Réseau routier au Moyen-Âge

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En Europe, les chemins médiévaux sont les routes ayant existé du IXe siècle au XVe siècle et sont pour la plupart des voies préexistantes, romaines ou préromaines. Les cartes à notre disposition sont antérieures et postérieures. La carte de Peutinger est sans doute antérieurs à -109, année de construction de la Via Aemilia Scaura, qui n'y pas indiquée. La carte de Cassini date du XVIIIe siècle.

Sommaire

[modifier] Le déclin des voies romaines

Pour réaliser l’unification politique, Rome a créé un réseau interurbain à longue distance, surtout stratégique et administratif, reliant Rome aux autres villes romaines. Lyon est alors un important carrefour.

La voirie romaine, bien plus encore que nos voies modernes aux revêtements étanches, avait un besoin constant d’entretien, exécuté de gré ou de force[réf. nécessaire]. Faute d'entretien, la plupart de ces chaussées cessèrent rapidement d'être carrossables quoi qu’on ait pu dire de leur consistance. Même lorsqu’elles étaient en béton ou en vrai pavés, leur état se dégrada rapidement, car les fossés et le système d’écoulement des eaux n'étaient plus continuellement entretenus, sans parler des aqueducs et des ponts. Les seuls ouvrages qui ont bien résisté sont ceux fondés sur le roc. Sur les grands fleuves, il n'en reste plus de traces, même si l’on retrouve parfois encore des pieux de fondation lors de travaux dans leur lit. La plupart de ces ponts étaient en bois, comme ceux construits par César sur la Saône ou le Rhin, ou des ponts de bateaux comme à Arles.

[modifier] Les chaussées Brunehaut

Les chaussées Brunehaut, du nom d'une reine d’Austrasie de la fin du VIe siècle, sont des routes droites que l’on rencontre dans le nord de la France et la Belgique.

Selon la légende, ces chaussées seraient dues au diable, ou encore Odin (en pays germanique) ou encore la main miraculeuse de l’impératrice sainte Hélène (pour les Anglais).

Jean d’Outremeuse écrit en 1398 : « en l’an 526, commença à faire la reine Brunehaut moult de merveille par nécromancie, et fit une chaussée toute pavée de pierres du royaume, d’Austrasie jusqu’au royaume de France et de Neustrie, jusqu’en Aquitaine et en Bourgogne... Et tout cela fut fait en une nuit, et le fit faire par les esprits malins, comme Virgile faisait en son temps. Cette chaussée sert toujours, nous la nommons chaussée Brunehaut ».

Si on porte sur une carte les routes très nombreuses qui portent depuis le Moyen Âge le nom de Brunehaut, il apparaît que toutes ces chaussées sont en pays de langue romane et les plus anciennes mentions se rencontrent en Artois et en Picardie. Or la reine Brunehaut n’a jamais régné sur ces provinces et c’est pourtant là que sa popularité semble la mieux établie.

Il faut en fait remonter à la chanson de geste Huon de Bordeaux composée vers la fin du XIIe siècle pour trouver que Brunehaut était selon le poète la mère de Jules César, le constructeur des voies romaines. Il n’y avait qu’un pas à franchir entre les voies romaines et les chaussées Brunehaut.[réf. nécessaire]

En tout cas on ne peut que rêver quand on considère l’extraordinaire étoile routière toujours bien visible autour de Bavay (où l’on a placé à juste titre la statue de Brunehaut) et aussi les gigantesques alignements, en pointillé, des chaussées Brunehaut, de Thérouanne à Arras puis à Saint-Quentin, Laon, Reims..., des environs de Boulogne-sur-Mer vers Saint-Just-en-Chaussée, et de Courtrai à Saint-Quentin, Soissons, Provins et Sens... Tout ceci correspond bien au fait que les voies romaines se sont particulièrement bien conservées dans le nord-est de la France à l’époque carolingienne jusqu’aux invasions normandes.

[modifier] Les chemins de pèlerinages

Chemins de pèlerinage contemporains vers Saint-Jacques-de-Compostelle
Chemins de pèlerinage contemporains vers Saint-Jacques-de-Compostelle

En 819, 823 et 830 Louis le Pieux (778-840) ordonne le rétablissement de relais pour ses envoyés et la réparation ou la reconstruction des ponts construits au temps de son père. Mais aucune organisation efficace n’est prévue et le trafic s’effectue avec des bêtes de somme ou des chars à bœufs.

