Droit fiscal en France

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Le droit fiscal est, en France, la branche du droit public qui définit les règles permettant à l'État de percevoir, par le biais de l'impôt et des taxes, les moyens financiers lui permettant de remplir sa mission.

Icône de détail Article détaillé : Fiscalité française.

Sont soumises au droit fiscal français les personnes ayant leur domicile fiscal en France, c'est-à-dire les personnes physiques ou morales :

  • qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ;
  • qui exercent en France une activité professionnelle ;
  • qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques.

Pour qu’un contribuable soit considéré comme résidant fiscalement en France, il suffit que l’un seulement de ces critères soit rempli, ces trois critères étant en effet des critères alternatifs.

Les conventions fiscales internationales réservent cependant à la France le droit de soumettre à l'impôt français certains revenus perçus par des personnes n'ayant pas leur domicile fiscal en France (revenus immobiliers, plus-values immobilières).

Sommaire

[modifier] Histoire du droit fiscal français

De la dîme de la Bible aux dernières créations fiscales, l’impôt a marqué toutes les civilisations, chaque époque étant cependant marquée par une évolution de la fiscalité. Si la fiscalité française a toujours été marquée par une certaine complexité, les fondements de cette complexité ont varié au gré des inventions fiscales ; ainsi :

  • jusqu’en 1789, le système fiscal français repose sur un triptyque constitué
    • de la fiscalité royale ;
    • de la fiscalité d’Église ;
    • de la fiscalité seigneuriale.
  • à partir de la Révolution française, le système fiscal français suit les fluctuations de l’économie et oscille entre une fiscalité du patrimoine et une fiscalité des revenus, deux conceptions qu’il ne parvient pas à opposer et qu’il superpose l’une à l’autre avant d’y adjoindre la fiscalité de la consommation.

La notion d’unité est donc essentiellement étrangère au droit fiscal et le législateur, quelle que soit l’époque envisagée, utilise une extrême hétérogénéité des prélèvements fiscaux, hétérogénéité qui réside non seulement dans l’assiette mais aussi dans la nature même de ces prélèvements.

[modifier] La fiscalité d’Ancien Régime : du Moyen-Âge à la Révolution

L’Ancien Régime demeure l’époque de la disparité fiscale. L’une des causes du renchérissement du prix des denrées n’était-il pas, à la veille de la Révolution de 1789, la répercussion par les négociants du montant des taxes acquittées aux péages et octrois ? Les grandes phases de l’histoire de la fiscalité française suivent schématiquement les dates suivantes :

La fiscalité d’Ancien Régime se caractérise par la coexistence de trois catégories d’impôt :

  • l’impôt royal (perçu au profit du Trésor royal),
  • l’impôt seigneurial (impôt local perçu au profit des seigneurs),
  • l’impôt d’Église (perçu au profit de l’Église) ;

À cette hétérogénéité venait s’adjoindre la traditionnelle distinction entre les impôts directs et les impôts indirects.

Durant la période du haut Moyen-Âge, deux grandes dates méritent d’être relevées :

  • en 1147 : Louis VII lève en France l’impôt du vingtième. Cette contribution prélève la vingtième partie du revenu des nobles, prêtres ou roturiers ;
  • en 1296 : Philippe IV le Bel créé le centième, impôt de 1% assis à la fois sur le capital (immeubles, meubles corporels) et sur le revenu est établi.
  • L’année suivante, cet impôt est porté à 2% sous la promesse qu’il ne sera pas renouvelé : c’est le cinquantième, qui sera levé pourtant encore une fois en 1300, et pour la dernière fois en 1301.

La fiscalité de l’Ancien Régime a préfiguré la fiscalité moderne dans la spécialisation des impôts : à côté des impôts généraux, figure en effet un certain nombre d’impôts spéciaux, frappant soit des produits particuliers soit des services. Parmi les principaux impôts coexistant sous l’Ancien Régime, on ne peut manquer d’évoquer :

  • les aides : impôts indirects royaux, portant principalement sur les boissons (mais aussi sur les huiles et savons, les papiers, les cartes à jouer…). Leur montant était variable et très inégal selon les généralités et leur perception fut comprise dans le bail des fermes générales. En 1789, Necker les en retira et les mit en régie ;
  • les banalités : droit seigneurial par lequel certains seigneurs pouvaient prescrire l’usage payant et obligatoire du moulin, du four ou du pressoir (dit banal). La banalité du moulin figurait parmi les droits seigneuriaux les plus lourds et les plus détestés ;
  • le casuel : redevance perçue par le Clergé, à l’occasion des baptêmes, mariages et sépultures. Il était payé avec réticence, car il s’ajoutait à la dîme ;
  • le cens : redevance due annuellement au seigneur, pour les terres exploitées sur sa seigneurie. Elle n’était due que par les roturiers, était payée en espèces et représentait, à la veille de la Révolution, une charge assez légère ;
  • le champart : redevance due au seigneur par ses censitaires, consistant en une portion de la récolte (en moyenne une gerbe sur dix). Il portait le plus souvent sur les céréales, tandis que les vignes, bois, légumes et arbres fruitiers en étaient généralement exemptés. À la différence du cens, le champart constituait pour les paysans une charge assez lourde ;
  • la dîme : principale redevance due au clergé et représentant la portion la plus importante de ses revenus Elle portait sur toutes les terres, même nobles, et celles qui faisaient partie de patrimoine ecclésiastique, et était perçue avant le champart et les autres droits seigneuriaux. Le taux en était variable selon les lieux et les cultures, mais avoisinait en moyenne le douzième ou le treizième des récoltes et des produits des troupeaux. On distinguait plusieurs types de dîmes selon leur objet : grosses dîmes (sur le blé et le vin), dîmes menues ou dîmes vertes (sur les autres céréales, les légumes…), dîmes de charnage ou de carnage (sur les brebis, porcs ou animaux de basse-cour), dîmes anciennes, dîmes novales ;
  • la gabelle : impôt royal de consommation sur le sel, généralisé au XIVe siècle. Pour le payement de la gabelle, le Royaume était réparti en six divisions : 1°) les pays de grande gabelle, où le sel était lourdement taxé et une consommation minimum obligatoire ; 2°) les pays de petite gabelle (Lyonnais, Languedoc, Provence, Roussillon) ; 3°) les pays de salines (Franche-Comté et Lorraine) ; 4°) les pays rédimés (Poitou, Aunis, Saintonge, Guyenne, Angoumois, Limousin, Marche) ; 5°) les pays de quart bouillon (régions d’Avranches, Coutances, Bayeux, Pont l’Evêque) ; 6°) les pays exempts ( Artois, Flandre, Hainaut, une petite partie de l’Aunis et de la Saintonge, Béarn, Navarre et surtout la Bretagne) ;
  • le minage : droit perçu par le Roi, un seigneur ou une municipalité sur les grains et les autres marchandises vendues dans les foires et les marchés. Suspendu par Turgot en 1775, le droit de minage n’avait pas totalement disparu à la veille de la Révolution.

