Thomas Edward Lawrence

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Le colonel T. E. Lawrence dans la robe blanche de Chérif de La Mecque
Le colonel T. E. Lawrence dans la robe blanche de Chérif de La Mecque

Thomas Edward Lawrence (16 août 1888 - 19 mai 1935), également connu comme T. E. Lawrence, et surtout comme le célèbre Lawrence d’Arabie (Lawrence of Arabia), ou encore — parmi ses compagnons arabes — Aurens ou Al-Aurens, est un archéologue, officier, aventurier et écrivain britannique. Il accéda à la notoriété en tant qu’officier de liaison britannique durant la Révolte arabe de 1916 à 1918. L’immense écho que connut son action pendant ces années et après est dû tant aux reportages du journaliste américain Lowell Thomas qu’à son autobiographie Les Sept Piliers de la sagesse (Seven Pillars of Wisdom). T. E. Lawrence est resté très populaire parmi les Arabes pour avoir soutenu leur lutte pour se libérer des jougs ottomans et européens. De même, les Britanniques le considèrent comme un des plus grands héros militaires de leur pays. Un film a été tiré de sa vie en 1962, avec Peter O'Toole dans le rôle-titre : Lawrence d’Arabie.

Sommaire

Avant-guerre

Lawrence naît à Tremadoc, Caernafonshire au Nord du Pays de Galles, de parents d’ascendance anglaise et irlandaise. Son père, Thomas Chapman, est un membre important de l’aristocratie irlandaise qui a quitté sa femme tyrannique afin de vivre avec la gouvernante de ses filles avec laquelle il eut cinq fils. De décembre 1891 jusqu’au printemps de 1894 il habite à Dinard et part pour Aigues-Mortes à vélo.

Lawrence suit des études au Jesus College à Oxford. Il obtient son diplôme avec mention après avoir rédigé une thèse intitulée L’Influence des croisades sur l’architecture militaire européenne à la fin du XIIe siècle (The Influence of the Crusades on European Military Architecture - To the End of the 12th Century).

Il accepte une position post-doctorale sur la poterie médiévale, mais l’abandonne après s’être vu proposer un poste d’archéologue au Moyen-Orient. En décembre 1910, il part pour Beyrouth, qu’il quitte pour Jbail (Byblos). Il participe ensuite aux fouilles de Karkemish ("Kargamis") près de Jerablus, au sud de l’actuelle Turquie, sous les ordres de D.G. Hogarth et R. Campbell-Thompson.

À la fin de l’été 1911, il retourne au Royaume-Uni pour un bref séjour et, dès novembre, il repart pour le Moyen-Orient afin de travailler brièvement avec Williams Flinders Petrie à Kafr Ammar en Égypte. Il retourne à Karkemish travailler avec Leonard Woolley. Il continue à visiter régulièrement le Moyen-Orient afin d’y mener des fouilles jusqu’au début de la Première Guerre mondiale. Ses nombreux voyages en Arabie, sa vie avec les Arabes, à porter leurs habits, apprendre leur culture, leurs langue et dialectes, allaient s’avérer des atouts inestimables durant le conflit.

En janvier 1914, sous couvert d’activités archéologiques, Wooley et Lawrence sont envoyés par l’armée britannique en mission de renseignements dans la péninsule du Sinaï. Lawrence visite notamment Aqaba et Pétra. De mars à mai, Lawrence retourne travailler à Carchemish. Après l’ouverture des hostilités en août 1914, sur le conseil de S.F. Newcombe, Lawrence décide de ne pas s’engager immédiatement et attend octobre pour le faire.

La Révolte arabe

Icône de détail Article détaillé : Révolte arabe.
Emir Fayçal sur un dromadaire - Palestine 1918
Emir Fayçal sur un dromadaire - Palestine 1918

Une fois engagé, il est nommé au Caire où il travaille pour les services de renseignements militaires britanniques. La très bonne connaissance du peuple arabe de Lawrence en fait un agent de liaison idéal entre les Britanniques et les forces arabes. En octobre 1916, il est envoyé dans le désert afin de rendre compte de l’activité des mouvements nationalistes arabes. Durant la guerre, il combat avec les troupes arabes sous le commandement de Fayçal ibn Hussein, un fils d'Hussein ibn Ali (chérif de la Mecque) qui mène une guérilla contre les troupes de l’Empire ottoman. La contribution principale de Lawrence à l’effort britannique consiste à convaincre les Arabes de coordonner leurs efforts afin d’aider les intérêts britanniques. Il persuade notamment les Arabes de ne pas chasser les Ottomans de Médine, forçant ainsi les Turcs à conserver de nombreuses troupes pour protéger la ville. Les Arabes harcèlent le chemin de fer du Hedjaz qui approvisionne Médine, immobilisant davantage de troupes ottomanes pour protéger et réparer la voie. En 1917, Lawrence organise une action commune entre les troupes Arabes et les forces de Auda ibu Tayi (jusqu’alors au service des Ottomans) contre le port stratégique d’Aqaba. Le 6 juillet, après une audacieuse attaque terrestre, Aqaba tombe aux mains des Arabes. En novembre, il est reconnu à Dara alors qu’il mène une mission de reconnaissance déguisé en Arabe. Il parvient malgré tout à s’échapper. Un an plus tard, le 1er octobre 1918, Lawrence participe à la prise de Damas.

