Jules Saliège

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Cardinal

Jules Saliège
de l’Église catholique
[[Image:|250px|Image de Jules Saliège]]
cardinal-prêtre
de S. Pudenziana
Blason de Jules Saliège
« À l'ombre de la Croix »
Naissance 24 février 1870
Mauriac (France)
Ordination
sacerdotale
21 septembre 1895
Consécration
épiscopale
6 janvier 1926 par
Mgr Paul Lecoeur
Évêque Évêque de Gap
Archevêque de Toulouse
Créé
cardinal
18 février 1946 par le
pape Pie XII
Décès 4 novembre 1956
à Toulouse (France)
 
Cardinal
Titre cardinalice
Collège cardinalice · Consistoire
Tous les cardinaux
(en) Fiche

Projet Catholicisme · Instructions

Jules-Géraud Saliège, né à Mauriac au lieu-dit Crouzit Haut le 24 février 1870 et mort à Toulouse le 4 novembre 1956 est un homme d'Église, évêque, puis archevêque de Toulouse et cardinal, particulièrement connu pour ses prises de position pendant l'Occupation, où il dénonça les déportations de Juifs, le STO ou les exactions nazies. Sans avoir jamais rejoint non plus la Résistance proprement dite, il fut reconnu compagnon de la Libération par le général de Gaulle. Il est Juste des Nations. Sa devise : « À l'ombre de la Croix. »

Sommaire

[modifier] Biographie

Prêtre, il devient supérieur du Grand Séminaire de Saint-Flour en 1897, fonction qu'il abandonne en 1914 pour devenir aumônier militaire. À la fin de la guerre, il est nommé évêque de Gap, puis devient archevêque de Toulouse en 1928. Il est élu mainteneur de l'Académie des Jeux floraux en 1932.

Dès le 12 avril 1933, donc peu de temps après l'arrivée d'Hitler à la chancellerie en janvier de la même année, il prend la parole dans une réunion au Théâtre du Capitole pour la défense des juifs menacés par la montée du nazisme.[citation nécessaire]

Le 19 février 1939, avec son ami le nonce apostolique Bruno de Solages (1895-1983), il rappelle avec fermeté que l'Église condamne le racisme, erreur dont le pape Pie XI a montré en 1937 dans l'encyclique Mit brennender Sorge qu'elle est fondamentalement contraire aux enseignements de l'Évangile.

En 1940, comme la grande majorité de la population, il affirme son respect pour le Régime de Vichy. Mais il s'agit plutôt de maréchalisme que de pétainisme, selon la distinction établie par Stanley Hoffmann. Selon l'historien Germain Sicard, il était « hanté par la déchristianisation..., la baisse de la moralité, la recherche du plaisir et de la vie facile. »

Dès mars 1941, Mgr Saliège agit pour aider matériellement les détenus (majoritairement étrangers) des camps de de Noé et de Récébédou.

Le 23 août 1942, il ordonne la lecture dans toutes les paroisses de son diocèse d'une lettre pastorale intitulée Et clamor Jerusalem ascendit.

«  LETTRE DE S.E. MONSEIGNEUR SALIEGE ARCHEVEQUE DE TOULOUSE SUR LA PERSONNE HUMAINE
Mes très chers Frères,
Il y a une morale chrétienne, il y a une morale humaine qui impose des devoirs et reconnaît des droits. Ces devoirs et ces droits, tiennent à la nature de l’homme. Ils viennent de Dieu. On peut les violer. Il n’est au pouvoir d’aucun mortel de les supprimer.
Que des enfants, des femmes, des hommes, des pères et des mères soient traités comme un vil troupeau, que les membres d’une même famille soient séparés les uns des autres et embarqués pour une destination inconnue, il était réservé à notre temps de voir ce triste spectacle.
Pourquoi le droit d’asile dans nos églises n’existe-t’il plus ?
Pourquoi sommes-nous des vaincus ?
Seigneur ayez pitié de nous.
Notre-Dame, priez pour la France.

Dans notre diocèse, des scènes d’épouvante ont eu lieu dans les camps de Noé et de Récébédou. Les Juifs sont des hommes, les Juives sont des femmes. Tout n’est pas permis contre eux, contre ces hommes, contre ces femmes, contre ces pères et mères de famille. Ils font partie du genre humain. Ils sont nos Frères comme tant d’autres. Un chrétien ne peut l’oublier.
France, patrie bien aimée France qui porte dans la conscience de tous tes enfants la tradition du respect de la personne humaine. France chevaleresque et généreuse, je n’en doute pas, tu n’es pas responsable de ces horreurs.
Recevez mes chers Frères, l’assurance de mon respectueux dévouement.
Jules-Géraud Saliège
Archevêque de Toulouse
13 Août 1942

A lire dimanche prochain, sans commentaire.  »

Pierre Laval, sous prétexte que les Allemands risquent de remettre en cause l'autonomie relative de la zone non occupée, fait interdire sa publication par arrêté préfectoral. Mais la lecture de cette lettre continue d'être faite dans d'autres paroisses de France, puis diffusée par le Vatican et sur les ondes de la B.B.C. à Londres (le 31 Août avec la voix de Maurice Schumann et le 9 Septembre avec celle de Jean Marin). Les Français pouvaient relire le texte dans La Semaine Catholique. Le chef du gouvernement convoque le secrétaire de la nonciature du Vatican pour demander, mais en vain, la mise à la retraite de Mgr Saliège.

