Lébous

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Lébous

Pêcheurs lébous à Yoff. Au fond, la mosquée layène
Population totale 90 000[1]
Populations significatives en Sénégal
Langue wolof
Religion islam
Groupes ethniques relatifs Wolofs

Les Lébous constituent une partie de la communauté wolof au Sénégal. Traditionnellement pêcheurs mais aussi agriculteurs, ils sont concentrés dans la presqu'île du Cap-Vert (Dakar) qu'ils occupaient à l'arrivée des premiers colons dans la région. Ils parlent un dialecte wolof et sont aujourd'hui musulmans, mais ont conservé des traditions issues de leurs origines animistes.

Sommaire

[modifier] Ethnonyme

Le mot lebu pourrait venir de leb qui signifie « conter » en wolof, dans le sens de dire des fables, dissimuler. D'autres explications rattachent le terme à la notion de « défi », en écho à la farouche volonté d'indépendance de ce peuple[2].

[modifier] Distribution géographique

Selon le recensement de 1988 au Sénégal, les Lébous étaient 56 758, sur une population totale de 6 773 417 habitants, soit 0,8 %[3]. D'après d'autres sources, leur nombre est estimé à 90 000[4].

Ils sont essentiellement présents sur la presqu'île du Cap-Vert, mais de façon générale, on les trouve sur tout le littoral entre la Petite-Côte et la ville de Saint-Louis.

[modifier] Histoire

Les Lébous, comme la plupart des peuples de la Sénégambie, ont d'abord quitté la vallée du Nil en Égypte, pour arriver dans la vallée du fleuve Sénégal où s'était constitué le Tekrour. Ils y ont cohabité avec les Sérères, les Peulhs, les Toucouleurs, les Mandingues et les Wolofs à l'époque de l'empire du Ghana.

Dès le XVe siècle les Lébous, appelés Barbeçin par les navigateurs portugais, sont présents sur la presqu'île du Cap-Vert. Les Lébous sont issus d'un groupe de Wolofs qui, après l'éclatement de l'empire du Djolof, considéraient qu'ils n'y étaient plus en sécurité. Pour cette raison, ils ont fui le Djolof pour s'installer au Cayor où ils ont mené une dure bataille contre le damel du Cayor, Ngoné Ndella Coumba Fall, qui leur a enfin cédé la presqu'île du Cap-Vert en 1812, fondant ainsi la république léboue avec comme capitale Ndakarou, lieu où allait être construit plus tard la ville de Dakar. Les Lébous ont constitué une république avec un système original de partage des pouvoirs entre le Grand Serigne, chef supérieur de la Communauté (Seriñ Ndakaaru), le Parlement national et les assemblées locales (les peñc).

Ils ont été avec les Sérères de la Petite-Côte le principal frein à la traite négrière de Dakar à la Petite-Côte.

Le Royaume de Cayor, État négrier, a parfois réussi à s'emparer de la presqu'île du Cap-Vert, obligeant les Lébous à s'enfuir sur la Petite-Côte et sur l'île de Gorée toute proche, où se trouvaient les signares, femmes métissées descendant des premiers mariages entre commerçants européens et femmes noires du Sénégal, souvent d'origine lébou et sérères.

C'est Matard Diop dit Eliman, un imam de Dakar du début du XIXe siècle qui autorisa la création du cimetière de Bel-Air à Dakar en 1820 à la demande des signares de Gorée. C'est encore lui qui permit aux congrégations catholiques de prendre pied à Dakar à la demande de la signare Anna Colas Pépin, nièce de Anne Pépin résidant à Gorée.

[modifier] Langue

Les Lébous parlent le wolof lebu, un wolof avec l'accent lébou, où l'on trouve des mots inexistants dans le wolof authentique.

[modifier] Patronymes

Cette population particulière participa activement au développement de Dakar. Voici pourquoi on trouve des patronymes de grandes familles léboues parmi les fondateurs de capitale.

Parmi les noms de familles souvent portés par les Lébous, on relève notamment : Ndoye, Diene, Gueye, Bakhoum, Diagne, Samb. Le nom Diagne est d'origine maure, même si beaucoup de Wolofs et de Lébous portent ce nom. À part cela, seul le nom Ndoye est véritablement et typiquement lébou. Les noms Diene et Bakhoum sont d'origine sérère. Lébous et Wolofs portent souvent les mêmes noms. C'est ainsi que Gueye, Mbengue, Gaye et Samb sont aussi portés par des Wolofs et que par ailleurs beaucoup de Lébous portent les noms typiquement wolof, Ndiaye et Diop.

Parmi les personnalités d’origine léboue figurent notamment le cinéaste Moustapha Ndoye, la femme de lettres Mariama Ndoye qui à consacré sa thèse à la littérature orale lébou[5], l’homme politique Doudou Ndoye, le musicien Wasis Diop et son frère le cinéaste Djibril Diop Mambéty, le député-maire de Dakar, Pape Diop, l’écrivain Abdoulaye Sadji (par sa mère), né à Rufisque, ou la femme politique française Rama Yade, née à Ouakam.

[modifier] Valeurs, traditions, croyances

Fresque layène dans la rue Seydina Mandione Laye à Yoff
Fresque layène dans la rue Seydina Mandione Laye à Yoff

Bien qu'ils soient un sous-groupe des Wolofs, ils ont toujours entretenu avec les Wolofs des rapports belliqueux. Les Lébous sont réputés pour leur fierté, leur indépendance et leur rigueur aux travail.

