Droits des animaux et Shoah

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PETA montre côte à côte une image d'enfants derrière des barbelés dans un camp de concentration et un enclos avec des cochons.
PETA montre côte à côte une image d'enfants derrière des barbelés dans un camp de concentration et un enclos avec des cochons.

Le traitement des animaux et la Shoah ont été comparés par des écrivains et par des groupes de défense des Droits des animaux.

Sommaire

[modifier] Opinions

La comparaison est considérée comme contestable et a été critiquée par plusieurs organisations telles que la Ligue antidiffamation (Anti-Defamation League – ADL) et l'United States Holocaust Memorial Museum (Musée du Mémorial de l'Holocauste des États-Unis)[1] [2]. L'ADL a écrit que l'utilisation croissante de l'imagerie de la Shoah par les activistes des Droits des animaux est une « exploitation perturbatrice » d'un drame[3].

Roberta Kalechofsky de l'association "Les Juifs pour les Droits des animaux" affirme que bien qu'il y ait un « tissu conjonctif » entre les souffrances des animaux et la Shoah, ils font partie de « deux schémas historiques différents, et la comparaison entre les deux atténue …la force de l'antisémitisme »[4]. Elle est considérée comme une banalisation de la Shoah.

[modifier] Comparaison

La comparaison entre la Shoah et le traitement des animaux par les hommes a été faite par de nombreuses personnes et groupes.

L'auteur juif Isaac Bashevis Singer, qui reçu le prix Nobel de littérature en 1978 et qui était lui-même végétarien, a établit cette comparaison plusieurs fois dans ses histoires, telles que "Ennemies, une histoire d'amour", "Le Pénitent" et "The Letter Writer". Dans "The Letter Writer", le protagoniste dit: « Dans les relations avec les animaux, tous les gens sont des nazis; pour les animaux, c'est un éternel Treblinka »[5]. Dans "Le Pénitent", le protagoniste exprime la même idée: « quand on en vient aux animaux, tout homme est un nazi »[6].

John Maxwell Coetzee, qui a reçu le prix Nobel de littérature en 2003, écrit:

« ... au XXe siècle, un groupe d'hommes puissants et sanguinaires en Allemagne ont eu l'idée d'adapter les méthodes des parcs à bestiaux, tels qu'ils avaient été développés et perfectionnés à Chicago, pour le massacre, ou ce qu'ils préféraient nommer, le "traitement" des êtres humains[7]. »

L'ADL liste un nombre de groupes de défense des Droits des animaux qui ont fait cette comparaison. L'Animal Liberation Front (Front de Libération des Animaux) se présente dans le magazine No Compromise sous ces termes: « Si nous pénétrons illégalement, de même faisaient les soldats qui firent sauter les portes des camps de la mort d'Hitler; Si nous sommes des voleurs, de même étaient les membres du Chemin de fer clandestin (Underground Railroad) qui libéraient les esclaves du Sud; Et si nous sommes des vandales, de même étaient ceux qui détruisirent à jamais les chambres à gaz de Buchenwald et d'Auschwitz »[3].

En 2001, le site "Meat.org" incorpore une section "Shoah animale" contenant des photographies d'animaux avec des légendes comme "Victime de la Shoah", et affirmant qu'il est « facile de voir la ressemblance entre la destruction et le massacre systématique de six millions de Juifs par les nazis avant et pendant la Seconde Guerre mondiale et les 20 millions d'animaux qui sont exécutés chaque jour uniquement en Amérique. De nombreux Juifs pendant la Shoah furent transportés dans des camions à bestiaux vers les camps de concentration et leur mort. Les camps de concentrations ressemble énormément aux abattoirs ordinaires de nos jours »[3].

La Consistance dans la Campagne de Compassion (CCC), un projet du Réseau des Droits des Animaux du Nord-ouest, situé à Seattle dans l'État de Washington, affirme que « la Shoah représente beaucoup plus que ce seul événement. Elle représente un lieu et une période quand la pensée suprématiste était si incrustée dans une culture, que les gens étaient aveugles ou apathiques au diable qui existait dans leur monde de tous les jours. Cette sorte de pensée n'est pas exclusive à juste cette période et ce lieu. La grande région aveugle de notre pays et de la civilisation occidentale correspond au mauvais traitement et au dédain pour les animaux non-humains »[3].

[modifier] PETA et l’utilisation de l’imagerie de la Shoah

Ingrid Newkirk, la présidente de People for the Ethical Treatment of Animals (PETA), a elle-même fait cette comparaison de façon claire en disant: «  Six millions de Juifs sont morts dans les camps de concentration, mais six milliards de poulets à rotir vont périr cette année dans les abattoirs »[8].

PETA a utilisé l'imagerie de la Shoah par deux fois dans ses campagnes. En juillet 2003, une publicité télévisée de PETA passée sur plusieurs chaînes câblées américaines appelée: « Ils vinrent nous chercher la nuit », racontée par un homme décrivant ce qu’il a ressenti lorsqu’il fut transporté sans eau et sans nourriture[9].

