Alain le Roux

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Confusion possible avec Alain Fergent dit le Roux, et Alain Le Roux, poète breton

Alain le Roux[1] (Alan Rufus ou Alan the Red en anglais) (vers 1040 – 4 août 1093[2]), lord de Richmond, fut un noble breton qui participa à la conquête normande de l'Angleterre et en devint l'un des plus riches barons.

Sommaire

[modifier] Biographie

Mûrs du château de Richmond, vus depuis le donjon du XIIe siècle.
Mûrs du château de Richmond, vus depuis le donjon du XIIe siècle.

Il était le fils d'Éon Ier († 1079), comte de Penthièvre et régent du duché de Bretagne entre 1040 et 1062, et d'Agnès de Cornouaille, fille du comte de Cornouaille Alain Canhiart. Il était donc issu d'une branche cadette des ducs de Bretagne, et était ainsi parfois désigné comme Comte Alain de Bretagne. Il était aussi cousin au troisième degré de Guillaume le Conquérant[3]. Ses deux frères, Brian son aîné, et Alain le Noir son cadet, furent aussi impliqués dans la conquête de l'Angleterre.

[modifier] Conquête de l'Angleterre

Il est très probable qu'il participe à la bataille de Hastings en 1066 dans laquelle une division bretonne aurait été sous son commandement ou sous celui de son frère Brian[4].

Il est un témoin fréquent des chartes du roi[5], et un membre du cercle des conseillers les plus proches[6] dont la présence est fréquemment requise[7]. En récompense, le Conquérant lui donne de très nombreuses terres dans le Yorkshire qui appartenaient, avant sa révolte, au comte Edwin de Mercie († 1071). En 1086, à la rédaction du Domesday Book, il a 440 seigneuries[8] réparties dans 11 comtés. La majeure partie de ses possessions est concentrée dans le Yorkshire, le Lincolnshire, l'Est-Anglie, et le sud-ouest[9].

[modifier] Honneur de Richmond

Dans le Yorkshire, ses terres (environ 200 seigneuries) forment un très important ensemble compact, ce qui est inhabituel pour l'époque. En général, le Conquérant donnait à ses vassaux des terres dispersées afin qu'en cas de rébellion ils ne puissent les protéger facilement. Cet ensemble, nommé « honneur de Richmond », est l'un des trois plus grands ensembles féodaux créés par le Conquérant. Il comprend 199 seigneuries et 43 autres propriétés, et permet à Alain le Roux d'établir une force militaire puissante dans le nord-ouest du Yorkshire, à la jonction des principales routes venant d'Écosse et entrant dans la vallée d'York[8]. Cet honneur est si important qu'il forme aujourd'hui le Richmondshire. Alain le Roux est ainsi parfois considéré comme comte de Richmond, bien que n'ayant jamais été créé ainsi par le Conquérant.

Certaines de ses terres avaient appartenu à l'anglo-breton Raoul de Gaël, comte d'Est-Anglie, qui les avait perdues lors de sa révolte en 1075[10].

Ces terres font de lui le troisième plus riche baron laïc d'Angleterre, juste devant Guillaume Ier de Warenne[10]. Il a été calculé que ses terres rapportent annuellement 1 200 livres d'argent[10]. Les terres qu'il tient pour lui-même lui rapportent 770 livres, le reste est inféodé à des sous-tenants[11].

Son honneur fut l'un de ceux qui exista le plus longtemps. Alors que les deux honneurs plus importants que le sien n'existaient plus en 1104[12], le sien sera tenu par les descendants de son frère Étienne Ier de Penthièvre, devenus ducs de Bretagne jusqu'en 1399[10].

[modifier] Fin de vie

Il fait construire le château de Richmond qui domine la rivière Swale, à partir de 1071[13]. C'est lui qui le nomme, d'après l'ancien français « Riche Mont ». Le château sera le point central de son honneur et lui donnera son nom.

Vers la fin du règne du Conquérant, il commande l'armée royale qui assiège Hubert de Beaumont-au-Maine, vicomte du Maine retranché dans son château de Sainte-Suzanne[14]. Le siège durera trois ans, et Alain le Roux sera entre-temps remplacé à la tête de cette armée par un autre breton.

