Joachim Vilate

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Joachim Vilate, également connu sous le nom de Sempronius-Gracchus Vilate, né le 9 octobre 1767 à Ahun (Creuse), guillotiné le 7 mai 1795 à Paris, sur la place de Grève, est un révolutionnaire français.

Sommaire

[modifier] Vie

Issu d'une famille bourgeoise de la Haute-Marche, Vilate est le fils de François Vilate, chirurgien-juré à Ahun, et de Marie Decourteix (ou de Courteix)[1]. Après des études au collège d'Eymoutiers[2], il fait deux années de philosophie à l'université de Bourges[3]. Après la mort de son père, appartenant à une famille nombreuse[4], il s'installe à Blaudeix chez l'un de ses oncles paternels[5], où il passe l'année 1789, avant d'être appelé par le principal du collège de Guéret[6], où il enseigne dans l'une des classes inférieures. Après une année au séminaire de Limoges[7], il est nommé par les administrateurs du département professeur de seconde dans le collège royal de la ville[8] en 1791, avant d'enseigner la rhétorique à Saint-Gaultier (Indre)[9]. Vicaire dans la ville voisine d'Argenton, il prête serment, conformément aux dispositions de la constitution civile du clergé, le 1er janvier 1792[10].

Le 26 mars suivant, il arrive à Paris pour étudier la médecine et s'installe rue du Bacq. Militant dans son quartier et sa section, il fréquente le club des Jacobins et participe à la journée du 10 août 1792. Rebaptisé Sempronius-Gracchus Vilate (en référence à la famille romaine des Gracques), il propose à la convention nationale un Plan d'éducation républicaine, pour lequel les députés décrètent une mention honorable le 10 décembre 1792. Employé quelque temps dans les bureaux du comité de salut public, il accompagne en qualité de secrétaire les représentants Ysabeau et Neveu en mission dans les Hautes et les Basses-Pyrénées le 10 mars 1793. Après la journée du 31 mai, il est envoyé en mission à Bordeaux, afin d'y sonder l'opinion publique pour le compte du comité de salut public.

Remarqué, grâce à la qualité de ses rapports, par plusieurs membres du comité de salut public, en particulier Barère, il est logé aux Tuileries, dans le pavillon de Flore, à son retour à Paris[11]. Surtout, il est nommé, le 28 septembre 1793, au Tribunal révolutionnaire, où il siège très souvent, mais dans aucun des grands procès[12]. Il est, avec le peintre François Topino-Lebrun, le plus jeune juré. Participant aux soirées organisées par Barère dans sa maison de plaisance de Clichy[13], il passe pour son espion, mais aussi pour celui de Robespierre[14],[15].

Le 3 thermidor an II (21 juillet 1794), il est arrêté à dix heures du soir par Dossonville et des membres du comité révolutionnaire des Tuileries, sur ordre du comité de sûreté générale, suite à une dénonciation de Billaud-Varenne, et enfermé à la Force[16],[17]. Le 9-Thermidor (27 juillet 1794), vers les cinq heures du soir, la commune insurrectionnelle de Paris envoie trois administrateurs de police - Henry, Tanchon et Quenet[18] - libérer Lavalette, Boulanger et Vilate, qu'on pense rallier à la cause robespierriste, mais Dossonville et Dulac, agents du comité de sûreté générale, s'opposent à son élargissement[19].

Maintenu en prison comme « robespierriste » après le 9-Thermidor, il tente de sauver sa tête en rédigeant dans sa prison plusieurs écrits où il charge ses anciens amis, en particulier Robespierre et Barère[20],[21]. Certains considèrent qu'au moins les deux derniers des trois volumes des Causes secrètes de la Révolution du 9 au 10 thermidor sont peut-être apocryphes[22]; ils ont parfois été attribués à Pierre Choderlos de Laclos[23],[24]. En tout cas, ce revirement ne le sauve pas. Transféré au Luxembourg, il comparaît avec vingt-trois juges et jurés du tribunal révolutionnaire le 8 germinal an III (28 mars 1795). Condamné à mort, il est guillotiné, avec Fouquier-Tinville et quatorze autres co-accusés, le 18 floréal an III (7 mai 1795), vers onze heures du matin[25].