Les pèlerins se dirigeant vers les grands sanctuaires comme Saint-Martin de Tours (VIe siècle), Saint-Gilles-sur-le-Rhône (XVe siècle) et Saint-Jacques-de-Compostelle (XIe siècle) ou vers des sanctuaires plus modestes empruntent les mêmes voies de communications que tous les autres voyageurs : marchands, artisans, religieux, gens d'armes, vagabonds, étudiants se rendant dans les universités (XIIIe siècle). Ils voyagent le plus souvent à pied ou à cheval sur des routes avec des gués, des bacs ou des ponts.

S'agissant de Compostelle, beaucoup de publications se réfèrent au Guide du pèlerin de Saint-Jacques-de-Compostelle, traduit en français sous ce titre en 1938 et édité en latin pour la première fois en 1882. Ce titre est trompeur car ce document (probablement l’œuvre d'Aimery Picaud de Parthenay-le-Vieux) n'a été diffusé qu'à quelques exemplaires et n'a pas pu être un guide des pèlerins comme cela est dit à tort. Il commence par ces mots « Quatre routes mènent à Saint-Jacques [...] » et les décrit sommairement par quelques sanctuaires : Saint-Gilles, Notre-Dame du Puy, Vézelay et Saint-Martin de Tours, avec des précisions pour l’itinéraire de Tours par Poitiers et Bordeaux, le seul qu’il ait sans doute pratiqué lui-même. Les chemins de Compostelle représentés par la carte ci-contre sont des créations contemporaines établies pour la France à partir de la fin du XIXe siècle et pour l'Europe à partir des années 1980 quand il a été question d'itinéraire culturel européen.

[modifier] Le développement des infrastructures urbaines

Aux XIe et XIIe siècles les invasions ont cessé, le climat est plus doux, il y a une expansion démographique, des défrichements et une division du travail réapparaît. Des villes antiques renaissent et de nouvelles sont créées. Ces villes doivent être en relation avec la campagne environnante. Ainsi l’attelage moderne du cheval (en file et avec collier d’épaule, connu en Chine au IIe siècle) et sa ferrure (inventée au IXe siècle) sont utilisés. Du fait de l’existence de riches prairies, de croisements et de sélections, des chevaux plus forts et plus résistants apparaissent (races percheronne et boulonnaise), la charge des charrettes peut augmenter.

Les villes comportent des rues plus ou moins entretenues : en 1186, Philippe II Auguste (1165-1223) ordonne au prévôt de faire paver les principales rues de Paris (les dalles romaines subsistantes avaient depuis longtemps disparu sous une épaisse couche de boue). On connaît l’anecdote fameuse rapportée par les Chroniques de Saint-Denis : « Un jour que le roi allait par son palais [...] il s’accouda à une des fenêtres pour prendre l’air. Or il arriva que précisément des charrettes qui passaient sur les chemins remuèrent et touillèrent tant la boue et les immondices dont la voie était pleine qu’une puanteur à peine supportable en sortit, monta jusqu’à la fenêtre où était accoudé le roi. Quand il sentit cette odeur affreuse, il quitta la fenêtre, le cœur défaillant. » Cette aventure aurait déterminé Philippe Auguste à donner l’ordre aux bourgeois de Paris de « paver toutes les rues de grès épais et robuste ». Mais la ville ne fut pas pavée en un jour. Cela prit quelque quatre-vingt-dix ans.

Des villes possèdent aussi quelques ponts le plus souvent en bois et parfois en pierre (par exemple en Albi construit un pont vers 1035 ; à Londres la Tour protège un pont qui est en pierre à partir du XIIe siècle ; à Avignon, un pont est construit de 1177 à 1188, de même qu'à Pont-Saint-Esprit de 1265 à 1309, qu'à Cahors en 1308 et qu'à Céret en 1339). Les moyens financiers nécessaires pour l’édification de ces ponts sont fournis par une fondation. Leur entretien est assuré par des « œuvres du pont » qui tirent leurs revenus des péages. Quant aux liaisons à grandes distances, pour se substituer aux routes, des canaux, comme le Naviglio Grande dans le Milanais au XIIe siècle, sont creusés. Au XIVe siècle les galères génoises et vénitiennes vont jusqu’à Bruges et Londres, ce qui entraîne le déclin des foires de Champagne.

[modifier] Les premières cartes routières

L’emploi du mot atlas pour désigner un recueil de cartes géographiques date de l’édition de l’œuvre de Mercator vers 1585. En fait on peut faire partir seulement de la fin du XVIe siècle l'ère des géographes modernes. Antérieurement quelques échantillons de cartes antérieures commencent à faire apparaître des chemins.