La même année, l’exposition de PETA, "La Shoah dans votre assiette", se composait de huit panneaux d'environ six mètres carrés chacun, juxtaposant des images de la Shoah et des images d'animaux dans des fermes d'élevage intensif. Les photographies des détenus dans les camps de concentration étaient affichées à coté de photographies de poulets élevés en batterie, et les photographies de corps empilés des victimes de la Shoah, à coté d'une pile de carcasses de porcs. Les légendes prétendaient que « comme les Juifs tués dans les camps de concentration, les animaux sont terrorisés quand ils sont parqués dans des immondes entrepôts et rassemblés pour être envoyés à l’abattoir. Le canapé et le sac en cuir sont les équivalents moraux des abat-jour fabriqués avec la peau des personnes tuées dans les camps d’extermination »[10].

L’exposition était financée par un philanthrope juif anonyme[11], et créée par Matt Prescott, qui perdit plusieurs de ses parents dans la Shoah. Prescott a déclaré: « C'est exactement la même façon de voir les choses qui a rendu possible la Shoah, que nous pouvons faire ce que nous voulons à ceux que nous décidons être 'différents ou inférieurs'. C'est ce qui nous autorise à commettre tous les jours des atrocités sur les animaux…Le fait est que tous les animaux ressentent de la souffrance, de la terreur et de la solitude. Nous demandons aux gens de reconnaître que ce qui a été fait aux Juifs et à d'autres personnes pendant la Shoah est ce qui est fait journellement aux animaux dans les fermes d'élevage intensif »[11].

Abraham Foxman, président de la Ligue antidiffamation s'est plaint que l'exposition était « outrageusement offensive et portait la "chutzpah" (le culot) à de nouveaux sommets…Les efforts de PETA à comparer le massacre systématique et délibéré de millions de Juifs au problème des droits des animaux est odieux »[11]. Stuart Bender, conseiller juridique du United States Holocaust Memorial Museum, a écrit à PETA leur demandant « d'arrêter et de renoncer à ce détournement abusif des images de la Shoah »[2].

En 2005, Ingrid Newkirk s'excusa pour l'affliction que la campagne a pu causer à certaines personnes, en écrivant:

« Aussi dur qu'il soit de comprendre pour ceux qui ont été profondément peinés par cette campagne, j'ai été retourné par la réception négative faite par de nombreuses communautés juives. Cela était involontaire et imprévu. L'état-major de PETA qui proposa ce que nous avons fait, était juif et le mécénat de l'exposition était juif. Nous avons fait attention de prendre des auteurs et des historiens juifs et des citations de victimes et de survivants de la Shoah…Nous pensons que nous, humains, pouvons et devons utiliser nos capacités distinctives pour réduire la souffrance dans le monde…Notre mission est une mission profondément humaine; maintenant nous savons que nous avons causé de la peine. Ceci n'a jamais été dans nos intentions et nous en sommes profondément désolés. Nous espérons que vous pourrez comprendre que bien que nous nous soyons embarqués dans le projet "La Shoah dans votre assiette" avec une idée fausse sur ce que serait son impact, nous essayons toujours d'agir avec probité, dans le but d'améliorer la vie de ceux qui souffrent. Nous espérons que ceux que nous avons peinés auront à cœur de travailler dans le but d'un monde meilleur pour tous, quelque soit l'espèce[12] [13]. »

[modifier] Notes

  1. (en): Charles Patterson: Eternal Treblinka, Lantern Books, 2002.
  2. ab (en): Willoughby, Brian. "PETA Turns Holocaust into Pig Pen", Tolerance.org, un projet inthernet du Southern Poverty Law Center, 7 mars 2003, consulté le 17 août 2006.
  3. abcd (en): "Holocaust Imagery and Animal Rights", Ligue antidiffamation, 2 août 2005, consulté le 17 août 2006.
  4. (en): Roberta Kalechofsky: Animal Suffering and the Holocaust: The Problem with Comparisons, Micah Publications, 2003.
  5. (en): Charles Patterson, (2002): Eternal Treblinka, Lantern Books, pp. 181-188
  6. (en): Isaac Bashevis Singer (1983). The Penitent, Farrar, Straus, Giroux. p. 39 (Traduction française: Le Pénitent; éditeur : Stock; 26 septembre 1984; collection : Nouveau cabinet cosmopolite; broché: 165 pages; ISBN-10: 223401736X; ISBN-13: 978-2234017368)
  7. (en): J.M. Coetzee, Exposing the beast: factory farming must be called to the slaughterhouse, The Sydney Morning Herald, 22 février 2007, consulté le 25 février 2007.
  8. (en): Shafran, Avi. Cette fois, PETA est coupable de rater son objectif, j., 20 mai 2005.
  9. (en) : "Ils vinrent nous chercher la nuit", PETAtv.com, consulté le 17 août 2006.
  10. (en) : Wesley J. Smith "PETA aux cannibales: Ne les laissez pas manger du steak", San Francisco Chronicle, 21 décembre 2003.
  11. abc (en) : David Teather "'La Shoah dans une assiette' met en colère les Juifs américains", The Guardian, 3 mars 2003.
  12. (en): Ingrid Newkirk. "Apologie pour une comparaison de mauvais goût", Israelinsider, 5 mai 2005.
  13. (en): Communiqué de presse de la Ligue antidiffamation, "Imagerie de la Shoah et Droits des animaux", ADL Website, 2 août 2005, consulté le 17 août 2006
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