européens pour le contrôle de la Méditerranée qu'une bataille navale oppose au large de l'île, du 9 au 14 mai 1560, la flotte ottomane menée par Piyale Pacha et Dragut à une flotte européenne principalement composée de navires espagnols, napolitains, siciliens et maltais. Cette expédition fut l'un des évènements militaires et politiques des plus marquants du XVIe siècle[26].

En 1568, le pacha de Tripoli s'y présente pour demander un grand tribut ; l'île est prise par Ibrahim en 1598. Pendant le XVIe siècle et le début du XVIIe siècle, l'île dépend alternativement des gouverneurs d'Alger, de Tripoli ou de Tunis jusqu'à ce que Hammouda Pacha (gouverneur de 1631 à 1659) l'incorpore définitivement au royaume de Tunis. En 1705, avec l'établissement de la dynastie des Husseinites, le bey de Tunis est dorénavant représenté sur l'île par un cheïkh et des caïds recrutés au sein des familles locales les plus influentes. La plus importante d'entre elles est la famille Senumeni, au XVIe siècle, puis celle des Bel Djelloud. L'un des membres de cette famille, Saïd, fera utiliser tous les navires de l'île pour empêcher que Younès, fils d'Ali I Bey, puisse se rendre sur l'île, ce qui lui coûtera la vie. De la seconde moitié du XVIIe siècle aux XVIIIe et XIXe siècles, la famille dominante est celle des Ben Ayed.

À partir du XVIIIe siècle, le malékisme se répand sur l'île aux côtés de l'ibadisme et la langue berbère perd peu à peu de son importance face à l'arabe. Au XVIIIe siècle, on assiste à des incursions de la part des nomades Ouerghemma et Accaras provenant de la région de la Djeffara. En 1705 et 1706, la peste fait ravage sur l'île et revient en 1809. En 1794, l'île est pillée par un aventurier nommé Ali Burghul durant 58 jours et, en 1864, elle est à nouveau attaquée par des nomades de la région de Zarzis. Cette même année, une nouvelle épidémie de peste et une révolte sont relevées. En 1846, Ahmed I Bey interdit l'esclavage, acte qui affecte l'économie de l'île qui est alors l'un des plus importants centres du commerce des esclaves en Tunisie, avec Gabès, où parviennent les caravanes d'esclaves venant des oasis de Ghadamès et Ghat. Le commerce se déplacera par la suite vers Tripoli.

[modifier] Période moderne

Icône de détail Article détaillé : Attentat de la Ghriba.

L'île reste sous la domination ottomane jusqu'en 1881, date à laquelle la Tunisie passe sous protectorat français :

« Le 28 juillet 1881, les troupes françaises occupent Borj El Kebir (à Houmt Souk) et y restent jusqu'en 1890, date à laquelle l'administration de l'île passe à l'autorité civile[27]. »

En 1956, la Tunisie accède à l'indépendance et Djerba devient une délégation dépendant du gouvernorat de Médenine. Dès lors, comme le principal adversaire politique du président Habib Bourguiba pendant la lutte pour l'indépendance de la Tunisie, à savoir Salah Ben Youssef — les deux hommes politiques ayant une approche politique différente — était originaire de Djerba, l'île est négligée pendant plusieurs années sur le plan des infrastructures. Pendant que des hôpitaux, lycées et routes sont construits, même dans de petites localités dans le reste du pays, Djerba n'en est dotée que durant les années 1970 et 1980. Djerba n'est pas encore un gouvernorat, même si un projet serait en cours, alors que des régions beaucoup moins peuplées le sont devenues. Entre 1962 et 1969, les Djerbiens s'expatrient par millers (entre 5 000 et 6 000) en raison de la mauvaise conjoncture économique et rejoignent l'Europe (pour 80 % d'entre eux vers la France). Plus de la moitié de ces derniers s'installent dans la région parisienne[28].

En mars 1976, certaines rues d'Ajim sont transformées afin de servir de décor, les 2 et 3 avril, au tournage de La Guerre des étoiles. Des rues de Mos Eisley sont ainsi représentées. À 14 kilomètres au nord, le marabout de Sidi Jemour sert également de décor à Mos Eisley et Anchorhead.

Le visage de l'île a beaucoup changé depuis les années 1960 : zone hêtelière, extension de l'aéroport et des localités et — de simples hameaux devenant de véritables localités —, élargissement des routes ou encore installation de pylônes électriques[29]. Seules certaines parties de l'intérieur de l'île sont restées presque intactes tout comme une partie de la côte méridionale.

Le 11 avril 2002, un attentat est commis contre la synagogue de la Ghriba. Un camion bourré d'explosifs saute à proximité de cette dernière: 21 personnes sont tuées, dont 14 Allemands, 5 Tunisiens et 2 Français, et d'autres blessées. Le gouvernement tunisien parle alors d'un accident mais les experts suggérèrent rapidement un attentat qui est revendiqué par la suite par Al-Qaida.

[modifier] Architecture et urbanisme

Exemple de maison aux couleurs djerbiennes
Exemple de maison aux couleurs djerbiennes

Les Djerbiens, ayant eu à subir des attaques répétées venant de la mer tout au long de l'histoire, se sont éloignés des côtes et dispersés dans la campagne à l'intérieur de l'île : le bâti est donc, en général, isolé et dispersé et se structure selon une organisation hiérarchique de l'espace basée sur le menzel — terme signifiant « maison » en arabe littéral et décrivant les espaces résidentiels et fonctionnels dans lesquels vivent les familles — qui en constitue la cellule de base et la mosquée qui en est l'élément fédérateur[30]. Il est à noter que l'héritage architectural essentiel de Djerba réside avant tout dans ses mosquées, la dispersion de l'habitat étant à l'origine de la construction de nombre de celles-ci[31].

Les couleurs dominantes des habitations djerbiennes sont le blanc vif pour les murs et les toits et le bleu ciel ou plus rarement le vert bouteille pour les portes et fenêtres. D'autres couleurs ont commencé malheureusement à apparaître depuis l'installation d'habitants venant de l'extérieur de l'île (en majorité du sud et du centre-ouest de la Tunisie). À Djerba, il est interdit de construire plus de deux étages au-dessus du rez-de-chaussée et du sous-sol, ce qui a permis de préserver une certaine harmonie architecturale.

Le développement du tourisme international sur l'île dès les années 1960 a engendré une modification dans l'organisation traditionnelle de l'espace. Ce phénomène semble avoir amoindri l'espace central de l'île au profit d'une partie des côtes[9]. Beaucoup de champs ont été abandonnés, les jeunes préférant des activités moins pénibles et plus lucratives que l'agriculture et la main d'œuvre locale disponible représentant un coût que le rendement agricole ne justifie que dans de rares cas (en présence de nappes d'eau douce ou à basse salinité). Une enquête datée de 1963 estimait déjà à 7000 hectares la superficie des terres en friche sur un total de 39 000 hectares cultivables, soit près du cinquième du potentiel agricole. Les menzels abandonnés ou en ruines sont alors nombreux[32]. Le centre reste marginalisé économiquement et à l'écart des principales voies de communication même si plusieurs routes ont été goudronnées au cours des années 1990 et si le phénomène n'est pas propre à Djerba. Toutefois, cette partie centrale tend à être partiellement revalorisée par les habitants qui y construisent des résidences principales de type pavillonnaire[9].

La campagne djerbienne frappe par son silence profond que plusieurs visiteurs célèbres ont souligné, parmi ceux-ci Simone de Beauvoir qui a déclaré que « c'est l'endroit le plus silencieux du monde »[33].

[modifier] Organisation traditionnelle : le menzel

Icône de détail Article détaillé : Menzel.
Atelier de tissage au milieu de la végétation
Atelier de tissage au milieu de la végétation
Cour intérieure d'un houch
Cour intérieure d'un houch

Le menzel est formé d'une ou de plusieurs unités d'habitation (houch) et de vergers, champs ou atelier de tissage, greniers, huilerie (souvent souterraine), puits et citerne. Entouré de hautes levées de terre (tabia), il est organisé selon un principe défensif[30]. D'une façon générale, le houch abrite trois générations[34]. Il prend une forme carrée ou rectangulaire et ne comporte pas de fenêtres sur l'extérieur, celles-ci ouvrant normalement sur la cour intérieure[35]. Autour de la cour, s'articulent deux à quatre pièces plus ou moins grandes qui peuvent se diviser au moyen de cloisons internes, de portes ou de simples rideaux (kella) et comprendre des sedda (coins en général surélevés utilisés comme chambre à coucher), des magsoura (petites chambres) et des mesthan (petites salle de bains sans WC). La skifa, située à l'entrée, est la pièce qui réunit les habitants et sert à recevoir les voisins et les visiteurs les moins importants. Pour les visiteurs de marque, les familles aisées disposent en général d'un makhzin dhiafa indépendant ou rattaché au houch et donnant souvent sur l'extérieur.

Il y a également la zone cuisine et toilette avec le matbakh (cuisine), le houch el birpuits à eau en général saumâtre qui sert aux travaux ménagers hormis la lessive — et le knif ou mihadh (WC). Autrefois, les garçons qui se mariaient obtenaient leur propre pièce dans le houch parental. Dans certaines localités, ces pièces comportent une ghorfa, qui sert de chambre à coucher surélevée à laquelle on accède par un escalier intérieur raide et sans rampe. L'utilisation de voûtes et de coupoles est très courante et permettrait de lutter contre la chaleur. L'ameublement est en général simple et austère : des matelas souvent posés directement sur des nattes (h'sira) ou sur des estrades ou banquettes en maçonnerie (seddaou doukkana), des coffres pour ranger le linge, des marfaa (sorte de portemanteaux), des sofra ou mida, sorte de tables à manger basses car on mangeait assis, les jambes croisées, sur des nattes ou des matelas bas appelés gaada. Les réserves alimentaires étaient conservées dans de grosses jarres en terre cuite (khabia, tass ou zir) fabriquées depuis des millénaires dans le village de Guellala[36],[37]. La grande majorité de la vaisselle djerbienne provient également de ce même village.