En 1093, le roi Malcolm III d'Écosse a prévu de lui donner sa fille Edith (ou Mathilde) d'Écosse en mariage, afin de créer une alliance avec le baron le plus puissant du nord de l'Angleterre. Ce mariage n'aura jamais lieu, car Alain le Roux enlève la nonne Gunhilda, une fille illégitime du roi Harold II d'Angleterre[15], du couvent de Wilton[9]. Édith sera convoitée par Guillaume II de Warenne, et épousera finalement Henri Ier d'Angleterre alors que celui-ci vient tout juste de s'emparer du trône d'Angleterre.

Il meurt sans descendance le 4 août 1093, et est inhumé à l'abbaye de Bury St Edmunds[3]. Son frère Alain le Noir lui succède dans ses possessions, et devient aussi le compagnon de Gunhilda[9], mais il meurt peu de temps après en 1098[15].

[modifier] L'homme le plus riche d'Angleterre ?

Dans un livre intitulé The Richest of the Rich (Les plus riches des riches), Philip Beresford et William D. Rubinstein désignent Alain le Roux comme le particulier[16] le plus riche d'Angleterre de tous les temps. Leur calcul[17] montre qu'en valeur actuelle, sa fortune serait de 81,33 milliards de livres sterling (soit 117 milliards euros)[18]. Guillaume Ier de Warenne, qui arrive deuxième dans cette étude, avait été lui aussi désigné ainsi en 2000[19].

Le calcul est certes spécieux – les quinze premiers du classement vécurent au Moyen Âge, mais démontre que les possessions d'Alain le Roux étaient gigantesques.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes et références

  1. À cause de la couleur de ses cheveux et pour le distinguer de son frère Alain le Noir.
  2. Walter Fröhlich, « The Letters Omitted from Anselm's Collection of Letters », dans Anglo-Norman Studies VI : Proceedinds of the Battle Conference, édité par Reginald Allen Brown, Éd. Boydell & Brewer, 1984, p 65. (ISBN 0851151973).
  3. ab Généalogie et prosopographie des Medieval Lands.
  4. D. C. Douglas, « Companions of the Conqueror », dans History, vol. 28 (1943), p. 129-147, ainsi que dans William the Conqueror, p. 268, ou il affirme qu'il sert dans le contingent breton à Hastings.
  5. J. O. Prestwich, « The Military Household of the Norman Kings », dans The English Historical Review, vol. 96, n°378 (jan. 1981), p. 1-35.
  6. Avec les demi-frères du roi, Richard de Bienfaite, Roger II de Montgommery et Guillaume de Warenne.
  7. D. C. Douglas, William the Conqueror, Londres, 1964, p. 286.
  8. ab Richard Muir, The Yorkshire Countryside, A Landscape History, Edinburgh University Press, 1997, p. 172. (ISBN 1853311987).
  9. abc D. C. Douglas, William the Conqueror, Londres, 1964, p. 267-269 et 426.
  10. abcd J. F. A. Mason, « The 'Honour of Richmond' in 1086 », dans The English Historical Review, vol. 78, n°309 (oct. 1963), p. 703-704.
  11. Robert Fleming, Kings and Lords in Conquest England, Cambridge University Press, 1991, p. 219.
  12. Celui de Robert de Mortain est perdu par son fils Guillaume en 1104; celui de Guillaume Fitz Osbern est perdu par son fils Roger de Breteuil en 1075.
  13. Adrian Pettifer, English Castles, Éd. Boydell & Brewer, 2002, p. 295. (ISBN 0851157823).
  14. Orderic Vital, Histoire de la Normandie, Éd. Guizot, 1826, vol III, tome VI, p. 170-172.
  15. ab Frank Barlow, The Godwins, Pearson Education, 2003, p. 162-163. (ISBN 0582784409).
  16. L'étude porte sur toutes les personnes – monarques exclus – depuis la conquête normande de l'Angleterre en 1066, jusqu'à 2007.
  17. La fortune de chaque candidat fut évalué suivant sa contribution au produit national net du pays quand il mourut, ou quand sa fortune était à son point culminant. Ce pourcentage fut ensuite multiplié par le produit intérieur net de 1999. Celle d'Alain le Roux est évaluée à 7%.
  18. Jaya Narain, « 1066 invader was Britain's wealthiest man in history », dans le Daily Mail, 8 octobre 2007. [(en) Texte de l'article dans le Daily Mail (page consultée le 28 janvier 2008)]
  19. (en) Warlord tops richest ever list, article sur le site internet de BBC News. Vérifié janvier 2008.
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