Réformés au gré des conjonctures économiques, ces divers prélèvements témoignent de la complexité naturelle de tout système fiscal, quelle que soit l’époque envisagée mais trouvent leur origine dans des difficultés financières conjoncturelles, bientôt aggravées par l’incapacité de l’État de se doter d’une organisation fiscale rationnelle ; entrés dans la conscience populaire ou disparus dans les limbes de l’Histoire, ces divers impôts et taxes ne sauraient faire oublier les trois grands impôts directs qui vont se succéder du XVe au XVIIIe siècle, et auprès desquels ils coexistent : la taille, la capitation et le dixième.

[modifier] Taille

La taille apparaît au XVe siècle, différente dans les pays d'oïl et les pays d'oc. Elle devient pendant trois siècles et demi la base de la fiscalité personnelle de l’Ancien Régime. Jusqu’à la fin du XVIIe siècle, la taille est le seul impôt que l’on puisse qualifier d’impôt direct.

Dans les pays d’oil, la taille est un impôt personnel prélevé sur les revenus fonciers du contribuable, les rentes actives et les produits de l’industrie et on y distingue la taille de propriété (payée par les propriétaires sur les revenus de leurs propriétés), la taille d’occupation (payée sur l’habitation), la taille d’exploitation (payée par les exploitants sur les revenus de leurs exploitations) et la taille d’industrie, de commerce et d’élevage (acquittée sur les revenus de l’élevage) ; la taille d’oil n’est pas un modèle d’égalité fiscale : la noblesse et le clergé en sont ab initio exemptés, privilège dont bénéficieront ultérieurement les détenteurs d’offices de finances, d’offices judiciaires et municipaux, ainsi qu’un grand nombre de bourgeois habitant les villes pourvues de chartes et de franchises.

Dans les pays d’oc, la taille est un impôt réel grevant les biens roturiers, même s’ils appartiennent à des privilégiés. La cotisation dépend de la nature des terres et de leur superficie, fixées toutes deux par des cadastres rudimentaires, les compoix, suivant le sort des biens de propriétaire en propriétaire. Une terre noble, par exemple, passant de mains en mains fussent-elles roturières, conserve son immunité fiscale. À l’inverse, les gentilshommes ou les ecclésiastiques qui acquièrent des fonds sujets au droit de taille ne sont pas exempts d’en faire le paiement.

[modifier] Capitation

La capitation, créée en 1695, elle repose sur une division de la propriété en vingt-deux classes, chaque classe étant imposée selon un tarif différent. D’abord instituée à titre temporaire, elle devient un impôt définitif et prend la forme, dans les pays d’oïl, d’un impôt complémentaire à la taille personnelle.

[modifier] Dixième

L’impôt du dixième est instauré en 1710. Déjà, en 1707, Vauban avait préconisé la création d’un impôt unique, la « dîme royale », destinée à se substituer à tous les impôts directs (tailles, dîme du clergé) et à être acquittée par tous. Le dixième est un prélèvement du revenu de toutes les propriétés (revenus fonciers, revenus mobiliers, revenus des professions libérales, revenus de l’industrie) qui est acquitté par tous corps sociaux du royaume, sauf la possibilité pour certains d’y échapper par un rachat d’impôt : c’est ainsi que le clergé s’exonérera du dixième en versant le don gratuit. Le dixième sera aboli, puis restauré en 1733 avant d’être, en 1749, remplacé par le vingtième, qui sera un impôt permanent.

Le dixième, transformé en vingtième, était un impôt cédulaire et comprenait une taxe sur les créances ou rentes, recouvrée par voie de retenue à la source, un dixième (ou vingtième) sur les offices, le dixième (ou vingtième) foncier dont les contribuables devaient faire une déclaration puis enfin le dixième (ou vingtième) d'industrie : après un système de déclaration des fabricants et négociants, on s'orienta vers l'établissement d'un forfait discuté avec les corporations qui en répartissaient le montant entre leurs membres.

La disparité fiscale entraînée par le système d'imposition en vigueur sous l'Ancien Régime, et la lourdeur des prélèvements subis par les contribuables, qui seront une des causes de la Révolution à la fin du siècle, étaient déjà préoccupantes au début du XVIIIe siècle, à la mort de Louis XIV. Lorsqu'il entame sa régence, Philippe d'Orléans, au sortir du long règne du « Roi-Soleil », dont les nombreuses guerres ont souvent mis à mal les finances publiques, conscient du problème, adresse, dès le 4 octobre 1715, une « Lettre à Mrs les intendans commissaires départis dans les provinces », dans laquelle il déclare que sa préoccupation majeure est le poids excessif des différentes taxes et annonce son intention d'établir un système d'imposition plus juste et plus égalitaire. Des intentions aux actes, il y a souvent un fossé, et c'est la Révolution de 1789 qui mettra à bas ce système fiscal injuste, et proclamera le principe de l'égalité des citoyens devant l'impôt.

[modifier] La fiscalité du XIXe siècle : l’héritage fiscal de la Révolution

En 1790-1791, les impôts indirects (au nombre desquels figurait la fameuse gabelle, impôt sur le sel de sinistre réputation) sont supprimés et une vaste politique de réforme fiscale, héritée de l’abomination des impôts de l’Ancien Régime, conduit à la refonte du système fiscal et du paysage fiscal français. Les impôts de l’Ancien Régime sont supprimés et quatre grandes contributions directes voient le jour :

  • la contribution foncière, sur les biens fonciers, créée par une loi du 23 novembre 1790 ;
  • la contribution mobilière sur le logement, créée par la loi du 18 février 1791 ;
  • la contribution des patentes, assise sur l’industrie et le commerce, créée le 17 mars 1791 ;
  • la contribution des portes et fenêtres, fondée sur le nombre et la taille des fenêtres des immeubles et instaurée par la loi du 24 novembre 1798.

La fiscalité du XIXe siècle apparaît donc comme fondamentalement axée sur le patrimoine : faisant abstraction des revenus d’activité, elle se concentre essentiellement sur la fortune. C’est une fiscalité réelle.