Vue extérieure d'un menzel traditionnel
Vue extérieure d'un menzel traditionnel

Compte tenu de la faible pluviométrie (moins de 250 mm par an) et de la rareté de l'eau potable, les Djerbiens ont construit depuis des millénaires et construisent encore de nos jours des citernes (impluviums) qu'ils appellent feskia ou fesghia[38] — en général souterraines, de forme rectangulaire ou carrée et situées à l'extérieur du houch — et des majen ou majel — qui prennent la forme d'une grande carafe évasée contruite le plus souvent dans la cour intérieure du houch — et ce pour la collecte des eaux de pluie[39]. Les majen et les feskia reçoivent l'eau de pluie recueillie sur les toits des habitations, leurs terrasses ou cours, espaces passés à la chaux vive (jir) tous les ans avant la saison humide afin de garantir une certaine hygiène. Ce système de collecte d'eau pluviale existait déjà à Djerba à l'époque romaine, de grandes citernes ayant été découvertes à Meninx. En 1967, on a estimé à près de 1 000 000 m² la surface totale des impluviums à Djerba[40].

Léon l'Africain, cité par Salah-Eddine Tlatli[41] donne au XVIe siècle une description de l'habitat et de l'activité de Djerba qui est très proche de la situation des années 1960 :

« Gerba est une île prochaine de terre ferme [...] garnie d'une infinité de vignes, dattes, figues, olives et autres fruits. En chacune des possessions est bâtie une maison, et là habite une famille à part, tellement qu'il se trouve force hameaux mais peu qui aient plusieurs maisons ensemble. Ce terroir est maigre, voir qu'avec si grand labeur et soin qu'on puisse mettre à l'arroser avec l'eau de quelques puys profons... »

[modifier] Réseau de forteresses

Exemple de fort djerbien dominant la mer
Exemple de fort djerbien dominant la mer

Héritage du Moyen Âge, les côtes de Djerba sont parsemées de forts témoins de son passé mouvementé. Le plus grand monument historique de l'île est le Borj El K'bir, appelé aussi Borj El Ghazi Mustapha, situé sur la côte au nord de Houmt Souk. Il a été construit initialement par les Espagnols puis agrandi pendant l'époque hafside (aux environs de 1450) ; il contient actuellement deux zaouïas : Sidi Saad et Ghazi Mustapha. Il s'agit d'un château fort autrefois muni de pont-levis et entouré d'un grand fossé. Le 11 mars 1560, à la suite d'une défaite, le cheïkh Messaoud, à la tête de l'île, le remet au vice-roi de Sicile Don Juan de la Cerda qui ne le conserve pas longtemps car les Ottomans Dragut et Piyale Pacha remportent une importante bataille navale le 11 mai de la même année et assiégent le fort jusqu'au 31 juillet. Le 29 juillet, ils donnent l'assaut qui se solde par 5000 à 6000 morts.

Borj El Kastil est une forteresse en ruines, bâtie en 1210 par le conquistador espagnol Roger de Lauria qui y place une forte garnison. Situé à environ 10 kilomètres à l'est d'El Kantara, ce grand fort a une forme carrée, une construction solide et compte plusieurs pièces. Une forteresse entourée par la mer, appelée Borj El Agrab, est de dimentions plus modestes ; ses ruines se situent entre Terbella et El Kantara. Construite sur un plan de forme circulaire découpée en trois petites pièces, ses fondations sont encore solides et ses murs tiennent encore debout. Une légende entoure cette forteresse : elle aurait été construite par un prince djerbien, dont plusieurs enfants decédèrent à la suite de piqûres de scorpions, pour protéger son unique fils survivant. Malheureusement, cet enfant serait mort piqué par un scorpion caché dans une corbeille de raisins portée à la forteresse.

Il faut aussi citer Borj Jilij, construit par Hammouda Bacha El Husseini en 1209, et qui se situe entre Ajim et Mellita, à la pointe nord-ouest de l'île. Il existe des traces de plusieurs autres forts dont Borj K'sar Massoud, Borj Aghir, Borj El Wasat et Borj Marsa Ajim[17].

[modifier] Démographie

En 2004[1], Djerba compte 139 517 habitants répartis sur trois délégations qui correspondent à trois villes aux fonctions très différentes[9] :

  • Houmt Souk, cité considérée comme la « capitale » de l'île avec 44 555 habitants ;
  • Midoun, centre le plus proche des activités touristiques ;
  • Ajim, ville plus en retrait par rapport à la dynamique insulaire.
Municipalité Arrondissement Population (2004)
Djerba Houmt Souk Houmt Souk 44 555
Erriadh 11 268
Mellita 9 069
Djerba Midoun Midoun 30 481
El Mey 9 131
Sedouikech 6 280
Beni Mâaguel 4 567
Djerba Ajim Ajim 13 950
Guellala 10 216
Sources : Institut national de la statistique[1]

Ces délégations correspondent à trois municipalités : Djerba Houmt Souk, Djerba Midoun et Djerba Ajim.

Les habitants de l'île sont principalement arabophones même s'il s'y trouve une grande communauté berbérophone (Kutamas, Nefzas, Hawwaras, etc.). La plus grande partie de l'île est occupée par des villages d'origine berbère comme Mezraya, Ghizen, Tezdaine, Wersighen, Sedouikech, Ajim et Guellala qui parlaient le tamazight, appelé également chelha, langue aux consonnances explosives où la lettre « t » revient presque à chaque mot[42]. La tradition berbérophone est maintenue surtout par les femmes[43]. Il existe par ailleurs une petite et très ancienne communauté juive « pétrifiée dans les traditions hébraïques les plus anciennes »[44] et qui descenderait des exilés de Jérusalem. Elle a vécu en vase clos pendant des millénaires[44].

Une communauté d'origine arabe se serait installée à Djerba lors de l'invasion des Hilaliens. Djerba compte aussi une importante communauté noire musulmane arabophone d'origine principalement soudanaise, installée surtout à Arkou, non loin de Midoun[45]. Une communauté originaire du sud de la Tunisie (région de Beni Khedache) vit dans son propre quartier à Houmt Souk, Houmet Ejjoumaâ, et s'habille différement des autres Djerbiens (en particulier les femmes)[46] :

« Ainsi, dans cette île-carrefour, les populations bebères, judéo-berbères, arabes, africaines islamisées, nègres, quelques Turcs et même de vieux pêcheurs maltais se sont donnés rendez-vous et ont vécu en bons termes mais sans se mélanger. La barrière religieuse, malgré la proximité des races, a constitué un obstacle quasi-infranchissable et les mariages, par leur caractère endogamique, ont permis de maintenir une certaine homogénéité ethnique[47]. »

Dans son livre intitulé Djerba. L'île des Lotophages[48], Salah-Eddine Tlatli parle des « caractères ethniques » des Djerbiens « qui définissent un type humain à part en Afrique du Nord [...] La forme de leur crâne et leur taille : un crâne globuleux, massif, laissant à découvert un front bombé, limité par d'épais sourcils et des bosses pariétales accusées [...] Le corps est assez petit, trapu, musclé, avec de larges épaules [...] contraste avec les populations voisines. Les israélites ont des crânes plus allongés d'où la conclusion qu'il ne s'agit pas de Djerbiens judaïsés »[49].

La population nombreuse et l'insuffisance des ressources locales, à l'origine de crises liées le plus souvent à de mauvaises récoltes, ont contribué à la mise en place d'un processus migratoire saisonnier et temporaire mais devenu petit à petit structurel et définitif[30]. La grande majorité des Djerbiens qui quittent leur île travaillent dans le commerce en raison de la position stratégique de leur lieu d'origine. Même si la grande majorité d'entre eux restent dans un premier temps en Tunisie, où ils détiennent une position dominante dans le commerce alimentaire et de détail[30], les réformes du ministre Ahmed Ben Salah menées dans les années 1960, qui regroupèrent le commerce de détail en coopératives, poussent les Djerbiens à émigrer majoritairement en Europe et plus spécifiquement dans l'agglomération parisienne[30]. L'argent rapatrié par les Djerbiens vivant à l'étranger joue un rôle important dans l'économie de l'île. La migration des Tunisiens du continent (majoritairement originaires des gouvernorats du sud et du centre-ouest du pays) sur l'île s'est progressivement accrue et ces derniers représentent désormais près de 45 % des habitants et 60 % des actifs[30]. Dans ce contexte, ils concurrencent progressivement les Djerbiens sur leur marché de l'emploi.

Compte tenu de l'espace limité, des maigres ressources de l'île et de la rigueur du rite ibadite, l'anecdote populaire veut que le Djerbien soit traditionnellement connu comme un travailleur discipliné, rigoureux, parcimonieux et bon gestionnaire, de caractère plutôt réservé, calme et poli. Dans les familles ibadites, le fils même adulte ne fumait pas devant ses parents et la grand-mère gérait la famille d'une main de fer, ses fils, belles-filles et petits enfants lui devant obéissance. Frères et associés allaient faire du commerce à l'extérieur de l'île à tour de rôle[50] afin que quelques hommes adultes restent travailler la terre avec les femmes, enfants et hommes âgés[51].

[modifier] Culture

[modifier] Musées

Le Musée des arts et traditions populaires de Houmt Souk permet de découvrir les richesses folkloriques de l'île : costumes de divers groupes sociaux, bijoux fabriqués par les artisans juifs, exemplaires du Coran, ustensiles de cuisine, etc. Le musée de Guellala, ouvert en 2001, expose essentiellement le patrimoine djerbien. Avec plus de 4 000 m² d'exposition, il offre une série de pavillons indépendants développant chacun un thème (fêtes, traditions et coutumes, artisanat, mythes et légendes, musique traditionnelle, mosaïques ou encore calligraphie arabe). Il reçoit environ 100 000 visiteurs par an dont 30 % de Tunisiens[52].

À proximité du phare de Taguermess, se trouve un parc à thèmes s'étendant sur 12 hectares : Djerba Explore[53]. Il abrite un village traditionnel djerbien reconstitué, le Lella Hadhria Museum présentant quant à lui un panorama de l'art tunisien et du monde arabo-islamique, un circuit du patrimoine djerbien et la plus grande ferme aux crocodiles du bassin méditerranéen[54].

Jamâa Fadhloun, une mosquée située à proximité de la route reliant Houmt Souk à Midoun, a été transformée en musée et permet au visiteur de découvrir comment les mosquées ont servi de refuge aux habitants lors d'attaques et de sièges et leur permettaient de se défendre et d'assurer leur survie. En effet, cette mosquée possède son propre four pour la fabrication du pain, sa propre citerne à eau, etc.