Les traditions restent vives et certaines maladies mentales continuent d'être traitées chez les Lébous par des cérémonies rituelles de guérison, telles que le ndëp[6].

D'abord animistes, les Lébous se sont convertis à l'islam entre le XVIIe siècle et la fin du XXe siècle. Ils ont été convertis par les Musulmans de la province du Diambour au Cayor, venus s'installer sur la presqu'île, et les Maures commerçants qui venaient à cet endroit avec leurs caravanes.

Ils adhèrent pour la plupart à la confrérie musulmane soufie layène[7], qui est bien implantée à Yoff – aujourd'hui une commune d'arrondissement de Dakar – et dont le fondateur est Seydina Limamou Laye.

[modifier] Activités

Traditionnellement ils vivaient surtout de la pêche et de l'agriculture. Certains pratiquent l'élevage.

[modifier] Notes

  1. Christian Saglio, Sénégal, Grandvaux, 2005, p. 24
  2. C. Saglio, Sénégal, op. cit., p. 24
  3. Chiffres de la Division de la Statistique de Dakar cités dans Peuples du Sénégal, Éditions Sépia, 1996, p. 182
  4. C. Saglio, Sénégal, op. cit., p. 24
  5. Introduction à la littérature orale léboue. Analyse ethno-sociologique et expression littéraire, Dakar, Université de Dakar, FLSH, 1983, 378 p. (3e cycle de Lettres modernes) [1]
  6. András Zempleni, « La dimension thérapeutique du culte des Rab, Ndëp, Tuuru et Samp. Rites de possession chez les Lébou et les Wolofs », dans Psychopathologie Africaine, vol. II, n° 3, 1966
  7. Claude Laborde, La confrérie layenne et les Lébous du Sénégal. Islam et culture traditionnelle en Afrique, Karthala, 1997

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Bibliographie

  • (fr) Armand-Pierre Angrand, Les Lébous de la presqu'île du Cap-vert. Essai sur leur histoire et leurs coutumes, Dakar, Éd. La Maison du livre, 143 p.
  • (fr) Birahim Ba, La société lébu. La formation d’un peuple. La naissance d’un État, Dakar, Université de Dakar, 1972, 206 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • (fr) Georges Balandier et Pierre Mercier, Particularisme et évolution : les pêcheurs Lébou (Sénégal), IFAN, Saint-Louis du Sénégal, 1952
  • (fr) Adama Baytir Diop, La prise de position de la collectivité lebu en faveur du “oui” lors du référendum de 1958. Essai d’interprétation, Dakar, Université de Dakar, 1985, 51 p. (Diplôme d’Etudes Approfondies)
  • (fr) Adama Baytir Diop, La communauté lebu face aux développement de la politique coloniale : la question des terrains de Dakar (1887-1958), Dakar, Université Cheikh Anta Diop, 1995, 277 p. (Thèse)
  • (fr) Claude Laborde, La confrérie layenne et les Lébous du Sénégal. Islam et culture traditionnelle en Afrique, Karthala, 1997 (ISBN 2865377121)
  • (fr) Colette Le Cour Grandmaison, Rôles traditionnels féminins et urbanisation. Lébou et wolof de Dakar, Paris, EPHE, 1970, 4+310+23 p. (Thèse de 3e cycle, publiée en 1972 sous le titre Femmes dakaroises : rôles traditionnels féminins et urbanisation, Abidjan, Annales de l’Université d’Abidjan, 249 p.)
  • (fr) M. Mbodji, « Tiané, une jeune fille en quête d'initiation : Rêver chez les Wolof-Lébou, ou comment communiquer avec les ancêtres ? », dans Psychopathologie Africaine, 1998-1999, vol. 29, n° 1, p. 7-21
  • (fr) Mariama Ndoye Mbengue, Introduction à la littérature orale léboue. Analyse ethno-sociologique et expression littéraire, Dakar, Université de Dakar, 1983, 378 p. (Thèse de 3e cycle)
  • (fr) Médoune Paye, La collectivité lebu de Dakar : organisation, rôle politique dans les élections municipales de 1925 à 1934, Dakar, Université Cheikh Anta Diop, 2001, 118 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • (fr) Ousmane Silla, Croyances et cultes syncrétiques des Lébous du Sénégal, Paris, EPHE, 1967, 517 p. (Thèse de 3e cycle)
  • (fr) Assane Sylla, Le peuple Lébou de la presqu'île du Cap-Vert, Dakar, Les Nouvelles Éditions Africaines du Sénégal, 1992, 135 p.
  • (fr) Tamsir Sylla, Introduction à un thème négligé : révoltes et résistances en milieu lebou au XIXe siècle. Approche critique des sources, Dakar, Université Cheikh Anta Diop, 1990, 36 p. (Mémoire de DEA)
  • (fr) Ibrahima Thiam, Ousmane Diop Coumba Pathé, personnalité politique lebu : 1867-1958, Dakar, Université de Dakar, 1987, 46 p. (Diplôme d’Études Approfondies)
  • (fr) Guy Thilmans, « Étude de quelques crânes lébou (Sénégal) », Bulletin de l'IFAN, 1968, t. 30, série B, 4, p. 1291-1297

[modifier] Liens externes

UNESCO)