[modifier] Apparence physique

Joachim Vilate est décrit les « traits réguliers, le profil fin, la mise élégante, recherchée d'un muscadin, le masque sévère impénétrable »[26].

[modifier] Œuvres

[modifier] Sources principales

[modifier] Notes et références

  1. Ambroise Tardieu, Grand dictionnaire historique, généalogique et biographique de la Haute-Marche, Herment, 1894 (rééd. Lafitte, 1978, 430 pages, p. 421).
  2. Vilate fait partie des premiers élèves de ce collège, fondé seulement en 1778.
  3. Roland Narboux, L'Université de Bourges. À l'époque révolutionnaire, l'université de Bourges est en déclin. En 1789, la faculté de théologie ne comptait plus que deux professeurs. En 1792, il n'y avait plus que quatre élèves à la faculté de droit, la faculté de médecine était désertée, et il n'y avait plus aucun enseignement à la faculté des Arts.
  4. Il avait deux sœurs et cinq frères vivants au moment de la Révolution. L'aîné des Vilate, né en 1764 et baptisé lui aussi Joachim, est mort peu après sa naissance. Un second enfant, né le 15 août 1766, est mort avant la Révolution. Le quatrième, Marie, a vu le jour le 19 octobre 1768.
  5. Cet oncle, Joachim Vilate, né le 21 juillet 1743, était curé de Blaudeix.
  6. Suite à une donation d'Antoine Varillas (1624-1699), un collège est fondé par l'ordre des Barnabites. Le 2 novembre 1789, l'Ordre est supprimé, et la municipalité réclame la propriété du collège, qu'elle dispute à l'évêque. Voir le Dr Villard (maire de Guéret), Collège de Guéret,1699-1880, 1906, et Amédée Carriat, Dictionnaire bio-bibliographique des auteurs du pays creusois, Société des Sciences naturelles, archéologiques et Historiques de la Creuse
  7. D'autres personnalités de la Révolution française sont passées par le séminaire de Limoges, qu'il s'agisse de Léonard Gay-Vernon ou de François-Xavier Audouin.
  8. Ancien collège des Jésuites, dans ses locaux s'est installé le lycée Gay-Lussac.
  9. Henri Wallon, dans son Histoire du tribunal révolutionnaire de Paris, le décrit, pour sa part, comme professeur à Guerchy (Yonne), p. 99 et 428.
  10. Maurice Favone, Dans le sillage de Maximilien Robespierre, Joachim Vilate, reproduit, p. 20, le certificat de serment constitutionnel signé par le maire et les officiers municipaux d'Argenton le 3 janvier 1792.
  11. L'arrêté est signé de la main d'Hérault de Séchelles et de Barère.
  12. Pour se défendre, il explique ainsi dans la première brochure des Causes secrètes, p. 37, que, « depuis la loi du 22 prairial », il n'avait « siégé qu'un petit nombre de fois dans des affaires d'un petit nombre d'accusés, jamais dans aucune fournée. » Plus loin, p. 59, il parle de son « éloignement » après la « perte » de Camille Desmoulins, expliquant, p. 60 : « Je n'y ai paru que rarement et dans des occasions où le fauteuil n'était occupé que par un très petit nombre d'accusés. »
  13. Voir Louis Blanc, Histoire de la Révolution française, Paris, Furne & Cie, 1861, tome 11, p. 161-163.
  14. Maurice Favone, Dans le sillage de Maximilien Robespierre, Joachim Vilate, p. 72.
  15. Robert Launay, Barère de Vieuzac (l'Anacréon de la guillotine), Paris, Tallandier, 1929, p. 207.
  16. Maurice Favone, Dans le sillage de Maximilien Robespierre, Joachim Vilate, p. 86.
  17. Charles Joseph d'Héricault, La Révolution de thermidor, Robespierre et le Comité de salut public, 1878, p. 331.
  18. Pierre Henry, receveur des loteries, 48 ans, né à Riez (Var), rue Saint-Antoine, membre de la section de l'Indivisibilité. Ponce Tanchon, graveur né à Bourges, membre de la section de la cité, demeurant au 42 cloître Notre-Dame, 32 ans. Jean-Marie Quenet, marchand de bois, membre du Conseil général de la Commune de Paris, né à Lyon en 1749 ou 1753, demeurant 18 rue de la Mortellerie. Ces trois administrateurs ont été arrêtés, interrogés et guillotinés le 11 thermidor an II. Voir Émile Campardon, Le Tribunal révolutionnaire de Paris : ouvrage composé d'après les documents originaux conservés aux archives de l'Empire suivi de la liste complète des personnes qui ont comparu devant la Tribunal et enrichi d'une gravure et de Fac-simile, Paris, H. Plon, 1866, tome 1, pièces justificatives, p. 545-549.
  19. Émile Campardon, Histoire du Tribunal révolutionnaire de Paris 17 mars 1793-31 mai 1795, Paris, Poulet-Malassis, 1862, p. 136.
  20. Le premier volume des Causes secrètes est daté « de la Force, ce 15 vendémiaire, l'an troisième de la République une et indvisible ». La Continuation, de son côté, est datée « du Luxembourg, ce 25 brumaire, l'an 3 de la République une et indivisible ». Enfin, le titre du troisième volume — Les Mystères de la mère de Dieu dévoilés —, qui est daté du Luxembourg le 8 pluviôse an III, fait référence à Catherine Théot.
  21. Gracchus Babeuf se sert de ce texte pour son pamphlet Du système de dépopulation ou La vie et les crimes de Carrier, 1794, paragraphe IV, pages 24-25
  22. Michel Delon, professeur à l'université Paris X Nanterre, « La bibliothèque est en feu. Rêveries révolutionnaires autour du livre », in Bulletin des Bibliothèques de France, dossier « 1789-1989 », Paris, tome 34, n° 2-3, 1989
  23. Voir la notice de la Bibliothèque nationale de France
  24. Joseph Marie Quérard, dans Les supercheries littéraires dévoilées. Galérie des auteurs apocryphes, supposés, déguisés, plagiaires, et des éditeurs infidèles de la littérature française pendant les quatre derniers siècles, Paris, L'éditeur, 1852, tome 4, p. 618, rapporte : « On assure que cet ouvrage [Causes secrètes de la révolution du 9 au 10 thermidor] a été rédigé par Choderlos de Laclos ».
  25. Henri Wallon, Histoire du tribunal révolutionnaire de Paris. Avec le journal des actes, 1882, tome 6, chapitre LIX. Voir [1]
  26. Bulletin trimestriel de la Société archéologique de Touraine, Tours, Société archéologique de Touraine, 1991, p. 239.
  27. Selon Maurice Favone, Dans le sillage de Maximilien Robespierre, Joachim Vilate, Paris, 1938, p. 56, cette adresse est à dater du 16 septembre 1793.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Bibliographie