[modifier] Musique et danse

Groupe de musiciens djerbiens
Groupe de musiciens djerbiens

La musique djerbienne traditionnelle se base sur les percussions avec la darbouka (petit instrument utilisé par les hommes et les femmes) et le tabl (grand tambour cylindrique lourd à porter et utilisé exclusivement par les hommes[55]) ainsi qu'un instrument à vent autrefois appelé ghita et de plus en plus appelé zoukra ou zurna, utilisé uniquement par les hommes. Les rythmes sont lents et mélodieux et la chala est un rythme spécifique à l'île. Le mezoued a été introduit sur l'île plus récemment.

Le chant à thème occupe en fait une place prépondérante et les chansons racontent le plus souvent une histoire romantique et triste même si les paroles sont parfois osées, surtout lorsqu'elles racontent des histoires d'amour. Beaucoup de paroliers sont des femmes.

La rythme de la danse folklorique djerbienne est différent de celui de la plupart des autres danses folkloriques tunisiennes ; c'est un rythme lent et l'on danse généralement les pieds à plat sur le sol alors qu'ailleurs en Tunisie le rythme est généralement rapide et l'on danse en demi-pointe.

[modifier] Festivals et événements

Djerba célèbre au moins deux festivals par an : le festival international du film mythologique et le festival national d'Ulysse qui a lieu au mois de juillet et au cours duquel plusieurs manifestations culturelles et folkloriques ont lieu.

[modifier] Religion

Icône de détail Article détaillé : Synagogue de la Ghriba.

C'est l'islam sunnite de rite malékite qui prédomine en Tunisie, bien qu'il existe une petite communauté pratiquant le rite sunnite hanéfite qui était suivi par la cour beylicale et certaines familles d'ascendance ottomane. Tel n'est guère le cas à Djerba où une grande partie de la population pratique un rite kharijite non sunnite, schisme qu'on pourrait comparer au jansénisme. Les kharijites refusent aux hommes, même au calife, le droit d'interpréter les textes sacrés et préconisent un strict respect des textes, une vie sobre et une égalité parfaite entre tous les musulmans[21]. En fait, il existait à Djerba deux rites de ce type : le rite ibadite, apparu en 654 et prêché par Abdullah ibn-Ibad at-Tamimi, présentant des analogies avec le rite hanéfite, et un rite attribué à un musulman d'origine persane de la tribu des Beni Rostom, Ibn Rustom, et fondé vers 782. Cependant, ceux-ci sont aujourd'hui confondus, surtout que la plus grande partie des ibadites s'est convertie au malékisme[56]. Il existe quelques différences dans le rituel de la prière entre ibadites et malékites[57], ces derniers appellant les premiers ouheb ou kwames en référence aux quatre rites musulmans orthodoxes.

Mosquée de Medrajen à Mezraya : un exemple d'architecture ibadite
Mosquée de Medrajen à Mezraya : un exemple d'architecture ibadite
Mosquée souterraine de Sedouikech
Mosquée souterraine de Sedouikech

Les ibadites ayant résisté au pouvoir central du bey tenaient à affirmer leur autonomie en formant des alliances avec les ibadites de Tripolitaine et du sud de l'Algérie (Ghardaïa). Fréquemment, ils résistaient au paiement des impôts et se soulevaient, raison pour laquelle le rite sunnite a été introduit sur l'île, d'abord dans la localité de Houmt Souk, au travers de familles venant de l'extérieur de l'île. Ceci pourrait expliquer l'existence d'un certain antagonisme entre habitants ibadites d'origine berbère et habitants de rite malékite[58]. À trois kilomètres de Sedouikech, en direction d'El Kantara, se trouve l'une des mosquées souterraines de l'île où les ibadites, un temps persécutés, se réfugiaient pour pratiquer leur culte. Entourée d'une oliveraie, on y accède par un escalier très raide et étroit qui conduit dans la chambre principale. À côté de cette mosquée se trouve un grand réservoir qui alimente un puits également souterrain. Une autre de ces mosquées souterraines se trouve sur la route d'Ajim. Comme elles ne sont plus utilisées pour le culte, ces mosquées souterraines peuvent être visitées librement.

Intérieur de la synagogue de la Ghriba
Intérieur de la synagogue de la Ghriba

Les mosquées ibadites ont une architecture particulière[57] et il n'est possible d'accéder au minaret qu'en passant par la salle de prière. Par ailleurs, plusieurs mosquées et zaouïas (Djerba en compte près de 400) ont été construites le long des côtes de l'île. Elles servaient de garde-côtes et permettaient de signaler l'arrivée d'ennemis, dont des pirates et corsaires, par un système de fumées destiné aux habitants de l'île qui allaient s'abriter du danger éventuel. Certaines mosquées étaient construites comme des petites forteresses (comme Jamaâ Fadhloun) et disposaient d'un four et de citernes d'eau, ce qui permettaient de resister quelque temps aux attaquants. Jemaâ El May, classée comme monument historique, est l'une des mosquées les mieux fortifiées de l'île[59]. En évoquant les mosquées de Djerba, Salah-Eddine Tlatli a dit que « les mosquées les plus modestes ont la candeur naive et le charme d'un château de sable sorti d'un rêve d'enfant »[59].

L'île abrite également une petite communauté juive comptant autrefois plusieurs dizaines de milliers d'individus spécialisés en majorité dans des métiers artisanaux (bijouterie, cordonnerie, couture, etc.) mais pratiquant également le commerce. Elle y vit depuis des siècles en bonne entente avec la majorité musulmane malgré le déclin démographique engendré par l'émigration vers Israël dès 1948 et vers la France après 1956 (date de l'indépendance de la Tunisie), 1961 (crise de Bizerte) et 1967. La synagogue de la Ghriba, située dans le village d'Er-Riadh (ex-Hara Sghira situé à neuf kilomètres au sud de Houmt Souk), est très ancienne et très célèbre. D'après les rabbins locaux, même s'il existe d'autres versions, « les Juifs arrivés sur l'île auraient apporté avec eux certains manuscrits des Tables de la Loi qu'ils auraient sauvé des ruines du Temple de Jérusalem détruit par Nabuchodonosor et même certaines pierres du Temple sur lesquelles ils auraient bâti le sanctuaire[60] ». Cette synagogue attire tous les ans, trois semaines après la Pâque juive, des pélerins d'Europe et d'Afrique du Nord qui « transportent en procession sur leurs épaules, hors de la synagogue, les Tables de la Loi, sous un lourd baldaquin multicolore qu'ils promènent »[60] aux alentours. Plusieurs autres petites synagogues se trouvent à la Hara El K'bira, principal quartier juif de l'île situé à Houmt Souk.

Au début du XXe siècle, Djerba comptait, parmi une population d'environ 40 000 personnes, plusieurs centaines de catholiques français, italiens, grecs et maltais. Ces derniers gagnaient leur vie, entre autres, comme artisans et pêcheurs de poisson et d'éponges. L'église catholique Saint-Joseph de Djerba, située en plein centre de Houmt Souk, a été réouverte officiellement au culte et consacrée le 19 mars 2006. Il existe également une église grecque orthodoxe à proximité du port de Houmt Souk.

[modifier] Gastronomie

Avant l'essor touristique, les Djerbiens cultivaient du blé, de l'orge, du sorgho et des lentilles qui constituaient la base de leur alimentation. Le couscous d'orge (malthoutha) au poisson ou à la viande séchée et conservée dans de l'huile d'olive (dhan)[61] et les petits anchois séchés (ouzaf) sont des spécialités de l'île. La zamita, une préparation à base d'orge grillé, de fenugrec et d'épices, est pour sa part consommée par les Djerbiens au petit déjeuner, au goûter voire en repas principal, accompagnée de légumes crus ou en salaison (oignons verts, navets, carottes ou poivrons) ou de fruits (raisins ou grenades). Le sorgho est consommé en gâteaux, entremets (sahlab et bouza) ou bsissa.

La gastronomie djerbienne varie toutefois d'une localité à l'autre même si la cuisson à la vapeur qui aurait été préférée par les anciens Berbères y prédomine. Ainsi, pour le couscous djerbien, la semoule est-elle cuite à la vapeur ainsi que le poisson ou la viande et les légumes assaisonnés d'épices. On utilise alors un couscoussier en terre cuite à deux étages, typique de l'île, appelé keskess bou rouhine. Le riz djerbien est également cuit à la vapeur : viande, foie et légumes sont émincés, assaisonnés et mélangés au riz légèrement trempé à l'avance, l'ensemble étant ensuite cuit à la vapeur. Plusieurs variétés de farines de céréales et de légumes secs (orge, sorgho, blé, lentilles, pois chiches, fenugrec, etc.) assaisonnées d'épices et d'herbes appelées bsissa sont préparées et conservées pour être consommées naturelles, salées ou sucrées avec de l'huile d'olive, des fruits ou légumes frais, des dattes ou des figues sêchées.

Les Djerbiens sont aussi friands de poissons, de poulpes (frais ou séchés), de seiches et de calmars ; ces derniers farcis d'herbes permettent de préparer un plat de couscous ou de riz. Les ouzaf[62] constituent un condiment de choix, en paticulier dans la préparation du massfouf djerbien (couscous peu arrosé de sauce, bien épicé et riche en herbes dont le yazoul ou gazoul)[63] ou du s'der (soupe de semoule).

Le séchage de la viande est pratiqué sur toute l'île : la viande coupée en tranches fines (kaddid) est assaisonnée de sel et enduite d'huile (afin d'en éloigner les mouches), séchée au soleil puis bouillie dans l'huile d'olive (m'selli), conservée (d'hane) et utilisée pour la préparation de plats typiques. La glaia, viande cuite et conservée dans de la graisse de mouton et assaisonnée de curcuma, de sel et de poivre, peut également se conserver pendant un ou deux mois ; elle s'accommode notamment avec des tomates, poivrons et œufs et se mange avec du pain ou une bouillie épaisse de farine d'orge (bazine) ou de blé (assida).