Avec son neveu Mgr Bruno de Solages, l'archevêque contribue à protéger de nombreux juifs et proscrits, les place dans des lieux sûrs aux alentours de Toulouse, au point que la Gestapo décide de l'arrêter le 9 juin 1944. Il ne doit alors son salut qu'à son état de santé, une paralysie du bulbe rachidien, et à son âge, ainsi qu'à la protestation vigoureuse de la religieuse qui se trouvait auprès de lui. L'officer allemand chargé de son arrestation se retira en bafouillant qu'il allait demander de nouvelles instructions, et ne revint jamais. D'après le témoignage d'un résistant, Charles d'Aragon, Mgr Saliège manifesta du dépit de voir s'éloigner de lui la palme du martyre.

Mgr de Solages n'hésitait pas dès 1940 à proclamer qu'il préférait une France victorieuse même conduite par Léon Blum et les Francs-Maçons à une France vaincue gouvernée par le Maréchal Pétain.[réf. nécessaire]

Unique évêque fait compagnon de la Libération par le général de Gaulle, Mgr Saliège a toujours été assez isolé dans un épiscopat français resté jusqu'au bout largement pétainiste. Ainsi, seuls 5 évêques sur plus d'une centaine ont protesté publiquement contre les rafles antisémites (dont, en des termes plus timides que Saliège, le cardinal Gerlier, primat des Gaules, ou Mgr Delay à Marseille) ou encore, plus tard, au printemps 1943, contre l'institution du Service du Travail Obligatoire. Plusieurs des pairs de Saliège, comme Mgr Auvity à Mende, bloquèrent même la diffusion de sa lettre pastorale dans leur diocèse, en accord avec le gouvernement.

Toutefois, son attitude d'opposition aux persécutions racistes trouvait aussi des échos chez beaucoup de chrétiens conscients que le christianisme était radicalement opposé au nazisme. Ainsi, son voisin Mgr Pierre-Marie Théas à Montauban fit lui aussi diffuser des instructions à lire dans toutes ses paroisses pour condamner l'antisémitisme. Mgr Delay, évêque de Marseille, sera récompensé par la médaille des Justes des Nations.

D'autres prélats agirent surtout par motivation humaniste et devoir de charité, sans désirer s'opposer pour autant au gouvernement de Vichy ni à l'occupant. Très pétainiste et hostile à la Résistance durant toute l'Occupation, Mgr Piguet, évêque de Clermont-Ferrand, n'en sera pas moins déporté à Dachau à l'été 1944, et sera reconnu Juste des Nations à titre posthume en 2001 pour son action charitable en faveur des juifs pourchassés.

En 1943, un certain nombre de prêtres de l'Eglise catholique s'efforcent de remédier aux effets de la dénaturalisation des juifs français en fournissant de faux certificats de baptême. Mobilisant diverses congrégations et réseaux, l'aide apporté s'amplifia, dans le diocèse de Toulouse comme en bien d'autres endroits : filières d'évasion, passages en Espagne par des circuits pyrénéens, documents d'identité, cartes de textile, faux certificats de baptême, camouflage des jeunes dans les écoles catholiques et les couvents. A Montauban, ce sont les Bénédictines de Mas-Grenier, les soeurs d'Auvillar, de l'Institut Jeanne d'Arc, l'Institut Familial, le Petit séminaire, le Refuge. Le capucin Dom Marie-Benoît (Pierre Péteul) réussit à en sauver environ 4 000.

Par ailleurs, Mgr Saliège prend plusieurs fois positions pour condamner les actes d'agression contre les forces d'occupation allemandes, considérant, selon la tradition de l'Église, que l'Armistice qui a été signé doit être respecté, et que par ailleurs, les populations civiles ne doivent pas intervenir dans les guerres. Il s'éleva ainsi contre les injustices et les violences commises à la fin de la guerre par les partisans:
"On tue l'homme qui déplaît. On tue l'homme qui n'a pas des opinions conformes. On tue sans jugement; on tue avec jugement. On tue en dénonçant; on tue en calomniant. On tue en jetant dans la rue, par la radio, par la presse des paroles de haine (...) Tous les terroristes sont inhumains et condamnés par le monde chrétien."

Après la Libération, Mgr Saliège devient cardinal lors du consistoire du 18 février 1946, et compagnon de la Libération (décret du 7 août 1945).

En son honneur plusieurs lieux de la région toulousaine portent son nom. On recense ainsi un square à Toulouse, près de la cathédrale Saint-Étienne, un lycée post-baccalauréat (Prépas et BTS) à Balma, un espace culturel à Baziège.

[modifier] Bibliographie

  • Un évêque français sous l'occupation, extraits des messages de S. Exc. Mgr Saliège, archevêque de Toulouse, Éditions ouvrières, Paris, 1945.
  • Jean-Louis Clément, Monseigneur Saliège, archevêque de Toulouse 1929-1956, Beauchesne, 1994.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Lien externe