La Révolution n’ayant créé aucun impôt sur les revenus, le XIXe siècle va tenter de pallier cette « carence ». Dès 1848, en effet, Proudhon préconise la création d’un impôt du tiers frappant les revenus des biens mobiliers et immobiliers, idée que le parti radical, alors dirigé par Gambetta, reprendra dans son « programme de Bellevue » de 1869. L’impôt sur les revenus mobiliers voit le jour en 1872, tandis que Gambetta propose, dès 1876, la création d’un impôt proportionnel sur tous les revenus. Cette proposition ne sera suivie que de la création, en 1896, d’un impôt sur les revenus boursiers.

[modifier] La fiscalité du XXe siècle : le siècle de toutes les créations fiscales

La fiscalité française, telle qu’elle existe actuellement avec ses impôts, ses taxes et ses contributions, est née au XXe siècle, dans la mesure où il ne subsiste aujourd’hui pratiquement rien des impositions révolutionnaires. Le XXe siècle se caractérise en effet par un important bouleversement des mentalités fiscales :

  • l'impôt jusque-là visait à assurer "l'entretien de la force publique" et "les dépenses d'administration" (Cf. art. 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789) ; on compte désormais sur lui pour assurer des services sociaux de plus en plus étendus, ainsi qu'une redistribution sociale.
  • la charge fiscale est fortement multipliée (de l'ordre de 10% du PIB avant 1914, elle atteint environ 50 % du PIB un siècle plus tard) ; les sources fiscales doivent suivre, et peuvent le faire grâce à l'enrichissement général : quantité de nouveaux impôts voient le jour, dont les principaux actuellement (TVA, CSG, TIPP, etc.).
  • l’impôt, jusque-là assis sur le patrimoine, doit dorénavant peser sur les revenus du travail ainsi que sur les profits du patrimoine. La fiscalité personnelle, pour laquelle le montant d'impôt dépend d'une multitude de variables individuelle (situation matrimoniale, nombre d'enfant, lieu de résidence, niveau de revenu, etc.), se développe, alors qu'elle était presque inconnue auparavant.

Le patrimoine demeure en lui-même un objet d’imposition(impôt sur la fortune, taxes foncières, impôt sur les successions, etc.), mais dorénavant c'est surtout le revenu qu'il procure qui est soumis à l'imposition (impôt sur les plus-values immobilières, impôt sur les revenus fonciers, ...). l’imposition du produit de l’activité des personnes – physiques ou morales – a pris le pas sur celle, plus résiduelle, du patrimoine. Parallèlement, la taxation de la consommation (fiscalité indirecte), déjà très présente, conserve la première place.

[modifier] L'impôt sur le revenu

De 1896 à 1914, la question de l’impôt sur le revenu est le serpent de mer de la politique fiscale des gouvernements successifs, les divers projets présentés achoppant systématiquement devant l’hostilité soit de la classe politique soit du Sénat. Successivement enterré par les échecs successifs des projets Doumer, Cavaignac et Waldeck-Rousseau, retardé par l’hostilité à son égard de Maurice Rouvier, l’impôt sur le revenu voit le jour en 1914, sur la proposition de Joseph Caillaux, lequel ne parvient cependant pas à faire voter son projet d’impôt sur la fortune.

L’histoire de cet impôt est elle-même jalonnée de soubresauts : produit de l'imagination du ministre des Finances Joseph Caillaux, l’impôt sur le revenu a été introduit en France par les lois du 15 juillet 1914 et du 31 juillet 1917 ; il consistait alors en une taxation propre des divers revenus, classés en cédules d’imposition, puis en une taxation de superposition sous la forme d’un impôt général sur le revenu.

Ce système a été modifié par un décret du 9 décembre 1948, qui institua un impôt sur le revenu des personnes physiques comportant deux éléments : une taxe proportionnelle frappant les divers revenus du contribuable (à l’exception de certains revenus qui en étaient exonérés) et une surtaxe progressive qui frappait le revenu net global du contribuable (y compris les revenus exonérés de taxe proportionnelle) ; ces deux taxes constituaient les deux éléments d’un seul et même impôt. Une réforme définitive intervint par la loi du 28 décembre 1959 qui, supprimant les anciennes taxes proportionnelles et surtaxe progressive leur substitua, à compter du 1er janvier 1960, un impôt annuel unique sur les revenus des personnes physiques.

En 1917, les « quatre vieilles » contributions sont dévaluées au rang d’impôts locaux et remplacées comme impôt national par l’impôt sur le revenu, impôt cédulaire frappant sept catégories de revenus (revenus fonciers, bénéfices industriels et commerciaux, revenus agricoles, revenus des professions non commerciales, traitements et salaires, pensions et rentes viagères, revenus des valeurs mobilières, revenus des créances).

La parafiscalité fait son apparition à partir de 1920.

[modifier] Après 1945

C’est au lendemain de la Seconde Guerre mondiale que la fiscalité française va prendre son visage actuel du fait d’un certain nombre de réformes essentielles qui peuvent se résumer en deux mots, modernisation et adaptation :

  1. modernisation, par la suppression des anciennes contributions et une modernisation effective de l’impôt sur le revenu ;
  2. adaptation, par l’apparition de nouvelles impositions fondées sur l’évolution de la conjoncture économique et la prise en compte des nouvelles matières imposables.

En effet, si le patrimoine et les revenus demeurent au cœur de la matière imposable, le droit fiscal s’intéresse désormais à la consommation et à l’investissement comme sources de flux imposables. Cette nouvelle période va ainsi être marquée par :