La pâtisserie traditionnelle djerbienne est en revanche relativement pauvre. Les boissons typiques sont le legmi (sève de palmier qui se transforme en « vin de palme » dans la journée compte tenu d'une fermentation naturelle très rapide) et le l'ban (lait fermenté ou petit-lait). Le thé vert à la menthe ou le thé noir parfumé aux feuilles d'une variété de géranium (atr'cha) se boit bien sucré, aussi bien après qu'entre les repas.

[modifier] Croyances et légendes

Beaucoup de croyances ont longtemps existé sur l'île : les Djerbiens considéraient ainsi le mercredi comme une journée néfaste pendant laquelle il ne fallait rien entreprendre (mariage, visite d'un malade, etc.). Le chiffre cinq et ses multiples sont prononcés pour éloigner le mauvais sort ou les influences négatives. Le septième jour est quant à lui célébré en cas de naissance ou de mariage et le quarantième jour en cas de naissance et de décès. Le poisson est considéré comme un porte-bonheur et éloigne le mauvais œil : il est donc représenté sur les bijoux et utilisé couramment dans la décoration des intérieurs, un petit bijou représentant un poisson est accroché presque systématiquement aux habits des nouvaux-nés. Il existait aussi plusieurs journées dans l'année appelées moussem et au cours desquelles on portait un repas de viande ou de poisson aux voisins les plus pauvres[64].

Les Djerbiens croyaient également en l'existence de la khiala, fantôme d'une très belle femme qui apparaît à ses victimes, les ensorcele et les emporte pour les libérer sains et saufs après un ou plusieurs jours, le revenant ne se souvenant en principe de rien. Était-ce une façon par laquelle la sagesse populaire justifiait des fugues ?[65] On croyait également que les âmes des morts rôdaient autour des cimetières durant la nuit et pendant les heures les plus chaudes de la journée. On racontait aussi aux enfants que pendant ces mêmes heures, une vieille et méchante femme (azouzat el gaila) attrapait les enfants qu'elle trouvait dans la rue et les mangeait. Les enfants étaient également terrifiés par l'idée d'être attrapés par l'un de ces « messieurs » à la recherche d'enfants avec des signes particuliers dont le sacrifice leur permettrait de trouver un trésor enfoui. Le pain était vénéré et jamais jeté avec les ordures : si l'on devait en jeter un morceau, il fallait d'abord l'embrasser puis le poser dans un endroit propre, de préférence surélevé, afin qu'un pauvre ou un animal puisse le trouver propre. On racontait que lorsqu'on observe la lune, on y voit une femme pendue par les paupières parce qu'elle a utilisé un morceau de pain pour toucher son enfant. Les Djerbiens croient aussi que cela porte malheur de compter les gens et que le fait que les chaussures se superposent en les enlevant ou en les rangeant est un signe précurseur de voyage. Si par contre, les chaussures se renversent, il faut tout de suite les retourner autrement Satan (echitan) fait sa prière dessus[66].

Par ailleurs, l'expatriement de l'homme djerbien est à l'origine de croyances que la sagesse populaire a préservé pendant des générations comme le fait de croire qu'un fœtus peut être porté par la mère pendant plusieurs années et naître en l'absence du père (erraged)[67].

Des croyances et légendes entourent certaines mosquées dont Sidi Zitouni et Jemaâ El Guellal situées à Houmt Souk mais aussi Jemaâ Essatouri et Jemaâ Sellaouati. On raconte que Si Satouri, paysan modeste, possédait un lopin de terre isolé et difficile à travailler. Après une journée de dur labeur, il s'arrête en pleine route pour faire sa prière lorsqu'un riche cortège de mariage tente en vain de l'interrompre. Sa prière achevée, il se rend compte que le cortège a été pétrifié sur place. De retour au village, il raconte son aventure aux villageois qui, incrédules, se rendent sur place pour voir le cortège transformé en pierres, voient en Si Satouri un saint et édifient une mosquée sur le lieu de son aventure[21]. La légende des Sallaouta, installés dans la région de Mezraya, raconte que ceux-ci décidèrent de construire une mosquée, choisirent l'emplacement et commencèrent à en creuser les fondations. Le lendemain, en retournant vers leur chantier, ils aperçurent sur une surélévation un pilier en marbre de 12 pans qu'aucune main humaine n'aurait pu placer à cet endroit. Ils virent là un signe divin, ajoutèrent trois colonnes de pierre et du mortier et bâtirent leur mosquée appelée Jemaâ Sellaouati[21].

[modifier] Art de vivre

[modifier] Mariages traditionnels

Djerba possède des traditions très variées dont plusieurs se maintiennent comme par exemple les mariages traditionnels qui se célèbrent sur plusieurs journées et comptent plusieurs cérémonies.

[modifier] Généralités

Les distractions étant rares, les mariages qui se célèbrent surtout en été sont attendus, notamment chez les malékites pour qui le mariage représente une occasion de défoulement, ceci étant particulièrement vrai pour les femmes. Chez les Djerbiens de rite ibadite, les mariages sont plutôt austères, souvent sans danses voire sans musique[68].

Main de la mariée décorée au henné
Main de la mariée décorée au henné

Les cérémonies du mariage traditionnel sont nombreuses. Dans la ville de Houmt Souk, la hejba est la première d'entre elles. À partir de ce jour, la future mariée cesse de sortir de chez elle pendant une certaine période (une semaine à un mois voire plus), en grande partie pour se protéger du soleil, la peau blanche étant l'un des principaux critères de beauté à Djerba. Lors de cette cérémonie, la dot est payée au père de la mariée et servira principalement à l'achat du trousseau de celle-ci, y compris des couvertures en laine, de matelas, etc. Par ailleurs, plusieurs zaouïas sont visitées et des bougies y sont allumées. Mais c'est durant la semaine même du mariage que les cérémonies et les festivités se multiplient. Les familles des deux futurs époux organisent des festivités séparées et ce n'est qu'à l'aube du septième jour que les deux familles se rencontrent pour fêter le dernier jour (traditionellement un vendredi) ensemble. Les cérémonies pour femmes sont animées par des musiciennes et, en général, les hommes n'y accèdent pas. Par contre, les femmes, autrefois voilées en majorité, peuvent accéder aux soirées musicales organisées pour les hommes. En plus des musiciens locaux (autrefois en majorité noirs), les Djerbiens font appel aux musiciens des îles Kerkennah, dont le folklore est proche du leur, et parfois à ceux de Ghomrassen (appelés toualeb).

Les invités apportent en cadeau des oeufs frais [69] et de l'argent aux mères des futurs époux. Note est prise de ces cadeaux que l'on appelle hourem ou haouram afin qu'au moins l'équivalent soit offert en retour.

[modifier] Déroulement

À Houmt Souk, à l'occasion du premier des sept jours du mariage, on lance les invitations (tahdhir) à travers des haddharat habillées, maquillées et parées de bijoux ; les familles visitées leur offrent à manger ainsi que de l'argent. Ce même jour, la zammita[70] du mariage[71] est préparée au son de chants traditionnels et de youyous.

Marié célébré par ses amis le soir de la henna kbira
Marié célébré par ses amis le soir de la henna kbira

D'autres cérémonies suivent dont la henna sghira (quatrième jour du mariage) ; des enfants de familles proches habillés en adultes (les fillettes maquillées et parées de bijoux traditionnels) sont reçus par les parents de la future mariée. Ils apportent une bague dissimulée dans du henné en feuilles qu'un petit garçon enfile dans l'annulaire de la mariée. Sa famille offre à ces enfants à manger ainsi que des cadeaux et des œufs durs colorés. La soirée est dédiée à la tatrifa : après les chants et danses, une proche parente du futur époux applique du henné à la mariée au rythme de chants traditionnels et de youyous et à la lumière de bougies tenues par de jeunes femmes récemment mariées (appelées saddarat), parées d'habits et bijoux traditionnels réservés aux mariées.

Le lendemain soir, la henna kbira a lieu chez le marié : un yahni est servi aux invités[72] et des cadeaux envoyés à la mariée. Un couffin plein de produits de maquillage traditionnel (gouffat el henna), d'encens, des bijoux, un rdi que la mariée portera pour la jeloua et un beskri[73] sont amenés, en principe, à cheval par un homme adulte, de préférence noir accompagné de proches parentes du marié. Le marié est habillé par ses amis à la lumière de bougies et au son de musique (traditionnellement El Borda). Une cérémonie particulière à l'île (qui aurait des origines paiennes), la barboura, a alors lieu : le marié, abrité par un biskri et accompagné par ses proches parentes et ses amis, rend une visite rituelle à un olivier d'où il détache un rameau avec laquel il frappe symboliquement ses amis célibataires[74].

Le jour suivant, le contrat de mariage est signé et une cérémonie féminine de coiffure a lieu chez la mariée (bambar). Par le passé, les cheveux de la mariée étaient coiffés en fines tresses assemblées en deux tresses tombant le long de son visage. Des pièces rondes en or appelées mahboub[75] étaient appliquées sur ces tresses. Avant le bambar, les parents de la mariée offrent un yahni à leurs invités. Après une soirée de musique et de danse, la mariée est portée chez son mari, à dos de chameau, dans la jahfa (sorte de baldaquin orné de tentures), accompagnée de ses invités et de musiciens en costume traditionnel jouant du tabl et de la ghita et dansant tout au long du trajet alors que son trousseau est porté par d'autres chameaux[76],[77]. Une fantasia (course de chevaux) est parfois organisée lors du parcours. On peut également assister à un spectacle de zgara, une danse-combat entre deux hommes armés de sabres. Dans certaines localités, la mariée ne doit arriver chez son époux qu'à l'aube pour le dkhoul[78]. Un œuf dur est partagé entre les deux époux et une jarre est cassée au moment où ils s'isolent. Dans certains villages, une cérémonie appeléelederdek a lieu[79].

Mariée durant la cérémonie de la jeloua
Mariée durant la cérémonie de la jeloua

La jeloua a lieu le lendemain et consiste en un après-midi de chants et de danses animée par des musiciennes traditionnelles, en majorité noires, appelées chouachan. En fin d'après-midi, habillée en r'di et parée de bijoux[80], la mariée est portée sur un coffre (autrefois réservé à son trousseau) par son frère aîné. Face au soleil, un rituel a lieu au cours duquel son visage est montré aux invités à intervalles par la maquilleuse (zaiana, en principe noire) qui baisse et soulève le bundi[81] au rythme de youyous alors que la mariée garde les yeux fermés. Des pièces de monnaie et des bonbons sont lancés par les frères et les oncles de la mariée qui se succèdent à sa gauche sur le coffre alors que la zaiana se tient à sa droite. Le tout s'achève au coucher du soleil lorsque le marié tourne le bundi sur la tête de la mariée sept fois puis le retourne sur l'autre face.

