Robert Brasillach

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Robert Brasillach, né le 31 mars 1909 à Perpignan (Pyrénées-Orientales), fusillé le 6 février 1945 au Fort de Montrouge, est un écrivain, journaliste et critique de cinéma français, également connu pour son activité de collaborationniste pendant la Seconde Guerre mondiale.

Sommaire

[modifier] Biographie

Ancien élève du lycée de Sens où il a pour professeur Gabriel Marcel, Robert Brasillach est, après trois ans de classe préparatoire littéraire au lycée Louis-le-Grand, — où il côtoie Maurice Bardèche, Thierry Maulnier, José Lupin, Jean Martin et Paul Arrousseau —, admis à l'École normale supérieure en 1928. Cette période est longuement décrite dans les premiers chapitres de Notre avant-guerre, livre de mémoires écrit en 1939-1940.

Il assura une chronique littéraire dans le quotidien L'Action française et dans L'Étudiant français dans la première moitié des années 1930.

Auteur de l'entre-deux guerres et collaborateur durant la Seconde Guerre mondiale, il fut, de 1937 à 1943 (entrecoupé d'une captivité en Allemagne de 1940 à 1941, suite à sa mobilisation et à la défaite française), rédacteur en chef de l'hebdomadaire Je suis partout, dans lequel il laissa transparaître sa haine des Juifs[1], du Front populaire, de la Troisième République[2], et son admiration du nazisme. En 1943, il est supplanté par Pierre-Antoine Cousteau (frère de Jacques-Yves Cousteau), collaborateur plus militant, à la tête de l'hebdomadaire. Persuadé de la justesse de ses idées comme au premier jour, Brasillach est paradoxalement évincé à cause de sa constance : fasciste convaincu, il réclame un fascisme à la française, qui soit allié au nazisme mais qui ne soit pas un simple calque ; partisan de la victoire de l'Allemagne, il la juge de moins en moins probable et refuse de mentir en l'annonçant comme certaine, à un public qui n'y croit plus.

[modifier] Procès et exécution

En septembre 1944, sa mère ayant été arrêtée, il se constitue prisonnier auprès de la Préfecture de police de Paris. Il fut emprisonné à la prison de Fresnes (actuel Val-de-Marne) et poursuivi pour intelligence avec l'ennemi. Son procès s'ouvre le 19 janvier 1945 devant la cour d'assises de la Seine. Il est condamné à mort le jour même après une délibération de vingt minutes. Sa défense avait été assurée par Jacques Isorni, lequel fut également, quelques mois plus tard, défenseur du maréchal Pétain.

Dans les jours qui suivirent, une pétition d'intellectuels renommés, parmi lesquels Paul Valéry, Paul Claudel, François Mauriac, Daniel-Rops, Albert Camus, Marcel Aymé, Jean Paulhan, Roland Dorgelès, Jean Cocteau, Colette, Arthur Honegger, Maurice de Vlaminck, Jean Anouilh, André Barsacq, Jean-Louis Barrault, Thierry Maulnier, etc.[3], demanda au général De Gaulle, chef du gouvernement provisoire, la grâce du condamné à mort. Le général choisit de ne pas commuer la peine prononcée, ce qui entraîna l'exécution de la sentence, le 6 février suivant, lorsque Brasillach fut fusillé au Fort de Montrouge. De Gaulle dira :

« Cela ne s'explique pas. Dans les lettres aussi, le talent est un titre de responsabilité et il fallait que je rejette ce recours-là, peut-être, après tout, parce qu'il m'était apparu que Brasillach s'était irrémédiablement égaré. Je précise tout de même que ma décision n'eut rien à voir avec les orientations sexuelles de cet auteur, dont je reconnais par ailleurs, comme vous, la phénoménale culture. Si je me rappelle si bien de ce matin-là, c'est qu'à chaque dernière nuit d'un homme que je pouvais gracier, je ne fermais pas l'œil. À ma manière, il fallait que je l'accompagne. »

Pourtant, bien des biographes s'interrogent sur les raisons ayant poussé le général de Gaulle à laisser exécuter Robert Brasillach. De Gaulle aurait vu dans le dossier de Brasillach la couverture d'un magazine le montrant sous l'uniforme allemand. Il y aurait eu une confusion avec Jacques Doriot[4]. Lacouture qui rapporte cette rumeur ne croit pas à cette interprétation. Il penche pour l'hypothèse d'une concession faite aux communistes pour pouvoir être plus ferme sur d'autres points.