  1. l’instauration du quotient familial en 1945 ;
  2. la création de l’impôt sur les sociétés par le décret du 9 décembre 1948, modifié par une loi du 28 décembre 1959 ;
  3. la création du « versement forfaitaire », par le décret du 9 décembre 1948, réformé et renommé « taxe sur les salaires » par la loi du 6 janvier 1966 ;
  4. la création de la TVA en 1954 sur la proposition de Maurice Lauré. Initialement limitée aux opérations commerciales, cette taxe sera progressivement étendue aux opérations immobilières ;
  5. le remplacement des contributions foncières par la taxe foncière sur les propriétés non bâties et la taxe foncière sur les propriétés bâties, en 1959 ;
  6. l’apparition progressive de la fiscalité immobilière à partir de 1963. La fiscalité immobilière procède de la prise de conscience des pouvoirs publics que l’immeuble, élément souvent stable des patrimoines, peut devenir une simple marchandise. Tenant compte de cet état de fait, le législateur décide donc, par la loi du 19 décembre 1963, de soumettre à la TVA les ventes de terrains à bâtir réalisées par des personnes physiques, faisant ainsi des vendeurs des producteurs de terrains, tout en ayant soin de distinguer les spéculateurs des opportunistes. Cet assujettissement constitue la consécration fiscale de l’assimilation des terrains à bâtir et des constructions à des marchandises. En matière de fiscalité des opérations immobilières, cette loi avait été précédée par la loi du 21 décembre 1961, qui avait instauré un prélèvement de 25% sur les plus-values réalisées sur des cessions de terrains ayant fait l’objet d’une mutation antérieure à titre onéreux depuis moins de sept ans. D’autres lois sont venues compléter ces deux dispositions et on peut citer :
    1. la loi du 3 juillet 1961, créant la taxe d’équipement ;
    2. la loi de finances pour 1964, instituant la taxe de régularisation des valeurs financières ;
    3. la loi de finances pour 1977, instituant un régime fiscal lié aux opérations de restauration immobilières, réglementées par la « loi Malraux » ;
  7. la création de l'avoir fiscal et du précompte en 1965 (supprimés depuis le 1er janvier 2005) ;
  8. la réforme, en 1971, de la taxe d'apprentissage (qui avait été créée par une loi du 25 juillet 1925) ;
  9. le remplacement de la contribution mobilière par la taxe d'habitation, en 1974 ;
  10. le remplacement de la contribution des patentes par la taxe professionnelle en 1974, qui marque ainsi la disparition de la dernière des « quatre vieilles » ;
  11. la création de l'impôt sur la fortune en 1981 puis en 1988 (après l’intermède de son abolition en 1986) ;
  12. la création de la CSG en 1988 et de la CRDS en 1996 ;
  13. la suppression du droit au bail et la création de la contribution sur les revenus locatifs, en 2001.

[modifier] Définition du droit fiscal

Le droit fiscal peut être défini comme la branche du droit permettant la participation des sujets de droit (aussi bien personnes physiques que personnes morales) à l’organisation financière de l’État et à l’expression de la politique économique et sociale.

[modifier] Le droit fiscal dans l'ordre juridique français

Parce qu’il met en jeu l’État, le droit fiscal est une branche du droit public : l’État dispose en effet du pouvoir d’édicter les règles relatives à la nature et au recouvrement des divers impôts, même si la décentralisation a conduit les collectivités locales à se voir reconnaître un certain pouvoir en matière d’établissement du taux des impositions qui leurs sont attribuées. Le droit fiscal est, au moins étymologiquement, le droit de l’impôt, le droit qui se rapporte à l’impôt, à la fiscalité.

[modifier] L'impôt

L'impôt est la contribution pécuniaire requise des particuliers par voie d’autorité, à titre définitif et sans contrepartie, dans le but d’assurer la couverture des charges publiques. D’autres ont caractérisé l’impôt comme étant un prélèvement obligatoire destiné à financer les dépenses budgétaires de l’État et de certains organismes publics, collectivités locales, établissements publics à vocation territoriale ou encore un mode de répartition des charges publiques fondé sur l’adaptation aux facultés contributives des citoyens.

L’impôt a été également défini par les lexicographes français comme étant la « contribution prélevée sur des revenus, des transactions, des produits, etc. pour assurer le fonctionnement du budget de l’État ou des collectivités locales ».

L’impôt constitue la ressource financière assurée à l’État afin de lui octroyer les moyens matériels et humains destinés à lui permettre de répondre aux besoins de l’intérêt public ; il est donc, par voie de conséquence, la contribution des citoyens aux charges exposées par l’État dans un but d’intérêt collectif et national. Le droit fiscal doit donc être défini comme étant l’ensemble des règles de droit destinées à permettre à l’État de percevoir, auprès des citoyens, leur contribution aux charges financières exigées par l’intérêt public.

[modifier] Caractère obligatoire de l'impôt

Le caractère obligatoire de l’impôt signifie qu’il s’agit d’une contribution dont les citoyens doivent s’acquitter et dont ils ne peuvent être exemptés que par une disposition expresse de la loi ; il ne signifie cependant pas que l’État est seul habilité à percevoir l’impôt : si l’édiction des normes fiscales législatives et réglementaires demeure une compétence dont l’État ne peut se défaire, l’impôt peut alimenter des organismes de droit privé, par exemple, des institutions sociales, telles que les caisses d’allocations familiales ou de Sécurité sociale, et même les organismes privés placés sous le contrôle de l’État ; ces organisme peuvent assurer eux-même le calcul du montant du, et sa perception.

L’article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 dispose seulement que : « la loi fixe les règles concernant : (…) l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature (…) », de telle sorte qu’aucune disposition constitutionnelle n’interdit que l’impôt soit recouvré au profit de et par d’autres personnes que l’État. Il n'y a pas non plus d'autres dispositions légales qui s'y oppose.

Seule l’existence et la structure de l’impôt sont d’essence législative ; dès lors que ces conditions sont remplies, rien ne s’oppose à ce que le bénéficiaire effectif de la perception de l’impôt soit une personne autre que l’État. Néanmoins, la mission de l’impôt étant d’assurer la couverture des charges publiques, seuls des organismes assumant une telle charge peuvent percevoir le produit des impôts.

On s'interdit aussi souvent d'envisager la délégation du recouvrement des impôts à une entreprise privée, en souvenir de l’époque révolue des fermiers généraux. En réalité, la perception de la CSG est assurée par et pour des organismes de droit privé (respectivement les URSSAF et les caisses de sécurité sociale), tandis que la TVA et la "part salariale" des charges sociales sont calculées et encaissées par les entreprises. Inversement, la perception des impôts locaux, quand elle est assurée par l'administration d'état, fait l'objet d'une rémunération de l'état par la collectivité territoriale qui lui confie cette mission, ce qui dans ce cas fait du percepteur une entreprise. En dépit de la légende, la délégation du recouvrement des impôts à une entreprise privée est donc une réalité d'aujourd'hui.