Parmi les Arabes, Lawrence adopte nombre de coutumes locales et devient bientôt ami du Prince Fayçal. Il devint connu pour porter des vêtements blancs et monter des chameaux et des chevaux dans le désert. Vers la fin de la guerre, il cherche à convaincre, sans succès, ses supérieurs de l’intérêt de l’indépendance de l’Arabie pour le Royaume-Uni. En juillet 1920, la colonne française du général Mariano Goybet chassera Fayçal de Damas, brisant l’espoir de Lawrence de libérer la Syrie.

L’après-guerre

Lawrence sur sa motocyclette
Lawrence sur sa motocyclette

Dans l’immédiat après-guerre, Lawrence travailla pour le Foreign Office et assista à la conférence de paix de Paris entre janvier et mai 1919 en tant que membre de la délégation de Fayçal. Il fut ensuite conseiller de Winston Churchill au Colonial Office jusque vers la fin de 1921.

À partir de 1922, il essaya de redevenir anonyme. Il s’engagea dans la Royal Air Force sous le nom de « Ross ». Il fut rapidement démasqué et dut quitter la RAF. Sous le pseudonyme de « Shaw », il s’engagea en 1923 dans le Royal Tank Corps. Cet engagement ne lui plaisant pas, il fit de multiples demandes pour rejoindre la RAF et y parvint finalement en août 1925. À la fin de l’année 1926, il fut assigné à une base en Inde, à Miramshah, à la frontière afghane et y resta jusque fin 1928, date à laquelle il fut rapatrié au Royaume-Uni suite à des rumeurs infondées d’espionnage en Afghanistan. Il s’occupa ensuite des bateaux à grande vitesse au sein de la RAF ("Air Sea Rescue" pour le sauvetage des pilotes tombés en mer) et dut quitter à regret l’armée à la fin de son contrat en mars 1935. Quelques semaines plus tard, il fut tué lors d’un accident de moto dans le Dorset. Il avait 47 ans.

T. E. Lawrence et Vo Nguyen Giap

Au-delà du mythe, Lawrence d’Arabie reste l’un des officiers les plus influents dans le développement d’une doctrine insurrectionnelle au siècle dernier. En 1946, le général français Raoul Salan a mené plusieurs entretiens avec le général vietnamien Võ Nguyên Giáp qui a planifié et conduit les opérations militaires contre les Français jusqu’à leur défaite à la bataille de Điện Biên Phủ. Salan faisait partie d’une mission de négociation créée pour finaliser le retour de l’autorité française au Viêt Nam. Plus tard, il commandera le Corps expéditionnaire français au Viêt Nam du 20 mai 1951 jusqu’à mai 1953, et il a conduit la dernière action militaire réussie contre Hô Chi Minh : une offensive nommée opération Lorraine, le 11 octobre 1952, dans laquelle les forces de Salan ont balayé la vallée de la Rivière Rouge et les jungles du Nord-Viêt Nam. L’année suivante, il remettra son commandement au général Henri-Eugène Navarre, qui présidera au désastre de Dien Bien Phu. Giap disait :

  • « […] Lawrence combinait la sagesse, l’intégrité, l’humanité, le courage et la discipline avec l’empathie, soit l’aptitude à s’identifier émotionnellement aussi bien avec les subordonnés qu’avec les supérieurs. »

Pendant ces entretiens de 1946, Salan a été frappé par l’influence d’un homme sur la pensée de Giap ; cet homme était Thomas Edward Lawrence. Giap a dit à Salan :

L’essence de la théorie de la guérilla à laquelle se réfère Giap peut être trouvée à deux endroits. Le premier et le plus accessible n’est autre que les nombreuses éditions des Sept Piliers de la sagesse, notamment le chapitre 33. Le deuxième est un article portant le titre The Evolution of a Revolt, publié en octobre 1920 dans le Army Quarterly and Defense Journal. Tous deux sont basés sur l’évaluation pratique et réfléchie par Lawrence de la situation à laquelle faisaient face les forces arabes dans la région du Hedjaz, au sein du désert saoudien, en mars 1917.


L’écrivain

Lawrence fut un auteur prolifique tout au long de sa vie. Il est l'auteur de Les Sept Piliers de la sagesse (Seven Pillars of Wisdom). Il eut également une correspondance fournie, notamment avec George Bernard Shaw, Edward Elgar, Winston Churchill, Robert Graves et Edward Morgan Forster. Plusieurs recueils épistolaires furent publiés, dont certains furent expurgés par leurs éditeurs.

