Freissinières

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Freissinières
Carte de localisation de Freissinières
Pays France France
Région Provence-Alpes-Côte d'Azur Provence-Alpes-Côte d'Azur
Département Hautes-Alpes Hautes-Alpes
Arrondissement Briançon
Canton L'Argentière-la-Bessée
Code Insee 05058
Code postal 05310
Maire
Mandat en cours
Cyrille Drujon d'Astros
2008-2014
Intercommunalité Communauté de communes du Pays des Écrins
Latitude
Longitude
44° 45′ 18″ Nord
         6° 32′ 16″ Est
/ 44.755, 6.53777777778
Altitude 936 m (mini) – 3 236 m (maxi)
Superficie 88,21 km²
Population sans
doubles comptes
169 hab.
(1999)
Densité 1 hab./km²

Freissinières est une commune française, située dans le département des Hautes-Alpes et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Elle doit son nom aux nombreux frênes noirs (fraxinus niger) qui la couvrent.

Sommaire

[modifier] Géographie

La commune de Freissinières, dans la vallée de Freissinières, correspond au bassin versant de la Biaisse, rivière qui prend sa source au col d'Orcières et qui se jette dans la Durance entre La Roche-de-Rame et Saint-Crépin.

D'est en ouest, on découvre une plaine alluviale d'environ 80 hectares bordée au sud par des forêts de mélèzes, de pins et de sapins, tandis que le versant nord ne présente qu'une façade aride et rocheuse ; néanmoins au début du siècle dernier, la vigne y était cultivée jusqu'à 1200m.

Au niveau du hameau des Meyries, la vallée s'élargit sur le versant nord qui porte une végétation assez dense de peupliers, de frênes et de noyers surtout. Ce secteur de la vallée, appelé la "Poua", bien exposé au sud, offrait encore au siècle dernier des terres bien cultivées jusqu'au niveau des pâturages, vers le col d'Anon.

Après le hameau des Ribes, la vallée se rétrécit sans cesse le long du cours de la Biaisse, jusqu'au fond de la vallée. Les terres cultivables étaient rares, les avalanches de neige et les éboulements recouvrant de pierres et de graviers les champs et les prés ; les deux petits hameaux des Viollins et des Mensals sont d'ailleurs situés dans les rares zones abritées.

Après ce village, la vallée cesse brusquement au niveau du parking (1441 m), la Biaisse descendant en cascade depuis le hameau de Dormillouse situé à 1727 m. Au niveau de ce hameau, la vallée se subdivise, la Biaisse remontant son cours, plein ouest, jusqu'au col d'Orcières (2782 m) tandis que, venant du sud, le petit torrent des Oules charrie les eaux sorties des lacs de Faravel et de Palluel. Tout ce secteur, dominé par les hauts sommets du pic Félix Neff (3243m), du Grand Pinier (3117m) et du Petit Pinier (3100m) est aujourd'hui incluse dans la zone centrale du Parc national des Écrins. Enfin, il ne faut pas oublier, au sud du hameau des Viollins, la belle montagne de Val-Haute, dominée par la Tête de Vautisse (3156m).

[modifier] Histoire générale

A la Préhistoire.

Jusqu'il y a peu, la plus ancienne trace de l'homme à Fressinières remontait au deuxième âge du fer (400 à 120 av. J.C), avec le magnifique torque en argent massif mis à jour à Pallon au XIXème siècle.