[modifier] Les prélèvements fiscaux

Parce qu’il appartient au droit financier, et détermine les règles selon lesquelles l’État se procure les ressources qui lui sont nécessaires, le droit fiscal peut se définir comme étant le droit de l’impôt – tel étant d’ailleurs, nous l’avons dit, la perception habituelle que le grand public a adoptée du droit fiscal. La question qui se pose, préalablement à toute étude générale du droit fiscal, est donc de définir la notion d’impôt. En droit fiscal, la notion d’impôt s’entend de façon large et est appréhendée sous la notion de prélèvement ; le droit positif distingue à ce sujet cinq grandes catégories de prélèvements :

  • les impôts ;
  • les taxes ;
  • les taxes parafiscales ;
  • les rémunérations ou redevances pour services rendus ;
  • les contributions sociales, lesquelles sont toutefois étrangères au droit fiscal.

Cette diversité structurelle des prélèvements fiscaux n’est pas sans importance, dans la mesure où elle va se répercuter sur le problème de la compétence juridictionnelle de traitement du contentieux fiscal. Cette dernière question, qui consiste à déterminer quel est le juge compétent pour connaître des litiges relatifs aux prélèvements fiscaux, n’est pas importante seulement au regard de la notion de prélèvement fiscal : en effet, la nature même du juge compétent en matière fiscale déterminera la philosophie judiciaire présidant à la jurisprudence fiscale, le juge (judiciaire ou administratif) imprimant le droit fiscal de la philosophie qui lui est propre, qu’il s’agisse d’une philosophie privatiste (pour le juge judiciaire) ou publiciste (pour le juge administratif).

[modifier] Les impôts

La définition de l’impôt est actuellement donnée par l’article 4 de l’ordonnance du 2 janvier 1959, qui dispose que l’impôt est une ressource dont la perception doit être autorisée annuellement par le législateur.

Si la caractéristique essentielle de ce prélèvement dont donc être recherchée dans son caractère purement législatif, elle n’en saurait pas moins constituer un critère déterminant de la nature fiscale d’un prélèvement puisque le pouvoir réglementaire empiète, dans certains cas, irrégulièrement sur la compétence réservée au législateur : l’institution d’un prélèvement par voie réglementaire ne saurait donc exclure celui-ci de la catégorie des impôts ou des impositions de toutes natures.

[modifier] Les taxes

La taxe peut se définir comme étant la contrepartie de l’utilisation d’un service ou d’un ouvrage public, à caractère obligatoire, qui est due dès que le redevable est en situation de profiter du service, même s’il n’en profite pas directement, on parle alors d'usager potentiel du service public.

La taxe se distingue donc de l’impôt dans la mesure où son profit est affecté, alors que celui de l’impôt ne fait pas l’objet d’une affectation particulière.

La taxe se distingue de la redevance car la taxe est payée par toute personne ayant la possibilité d'utiliser le service, la taxe sera donc payée même si l'usager ne veut pas se servir du service (celui qui a la possibilité d'utiliser le service et qui ne le fait pas paie quand même). La redevance en revanche n'est payée que lors de l'utilisation effective de service par l'usager (celui qui n'utilise pas ne paie pas).

[modifier] Les taxes parafiscales

Indépendamment des impôts et des taxes il existait, sous le terme général de parafiscalité, un ensemble de droits, taxes, redevances, prélèvements et cotisations soumis à des règles particulières. Elles étaient perçus dans un intérêt économique et social au profit d’une personne morale de droit public ou de droit privé, autre que l’État, les collectivités locales et leurs établissements publics administratifs.

Ces taxes échappent à la compétence du législateur, qui devait laisser au pouvoir réglementaire le soin de préciser leur assiette, les modalités de leur application et leur taux.

Les taxes parafiscales ont été supprimées depuis la LOLF de 2001, mais leur intérêt pratique est certain, puisque c'est la seule imposition réglementaire. Certes, le principe de légalité de l'imposition s'y oppose (selon l'article 34 de la Constitution) ; mais ce même article dispose que « le législateur organique a la possibilité de compléter, de préciser le contenu de l'article 34 », ce que le Conseil Constitutionnel a rappelé lorsqu'il a examiné l'article 4 de l'ordonnance de 1959, instituant les taxes parafiscales.

[modifier] Les redevances

L’article 5 de l’ordonnance du 2 janvier 1959 précise que la rémunération des services rendus par l’État ne peut être établie et perçue que si elle est instituée par décret en Conseil d'État, pris sur le rapport du ministre des finances et du ministre intéressé. Il s’agit donc d’un prélèvement d’essence purement réglementaire.

Contrepartie de l’utilisation d’un service ou d’un ouvrage public, ces redevances sont soumises au principe de l’équivalence financière entre la somme réclamée et le service rendu, principe qui permet de les différencier de la taxe.

Les juges ne peuvent exercer sur ces prélèvements qu’un contrôle restreint, qui porte sur le rapport entre le taux de la redevance et le coût réel des services qui sont rendus en contrepartie.

[modifier] Sources du droit fiscal français

Le droit fiscal est un droit d’origine législative, la Constitution du 4 octobre 1958 réservant au législateur le pouvoir d'édicter les règles relatives à la détermination, l'assiette et le recouvrement des impositions de toute nature.

La loi constitue donc la source première du droit fiscal, le pouvoir réglementaire ne pouvant intervenir que dans les domaines qui ne sont pas attribués au législateur par la Constitution, et sur renvoi exprès de la loi fiscale. Mais si elle est la source première du droit fiscal, la loi n’en constitue pas pour autant la source exclusive. En effet, d’autres normes peuvent être invoquées à l’occasion d’un litige entre l’Administration fiscale et un contribuable ; tel sera ainsi le cas lorsque le contentieux portera sur la validité des règles dont l’Administration entendra se prévaloir à l’encontre d’un contribuable. Pourront être invoquées la doctrine administrative, la jurisprudence, voire les conventions internationales.

Si le droit fiscal présente, au sein de l’ordre juridique français, un certain nombre d’originalités, celles de ses sources ne sont pas les moindres dans la mesure où le droit fiscal connaît deux catégories de sources, les sources d’édiction et les sources d’interprétation.

[modifier] Sources directes et sources indirectes

Encore appelées sources directes, les sources d’édiction de la règle de droit regroupent la source traditionnelle du droit, à savoir la loi. L’édiction de la règle fiscale est en effet réservée au législateur et au gouvernement, les juges ne pouvant se prononcer par voie de disposition générale ou réglementaire : ce principe, inscrit à l’article 5 du Code civil français, réserve aux juges un pouvoir d’interprétation, qui s’exercera dans le cadre de l’application des règles de droit.

Également appelées sources médiates, les sources d’interprétation sont constituées par la jurisprudence et par la doctrine administrative.

