Aicard d'Arles

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Aicard (° v. 1040 - † 1113), dit Aicard d'Arles ou parfois Aicard de Marseille était un religieux français du Moyen Âge, qui fut archevêque d’Arles officiellement de 1070 à 1080.

Sommaire

[modifier] Biographie

[modifier] Origine

Blason des vicomtes de Marseille
Blason des vicomtes de Marseille

Aicard est fils du vicomte de Marseille Jaufre 1er et de Rixendis de Millau. La famille des Vicomtes de Marseille est fidèle des comtes de Provence et alliée des Baux, les principaux soutiens du siège métropolitain ; elle est richement possessionnée à Arles où elle a inféodé ses biens à plusieurs familles de milites de la cité, dont les Porcelet.

[modifier] Élection et premières années de l'archiépiscopat

A la mort de l’archevêque Raimbaud (1069) et à la suite d’un arbitrage entre les grands et le pouvoir comtal, le siège d’Arles échoit entre 1069 et 1073 (probablement en 1070) à Aicard de la famille des vicomtes de Marseille, famille à l’origine de la majeure partie de la mense canoniale, ce qui ne pouvait manquer de lui attirer les faveurs des chanoines.

Dans ses premières années de gouvernement, Aicard se montre le continuateur de Raimbaud dont il poursuit la politique d’alliance avec les comtes et les Baux, politique illustrée par la partage du castrum à élever sur l’île du Pont-Saint-Geniès, une fois l’île récupérée sur Pons de Fos .

[modifier] Le conflit avec le pape et le comte de Provence

Un soutien d'Aicard, Raymond IV de Toulouse, par Merry-Joseph Blondel. Salles de Croisades, Versailles
Un soutien d'Aicard, Raymond IV de Toulouse, par Merry-Joseph Blondel. Salles de Croisades, Versailles

Pourtant le 1er mars 1079, le pape Grégoire VII écrit au peuple et au clergé de la cité pour trouver un nouveau pasteur « convenable ». Que s’est–il passé ?
Le comte de Provence Bertrand II affaibli recherche l'appui du pape en accusant l'archevêque de simonie : il est en effet triplement opposé à Aicard, d'abord à propos de la nomination de Bermond comme abbé de Montmajour[1], ensuite parce que l'archevêque s'est rapproché de son ennemi Raymond IV, le comte de Toulouse, et surtout parce qu'il redoute la puissance de la famille des vicomtes de Marseille, seigneur d'une partie de la cité arlésienne.
Aicard s'oppose également au Saint Siège. Il faut rappeler le contexte particulier de la fin des années 1070 avec la Querelle des Investitures, querelle dans laquelle l'archevêque Aicard a pris parti pour l'empereur Henri IV contre le pape Grégoire VII. Pour certains toutefois, cette prise de position serait plus un recours contre le durcissement de la papauté vis à vis des pratiques épiscopales provençales (donum) qu’une opposition initiale délibérée contre le pape.
Quoi qu’il en soit, Aicard se trouve en face de deux conflits convergents par opportunisme : un conflit de pouvoir local et une radicalisation des thèses grégoriennes défendues par Grégoire VII.

[modifier] Une condamnation papale non appliquée

La prêche du pape Urbain II au concile de Clermont.
La prêche du pape Urbain II au concile de Clermont[2].

Le prélat arlésien est toutefois soutenu par le peuple, le clergé, les familles des Baux et des Porcelet et le comte de Saint-Gilles, Raimon IV. Ainsi, la ville refuse la destitution de son archevêque prononcée au concile d’Avignon en 1080[3] et interdit l'entrée à Gibelin de Sabran, le nouveau prélat désigné par le pape et soutenu par le comte Bertrand.

Aicard va usurper alors le diocèse d'Arles pendant de nombreuses années. Cette situation est illustrée par exemple quinze ans plus tard, en 1095-1096, lors du passage du pape Urbain II en France. Après avoir débarqué en juillet 1095 à Maguelonne, Urbain II prêche la première croisade[4] et sillonne dans le Midi de nombreuses villes du Languedoc et de Provence (Montpellier, Nimes, Saint-Gilles, Tarascon, Avignon, Aix, Cavaillon, …) tout en évitant soigneusement la cité d'Arles encore aux mains d'un évêque banni. En dépit de l'hostilité de Richard, son oncle maternel désormais abbé de Montmajour, l'archevêque d'Arles bénéficie du soutien de sa famille, les vicomtes de Marseille qui à partir de 1079 désertent l'entourage du comte Bertran[5]. Il faudra attendre 1116 pour voir à nouveau un vicomte de Marseille, en l'espèce Pons de Peynier, figurer aux côté d'un comte de Provence[6].

Aicard cède probablement son diocèse dans les années 1098 - 1099[7], certainement au moment de son départ en Terre Sainte et après que Gibelin se soit fait relever par une Bulle du Pape Urbain II des serments (renoncement à l’archevêché d’Arles) qu’il avait prononcés en 1080 sous la menace des Arlésiens.

On le trouve en Palestine dans les années 1103-1105[8] où il a rejoint le comte de Saint-Gilles Raimon IV. Il revient ensuite à Arles, rapportant notamment une relique de la vraie croix qu'il offre à la cathédrale d'Arles[9], et récupère son diocèse à la fin 1107 après le départ de Gibelin comme légat en Palestine jusqu'en 1113 date présumée de sa mort.

[modifier] Postérité

Encore au milieu du XIIe siècle, le souvenir de l'archevêque au sein du milieu canonial demeure excellent ainsi qu'en témoigne la révérence faite au vénérable archevêque Aicard dans la liste des reliques de la cathédrale d'Arles dressée lors de la translation du corps de saint Trophime en 1152[10].

[modifier] Bibliographie

  • Florian Mazel - La noblesse et l'Église en Provence, fin Xe - début XIVe siècle, CTHS - Histoire (ISBN 2-7355-0503-0)

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes et références

  1. Les comtes considèrent en effet cette riche abbaye qu'ils ont transformée en nécropole familiale comme faisant partie de leur domaine
  2. Illustration de style gothique tardif, extraite du Livre des passages d'Outre-mer (vers 1490), conservé à la BnF
  3. Martin Aurell, Jean-Paul Boyer et Noël Coulet - La Provence au Moyen Âge, page 46 :
    les légals pontificaux, Hugues de Die et Richard de Millau, abbé de Saint-Victor, le déposent sans doute davantage pour son parti pris favorable à Henri IV et à l'antipape Clément III que pour l'irrégularité de son accession à l'épiscopat. Brémond, abbé de Montmajour, proche d'Aicard, est chassé de son monastère par la même occasion.
  4. Cf. Concile de Clermont en novembre 1095
  5. Florian Mazel - La noblesse et l'Eglise en Provence, fin Xe-début XIVe siècle, page 220
  6. Mais entre temps, bien des choses auront changé : mort d'Aicard, avènement d'une nouvelle dynastie de comtes de Provence
  7. Au plus tard le 29 juillet 1099, date du décès d'Urbain II.
  8. Ibidem, page 220 :
    (Aicard) figure en 1103 et 1105 dans les actes passés par le vieux comte (note : le comte de Saint-Gilles, Raimon IV) à Mont Pèlerin, dans le comté de Tripoli.
  9. Ibidem, page 220
  10. Ibidem, page 221

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