Des découvertes réalisées, entre 1998 et 2003, par des bénévoles et des chercheurs des universités d’York et d’Aix-en-Provence, ont permis de faire un bond en arrière considérable, pour remonter à 12 000 ans avant J.C. Ces chercheurs ont en effet trouvé deux outils en silex qu’ils attribuent au Paléolithique supérieur. Ces objets se trouvaient dans les ruines d’une petite cabane en blocs de schiste d’environ 9m², située au Fond de la Cabane, à 2km environ à l’ouest du Petit Pinier, au-dessus du torrent du Ruffy. Des hommes auraient fréquenté la montagne de Faravel, à plus de 2300m d’altitude à la fin de la dernière glaciation de l’ère quaternaire. L’homme de Faravel vivait donc 8 000 ans avant Ötzi, l’homme dont le corps a été découvert en 1991 dans un glacier du massif des Dolomites. Des traces d’une présence humaine au Mésolithique, soit 9 000 ans environ avant J.C., ont également été mises à jour par la même équipe de scientifiques, toujours sur le plateau de Faravel, mais sur deux autres sites situés à environ 2km au nord du précédent. Les traces de la présence humaine au Néolithique, la dernière période de la Préhistoire, deviennent plus nombreuses, toujours sur le plateau de Faravel, mais aussi cette fois dans la haute vallée du torrent de Chichin, avant la cabane et sur la rive gauche du torrent. Les chercheurs ont trouvé des éclats de pierres, ce qui montre que l’homme fabriquait alors ses outils en pierre sur place, mais aussi qu’il y demeurait au moins temporairement, contrairement à ses prédécesseurs qui ne faisaient que passer. Cet homme faisait donc partie des dernières populations de chasseurs-cueilleurs et, certainement, des premiers bergers. Les premiers hommes qui ont laissé des traces à Freissinières venaient très certainement, et logiquement, du sud de la France actuelle. Ils avaient remonté le cours de la Durance au fur et à mesure du retrait des glaciers, à la recherche de gibier ou de plantes car ils trouvaient sur les hauteurs une faune abondante et des torrents poissonneux ; ils chassaient le bouquetin et la marmotte et, plus rarement, le renne, le chamois et le cerf.

Les Ligures et les Celtes

Les Lombards

Dormillouse, un des treize hameaux de la commune, aurait été fondé par les Lombards, au VIe siècle, village qu'ils appelèrent d'ailleurs « Dormil », d’où est venu Dormillouse. Il n'y a aucune trace écrite de la fondation de Dormillouse par les Lombards, mais quand on sait le nombre de fois qu'ils sont passés le long de la Durance en venant de Montgenèvre, on ne peut écarter, a priori, l'hypothèse que certains d'entre eux soient montés à Dormillouse et y aient fait souche. Quant au nom de "Dormil", s'il est évident qu'il a pour origine des radicaux pré-indoeuropéens ayant le sens de roche, hauteur, montagne, il est difficile de savoir si ce sont les Lombards, ou d'autres, qui les ont utilisés les premiers pour désigner leur hameau. On ne peut non plus exlure qu'il vienne du mot « dormillosa », qui signifie marmotte en provençal, et qui a en fait pour origine les deux mêmes radicaux pré-indoeuropéens. Quand on connaît l’abondance de ce sympathique rongeur à Dormillouse, il n’est pas interdit de penser que quelqu’un ait appelé un jour ce hameau « Dormillosa » et que, marmotte ne se disant pas « dormillosa » mais « muret » en patois local, ce quelqu’un soit un berger provençal, les bergers de Provence étant nombreux depuis très longtemps à faire transhumer leurs troupeaux sur les pâturages d’altitude de la vallée.

Les Romains

On n'a pas découvert de trace de la présence romaine à Freissinières mais, pendant longtemps, certains chercheurs ont pensé que la mutatio Rama, un important relais routier sur la voie romaine, dite voie cottienne, devait se trouver à Pallon et non à Rame, près du château des anciens co-seigneurs de Freissinières. Ils avançaient même que, la voie romaine ne pouvant certainement pas passer en plaine, en raison des divagations de la Durance, elle devait remonter jusqu'au col de l'Anon, descendre dans la vallée du Fournel, remonter le col de la Pousterle et descendre ensuite vers La Bâtie des Vigneaux, en Vallouise. La découverte récente de vestiges romains près du château de Rame permet de penser que la mutatio Rama était bien à Rame et non à Pallon. De plus, le passage de la voie cottienne par le col de l'Anon et celui de la Pousterle est peu crédible. Les romains avaient en effet l'habitude de tracer les itinéraires les plus directes possibles et on sait que, pour le moins, ils avaient quelques compétences en matière de génie civile, notamment pour la construction de ponts. Cependant, si Rama était bien à Rame, le tracé suivi par la voie cottienne, entre Châteauroux et La Bâtie des Vigneaux, demeure encore en partie un mystère.