La doctrine n’est pas, en droit fiscal, une source de droit mais les exégètes admettent qu’elle peut influencer le juge et le législateur ; en revanche, les instructions et circulaires de la Direction générale des impôts, voire les réponses ministérielles, si elles ne peuvent participer de sources d’édiction, constituent en revanche une source d’interprétation du droit fiscal.

[modifier] La Constitution

[modifier] Le principe de légalité de l'impôt

Il découle de deux articles : Il découle de deux articles :

  • l'article 34 de la constitution de 1958 qui dispose que : « La loi fixe les règles relatives à l'assiette, au taux et aux modalités de recouvrement des impositions de toutes natures. »
  • l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Tous les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leurs représentants la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée. »

Ce principe rend le Parlement seul compétent pour établir ou lever de nouveaux impôts; cette compétence exclusive du législateur s'entend non seulement de la création d'impôts, mais aussi des règles qui fixent leur modalités: cette compétence exclusive est valable quel que soit le bénéficiaire de l'impôt.

Ainsi, bien que les collectivités locales puissent déterminer elles-même les taux, cela n'atteint pas le principe, étant donné que les collectivités détiennent ce pouvoir par délégation de la part des législateurs et que cela est fait dans la limite du cadre imposé par le législateur. Le législateur peut en outre déléguer la prise de décision relative aux mesures nécessaires à l'application des lois fiscales. Le seul domaine pour lequel le parlement ne peut rien déléguer est la création de nouveaux impôts, qui est de sa seule compétence.

[modifier] Le principe d'égalité devant l'impôt

Il découle de trois articles, dont deux de la DDHC :

  • L'article 1er de la DDHC qui déclare que : Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.
  • L'article 13 de la DDHC qui dit que : la contribution commune doit être également répartie entre les citoyens à raison de leurs facultés
  • L'article 1er de la constitution de 1958 qui dit que : la France assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion.

Malgré tout, ce principe ne signifie d'aucune manière une uniformité de traitement. Sa vocation est plus d'interdire les discriminations injustifiées, selon des critères tels que la religion ou l'ethnie. Ce principe permet donc, a contrario, une discrimination en fonction des capacités contributives de chacun, des situations familiales, de profession, etc. Cela permet donc aussi les discriminations positives qui permettent à ceux qui ont un faible revenu de ne pas payer d'impôt sur le revenu par exemple.

[modifier] Le principe de nécessité de l'impôt

Le Conseil constitutionnel la définit comme découlant de l'article 13 de la DDHC qui dit : pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable.

Ce principe a pour but en particulier de légitimer la levée de l'impôt mais aussi de justifier les droits exceptionnels (dérogeant au droit commun) donné au fisc pour lutter contre la fraude fiscale. Certains juristes jugeaient que cet article ne prévalait que pour les dépenses ayant trait au pouvoir régalien de l'État, mais le conseil constitutionnel a considéré qu'il fallait comprendre cet article dans un sens plus large, qui voulait que les impôts servent bien à financer les dépenses relatives à l'organisation collective, et qu'il soit nécessaire à celles-ci.

[modifier] Le principe d'annualité de l'impôt

Ce principe ne découle pas d'un article le concernant en particulier mais le principe d'annualité budgétaire de l'État est l'un des 4 grands principes des finances publiques. Le Budget de l'État doit en effet être voté chaque année par le Parlement.

Cependant ce principe ne concerne que la levée de l'impôt et non son existence. L'impôt doit donc pour être valablement levé, l'être après le vote du budget par le parlement. Si ce vote n'était pas positif, ce serait simplement la levée de l'impôt pour l'année en cours qui serait frappée d'irrégularité.

Il existe cependant des exceptions au principe d'annualité, comme par exemple lors de la formation ou la séparation d'un nouveau foyer fiscal (mariage / PACS / divorce).

[modifier] La loi

À la différence des lois civiles, dont certaines ont un caractère facultatif et ne sont que supplétives de la volonté des parties, les lois fiscales sont des lois impératives d’ordre public ; à l’instar des règles du droit pénal, les règles du droit fiscal doivent donc être interprétées restrictivement.

Il n’existe pas, en droit fiscal, de loi supplétive.

Ce caractère restrictif interdit par conséquent de raisonner d’un cas prévu à un cas imprévu , autant qu’il interdit d’étendre à une situation qui n’a pas été prévue une solution, doctrinale ou jurisprudentielle, dégagée pour une autre situation. Il implique donc que l’interprétation de la loi ne puisse être effectuée selon un principe d’analogie, réservant ainsi la spécificité des lois fiscales les unes par rapport aux autres autant que l’autonomie de chaque impôt par rapport aux autres impôts. Selon le Conseil d’État, dès lors que les dispositions législatives ne contiennent aucune réserve et ne présentent pas d’ambiguïté, il n’y a pas lieu de rechercher dans les travaux préparatoires de la loi les éléments nécessaires pour en éclairer le sens ; cette position ne formule cependant pas une interdiction totale d’interprétation de la loi fiscale par le juge : le juge administratif peut cependant se réserver la faculté d’interpréter à la lumière des travaux préparatoires une loi dont le texte littéral est clair.

[modifier] La doctrine

La doctrine administrative occupe une place particulière en droit fiscal, dans la mesure où elle ne jouit en principe d’aucune légitimité normative. L’Administration fiscale publie régulièrement des Instructions qui peuvent être envisagées de deux façons différentes :

  • soit l’Administration se borne à donner son interprétation d’un texte, auquel cas la position développée par l’Administration aux termes de l’instruction ne constituera pour le juge qu’un élément d’information ;
  • soit l’Administration entend fixer de véritables normes, auquel cas elle s’arroge un pouvoir réglementaire dont elle n’est pas constitutionnellement investie mais la norme en question pourra être validée si l’autorité qui l’a édictée était investie d’un pouvoir réglementaire. Pour être opposable aux contribuables il convient que la norme administrative ait été suffisamment publiée.

[modifier] La jurisprudence

Le juge trouvera d’autant plus matière à intervenir en droit fiscal que la loi établit un partage de compétence, dans le traitement du contentieux fiscal, entre les juridictions administratives et les juridictions judiciaires.

En droit fiscal, la jurisprudence a la même portée qu’en droit privé, sauf que l’Administration ne s’estime pas systématiquement liée par la jurisprudence. Ainsi, lorsqu’une décision aura été rendue dans un litige entre l’Administration et un contribuable, la solution jurisprudentielle ne s’appliquera pas systématiquement aux autres litiges de même nature survenant entre l’Administration et d’autres contribuables : si ceux-ci entendent se prévaloir de la première solution jurisprudentielle, ils devront invoquer cette solution dans leur litige personnel, jusqu’à ce que le juge leur donne satisfaction.