Le troisième jour après le mariage (ethalath), les parents de la mariée rendent visite à leur fille qui s'habille en melhafat zouizat. Le contenu d'un grand couffin de fruits secs et de bonbons typiques (gouffat ezraraa) est partagé entre les deux familles. La dernière cérémonie (essboua) a lieu quatre jours après. La mariée peut y attacher pour la première fois son beskri avec une broche centrale (au lieu des deux broches qu'elle a portées sur les côtés depuis le commencement du mariage). Elle enjambe un récipient contenant du poisson frais et travaille la semoule pour le couscous au poisson (cousksi el khouatem) qui sera offert aux invités. Il est à noter qu'à Djerba, le poisson est considéré comme un porte-bonheur qui conjure le mauvais œil. Ce jour-là, le marié invite les parents et amis mâles qui auront le droit de rencontrer sa femme à l'avenir. Ceux-ci baisent la main de la mariée et lui offrent de l'argent.

[modifier] Traditions

L'île connaît une multitude de costumes traditionnels et de bijoux typiques[82]. Il existe également des chapeaux caractéristiques de certains villages (comme Guellala et Sedouikech), une musique typique longtemps exécutée par des musiciens et chanteurs en majorité noirs, une gastronomie variant d'un village à l'autre, des accents divers voir des rites religieux différents. Jusqu'à il n'y a pas très longtemps, les différents groupes ethniques et religieux ne se mariaient pas entre eux bien que les relations entre les différents groupes étaient affables[83].

Chez certains Djerbiens de rite ibadite, la jeune fille qui jeûne durant le ramadan pour la première fois (en principe dès qu'elle devient pubère) est reçue à dîner par les parents et amis pendant tout le mois du ramadan et reçoit des cadeaux destinés à son trousseau de mariage (coupons de tissu, draps, etc.).

L'une des conditions du mariage musulman est le payement d'une dot par le futur époux ou sa famille à la future épouse. Au Moyen-Orient, cette dot comprend deux parties : l'une payée au moment du mariage, appelée mokkadam, et l'autre appelée moakhar est la plus importante et payée en cas de divorce. En Tunisie, la dot est normalement payée en entier au moment du mariage et, à Djerba, elle sert pour préparer le trousseau de la mariée (linge et vêtements notamment). La dot est d'autant plus élevée que la jeune fille est jolie et issue d'une famille importante. Après l'indépendance de la Tunisie en 1956, une grande campagne est menée pour réduire la dot à une somme symbolique et, au début des années 1960, des Djerbiennes se marient avec une dot symbolique d'un dinar.

Djerba connaît deux personnages traditionnels importants qui sont en général des hommes noirs. Le premier, tengam, vient réveiller les habitants pendant les nuits du ramadan pour prendre le dernier repas avant le début du jeûne. Il y a plusieurs tengam sur l'île qui vont de maison en maison battre leur tbal et chanter goumou le s'hourkoum. Le quinzième jour de ce mois, les Djerbiens les attendent pour leur offrir des f'tair (larges beignets) et des z'labia (gâteaux au miel). Le jour de l'Aïd el-Fitr, ils repassent pour recevoir de l'argent[84]. Quant au deuxième, appelé boussadia, c'est un personnage typiquement africain portant masque, peaux d'animaux ornées de petits miroirs et de rubans multicolores, il passe de maison en maison, souvent accompagné d'un enfant habillé comme lui, pour chanter et danser au son de petites cymbales en fer de forme ovale. Ce spectacle constitue une distraction et les gens lui offrent de l'argent [85].

[modifier] Rapports à l'environnement

Il est intéressant de se pencher sur le rapport qu'avaient les Djerbiens avec leur environnement avant l'essor touristique et le revirement que vit l'île de nos jours.

Palmier-dattier avant la récolte
Palmier-dattier avant la récolte
Vieil olivier isolé
Vieil olivier isolé

Les centaines de milliers de palmiers de l'île représentent un élément très important pour les Djerbiens qui en utilisent toutes les parties : les palmes sont utilisées pour la vannerie[86] et les barrières des pêcheries fixes. La partie supérieure de celles-ci est aussi utilisée comme balai[87]. La partie dure des palmes vertes est utilisée pour fabriquer un jeu de société appelé sigue[88]. On utilise cette partie également pour la confection de brochettes pour les barbecues. Elle est également utilisée par les pêcheurs pour la confection des nasses. Lorsqu'elles sont sèches, les palmes sont utilisées comme combustible, la partie supérieure, qui brûle rapidement, est utilisée pour faire partir le feu et la partie proche du tronc comme bois de combustion. Les palmes entières servent également à construire des enclos pour les animaux (z'riba) et des huttes qui servaient autrefois d'habitation pour les plus pauvres ou comme abris pour les cuisines externes[38], les toilettes voir des khoss où les habitants se réunissaient[89]. Elles servent à présent pour construire des parasols sur les plages. Le tronc du palmier coupé en deux dans le sens de la longueur (sannour) sert pour la charpente du menzel et constituent la plupart des poutres des anciennes habitations ou ateliers de tissage. Le tronc sert aussi pour certains instruments des vieux pressoirs à huile. Les régimes (qui portent les dattes), une fois débarassées des fruits, sont utilisées comme balais pour les cours sablonneuses et les alentours du menzel. Ils sont également utilisés par les pêcheurs pour confectionner des cordages et enfiler le poisson vendu à la criée. Le cœur de palmier, appelé jammar, constitue un entremet et la sève (legmi) est bue fraîche le matin ou fermentée, comme vin de palme. Les dattes, dont l'île produit plusieurs variétés, sont consommées aussi bien fraîches que séchées. On en fait également des confitures, on les farcit de pâte d'amande et on les utilise pour farcir des gâteaux comme le makroud. Elles constituaient un élément fondamental dans le régime alimentaire des Djerbiens. Les habitants de confession juive les utilisent également pour la fabrication d'un alcool appelé boukha (qui se fait aussi à partir de figues). Les noyaux des dattes étaient concassés et utilisés dans l'alimentation des chameaux.

La place qu'occupe l'olivier n'est pas moindre et des rites sont encore célébrés autour de l'olivier aussi bien pendant les cérémonies de mariage que de circoncision[74]. Par ailleurs, lorsque les Djerbiens visitent les zaouïas, ils faisaient souvent des offrandes d'huile d'olive. Tout comme pour le palmier, les Djerbiens font un usage multiple de toutes les parties de l'olivier : les fruits sont utilisés pour l'extraction de l'huile utilisée dans l'alimentation, la cosmétique (en particulier pour le soin des cheveux) ainsi que dans la pharmacologie traditionnelle. L'huile était aussi utilisée pour l'illumination (mosbah ou lampes à huile), pour allumer le feu (f'tilat zit ou mèche) et les huiles usagées ainsi que les déchets d'huile servaient pour la confection de savon artisanal.

Les olives sont aussi conservées — plusieurs procédés sont utilisés dont le séchage, la salaison et la saumûre — pour usage alimentaire et les noyaux broyés et utilisés dans l'alimentation du bétail ainsi d'ailleurs que les restes des olives pressées. Les feuilles de l'olivier (ainsi que celles des autres arbres fruitiers) sont séchées et servent pour l'alimentation du bétail, en particulier les chèvres et les moutons[90]. Les humains en font un usage médicinal (notamment des tisanes contre le diabète). Les branchages secs sont utilisés comme combustible et les troncs pour la confection d'objets en bois d'olivier.

L'orge constituait l'aliment de base des Djerbiens sous diverses formes : zammita (poudre d'orge aromatisée), malthoutha (couscous d'orge), kesra (galettes d'orge), bazine (pouding d'orge), h'sou (soupe de farine d'orge), d'chicha, pain, crêpes et gâteaux d'orge sont consommés sur l'île depuis des millénaires. La paille est utilisée pour l'alimentation du bétail qui peut avoir exceptionellement droit à de l'orge (exemple pour engraisser le mouton de l'Aïd el-Kebir). Le grenadier est un autre arbre familier aux Djerbiens qui utilisent son fruit en totalité, écorce comprise, celle-ci servant au tannage des peaux. Les feuilles servaient pour l'alimentation du bétail et les branchages secs comme combustible.

Les Djerbiens ne jetaient presque rien : les épluchures de figues de Barbarie, de melons, de pastèques, de courges ainsi que les épluchures des légumes et leurs feuilles (carottes ou radis) étaient coupés en petits morceaux et utilisés pour l'alimentation du bétail. Les pépins non consommés par les humains — les Djerbiens sont friands de pépins de courge et de tournesol — sont donnés au animaux. Les roses, certains géraniums (atr'cha) et les fleurs d'oranger sont distillés et utilisés dans la cuisine, surtout dans les desserts, la cosmétique ou la pharmacologie traditionnelle. Les écorces d'oranges sont quant à elles séchées, pilées et utilisées pour aromatiser café et gâteaux. Ainsi, les Djerbiens opéraient-ils un recyclage systématique des restes ménagers, les quelques déchets non utilisables étant déposés dans une grosse fosse creusée à l'extrémité du champ ou verger et couverte de sable une fois remplie. Pour l'alimentation de leurs animaux, les Djerbiens ramassaient l'herbe du printemps, la conservaient pour la saison sèche[90] et broyaient et traitaient tous les restes alimentaires difficiles à consommer tels quels. Tous les branchages secs, voire les crottes de chameaux, étaient ramassés systématiquement, conservés et utilisés comme combustible. Les restes de linge et habits usés étaient coupés dans le sens de la longueur et utilisés pour la fabrication de nattes (klim ch'laleg). Les écorces d'amandes servaient pour la fabrication d'une teinture traditonnelle pour cheveux (mardouma). Les restes de papiers (journaux, vieux cahiers, etc.) étaient vendus au poids. La vaisselle se faisait avec l'eau du puits (en général saumâtre) et du sable, de l'argile ou une herbe grasse qui pousse spontanément, appelée gassoul. Le cuivre était nettoyé avec de la cendre et la peau de citrons préssés. L'eau de vaisselle servait pour arroser le grenadier ou autres plantes supportant l'eau saumâtre. Le kaolin et l'argile verte (disponibles à Guellala) étaient utilisés en cosmétique (bain de cheveux et masques pour visage et corps). D'autres produits naturels étaient utilisés en cosmétique comme le fenugrec, le miel, la farine de pois chiche, le blanc et le jaune d'œuf, l'huile d'amande, etc.