Les Sarrasins

"Les Sarrasins, ont laissé de nombreuses traces de leur présence dans la vallée. Au dessus de Pallon, on trouve les ruines des fortifications où ils se sont maintenus jusqu'au Xe siècle et ils y avaient même construit un moulin sur une élévation ; de là, ils défendaient l'accès à la vallée car le chemin passait par un col étroit appelé l'Estrets. En bas de la plaine, il existe une fontaine près de laquelle les "Arabes" ont dû habiter, et que l'on nomme d'ailleurs Fontanier ou fontaine du Noir. On leur attribue aussi la fondation des hameaux des Viollins et des Minsars. Les restes de ces populations se sont fondus avec les habitants de la vallée dont certains présentent encore aujourd'hui les traits caractéristiques de la race sarrasine"[1]. A Freissinières, comme d'ailleurs dans toutes les Hautes-Alpes, c’est la présence des des Sarrasins qui a le plus durablement marqué la mémoire collective des populations ; les Hautes-Alpes auraient été peuplées par les Sarrasins. En fait, tous ces toponymes sont composés d’un préfixe désignant une hauteur ou une montagne (Puy, Mont) et d’un suffixe issu de « Maurus ou de Maurinus, nom gallo-romain assez répandu qui signifie brun ou noir » et ne désigne donc pas les Maures. De plus, au moyen-age, les Sarrasins ne sont jamais nommés Mauri mais Sarraceni, et il ne reste dans les Alpes aucune trace de constructions datant des Sarrasins ; les ruines et les tuiles que l'on nomme vulgairement murs sarrasins et tuiles sarrasines datent de l'époque gallo-romaine ou franque. On sait aujourd’hui que les Sarrasins n’étaient pas très nombreux. Ils étaient organisés en bandes de quelques milliers d’hommes, tout au plus, qui razziaient les régions traversées, enlevant les troupeaux et faisant du butin. Ils ne s’installèrent jamais dans le pays et ils n’y laissèrent aucune trace de leur passage. Comme l’a écrit J. Roman : « ils furent essentiellement des pillards et non des administrateurs et des maîtres[2] ». L’expulsion des Sarrasins de tout le sud de la France, en 972, fut toutefois un fait réel et capital car elle allait permettre une reprise de l’économie et la reconstitution du pays.

On ignore les noms des premiers seigneurs après la défaite des Sarrasins en Provence. Ce qui est certain c'est qu'en 1375 les sires de Rame exerçaient une co-suzeraineté sur la vallée avec le seigneur de Freissinières ; plus tard, cette suzeraineté fut encore partagée avec le sieur Bayle, premier président à la Cour de Grenoble.

Le seigneur le plus connu est Fazy (François) de Rame qui vivait au XVe siècle. Dans son "livre-journal" (écrit en patois mais aussi en latin), il enregistrait les moindres détails concernant son colombier, ses récoltes de miel, les redevances en fromages, ses transactions avec les habitants de la vallée. Il ne laissait perdre aucun profit mais c'était aussi un brave homme qui prêtait des sous à certains de ses sujets pour qu’ils s’instruisent, qui blâmait les excès des troupes dans leur lutte contre les vaudois qu'il cherchait d'ailleurs à sauver en intervenant auprès du pape et de l'archevêque d'Embrun. Le seigneur de Rame était très religieux mais il n'en était pas moins tolérant.