Biographie de référence 
  • Maurice Favone, Dans le sillage de Maximilien Robespierre, Joachim Vilate, Paris, Marcel Rivière, 1938, 117 pages
Ouvrage historique 
  • Alphonse Dunoyer, Deux jurés du Tribunal révolutionnaire. Vilate « Le Petit Maître », Trinchard « L'Homme de la Nature », Paris, Perrin, 1909, 332 pages
Recueil de documents 
  • François Barrière (1786-1866), Mémoires sur les journées révolutionnaires et les coups d'État, Paris, Firmin-Didot, Bibliothèque des mémoires relatifs à l'histoire de France pendant le XVIIIe siècle, 1875, introduction, notice et notes d'Adolphe Mathurin de Lescure (1833-1892), 2 volumes
Travaux d'érudition 
  • Dr Aumasson, « Dans l'ombre de Robespierre et de Fouquier-Tinville, un ahunois Joachim Vilate, né le 9 octobre 1767, guillotiné le 7 mai 1795 », Bulletin du Cercle généalogique et héraldique de la Marche et du Limousin, 1981, volume 3, n° 11-12, p. 46-51
  • Amédée Carriat, « Un Ahunois dans la Révolution : Joachim Vilate (1767-1795) », Mémoires de la Société des sciences naturelles et archéologiques de la Creuse, 1989, tome 43, fascicule 3, p. 623-626

[modifier] Liens externes