Ausone

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Monument à Ausone à Milan.
Monument à Ausone à Milan.

Ausone ou Decius ou Decimus Magnus Ausonius, né à Bazas vers l'an 309 et mort vers 394 dans une villa où il s'était retiré près de Bordeaux, était un poète de langue latine. Son père, Jules Ausone (287-377), était médecin, préfet d'Illyrie et archiatre de Valentinien Ier. Sa mère Atttusa Lucana Sabina était la fille du sénateur Attusius Lucanacus Talisius. Ausone est un poète et lettré latin de Gaule, mais la littérature française le tient pour le premier représentant d'une longue tradition: celle des lettres latines de France et de l'usage du Latin moderne dans ce pays jusqu'à nos jours.

Sommaire

[modifier] Biographie

Il fait ses études d'abord à Bordeaux qui s'appelait alors Burdigala, puis à Toulouse (Tolosa) sous la direction de son grand oncle paternel Aemilius Magnus Arborius d'origine éduenne, avocat et précepteur de la famille impériale qui résidait dans cette ville. Revenu à Bordeaux, il pratique le droit quelque temps, mais préfère ensuite se tourner vers l'enseignement d'abord de la grammaire, puis de la rhétorique. Il eut pour élève Paulin de Nole (353-431) avec qui il entretint une longue correspondance, sa vie durant. Ausone, parlant des professeurs de Bordeaux, nous apprend qu'il y avait des philologues, des grammairiens et des rhéteurs, enseignant en latin et en grec.

Il a 30 ans environ, lorsque l'empereur Valentinien Ier l'appelle comme précepteur auprès de son fils Gratien, qui deviendra empereur à son tour en 367. Gratien lui vouera toute sa vie un immense respect. Ausone connaît une belle carrière : d'abord comte du palais, puis questeur, préfet du prétoire, consul (379) et enfin proconsul d'Asie.

Il est préfet pour l'Italie et l'Afrique avant 377 puis en 377-378 (peut-être plus longtemps), préfet des Gaules.

Il se retire de la cour à la mort de Gratien, en 383, et s'en retourne à Bordeaux, partageant sa vie entre ses amis, la poésie et les plaisirs champêtres : c'est là qu'il composa la plupart de ses ouvrages. Sa tombe serait dans l'ermitage de Mortagne-sur-Gironde. On a de lui des épigrammes, des idylles, des églogues et des épîtres. Ses vers célèbrent souvent la table et surtout, le vin, le vin de Bordeaux dont le château Ausone prendra le nom, mais aussi les vins de Moselle et les vins d'Italie. Son chef d'œuvre est La Moselle, description en 483 hexamètres d'un voyage de Bingen à Trèves. Ses morceaux les plus estimés sont les Parentales, les Roses, la Moselle et le Crucifiement de l'Amour.

C'est dans l'ode à la Moselle de ce pêcheur accompli qu'apparaîtrait pour la première fois, parmi force précisions halieutiques et ichtyologiques, le nom latin (salar) de la truite :
« purpureisque salar stellatus tergora guttis » (« la truite a le dos étoilé de gouttes de pourpre »)
« qui nec dum salmo nec iam salar » (« toi, truite saumonée, qui n'es pas encore le saumon et n'es plus la truite »).

La correspondance entre Ausone, resté polythéiste, et Paulin de Nole, converti au christianisme (futur évêque de Nola (Nole) et futur saint) « est un document d'une importance exceptionnelle tant sur le plan de l'histoire de la société aristocratique de l'Antiquité tardive (vie de grands propriétaires, réaction d'Ausone à la conversio de Paulin) que sur le plan littéraire (abandon de la poésie profane par Paulin, conception de l'amitié épistolaire) » (Janine Desmulliez, compte rendu de l'édition et de la traduction française de cette correspondance par David Amherdt).

[modifier] Opinions diverses

Ferdinand Lot n'avait pas l'habitude de mâcher ses mots en parlant des écrivains qu'il n'aimait pas[1] estime qu'on « trouve dans ses poésies assez d'élégance, et d'esprit, mais aussi de l'affectation, de la monotonie et bien des puérilités ». Lot nous dit aussi que « La plupart du temps il est ennuyeux et sans originalité »[2], et il cite à l'appui de sa critique René Pichon, auteur d'une célèbre Histoire de la Littérature latine : « Son style, bourré de citations, de plagiats et de pastiches, est celui d'un vieux professeur qui a la tête meublée d'expressions consacrées et qui croit rendre aux auteurs qu'il a si longtemps expliqués un suprême hommage, en pensant et en parlant sans cesse d'après eux... Il déverse dans ses écrits la masse des renseignements hétéroclites qu'il a accumulés pendant ses trente ans de professorat. » Tout ce qu'il concède est que « cette érudition indigeste gâte les parties où l'on trouve ce que l'on chercherait vainement chez les classiques: un je ne sais quoi de confiant et de familial »[3] »