À la fin du XVe siècle, plusieurs familles de Freissinières vont s'installer dans le Luberon, notamment en 1585 où le seigneur de Cabrières-d'Aigues signe un acte d’habitation avec 80 chefs de famille dont 75 étaient de Freissinières. Au milieu du XVe siècle en effet, le Luberon est un pays dépeuplé (60% de la population a disparu), certains villages sont inhabités et de nombreuses terres ne sont plus cultivées. Cette situation est la conséquence des calamités qui se sont abattues en Provence, comme sur l’ensemble de la France d’ailleurs : famines, peste noire, guerre de cent ans avec ses « routiers » qui ravagent les campagnes. A partir des années 1460, la situation s’améliore lentement, aussi les seigneurs locaux, et le pape pour le Comtat d’Avignon, font-ils appel à des colons en leur promettant des exemptions fiscales. Ceux-ci vont surtout venir des Alpes, et plus particulièrement des diocèses d’Embrun et de Turin , ces vallées se convertissant alors à une économie pastorale, nécessitant beaucoup de terres pour les pacages, mais libérant une main-d’œuvre nombreuse.

En 1692, le duc de Savoie abandonne l'alliance française, passe le col de Vars et s'empare d'Embrun et de Gap. N'osant pas l'affronter, le maréchal Catinat se contente de surveiller l'avance des troupes depuis un camp qu'il installe à Pallon ; il dispose des troupes à La Roche-de-Rame et reçoit régulièrement des informations par des émissaires qui passent le col d'Orcières.

À la Révolution, les cahiers de doléances ont été signés, pour la vallée, par les personnes suivantes : Gouirand (châtelain), P. Anthouard (consul), Bertrand (consul), André Anthouard (ex-consul), T. Pellegrin, Anthouard, J. Boysset, Baridon, P. Anthouard, A. Boysset, T. Boysset, J. Bret et J. Gouirand[3].

Au XIXe siècle, les rares terres agricoles ne pouvant plus nourrir une population en forte croissance démographique, certains habitants décidèrent d’émigrer à l’étranger ou dans les colonies françaises. En 1861, huit familles partirent s’installer en Algérie, dans la région d’Aumale, mais elles ne purent se maintenir longtemps sur le sol algérien et rentrèrent en France, par manque de capitaux et de soutien. En 1887, quelques jeunes gens de la vallée choisirent l’aventure au Brésil, un peu comme les « Barcelonnettes » au Mexique ; en 1873, une famille des Minsars, attirée par des promesses, partit aussi pour Rio de Janeiro ; la plupart rentrèrent cependant au pays quelques années après. Des associations caritatives protestantes, le « Comité de Lyon », puis la « Société Coligny », avec le sénateur Eugène Réveillaud, décidèrent alors de favoriser l’établissement définitif de familles en Algérie, en prêtant aux candidats à l’émigration la somme exigée (5 000F) par le Gouvernement général pour obtenir une concession. Trois villages, tous dans la région d'Oran, accueillirent ainsi successivement des familles : en 1888, les Trois-Marabout (Sidi Ben Adda) avec treize familles, puis en octobre 1890, Guiard (Aïn Tolba) avec 22 familles (la plupart de Dormillouse) enfin, en 1919/1922, Ténézéra (au sud de Sidi Bel Abbes) avec dix familles. Certaines de ces familles ne réussirent pas à s'adapter au climat et aux difficultés de la vie et rentrèrent donc en France rapidement ; quelques unes persévérèrent et ne regagnèrent la métropole que dans les années qui ont suivi l'indépendance de l'Algérie.

[modifier] Vaudois et protestants

L'histoire de la vallée a surtout été marquée par la violence des persécutions religieuses contre les vaudois et les protestants.