[modifier] Les conventions internationales

Les conventions fiscales internationales sont des traités internationaux dont l’objet est purement fiscal ; ces conventions doivent donc être distinguées des autres accords internationaux comportant des dispositions fiscales (tels par exemple les accords de coopération, les conventions consulaires).

Les conventions fiscales les plus importantes sont celles dont l’objet est général, c’est-à-dire celles qui règlent les relations entre deux États pour tout ce qui concerne les impôts sur le revenu, les droits de succession, de donation et de timbre. Elles ne traitent cependant ni des taxes sur le chiffre d’affaires, ni des droits indirects car l’application est normalement limitée au seul territoire national, ce qui exclut, en pratique tout phénomène de toute imposition internationale.

Les conventions fiscales internationales se voient en général assigner un triple objectif :

  1. élimination des doubles impositions : l’objet essentiel des conventions fiscales internationales est l’élimination de la double imposition entre les deux États contractants que l’on distingue traditionnellement comme étant, l’un celui de la source et l’autre celui de la résidence. Cette élimination se fait soit par la méthode de l’imputation (le bien ou le revenu est initialement imposé dans les deux États mais la double imposition est effectivement évitée par une imputation de l’impôt acquitté à l’étranger sur l’impôt dû en France) soit par la méthode de l’exonération (les revenus perçus à l’étranger sont exonérés d’impôt en France) ;
  2. Lutte contre la fraude : les conventions établissent les bases d’une coopération entre les États afin de lutter contre l’évasion et la fraude fiscale internationale, rendues d’autant plus faciles et attractives par l’existence de « paradis fiscaux ». Pour cela, elles prévoient, en général, un échange de renseignements et, éventuellement, une assistance au recouvrement. Elles fixent également le cadre dans lequel les États vont coopérer pour assurer une correcte application de la convention, pour en interpréter les dispositions obscures ou imprécises et, en définitive, pour assurer une correcte assiette de l’impôt ;
  3. Protection des contribuables : les conventions protègent les contribuables en fixant le régime fiscal applicable à une transaction, à une opération ou à un investissement déterminés. Elles permettent aux contribuables de connaître à l’avance le régime fiscal, et donc les conséquences financières de leurs activités. En outre, elles contiennent normalement une clause de non-discrimination qui vise à protéger les nationaux français, ainsi que les entreprises contrôlées par les nationaux français, contre les discriminations de nature fiscale qu’ils pourraient subir dans l’autre État du fait de leur nationalité.

[modifier] Directives fiscales communautaires

L'Union européenne (UE) s'est donné un objectif d'harmonisation fiscale au sein des pays membres, ce qui fait que les directives fiscales sont de plus en plus nombreuses. Celles-ci s'imposent au droit national même si les États ont la faculté de les retranscrire à leur manière dans leur droit. Par ailleurs, le Conseil d'État a décidé que le législateur ne pouvait laisser subsister dans le droit national des dispositions contraires à celles des directives européennes, et que l'État pourrait être tenu de réparer les torts causés si de telles dispositions restaient en place.

[modifier] Autonomie du droit fiscal français

Chaque branche spécialisée du droit tend à s'organiser d'une manière originale, à élaborer autour d'un fonds commun constitué de quelques principes fondamentaux ses règles et ses principes particuliers. Lorsqu'une discipline est ainsi régie par ses règles propres, on dit qu'elle est autonome. La portée de cette autonomie se mesure au fait qu'une situation juridique peut être réglée, au regard d'une discipline autonome, autrement qu'au regard de toute autre discipline, même au regard du droit commun : à un problème posé, la discipline autonome apportera des règles qui lui sont spécifiques et qu'aucune autre matière n'est en mesure d'apporter, et ainsi le droit commun ne s'appliquera que dans la mesure où le juge a estimé que ses règles sont valables au regard de la branche juridique autonome.

Si certains glossateurs ont tenté de refuser l’autonomie du droit fiscal, au motif que celui-ci resterait soumis aux règles du droit commun, et en particulier aux règles du droit privé, force est de constater que le droit fiscal non seulement vise à procurer à l’État les ressources nécessaires à son activité mais encore ne comporte aucune règle supplétive : sa place doit donc être recherchée au sein du droit public, plutôt que sous l’autorité du droit privé.

[modifier] Étendue de l'autonomie du droit fiscal

La question de l’autonomie du droit fiscal a été, pendant plus d’un siècle, la pomme de la discorde entre les auteurs, juristes et fiscalistes s’affrontant au sein des clans “autonomistes” et “publicistes” ; en fait, c‘est cette controverse doctrinale qui a porté l‘autonomie du droit fiscal sur les fonts baptismaux.

À l’heure actuelle, les débats sont clos ou, tout au moins, mériteraient de l’être puisque si le droit fiscal a acquis ses galons de discipline autonome, c’est fondamentalement par l'intervention du juge ; En fait, il serait exact de dire que l'affirmation du principe de l'autonomie du droit fiscal est d’origine principalement jurisprudentielle. Cependant, force est de constater que le juge fiscal a été relayé dans sa tâche par le droit fiscal lui-même, celui-ci ayant développé une certaine réalité pratique de son autonomie.

[modifier] Affirmation de l'autonomie du droit fiscal

En pratique, le droit fiscal a affirmé son autonomie face aux règles du droit comptable mais aussi face aux autres branches du droit, et en particulier face au droit commercial et au droit civil, ce qui n’en accrédite pas moins la thèse d’une impossibilité d’assimiler les conceptions du droit fiscal avec celles du droit privé, comme les « privatistes », anti-autonomistes, voudraient le soutenir.

Face au droit du commerce et des affaires, le droit fiscal présente des particularismes dans bien des domaines qui ont cependant tous un point commun, celui de leur domaine qui est l’entreprise :

  • le cheval de bataille des autonomistes réside dans la question de la personnalité de l’entreprise individuelle : sa personnalité fiscale est déduite, par la doctrine, de la reconnaissance par le droit fiscal de la dualité du patrimoine de l’exploitant ;
  • d’autres domaines caractérisent l’antinomie entre le droit fiscal et le droit commercial : la personnalité morale des sociétés, la notion de bénéfices ; mais ces antinomies, si elles peuvent caractériser l’autonomie du droit fiscal par rapport au droit commercial, sont beaucoup moins prononcées que celles qui séparent la fiscalité de la comptabilité.