Sur l'homme privé, au contraire, Bayle multiplie les éloges : « Ausone était un homme d’un très grand mérite et d’une rare vertu, et, s’il était semblable au portrait que son fils en a laissé, c’était un homme du siècle d’or, le dernier siècle où la pensée et l'érudition philosophique purent encore se développer librement, avant la grande parenthèse de domination monothéiste de la pensée, qui ne se refermera en Europe que dix-huit siècles plus tard. » Il fut bien un médecin de son époque : se contentant d’un modique revenu, il n'abusa ni de son savoir médical, ni de la considération dont il jouissait. Il donnait gratuitement ses soins aux malades, et la seule ambition de toute sa vie, fut l’application constante à chacune de ses actions des préceptes de la philosophie des sept Sages de la Grèce. En ce quatrième siècle où les prédicateurs de l’Évangile étaient légion, ce païen stoïque, fidèle à ses vieilles croyances, prouvait que le christianisme n'avait pas le monopole de la vertu. Son épouse Éonia était comme lui et ils restèrent très unis durant les 45 ans de leur union (dont naquirent 4 enfants: Émilia Melania, qui ne vécut qu'un an ; Ausone-le-jeune, poète ; Julia Dryadia, qui vécut soixante ans et épousa un sénateur de Bordeaux et Avitianus, qui étudiait la médecine lorsqu'il mourut encore adolescent).

[modifier] Œuvres

s:Accueil

Voir sur Wikisource : Ausone.

  • Les épigrammes comptant 150 poésies.
  • Un éphéméride dont on n'a que des fragments et qui semble destiné à la jeunesse
  • Les Parentalia, éloges de ses parents presque intégralement en vers élégiaques.
  • Les éloges des professeurs de Bordeaux.
  • Les épitaphes des Héros qui se trouvèrent à la guerre de Troie.
  • Les Césars qui évoquent les empereurs décrits aussi par Suétone.
  • Les villes célèbres où il écrit sur Constantinople, Carthage, Antioche, Alexandrie, Trèves, Milan, Capoue, Aquilée, Arles, Lérida, Athènes, Catane, Syracuse, Toulouse, Narbonne et Bordeaux. La partie sur Rome ne compte qu'un seul vers et est probablement incomplète.
  • Le jeu des sept sages, daté probablement de 390.
  • Les Idylles réputées pour être la plus belle œuvre de l'auteur et très souvent rééditées. C'est dans cet ensemble que se trouve son célèbre poème Moselle intéressant pour les connaissances ichtyologiques qu'il renferme.
  • Epigrammata. Venetiis, impressa magistr. Ioanne de Cereto de Tridino alias Tacuini, 1496 pridie idus octobriis.
  • Opera. Venice In Aedibus Aldi et Andreae Soceri, Novembre 1517.
  • Griphi Ausoniani Enodatio. Paris, venundatur in aedibus Ascensianis. 1522.
  • Opera. Adhaec Symmachi, et Pontii Paulini litterae ad Ausonium scriptae tum Ciceronis, sulpicae... veterum carmina nonulla. Burdigalae (Bordeaux), S. Millanges, 1580.
  • Ausone et Paulin de Nole, Correspondance; Introd., texte latin, traduction et notes par David Amherdt; Peter Lang, 2004 (Sapheneia, Beiträge zur Klassischen Philologie ; 9), VII et 247 p. (ISBN ). Compte rendu critique de Janine Desmulliez

[modifier] Bibliographie

  • Jacques Demogeot, Études sur Ausone, 1837.

[modifier] Source partielle

« Ausone », dans Marie-Nicolas Bouillet et Alexis Chassang (dir.), Dictionnaire universel d'histoire et de géographie, 1878 [détail des éditions] (Wikisource)

[modifier] Liens externes

[modifier] Notes

  1. Voir son opinion sur Symmaque
  2. La Fin du monde antique et les Débuts du moyen-âge, Albin Michel, réédition 1968, p. 166.
  3. Il cite cette fois Camille Jullian, Ausone et Bordeaux, Étude sur les derniers temps de la Gaule romaine» : il parle de lui-même, de sa vie, de ses parents et amis, de sa petite patrie, Bordeaux, avec simplicité et bonne grâce