  • On pense que les vaudois sont arrivés à Freissinières dès la fin du XIIe siècle et qu'ils venaient du Piémont ou du midi provençal. Ils y rencontrèrent une population réceptive à leur prédication, cette région étant marquée par la présence ancienne de chrétiens vivant en marge de l'Église catholique ; au début du XIIe siècle, Pierre de Bruys, originaire de la région de Gap, parcourait déjà les diocèses de Gap et d'Embrun, prêchant un christianisme dépouillé et un retour à l'idéal des premiers chrétiens.
  • Pendant le XIIIe siècle, il ne semble pas que la répression ait été très forte, mais les deux siècles suivants allaient être marqués par des excès sans nombre pour éradiquer les vaudois. Les périodes de violence étaient certes entrecoupées de moments de calme mais les vaudois devaient subir alors la présence de missionnaires et de moines cherchant à obtenir leur abjuration ; seul saint Vincent Ferrier, qui visita deux ou trois fois les vallées au début du XVe siècle avant de s'établir pendant trois mois à Vallouise réussit, semble-t-il, à obtenir des conversions sérieuses et durables. Citons parmi les épisodes les plus dramatiques les faits suivants : En 1352, l'inquisiteur se rendit à Freissinières et à l'Argentières où les corps d'hérétiques furent déterrés et brûlés ; vingt et un vaudois en fuite furent déférés au bras séculier et dix-huit abjurèrent. En juillet 1380, un nouvel inquisiteur condamna et livra vingt-neuf habitants au bras séculier, en précisant toutefois qu’ils ne devaient être ni mis à mort ni mutilés. En 1390, le gouverneur du Dauphiné, Jacques de Montmaur, arriva à l'improviste dans la vallée ; les vaudois n'eurent que le temps de se réfugier dans la grotte des Fazys où le gouverneur les asphyxia en mettant le feu à des fagots de paille disposés devant l'entrée ; quatre vingt adultes et quarante enfants y trouvèrent la mort. En 1393, quatre vingt vaudois furent brûlés vifs sur l'esplanade de la cathédrale d'Embrun.
  • À partir de 1457, avec l'arrivée de Jean Bayle, co-seigneur de Freissinières, à l'archevêché d'Embrun, poursuites, excommunications et saisies de biens redoublèrent, ces actes arbitraires amenant presque à une révolte générale de la région. Les catholiques, las d'être soupçonnés eux-mêmes, firent appel au roi Louis XI qui, dans une lettre de mai 1448, demanda de ne plus inquiéter le peuple des vallées, mais sous réserve qu'il n'y ait pas d'endurcissement contre la foi catholique, ce que ne pouvaient accepter les vaudois. Après la mort du roi, les violences reprirent de plus bel, pour aboutir à un paroxysme avec la « croisade » d'avril 1488, la vallée étant alors envahie par plus de six cents hommes ! Ne pouvant lutter contre cette masse, les vaudois divisèrent leurs forces en quatre groupes qui se dispersèrent vers les points habituels de résistance, notamment sur les hauteurs de Dormillouse, au dessus de Pallons (à Valhaute) et aux Fazys. Un premier groupe se rendit après avoir résisté pendant quatre jours et les soldats réussirent à enlever la position de résistance au dessus des Fazys ; après quelques jours de résistance à Dormillouse, tous les vaudois se rendirent. Les violences n'atteignirent non seulement les chefs de la résistance et leurs troupes mais, également, femmes et enfants. Les prisonniers furent conduits à Embrun « comme une chiourme de forçats ». Le 27 avril, soixante-seize d’entre eux abjurèrent sur la place de la cathédrale, tandis que deux femmes et quatre hommes, déclarés relaps, furent brûlés à Embrun ou pendus à Freissinières.
  • Le début du XVIe siècle allait être marqué par un retour temporaire à la paix et surtout, par l'adhésion des vaudois à la Réforme, suite au synode de Chanforan. La Réforme fut prêchée dans la région par les frères de Guillaume Farel et des pasteurs venus de Suisse. Au milieu du siècle, il existait de petites communautés protestantes à Molines en Queyras et à Vars mais, à Freissinières, ils représentaient la grande majorité de la population.