Jusqu'aux années 1970, il est interdit d'introduire des bouteilles en plastique sur l'île et l'usage des sachets en plastique était rare, les Djerbiens allant au marché avec leurs couffins s'ils y allaient à pied et leur zembil s'ils y allaient à dos d'âne ou de mulet. Avec le tourisme, les bouteilles en plastique sont autorisées, l'usage des sachets et emballages en plastique est généralisé, sans parler des boîtes de conserve en métal ou en plastique ; il est devenu commun de voir les bords de route jonchés de ce genre de déchets et ce même en pleine campagne. La structure même de l'habitat est en train de changer : on assiste à la transformation de Midoun en vraie ville et la naissance d'autres agglomérations comme Ouled Amor qui comptait à peine quelques maisons jusqu'aux années 1980 et Sidi Zaid où il n'y avait pratiquement pas de constructions hormis la zaouïa. Des habitations et des locaux de commerce ont commencé à pousser comme des champignons le long des côtes qui n'étaient peuplées que de palmiers, cactus, agaves, aloès et figuiers de Barbarie. La population s'est beaucoup mélangée, l'habillement et le langage sont en train de changer, les vols sont devenus monnaie courante et on entend de plus en plus parler de crimes ; la prostitution dont on n'entendait guère parler a fait son apparition.

[modifier] Économie

L'économie de Djerba est traditionellement « mixte, fondée sur la complémentarité des ressources du sol, de la mer et de l'artisanat [...] l'agriculteur peut être pêcheur ou artisan une partie de l'année »[91] voire de la journée tout en étant commerçant[92]. Toutefois, le Djerbien est avant tout un commerçant prêt à quitter son île natale pour mener son activité commerciale. En effet, dès les années 1940, les commerçants djerbiens installés sur l'île ne représentent que 4 % de l'ensemble des négociants djerbiens. René Stablo indique que parmi les « 6444 musulmans se livrant au commerce, 6198, soit 96 % tiennent boutique dans le bassin méditerranéen depuis le litoral atlantique jusqu'aux rives du Bosphore [...] Ils sont épiciers, merciers, marchands de tissus, de couvertures, de chéchias, de poteries, cafetiers, coiffeurs, etc. »[93]. En 1961, on a estimé à 1 067 412 dinars tunisiens l'apport des Djerbiens vivant hors de l'île, soit 42 % de l'ensemble de la valeur des productions et services djerbiens, l'agriculture en représentant 17 %[10]. En 1998, on estime l'apport des Djerbiens vivant à l'étranger à entre 20 et 25 millions de dinars par an[94] alors que les ressources dérivées de l'agriculture ne représentent plus qu'entre 2 et 4 % des ressources globales de l'île comparées aux ressources des activités touristiques qui se montent à 20 fois plus[50].

[modifier] Tourisme

Plage d'un hôtel djerbien
Plage d'un hôtel djerbien
Hôtel djerbien
Hôtel djerbien

Djerba dispose d'une vingtaine de kilomètres de plages sablonneuses, situées surtout à l'extrémité orientale de l'île[9], qui ont poussé Gustave Flaubert à surnommer Djerba « l'île aux Sables d'Or ». Les plus belles plages se trouvent au nord-est (Sidi Hacchani, Sidi Mahrez et Sidi Bakkour), à l'est (entre Sidi Garrous et Aghir), au sud (près de Guellala) et à l'ouest (Sidi J'mour)[95]. Jusqu'au début des années 1950, celles-ci ne sont fréquentées que durant les visites que les habitants rendent aux marabouts. Toutefois, avec l'arrivée du Club Méditerranée en 1954 et le développement du tourisme dès les années 1960 (construction du premier hôtel important en 1961[9]), ces plages sont de plus en plus fréquentées. L'État tunisien est alors l'acteur principal par ses investissements comme par les avantages fiscaux et financiers consentis aux établissements touristiques[30] qui sont pour la plupart construits sur la côte orientale de l'île.

Vers 1975, l'activité touristique prend des proportions insoupçonnables à l'orgine[29] et, dans les années 1980, le tourisme prend véritablement son essor pour devenir la principale activité économique de l'île : le nombre d'emplois directs correspond à quelques 15 000 postes de travail souvent précaires car saisonniers alors que les emplois indirects sont évalués à environ 55 000[30]. Les espaces permettent d'avoir de grandes unités hôtelières dont le taux d'occupation moyen est de 68 % en 1999, ce taux situant Djerba en seconde position parmi les sites touristiques tunisiens[30].

En 2005, la zone touristique s'étend sur plus de 20 kilomètres entre Aghir au sud et Houmt Souk au nord avec une capacité hôtelière passée de 8 300 lits en 1975 à 39 000 lits disponibles en 2002[9]. Néanmoins, un grand nombre de lits n'est utilisé que durant l'été et le parc hôtelier vieillit, entraînant un tassement de la clientèle, notamment en raison des prix trop bas induits par la concurrence[30]. Pour maintenir et développer l'activité, les acteurs locaux sont favorables à un enrichissement de l'offre par la création d'activités nouvelles (terrain de golf, casino, musée, thalassothérapie ou encore parc d'attractions). Plusieurs terrains destinés au tennis et à d'autres sports sont disponibles tout comme plusieurs stations nautiques qui offrent ski nautique, motomarine, parachute ou simple pédalo. Un bowling a ouvert ses portes non loin du terrain de golf. Par ailleurs, une marina est en cours de construction et permettra aux bateaux de plaisance d'y stationner sans difficulté.

La présence de l'aéroport international de Djerba-Zarzis[96] et d'infrastructures routières [97],[30] contribue à en faire un centre touristique important et un générateur de croissance économique pour la région.

[modifier] Agriculture

L'économie de l'île repose également sur l'agriculture et son climat permet la culture de nombreux oliviers, dont les familles d'agriculteurs récoltent les fruits en automne, de grenadiers, de palmiers-dattiers[98], de figuiers, de pommiers, d'amandiers, de figuiers de Barbarie aux fruits épineux qui bordent les routes (souvent plantés sur les haies appelées tabias à titre de protection), de la vigne et de légumes et de certaines céréales. Les revenus des palmiers et oliviers représentant à eux seuls 64 % du total des productions agricoles. On recense en 1963, 497 000 oliviers, alors qu'il n'y en avait que 394 500 en 1929, mais aussi 52 000 oliviers sauvages ou zabbous[99] qui, devenus à la mode, commencent à être arrachés pour être transplantés hors de l'île.

Au sein du menzel, la famille a en général un ou deux chiens de garde, un ou plusieurs chats qui se chargent de protéger le grenier contre les souris[38], quelques poules pour les œufs et la viande et quelques chèvres et moutons pour le lait, le petit-lait (l'ban), le lait caillé (raieb), le fromage (rigouta et jebna), la viande, la laine ou les peaux. Elle a aussi un âne ou un mulet et éventuellement une charrette ainsi qu'un chameau pour le travail de la terre (labour et irrigation) et le transport des biens et marchandises ainsi que celui des humains. S'il en a les moyens, le Djerbien possède une sénia, verger d'arbres fruitiers irrigué et clôturé mais ne comportant pas en général d'habitation. Mais le plus souvent, il possède un jnan, verger non irrigué, un potager et un champ pour produire ses propres céréales (blé dans les zones d'eau douce, orge, sorgho et lentilles sur le reste de l'île). La frawa est un autre type d'exploitation agricole plantée d'oliviers. Avant les années 1960, le Djerbien vivait souvent en autarcie presque totale et n'achetait au marché que le minimum nécéssaire : sel, sucre, thé et café[100], certaines épices et quelques autres articles.

Puits actionné par un chameau
Puits actionné par un chameau

Pour l'irrigation traditionelle, c'est la canalisation dite seguia qui est utilisée : l'eau est déversée dans un grand bassin par un delou (outre en cuir) qui plonge dans le puits au moyen d'une corde tirée le plus souvent par un chameau, la course en pente de l'animal correspondant à la profondeur du puits[101] ; le champ est divisé en petits carrés (jadouel) délimités par des talus de sable ; de petites ouvertures y sont pratiquées pour laisser passer l'eau ruisselant de la seguia[35]. Une fois le jadouel plein d'eau, l'ouverture est refermée et l'eau dirigée vers le jadouel suivant. L'eau souterraine est le plus souvent saumâtre et ne permet que certaines cultures (orge, sorgho et lentilles) et la fertilité des champs dépend aussi bien de l'ardeur au travail du propriétaire et de sa famille que de la qualité (niveau de salinité) des eaux d'irrigation. Les champs sont le plus souvent délimités à l'extérieur par de hautes levées de terre appelées (tabia) surmontées de cactus ou de figuier de Barbarie voire d'agave ou d'aloès. Ces tabias servent certes à abriter les menzels des regards mais surtout à protéger les enclos contre l'érosion éolienne[102].

Vers 1940, on comptait à Djerba 520 000 palmiers, 375 000 oliviers, 160 000 arbres fruitiers divers (pommiers, poiriers, figuiers, pêchers, orangers, citronniers, abricotiers, grenadiers, amandiers, etc.) et 650 000 pieds de vigne. Il n'existait pas de vrai pâturage et l'élevage était assez réduit[103]. En 1938, 31 % de la population adulte vivait des activités agricoles, cette proportion tombant à 25 % en 1956 puis 17 % en 1962[104]. Ce taux est encore plus bas de nos jours.

La culture sous serres en plastique et l'arrosage au goutte-à-goutte ont fait leur apparition de même que l'élevage de vaches laitières (près de 500 en 1998[90]).

[modifier] Pêche

Phare de Taguermess
Phare de Taguermess

Djerba compte plusieurs petits ports de pêche dont ceux de Houmt Souk, Ajim (autrefois célèbre pour sa pêche d'éponges), Aghir, Lella Hadhria et El Kantara. La pêche djerbienne — sautades de mulets[105] et pêche à la gargoulette (amphore) de poulpes — profite d'eaux parmi les plus poissonneuses de la mer Méditerranée.

