Philolaos de Crotone

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Philolaos (en grec Φιλόλαος / Philólaos) fut un philosophe et un mathématicien grec du Ve siècle av. J.-C. qui eut pour maître Pythagore et pour élèves : Démocrite, Archytas de Tarente, Xénophile de Chalcis en Thrace, Phanton de Phlionte, Echécrate, Dioclès et Polymnastos de Phlionte.

Sommaire

[modifier] Biographie

Philolaos naquit probablement à Crotone (selon Diogène Laërce), à Tarente ou à Heraclée. Il était le pupille et le transcripteur de Pythagore. Après la mort de son maître, de fortes tensions parcouraient l'Italie du sud. Il vivait à Crotone durant la persécution des pythagoriciens. Il aurait d'ailleurs été le seul survivant de l'incendie de l'École de Crotone avec Lysis et Archippe de Tarente. Philolaos, contraint de fuir, se réfugia d'abord en Lucanie[1]. Lysis de Tarente s'étant réfugié à Thèbes et y étant mort, il alla honorer sa tombe, et durant ce voyage s'entretint avec Cébès de Thèbes qui conta sa rencontre à Platon [2]. Platon, séduit par ce philosophe, s'empressa alors d'aller suivre son enseignement et celui d'Eurytos en Italie[3]... Totalement démuni, il se résolut à vendre des livres de l'école pythagoricienne. [1]. Platon en fut l'acquéreur. Son unique ouvrage, qui comprenaient entre autres ses traités sur l'astronomie qui furent probablement connus d'Aristote, fut vendu au même Platon par un ancien élève de Philolaos ou par ses parents après sa mort.

[modifier] Philosophie

Il y a lieu de croire que ce sont des considérations métaphysiques et non scientifiques qui ont poussé Philolaos à émettre ses théories. L'origine de ses écrits étant encore discutée, on s'entend en général pour dire qu'il croyait que l'âme était une harmonie des parties du corps et que les nombres étaient la clef de la connaissance. Il affirmait entre autres que l'Un procède à la fois du pair et de l'impair puisque ajouté à un nombre impair, il donne un nombre pair et vice-versa. Il est devenu le principe par excellence, l'Achevé. Le nombre pair, l'Inachevé, formait le monde organisé et comportant du superflu. Cette dissymétrie se justifie théoriquement par le concept de Philolaos sur l'harmonie, suivant ainsi les idées de Parménide. « L'harmonie provient toujours des contraires ; elle est en effet l'unité d'un mélange de plusieurs et la pensée unique de pensant séparés. »

[modifier] Cosmologie

Philolaos fut le premier penseur à affirmer que la Terre n'était pas au centre de l'Univers, mais qu'elle tournait en un jour autour d'un « Feu central », demeure de Zeus et mère des dieux, différent du Soleil et placé au centre de l'Univers. Il appela ce centre « Estia », d'après la déesse grecque du feu et du foyer Hestia. Ce concept fut l'un des premiers à expliquer avec une certaine logique le mouvement apparent des étoiles autour de la planète. Le Soleil, la Lune et les cinq planètes visibles tournaient également autour de ce Feu central. Comme la Terre tournait sur elle-même également en vingt-quatre heures, le Feu central lui était donc toujours invisible. Une autre planète, l'Anti-Terre, tournait aussi autour de ce centre, mais comme elle en était plus rapprochée, elle demeurait également invisible au monde méditerranéen. Ces deux astres n'avaient en fait pour seule raison d'être que de porter le nombre d'astres à dix, un nombre important pour les Pythagoriciens. Selon Copernic, Philolaos connaissait déjà le mouvement de la Terre autour du Soleil. Il évalua le mois lunaire à 29 jours et demi, l'année lunaire à 354 jours et l'année solaire à 365 jours et demi.

[modifier] Œuvre

Philolaos n'a écrit qu'un seul livre De la nature. Un livre dont il ne nous reste que quelques fragments  : les premiers mots rapportés par Démétrios de Phalère dans ses Homonymes lui-même cité par Diogène Laërce : "Ce sont les illimtés et les limitants qui ont constitué au sein du monde la nature, ainsi que la totalité du monde et tout ce qu'il contient" ; Aristote cite aussi ces mots "Il est certaines pensées plus fortes que nous" (Ethique à Eudème 2.8.1225a30) ; Stobée (Choix de textes 1.15.7) cite également ceci tiré du chapitre intitulé Les Bacchantes "Le monde est un, il a commencé à naître à partir du centre et vers le bas. Car, ce qui est situé au-dessus par rapport au centre est inverse de ce qui est situé au-dessous ; car, le centre est comme le plus au-dessus pour ce qui est tout en bas, et il en va de même pour le reste ; car, par rapport au centre les directions sont identiques à ceci près qu'elles sont inversées" ; les citations de l'Antiquité tardive sont plus soumieses aux doutes que les autres : Jean de Lydie (Des mois 2.12), "il existe en effet un chef, principe de toutes choses, Dieu, un, éternel, en repos, non mû, semblable à lui-même" et Philon (De la création §100) ajoute "et différent de tous les autres" ; Philolaos consacré encore plusieurs chapitres à De l'âme et Des rythmes et des mètres. Un livre très important et novateur : non seulement le premier à s'intituler De la nature (Peri fyseos), mais aussi le premier à traiter des enseignements de Pythagore. Un livre qui inspira beaucoup l'école platonicienne. Un élève, ou les parents de Philolaos, aurait vendu à Platon ce livre. Ce dernier s'en serait inspiré pour écrire son Timée (récit de l'Atlantide) ; hypothèse populaire dans l'Antiquité, Hermippe qui est cité par Diogène Laërce la reprend tout comme Timon dans ses Silles repris par Aulu-Gelle (Nuits attiques 3.17.4). Son oeuvre marqua en tout cas l'école platonicienne puisque Speusippe, le successeur de Platon à l’Académie en offrit un résumé (dans Des nombres pythagoriciens[4]).

[modifier] Mathématiques

Philolaos plongea profondément dans la théorie des nombres de Pythagore, s’intéressant particulièrement aux propriétés inhérentes au nombre dix, la somme des quatre premiers nombres et le quatrième nombre triangulaire, le tetractys, qu’il qualifiait de grand, tout-puissant et qui produit tout. On prenait le grand serment pythagoricien sur le tetractys sacré. La découverte des solides réguliers est attribuée à Pythagore et on dit qu’Empédocle fut le premier à prétendre qu’il existait quatre éléments. Philolaos, reliant ces idées soutenait que la nature élémentaire des corps dépendait sur leur forme. Il associa le tétraèdre au feu, l’octaèdre à l’air, l’icosaèdre à l’eau et le cube à la terre. Le dodécaèdre fut attribué à un cinquième élément, l’éther, ou comme d’autres pensent, l’univers. Cette théorie, quoique superficielle, démontrait une connaissance considérable de la géométrie et encouragea fortement l’étude des sciences.

[modifier] Sources

Diogène Laërce, Vie de Philolaos. Sources réunies par JP Dumont (cf infra).

[modifier] Bibliographie

  • Kranz Diels, Fragmente der Vorsokratiker, Philolaos Fr. 10 ;
  • Ivan Gobry, Pythagore ou la naissance de la philosophie, Seghers, Paris, 1973.
  • Jean-Paul Dumont Les écoles présocratiques 1988 (Paris) sp. p.248-273.

[modifier] Références

  1. Plutarque De genio Socratis §13
  2. Phédon 61.2
  3. Diogène Laërce Platon
  4. résumé par le Pseudo-Jamblique