C’est peut-être la table de Peutinger, édition moderne d’une carte ancienne (comme la Géographie de Ptolémée qui parurent à la même époque) qui donna l’idée de ces itinéraires cartographiés pour les pèlerins ou les voyageurs. Ce besoin se fit particulièrement sentir avant 1500, à l’approche de l’année sainte, et donna lieu à la fameuse carte des chemins de Rome d’Erhard Etzlaub, publiée à Nuremberg en 1492. On y distingue nettement en pointillé tous les itinéraires pour gagner Rome à partir de l’Allemagne du Nord et du Danemark, en particulier par le Saint-Gothard, mais en notant qu’aucun passage n’était conseillé par le Grand-Saint-Bernard.

Si Etzlaub peut ainsi être considéré comme le pionnier des cartes routières, il eut immédiatement un émule en la personne de Martin Waldseemüller, de Saint-Dié, qui participait à l’édition de cartes de Ptolémée modernisées, et qui publia à Strasbourg en 1520 une carte itinéraire de l’Europe dont la France occupe normalement le centre. Comme la précédente, elle est représentée le nord en bas, mais il est facile de s’y reconnaître, et d’y trouver l’axe fondamental de Paris à Orléans via Montlhéry et Étampes, d’où divergent ensuite les routes vers Lyon et vers Bordeaux en évitant le Massif central. Dans le Midi aussi on distinguera l’axe languedocien, bifurquant à son tour vers le Roussillon et la Catalogne et de l’autre côté vers l’Aquitaine par un trajet qui suit, jusqu’à l’Espagne, le piémont pyrénéen.

Un peu plus tard est publiée la plus ancienne carte de Savoie, œuvre de Gilles Boileau de Bouillon, datée de 1556 et publiée à Anvers. Elle recouvre largement aussi la Franche-Comté comme terre d’Empire, jusqu’à l’Alsace.

Il convient enfin de citer la carte de France d'Oronce Finé, mathématicien du roi, professeur au Collège de France, publiée à Paris en 1525 et dont on ne connaît plus aujourd’hui que deux épreuves dont celle de 1553 conservée à la Bibliothèque nationale de France. On la considère en général comme la plus ancienne carte de France produite en France par un Français, bien que d’autres préfèrent réserver cette qualité à la carte de Jean Jolivet publiée en 1570 et certainement bien meilleure. On ignore comment elles ont été établies, en particulier celle d'Oronce Finé qui a fait divers emprunts à des cartes d’Europe déjà parues avec leurs erreurs, ce qui lui donne une physionomie curieuse. Il a multiplié aussi les taupinières pour la figuration du relief, excès dans lequel Jolivet ne tombera pas. Ni l’un, ni l’autre n’ont figuré les routes sur leurs cartes, mais seulement les ponts sur les fleuves et les principales rivières. C’est dire la prééminence qui fut longtemps celle des ponts par rapport aux chaussées, d’autant plus que les rivières étaient elles-mêmes les principaux « chemins qui marchent et qui portent là où on veut aller ».

[modifier] Bibliographie

Sur les pèlerinages et chemins de pèlerinage :

  • Denise Péricard-Méa, Compostelle et cultes de saint Jacques au Moyen Âge, Paris, PUF, 2002, (ISBN 9-782130-510826).
  • Bernard Gicquel, La Légende de Compostelle, Le Livre de Jacques, Paris, Tallandier, 2003, (ISBN 9-782847-340297).
  • Denise Péricard-Méa, Brève histoire du pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle, Gavaudun, PUF, 2003, (ISBN 9-782910-685331).
  • Denise Péricard-Méa, Les Routes de Compostelle, Paris, Gisserot, 2002,réd. 2006, (ISBN 9 782877 476720).
  • Louis Mollaret et Denise Péricard-Méa, Dictionnaire de saint Jacques et Compostelle, Paris, Gisserot, 2006, (ISBN 9 782877 478847).
  • Ferdinand Soler, Guide pratique du Chemin de Saint-Jacques de Compostelle (camino francés) ISBN 2-84454-334-0
  • Christian Champion , manger et dormir sur le camino francés 2007 ISBN 2-9528559-0-0
  • José María Anguita. Le Chemin de Saint-Jacques. Guide pratique du pèlerin. (2004) ISBN 978-84-241-0406-1. Disponible en français.
  • Ángel González. El Camino de Santiago por la Costa o Camino Norte. (2004) ISBN 84-241-0479-X.