Contrairement à celles des îles Kerkennah, les femmes djerbiennes ne participent pas à l'activité de pêche et ce même en l'absence du mari, la pêche étant pratiquée en majorité par les habitants ibadites de l'île, d'Ajim à Sedouikech. Une méthode de pêche assez particulière, la zriba ou charfia (pêcherie fixe), est très pratiquée sur l'île et il est commun de voir dans la mer, au nord et à l'ouest de l'île, des haies ou des cloisons de palmes enfoncées dans la vase des hauts fonds servant à arrêter le poisson et à le diriger vers les nasses. En 1938, 1 300 hommes (environ 10 % de la population mâle adulte) vivaient de la pêche en utilisant près de 600 barques (des loudes pour la plupart) et 130 pêcheries fixes. En 1964, le nombre de barques était descendu à environ 507 unités et celui des pêcheries fixes à 85, le nombre de pêcheurs étant de 1 274 personnes[106] alors qu'en 1998, le nombre de pêcheurs atteint près de 2 470 personnes alors qu'il ne reste plus qu'une quinzaine de pêcheries fixes[107] d'où une baisse considérable si l'on considère l'accroissement démographique durant cette période. Si environ 4 378 tonnes de poisson ont été commercialisées en 1981, cette vente est tombée à environ 3 000 tonnes en 1993[108].

Les loudes à la blanche voilure grecque sont utilisées pour la pêche du poisson et les kamakis à voile latine de couleur rouge tirant sur l'orangé, la vergue fixée obliquement en son milieu à l'extrémité du mât unique et court, sont utilisées par les pêcheurs d'éponge[109]. Toutefois, des chalutiers ont fait leur apparition dans les hauts-fonds[110].

En fait, compte tenu des ressources limitées de l'île, les hommes, et en particulier ceux de souche berbère, s'expatriaient pour faire du commerce en dehors de l'île, aussi bien en Tunisie qu'à l'étranger (surtout en France et en Algérie) alors que les femmes restaient sur l'île avec les enfants et les hommes âgés. Elles pratiquaient l'agriculture et l'artisanat mais jamais la pêche, activité réservée aux hommes et limitée à certains villages.

Afin d'assurer la sécurité des navires, plusieurs phares existent le long des côtes de l'île dont le plus haut de l'île (mais aussi d'Afrique du Nord grâce à ses 64 mètres) se situe à Taguermess sur la côte nord-est de l'île. Il est construit sur une formation rocheuse côtière et surplombe une sebkha alimentée en eau de mer lors de la marée haute. Un deuxième phare se situe à Jilij sur la côte septentrionale, non loin de l'aéroprt, alors qu'un troisième se trouve à Aghir sur la côte sud-est. Il en existe plusieurs autres.

[modifier] Artisanat

L'artisanat, en particulier le travail de la laine, du lavage au cardage, en passant par le filage et le tissage[111], a depuis des générations joué un rôle primordial dans la vie économique et sociale de l'île et constitué une source de revenus importante pour les Djerbiens (hommes ou femmes). L'architecture des ateliers de tissage est typique sur l'île[112] : ils sont semi-enterrés afin de préserver l'humidité ainsi qu'une certaine température et possédent un fronton triangulaire. On comptait 428 ateliers et 2 524 tisserands en 1873, le nombre de tisserands tombant à environ 1 600 en 1955 et 1299 en 1963. À cela s'ajoute les laveuses, cardeuses et fileuses de laine (en principe toujours des femmes) ainsi que les teinturiers, l'activité de teinture remontant à l'époque punique[113].

Potier de Guellala au travail
Potier de Guellala au travail

La couverture djerbienne appelée farracha ou farrachia était célèbre et recherchée. L'activité de tissage des houli, fouta, h'rem et biskri (habits traditionnels féminins) en coton, laine ou soie naturelle ainsi que le tissage des kadrouns, k'baia, kachabia, wazra et burnous (habits en laine pour homme) joue également un rôle important. La poterie de Guellala remonte quant à elle au moins à l'époque romaine, ses produits étant principalement utilitaires mais pouvant aussi être décoratifs. Il est à noter que les potiers de Djerba n'ont plus le droit de vernir leur poterie à leur gré, une décision administrative centrale les obligeant à les garder brute. Parlant des potiers de Djerba, Georges Duhamel avait écrit dans les années 1920 :

« J'ai cherché des poètes. J'ai trouvé des potiers. Nul métier ne fait mieux penser à Dieu, à Dieu qui forma l'homme du limon de la terre [...] Sur tous les chemins de Djerba, entre les remblais sablonneux, crêtés de petits agaves pourpres, circulent des chameaux, portant un faix énorme et vain : la grosse grappe de jarres sonores...[114] »

La bijoutierie (or et argent) reste aussi une activité lucrative importante. Les bijoutiers de Houmt Souk excellent ainsi dans l'ornement des bijoux en argent émaillé et dans la fabrication de bijoux comportant de l'or en filigrane[115]. La vannerie — le produit de base étant les jeunes feuilles de palmiers — était également une source de revenue importante, en particulier pour les personnes âgées. Aujourd'hui, les sacs, couffins (koffa) et chapeaux (appelés m'dhalla ou dhallala selon les villages) restent des articles vendus aussi bien aux habitants de l'île qu'aux touristes. Les artisans confectionnent également des cordages et des nasses de pêcheurs. La natterie (tissage du jonc) est également une activité pratiquée sur l'île, surtout dans la localité de Fatou, non loin de Houmt Souk. La broderie, pratiquée presque exclusivement par des femmes, et en particulier celle des habits traditionnels, fait vivre encore de nos jours un nombre important de familles.

Il est à noter que l'artisanat a pris des formes diverses et a connu un essor considérable avec le développement du tourisme et en particulier la fabrication de tapis.

[modifier] Infrastructures

Pont romain reliant Djerba au continent
Pont romain reliant Djerba au continent

L'île est reliée du côté sud au continent par un pont de 7,5 kilomètres de long[9] et environ 10 mètres de large. Le tracé de ce dernier remonte à l'époque romaine (appelé pons zita par les Romains) voire punique. Le pont fut submergé par la mer puis coupé vers 1551, lors des conflits entre Dragut et les Espagnols. Au cours des siècles, un gué appelé Trik Ejjmaal (Route des chameaux) et situé près des ruines de la chaussée romaine a servi au passage des chameliers. C'est sur l'emplacement de ce gué qu'a été établie en 1951 puis améliorée en 1959, et à plusieurs reprises par la suite, cette route qui rattache l'île au continent africain[116]. Cette voie fut goudronnée pour la première fois sous le protectorat français. Elle permet également d'acheminer de l'eau douce, l'île ne possédant que de rares sources localisées à Mahboubine, où l'eau est pompée à 80 mètres de profondeur, Oued Ezz'bib et Oualegh et quelques autres localités. En effet, deux pipelines parcourent la voie et assurent l'alimentation de l'île sans laquelle le tourisme serait impensable[117]. À Ajim, des bacs relient l'île au village de Jorf situé sur le continent.

Un aéroport international relie l'île à Tunis et à la majorité des grands aéroports d'Europe et du Moyen-Orient. Infrastructure initiée vers les années 1950 à la pointe nord-ouest de l'île, cet aéroport est agrandi en 1972 et voit sa capacité doublée en 1992 avec la mise en service d'une nouvelle gare de fret en 1986[118]. Plusieurs routes goudronnées sillonnent l'île. Une voie rapide menant à l'aéroport a été construite dans les années 2000. Un certain nombre de cliniques privées, en plus des hôpitaux publics, ont été construites au cours des années 1990 et les établissements scolaires se sont multipliés.

Le réseau de transports publics est plutôt limité sur l'île et, en l'absence de véhicule personnel, le taxi reste le meilleur moyen de locomotion. Il est également possible de louer des vélos et des vélo-moteurs, pratiques sur des distances limitées mais parfois dangereux compte tenu de l'étroitesse de la plupart des routes.

Un grand théâtre en plein air, construit en 2004 à Houmt Souk, abrite les grandes manifestations culturelles dont celles du festival annuel d'Ulysse. Plusieurs stades de football existent dont ceux de Houmt Souk et Midoun.