« […] Le général de Gaulle a écouté Mauriac, et a refusé la grâce. Quoiqu’il en pensât, de Gaulle ne pouvait s’opposer à toutes les exigences des communistes qui constituaient un tiers du pouvoir, sinon davantage. Ils exigeaient la tête de Brasillach, qui avait conduit bien des leurs au poteau. Je pense que de Gaulle a fait la part du feu. […][4]  »

Robert Brasillach fut inhumé au cimetière de Charonne, dans le XXe arrondissement de Paris. Chaque année, le 6 février, le Cercle franco-hispanique organise un dépôt de gerbes sur la tombe de Robert Brasillach.

[modifier] Le critique de cinéma

Brasillach est très tôt fasciné par le cinéma : de 1922 à sa mort, il rend compte avec enthousiasme de l'actualité cinématographique. Le fruit de cette passion, outre de nombreuses chroniques dans les journaux, est son Histoire du cinéma publiée pour la première fois en 1935 et qui fera l'objet d'une nouvelle édition en 1943 en collaboration avec son beau-frère Maurice Bardèche. Contrairement aux critiques de l'époque, Brasillach adopte sur le cinéma un point de vue politiquement neutre, hormis quelques rajouts antisémites de circonstance en 1943. Sa soif de cinéma l'amène à fréquenter assiduement Henri Langlois au Cercle du cinéma. Bien qu'enthousiaste sur les classiques (Charles Chaplin, Georg Wilhelm Pabst, René Clair, Jean Renoir...) et les films hollywoodiens (John Ford, Frank Borzage, King Vidor, etc.), il fait preuve de goûts originaux et montre une insatiable curiosité pour les cinémas étrangers. Il est ainsi le premier à parler en France du cinéma japonais et notamment de Yasujiro Ozu, Kenji Mizoguchi et Heinosuke Gosho. En prison, il travaillait à la troisième édition de son Histoire du cinéma et préparait une adaptation de Falstaff, qu'il espérait tourner avec Raimu.

[modifier] Œuvres de Robert Brasillach

  • Présence de Virgile, 1931
  • le Voleur d'étincelles, roman, 1932
  • l'Enfant de la nuit, 1934
  • Histoire du cinéma, 1935 (en collaboration avec son beau-frère Maurice Bardèche)
  • le Procès de Jeanne d'Arc, texte établi et préfacé par Robert Brasillach [sélection de textes], Gallimard, 1941, réédité en 1998 aux Éditions de Paris, collection « Classiques », avec une présentation de François Bluche
  • Histoire de la guerre d’Espagne (avec Maurice Bardèche), Plon, 1939
  • Portraits, 1935
  • le Marchand d'oiseaux ou le Méridien de Paris, 1936
  • Comme le temps passe..., 1937
  • Pierre Corneille, Fayard, 1938
  • Les Sept couleurs, Plon, 1939
  • Notre avant-guerre, Plon, 1941
  • la Conquérante, 1943
  • les Quatre Jeudis, 1944
  • Lettre à un soldat de la classe 60. Les Frères ennemis. Dialogue tragique, Le Pavillon Noir, Paris. 1946. 107 p.