Nombreux sont cependant les points qui peuvent alimenter le débat sur l’autonomie du droit fiscal : les relations entre le droit fiscal et le droit des sociétés et, en particulier, la question de la personnalité fiscale des sociétés commerciales.

[modifier] Relativisation de l'autonomie du droit fiscal

L’acceptation de l’autonomie ne doit pas conduire à un respect aveugle et excessif des principes du droit fiscal : si l’autonomie implique que le droit fiscal développe une appréhension personnelle des concepts juridiques qui lui sont soumis, elle ne sous-entend pas pour autant le rejet systématique des principes d’interprétation de ces mêmes concepts juridiques issus d’autres branches du droit. Elle a pour corollaire la liberté de définition de son choix, et cette liberté consiste évidemment à élaborer ses propres principes, mais elle n’exclut pas, non plus, la possibilité d’adopter les facteurs d’interprétation que fournit telle ou telle branche du droit.

La relativisation de l’autonomie du droit fiscal a pu résulter tout d’abord de l’arbitrage apporté par le juge fiscal au conflit entre les règles du droit fiscal et celles du droit commun ; mais elle a pu aussi, se passant de l’intervention judiciaire, trouver un fondement dans les rapports entre le droit fiscal et le droit privé.

Rôle du juge. Le juge restreint en effet la sphère d’influence du droit fiscal, autant que le champ d’application de la loi fiscale, afin de « protéger », en quelque sorte, les notions du droit privé. Cette attitude régulatrice du juge fiscal se rencontrera dans deux hypothèses :

a) dans un premier cas, la disposition fiscale litigieuse contient un élément dérogatoire par rapport aux règles comptables de droit privé ; dans cette hypothèse, le juge décidera d’interpréter strictement cette dérogation car il la considère comme une exception à une norme générale – fût-elle non fiscale – et aussi parce que sa grande précision la rend susceptible d’extension. La loi fiscale est alors rigoureusement circonscrite à la sphère qui lui a été expressément assignée par le législateur : le juge ne fait pas appel au droit privé pour le substituer au droit fiscal mais il procède par restriction, en limitant le champ d’application du droit fiscal, de façon à laisser le champ libre à l’interprétation dégagée par le droit privé ;

b) dans un second cas, le juge va estimer que la disposition fiscale ne constitue qu’un rouage parmi d’autres d’un mécanisme global, relevant du droit civil celui-là, et qu’elle doit se combiner avec d’autres pièces constitutives.

L’autonomie du droit fiscal apparaît de ce fait comme limitée par le recours du juge à des concepts ou des éléments d’information non fiscaux. Il n’en demeure pas moins que l’autonomie n’est pas une fin en soi, son intérêt essentiel ne résulte pas de la multiplication des particularismes, mais de ce qu’elle permet l’existence et l’expression des composantes spécifiques du droit fiscal.

[modifier] Conséquence de l'autonomie du droit fiscal

L’application de l’autonomie du droit fiscal porte un nom, ou plutôt se matérialise sous la forme d’un autre principe, celui du réalisme du droit fiscal. Le principe du réalisme du droit fiscal est généralement présenté comme l’équivalent de l’autonomie ; en réalité, si les deux notions sont bien liées entre elles, elles sont dépourvues d’équivalence. En effet, l’autonomie signifie que le droit fiscal ne dépend pas des autres branches du système juridique français pour déterminer ses propres concepts ; quant au réalisme, il apparaît comme la conséquence immédiate de cette autonomie : le réalisme est à la fois la démonstration et la conséquence de l’autonomie du droit fiscal.

Le réalisme est donc une des composantes de l’autonomie du droit fiscal, la condition sine qua non de l’existence du principe d’autonomie du droit fiscal. Si le réalisme n’est pas un principe distinct de celui de l’autonomie, on pourrait se demander s’il existe en lui-même, comme découlant de l’autonomie.

[modifier] Concept de réalisme du droit fiscal

En réalité, le réalisme ne revêt pas les aspects d’un principe à part entière, il n’apparaît que comme une simple caractéristique de l’autonomie du droit fiscal : le droit fiscal adopte une logique interne, propre à sa philosophie personnelle, et c’est cette logique que l’on doit qualifier de réaliste.

L’autonomie du droit fiscal lui confère la faculté de ne pas prendre en considération les qualifications et implications portées par les autres branches du droit sur les situations qui, par définition, sont concrètes avant d’être juridiques. Fort de cette liberté de qualification, le droit fiscal appréhendera la réalité des choses sous un angle spécifiquement fiscal.

[modifier] Objet du réalisme

L’objectif poursuivi par ce principe est d’appréhender le fait, voire de le reconstituer en le dépouillant de la façade juridique derrière laquelle il est dissimulé.

Il en résulte que l’intérêt fiscal de l’État prévaut sur des situations juridiques régies par le droit privé ou même le droit administratif”, la notion d’intérêt fiscal de l’État s’entendant dans un sens politique très général. Le réalisme participe donc d’une méthode d’appréhension, qui se traduit par un abondant recours aux faits, ceux-ci étant privilégiés, par rapport à une autre norme – fût-elle de droit commun – et par rapport aux qualifications données à leurs activités par les sujets de droit. La recherche du fait va cependant s’exercer dans un cadre doté de limites infranchissables, celles-ci ayant pour noms « liberté d’entreprendre », « liberté de gestion », « libre choix du cocontractant » et seuls les abus seront réprimés. La marge d’appréciation du juge est donc étroite et c’est sur la base de l’instruction – destinée à analyser les faits et à reconstituer la démarche du contribuable – que le juge fiscal décidera de confirmer ou d’infirmer la qualification des faits retenue par les parties.

Le réalisme du droit fiscal n’a pour fonction que celle d’assurer le respect de l’égalité de tous devant l’impôt, en permettant une lutte efficace contre la fraude organisé avec des moyens juridiques. Si l’œuvre du juge est fondamentale dans ce domaine, le législateur est venu appuyer son action par l’adoption de dispositions ponctuelles d’essence réaliste.

Pour le juge fiscal, le réalisme du droit fiscal emporte trois séries d’implications pour sa démarche interprétative. Force est cependant de reconnaître que ces trois implications participent toutes d’un même fondement : la lutte contre la fraude, la lutte contre « l’illusion juridique » créée par le contribuable afin de se soustraire à l’impôt.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

Glossaires
Notions
Principaux impôts
Administrations et institutions

[modifier] Liens externes