Il écrivit The Mint, le récit de ses expériences en tant que soldat dans la Royal Air Force. Travaillant à partir de ses notes écrites lors de son service dans la Royal Air Force, Lawrence raconta la vie quotidienne des soldats et son envie de faire partie de la RAF. Ce livre fut publié à titre posthume. Lawrence traduisit aussi L’Odyssée d’Homère et Le Gigantesque, un roman français peu connu, par Adrien le Corbeau.

La possible homosexualité de Lawrence

Sheikh Ahmed (Dahoum) - photographié par Lawrence
Sheikh Ahmed (Dahoum) - photographié par Lawrence

Certains passages des écrits de Lawrence et des rapports d’un de ses collègues qui lui aurait administré des « fessées » laissent à penser que Lawrence avait des goûts sexuels non-conventionnels, notamment le masochisme. Bien que ses écrits comprennent un passage clairement érotique et homosexuel (voir citation), ses orientations et expériences sexuelles restent inconnues.

Les Sept Piliers de la sagesse sont dédiés à "S.A.", avec un poème qui commence par :

"I loved you, so I drew these tides of men into my hands
and wrote my will across the sky in stars
To gain you Freedom, the seven-pillared worthy house,
that your eyes might be shining for me
When I came." [1]

(Dans certaines éditions des Sept Piliers de la sagesse, la dernière ligne de ce poème est "When we came" ("Quand nous sommes arrivés"). L’édition de 1922 publiée à Oxford a cependant "When I came". Le poème complet est composé de 4 strophes).

L’identité de "S.A." n’a jamais été élucidée. Il a été supposé que ces initiales correspondent à un homme, une femme, une nation ou une combinaison des précédents. "S.A." pourrait être "Sheikh Ahmed", également appelé Dahoum, un jeune arabe qui travailla avec Lawrence dans un chantier archéologique avant la guerre et dont Lawrence aurait été très proche. Dahoum mourut en 1918 du typhus. Cependant, certains affirment que Dahoum était seulement un ami très proche de Lawrence comme cela arrivait au XIXe siècle et au début du XXe siècle, ce qui impliquait souvent des contacts physiques (mais à caractère non-sexuel). Lawrence lui-même, peut-être pour masquer les pistes, affirma que "S.A." était un personnage inventé.

Anecdotes

D'après le dossier médical militaire du 12 mars 1923 de Lawrence, il mesurait 1 mètre 66, pesait 59 kg et avait des « cicatrices sur les fesses », « trois cicatrices superficielles dans le bas du dos » et « quatre cicatrices superficielles sur le côté gauche ». De plus, il était circoncis.

Depuis 1923, Lawrence s'était découvert une passion pour les motocyclettes. Il en eut sept, qu'il baptisa toutes du nom George, et d'un numéro selon l'ordre de possession. En mai 1935, alors qu'il roulait à grande vitesse sur la moto « George VII », il perdit le contrôle de sa machine en voulant éviter deux jeunes cyclistes. Il mourut quatre jours plus tard des suites de son accident.

Notes et références

  1. « Je t'aimais ; c'est pourquoi, tirant de mes mains ces marées d'hommes,
    J'ai tracé en étoiles ma volonté dans le ciel
    Afin de te gagner la Liberté, la maison digne de toi, la maison aux sept piliers
    Ainsi tes yeux brilleraient peut-être pour moi
    Lors de ma venue »

Œuvres

s:Accueil

Wikisource propose un ou plusieurs textes écrits par Thomas Edward Lawrence.

Film tirés de la vie de T.E. Lawrence

Cinéma

Films télévisés

  • A Dangerous Man: Lawrence After Arabia, (1990)
  • Lawrence of Arabia: Master Illusionist, (1983)

Documentaires

  • Great Adventures of the 20th Century: Lawerence of Arabia, (1996)

Voir aussi

Lien externe

Bibliographie

  • Raphaël Lahlou, Lawrence d’Arabie ou l’Épopée des sables, Paris : B. Giovanangeli, coll. Biographies express, 2005, 143 p. (ISBN 2-909034-72-0)
  • Patrick et Olivier Poivre d’Arvor, Lawrence d’Arabie, la quête du désert, Mengès
  • Jacques Benoist-Méchin, Lawrence d’Arabie ou le Rêve fracassé (première biographie du Rêve le plus long de l’Histoire)
  • Philippe Squarzoni, Portrait inconnu de John Hume Ross, Édition Le 9e Monde, Paris, 2006
  • Guy Penaud, Le Tour de France de Lawrence d’Arabie, 336 pages, Éditions de la Lauze, Périgueux, 2007/2008, (ISBN 97 8-2-35 249-024-1)
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