- liste non exhaustive -

Publications posthumes :

  • Poèmes de Fresnes, 1950
  • Anthologie de la poésie grecque (1950), éd. Stock. Rééd. en 1995 au Livre de Poche. ISBN 2-25301-517-2
  • la Reine de Césarée, théâtre (drame), 1954, joué pour la première fois en 1957
  • Bérénice, théâtre (drame), 1954
  • Journal d'un homme occupé, 1955
  • les Captifs, roman inachevé, Plon, 1974

[liste non exhaustive]

Son beau-frère Maurice Bardèche assura la direction de publication, au Club de l'Honnête Homme, des Œuvres complètes (expurgées) en 12 tomes, de 1963 à 1966.

[modifier] Références

Icône de détail Articles connexes : : Action française, Je suis partout et Collaboration.
  1. En 1942, au lendemain de la déclaration de l'archevêque de Toulouse condamnant les déportations, il écrivit : « il faut se séparer des juifs en bloc et ne pas garder les petits ».
  2. Il écrit ainsi le 7 février 1942 dans Je suis partout :
    « On ne s'aperçoit pas qu'on encourage le mensonge, qu'on encourage le Juif. En finira-t-on avec les relents de pourriture parfumée qu'exhale encore la vieille putain agonisante, la garce vérolée, fleurant le patchouli et la perte blanche, la République toujours debout sur son trottoir. Elle est toujours là, la mal blanchie, elle est toujours là, la craquelée, la lézardée, sur le pas de sa porte, entourée de ses michées et de ses petits jeunots, aussi acharnés que les vieux. Elle les a tant servis, elle leur a tant rapporté de billets dans ses jarretelles ; comment auraient-ils le cœur de l'abandonner, malgré les blennoragies et les chancres ? Ils en sont pourris jusqu'à l'os. »
  3. La liste comprend 55 noms :


  4. ab Jean Lacouture, La raison de l'autre, Montesquieu, Mauriac, Confluences, 2002

[modifier] Bibliographie

  • Maurice Bardèche, Souvenirs, Buchet-Chastel, Paris, 1993
  • Anne Brassié, Robert Brasillach ou Encore un instant de bonheur, Robert Laffont, Paris, 1987 - réédité en 2006 par l'Association des Amis de Robert Brasillach (A.R.B.)
  • Brasillach et la génération perdue, Éditions du Rocher, 1987 - Hommage collectif (dont Jean Anouilh, Maurice Bardèche, Jean Guitton, Fred Kupferman, Anne Brassié, Dominique Desanti, Thierry Maulnier, et Jean-Marc Varaut ; sous la direction de Pierre Sipriot)
  • Philippe d'Hugues, Brasillach, collection « Qui suis-je ? », Éditions Pardès, 2005
  • Pierre-Marie Dioudonnat, Je suis partout, 1930-1944. Les maurrassiens devant la tentation fasciste, La Table Ronde, Paris, 1973
  • Jacques Isorni, le Procès de Robert Brasillach (19 janvier 1945), Flammarion, 1946
  • Alice Kaplan, Intelligence avec l’ennemi : Le procès Brasillach, Gallimard, 2001 (publication originale : The Collaborator: The Trial and Execution of Robert Brasillach, University of Chicago Press, 2000)
  • Michel Laval, Brasillach ou la trahison du clerc, Hachette, Paris, 1992.
  • Pascal Louvrier, Brasillach, l'illusion fasciste, Perrin, Paris 1989 (préface d'Alain Griotteray)
  • Jean Madiran, Brasillach, Nouvelles Éditions Latines, 1959
  • Henri Massis, le Souvenir de Robert Brasillach, Éditions Dynamo, Liège, 1963
  • Pierre Pellissier, Robert Brasillach...le maudit, Denoël, 1989
  • Robert Poulet, Robert Brasillach, critique complet, coll. « Brimborions », 186, Dynamo-Pierre Aelberts, Liège, 1971
  • Luc Rasson, Littérature et fascisme : Les romans de Robert Brasillach, Minard, Paris, 1991
  • Pol Vandromme, Robert Brasillach, l'homme et l'œuvre, Plon, 1956

[modifier] Liens externes