[modifier] Personnalités

[modifier] Notes et références

  1. abcd (fr) Recensement de 2004 (Institut national de la statistique)
  2. Il est aussi appelé baie de la « petite Syrte », la grande Syrte se trouvant le long des côtes de Libye
  3. René Stablo, Les Djerbiens. Une communauté arabo-berbère dans une île de l'Afrique française, éd. SAPI, Tunis, 1941, p. 9 et 11
  4. Salah-Eddine Tlatli, Djerba. L'île des Lotophages, éd. Cérès Productions, Tunis, 1967
  5. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 53
  6. Selon le parcours que l'on choisit : le plus court via Kairouan et Jorf, le plus long via Sfax, Médenine et Zarzis et via Kairouan, Médenine et El Kantara sans passer par Zarzis
  7. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., 1967, p. 19
  8. abcdefghijkl (fr) Présentation générale de l'île de Djerba (Association de sauvegarde de l'île de Djerba)
  9. abcdefgh (fr) Bassem Neifar, « Jerba. Les mutations récentes d’un système insulaire », Mappemonde, n°77, janvier 2005
  10. abc Salah-Eddine Tlatli, op. cit.
  11. Emmanuel Grevin, Djerba. L'île heureuse et le Sud tunisien, éd. Stock, Paris, 1937
  12. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 26
  13. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 3 et 7
  14. Victor Bérard, Les navigations d'Ulysse, tome IV, éd. Librairie Armand Colin, Paris, 1929
  15. Lucien Bertholon, « Exploration anthropologique de l'île de Gerba », L'Anthropologie, t. VIII, 1897
  16. Stéphane Gsell, Histoire ancienne de l'Afrique du Nord, éd. Hachette, Paris, 1913-1929
  17. ab Salem Ben Yagoub, Histoire de l'île de Djerba, éd. Jouini, Tunis, 1986
  18. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 51
  19. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 52
  20. (fr) Image du mausolée de Bourgou (Photos de Djerba)
  21. abcd Jeannine Berrebi, Les mosquées de Djerba, éd. Simpact, Tunis, 1995
  22. Mgr Anatole Toulotte, Géographie de l'Afrique chrétienne proconsulaire, Paris, 1892, pp. 353 et 380
  23. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 53
  24. Ibn Khaldoun parle largement du kharidjisme à Djerba dans son Histoire des Berbères et des dynasties musulmanes de l'Afrique septentrionale.
  25. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 69
  26. Éternelle Djerba, éd. Association de sauvegarde de l'île de Djerba et STAG, Tunis, 1998, p. 60
  27. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 72
  28. Éternelle Djerba, p. 74
  29. ab Éternelle Djerba, p. 68
  30. abcdefghijk (fr) Élise Bernard, « Djerba, tourisme international et nouvelles logiques migratoires », Revue européenne des migrations internationales, vol. 18, n°1, 2002
  31. Éternelle Djerba, p. 51
  32. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 82
  33. Henri Gault et Christian Millau, La Tunisie, éd. Imprimerie Molière, Lyon, 1968
  34. Éternelle Djerba, p. 47
  35. ab (fr) « Le conservatoire du patrimoine djerbien. Le menzel djerbien », Yatou TV, France 3 Corse
  36. René Stablo, op. cit., p. 114
  37. Ce genre de poteries était déjà utilisé par les Romains pour l'exportation de l'huile d'olive de Djerba vers Rome.
  38. abc Éternelle Djerba, p. 48
  39. Les personnes aisées construisaient des feskia destinées à l'usage des pauvres (ess'bil). Des feskia et des majen étaient aussi construits dans les mosquées et les zaouïas et des cordes étaient portées en offrande afin de permettre aux pauvres et aux personnes de passage d'accéder à l'eau potable.
  40. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p.34
  41. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., pp. 69-70
  42. Ainsi l'olivier se dit tazemmourt, le palmier taghla, la vigne tizimourin, le figuier tametchif, l'orge tamzin, etc.
  43. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 41
  44. ab Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 42
  45. Ces Djerbiens noirs sont en grande partie les descendants d'anciens esclaves et portent généralement le nom des familles auxquelles appartenaient leurs ancêtres. Les mariages entre noirs et blancs étaient rarissimes et restent encore rares même s'ils sont de plus en plus acceptés.
  46. Cette communauté possède ses propres traditions (mariages traditionnels, célébration de la Achoura, etc.), les hommes pratiquant principalement, par le passé, les métiers de boucher et de marchand de fruits et légumes.
  47. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 46
  48. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 39
  49. Salah-Eddine Tlatli citant Lucien Bertholon, op. cit., p. 43
  50. ab Éternelle Djerba, p. 41
  51. René Stablo, op. cit., p. 105
  52. Salem Trabelsi, « Voyage au cœur des civilisations », La Presse Magazine, n°920, 5 juin 2005, p. 5
  53. (fr) Site officiel du parc Djerba Explore
  54. Le bassin accueillant 400 spécimens ramenés de Madagascar et d'Afrique du Sud s'étend sur 20 000 m².
  55. Ce même instrument existe ailleurs en Tunisie mais il est en général de dimensions plus réduites que le tabl djerbien.
  56. René Stablo, op. cit., pp. 16-20
  57. ab (fr) Ibadites de Djerba : l'autre islam tunisien, film de Agnès De Féo, 2007
  58. René Stablo, op. cit., pp. 14-16
  59. ab Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 153
  60. ab Salah-Eddine Tlatli, op. cit., pp. 42-43
  61. Éternelle Djerba, p. 78
  62. Éternelle Djerba, p. 42
  63. Le nom de cette herbe varie selon la localité et appartient à la famille de l'ail. elle pousse à l'état naturel au printemps et se voit vendue au bord des routes principalement par les enfants.
  64. Certaines croyances sont moins vivaces comme le caractère néfaste du mercredi. De même, compte tenu de l'amélioration considérable du niveau de vie, il y a de moins en moins de pauvres et la tradition des moussem est entrain de disparaître.
  65. Jusqu'aux années 1950-1960, on entendait encore parler de personnes qui auraient disparu pendant un certain nombre de jours à la suite de l'apparition d'une khiala.
  66. Ces croyances restent vivaces de nos jours.
  67. René Stablo, op. cit., p. 105
  68. René Stablo, op. cit., pp. 29-30
  69. Enormément utilisés tout au long du mariage, des oeufs durs colorés étant notamment envoyés aux connaissances et amis pour annoncer le mariage
  70. Pour l'importance de la zammita dans le menu djerbien, voir Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 175
  71. Plat constitué principalement d'orge grillé, de fenugrec, de graines d'anis et d'épices
  72. Plat préparé à base de sauce tomate avec de la viande, des oignons, des pommes de terre, de la courge, des pois chiches et des raisins secs
  73. Le beskri est un habit traditionnel en coton tissé à la main et brodé de soie naturelle et de fil d'argent doré. Il est généralement de couleur bleu-marine dans la zone de Midoun et bordeau dans celle de Houmt Souk. Son coût peut facilement dépasser 500 dinars tunisiens.
  74. ab René Stablo, op. cit., pp. 25-27
  75. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 177
  76. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 178
  77. René Stablo, op. cit., pp. 80-83
  78. Première nuit que les jeunes mariés passent ensemble
  79. La mariée entre dans sa chambre à coucher et pousse la porte pour empêcher le marié d'y entrer.
  80. Ces bijoux couvrent sa tête, sa poitrine, ses mains et ses avant-bras et s'accompagnent d'un khoulkhal (gros bracelet) aux chevilles.
  81. Le bundi est un grand foulard de couleur turquoise ou bleu ciel d'un côté et rose de l'autre et brodé de fil d'argent.
  82. Durant longtemps, le métier de bijoutier n'était exercé que par les habitants juifs de l'île. Il est à noter qu'on trouve des bijoux identiques aux bijoux djerbiens au Yémen.
  83. Le mariage endogame a été pendant des siècles le plus commun sur l'île et le reste toujours dans les campagnes.
  84. Cette tradition est restée intacte et, pendant tous les mois du ramadan, les tengam — plus exclusivement des noirs — sillonent les villages pour réveiller les gens pour le dernier repas avant le début du jeûne. Ce personnage existe dans d'autres régions de la Tunisie où il est appelé bout'bila alors qu'en Égypte, il est appelé messaharati.
  85. Entre les années 1960 et 1990, le boussadia est devenu une attraction plus touristique que populaire, mais il redevient populaire et réapparait de plus en plus devant les maisons.
  86. La partie la plus jeune et la plus souple est utilisée pour les chapeaux traditionnels féminins qui peuvent atteindre des prix élevés pour le pouvoir d'achat local. Par ailleurs, dans certains villages comme Guellala, ces chapeaux sont portés même le soir et peuvent être protégés par un foulard contre l'humidité nocturne. Les palmes permettent également de confectionner d'autres articles comme les couffins et les cartables.
  87. On superpose deux parties de palmes vertes avec lesquelles on balaie les sufaces en maçonnerie.
  88. Il se joue particulièrement pendant la saison du pélerinage à La Mecque.
  89. Éternelle Djerba, pp. 33-36
  90. abc Éternelle Djerba, p. 40
  91. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 11
  92. René Stablo, op. cit., p. 65
  93. René Stablo, op. cit., pp. 85-86
  94. Éternelle Djerba, p. 75
  95. Salah-Eddine Tlatli, op. cit. p. 19
  96. Il est ouvert au trafic civil en 1970 mais existe déjà sous le protectorat français comme aéroport militaire et a été constamment agrandi depuis.
  97. L'île ne possédait qu'une soixantaine de kilomètres goudronnés avant 1960.
  98. Les r'tab, lemci et matata sont des variétés appréciées par les Djerbiens et consommées principalement en saison alors que le temri est conservé et consommé tout au long de l'année.
  99. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 98
  100. Quand ses moyens ne lui permettaient pas de consommer du café pur, il le mélangeait avec des pois chiches ou de l'orge grillés, l'écorce d'orange pilée servant comme arôme.
  101. René Stablo, op. cit., p. 68
  102. Éternelle Djerba, p. 28
  103. René Stablo, op. cit., p. 69
  104. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 91
  105. Les Djerbiens ont plusieurs noms pour désigner les différentes espèces de mulets : bouri, ouraghi et maazoul.
  106. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., pp. 111-112
  107. Éternelle Djerba, pp. 43-46
  108. Éternelle Djerba, p. 46
  109. René Stablo, op. cit., pp. 117-118
  110. Éternelle Djerba, p. 43
  111. (fr) « Le conservatoire du patrimoine djerbien. Le métier de tisserand », Yatou TV, France 3 Corse
  112. René Stablo, op. cit., pp. 112-113
  113. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., pp. 128-135
  114. Georges Duhamel, Le Prince Jaffar, éd. Mercure de France, Paris, 1924, p. 91
  115. Salem Trabelsi, « Chaque bijou est une nouvelle vie », La Presse Magazine, n°920, 5 juin 2005, p. 5
  116. Salah-Eddine Tlatli, op. cit., p. 20
  117. 80 % de l'eau est destinée à la zone touristique contre seulement 20 % pour le reste de l'île.
  118. Éternelle Djerba, p. 73
  119. (fr) Fiche de Riadh Bouazizi (L'Équipe)
  120. (fr) Ridha Kéfi, « Meny Mazouz. L'homme dont dépend l'avenir de Sharon », Jeune Afrique, 30 mai 2004
  • (ca) Cet article est partiellement ou en totalité issu d’une traduction de l’article de Wikipédia en catalan intitulé « Gerba ».
  • (de) Cet article est partiellement ou en totalité issu d’une traduction de l’article de Wikipédia en allemand intitulé « Djerba ».

[modifier] Bibliographie

  • Salem Ben Yagoub, Histoire de l'île de Djerba, éd. Jouini, Tunis, 1986
  • Lucien Bertholon, « Exploration anthropologique de l'île de Gerba », L'Anthropologie, t. VIII, 1897
  • René Stablo, Les Djerbiens. Une communauté arabo-berbère dans une île de l'Afrique française, éd. SAPI, Tunis, 1941
  • Salah-Eddine Tlatli, Djerba. L'île des Lotophages, éd. Cérès Productions, Tunis, 1967

[modifier] Liens externes

commons:Accueil

Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur Djerba.