  • Après cette période de calme relatif, les guerres de religion vont vite amener leur spectacle de désolation, mais toutes n'ont pas marqué la vallée. Quelques événements méritent d'être rapportés : le 22 septembre 1562, les capitaines ligueurs provençaux Sénas et Mouvans, en retraite depuis Briançon, arrivent à Dormillouse ; le lendemain 23, à minuit, ils passent le col d'Orcières dont les habitants s'étaient tous enfuis. En 1570, après la défaite des protestants à Montcourt, Lesdiguières, leur nouveau chef, installe quelques centaines de soldats dans le Champsaur. Cette vallée permettant de communiquer avec celle de Freissinières par le col d'Orcières, Lesdiguières disposait ainsi d'une "porte d'entrée" sur le Briançonnais, sans faire le détour par Embrun. Au printemps suivant, Bonrepos, gouverneur de Briançon, et le capitaine catholique La Cazette, décident de s'emparer de Freissinières et construisent un fort à Champcella. Les protestants de la vallée sont acculés dans les montagnes, surveillés par mille deux cents hommes. Se voyant exposés à mourir de faim, ils implorent secours auprès de Lesdiguières qui traverse le col d'Orcières, encore couvert de neige, et chasse ses ennemis jusqu'à Saint-Crépin où, un grand nombre de ceux qui avaient échappé au tranchant de l'épée furent emportés par la Durance qu'ils tentaient de traverser à la nage. Le fort de Champcella fut démoli quelque temps après la paix de Saint-Germain du 15 août 1570.
  • L'édit de Nantes ramena la paix religieuse pendant plusieurs années mais, dès 1679, les vexations reprirent avec une application rigoureuse et partiale du texte de l'édit. En 1685, le culte réformé ayant été interdit après l'abrogation de l'édit de Nantes, les deux temples de Freissinières (Dormillouse et Ville) furent détruits. Deux églises furent alors construites, l'une à Ville, l'autre à Dormillouse, sur l'emplacement du temple rasé, alors qu'il n'y avait aucun catholique pour assister à la messe dans ce hameau, si ce n'est, en été, les bayles de Provence. Présentant le danger, certains protestants commencèrent à émigrer, en famille ou individuellement, en Suisse, en Allemagne et en Hollande, leurs biens étant bien entendu saisi par le pouvoir royal. Les protestants restés sur place subirent vexations et persécutions ou choisirent une conversion de façade. Des habitants qui avaient fait bénir leur mariage par un pasteur furent incarcérés à leur retour pendant six mois dans la tour Brune d’Embrun et ne purent en sortir qu’en payant 600 francs d’amende et en promettant de se « réhabiliter » ; leurs femmes passèrent trois mois dans la prison du château de Freissinières. En 1775 encore, le pasteur de la vallée fut arrêté et emprisonné à Briançon et il ne fut relâché qu’après trois mois, contre le paiement d’une forte amende. La Révolution de 1789 mit fin aux persécutions de façon définitive à Freissinières.

[modifier] Administration

Liste des maires successifs
Période Identité Parti Qualité
1797 1799 Jacques Joseph Chevalier
1799 1799 Pierre Gouirand
1799 1803 Jean Baridon
1808 Berthalon
1818 Jean Laurent Anthouard
1823 Jacques Pellegrin
1833 Pierre Gouirand
1843 Jean Berthalon
1853 Jean Joseph Pellegrin
1873 André Boisset
1878 Jean Verdure Baridon
1995 2001 René Dorr
mars 2001 en cours (2008) Cyrille Drujon d'Astros[4]


La commune de Freissinières fait partie de la Communauté de Communes du Pays des Ecrins dont le président, élu le 6 avril 2008, est le maire de Freissinières, M. Cyrille Drujon-d'Astros. Elle est aujourd'hui rattachée au canton de l'Agentière-la-Béssée, et dépend donc de l'arrondissement de Briançon. Historiquement pourtant, elle n'a jamais appartenu au Briançonnais mais a toujours été une communauté de l'Embrunais, la frontière entre les deux châtellenies passant au niveau du Pertuis-Rostan. Comme l'Embrunais, qui ressortissait du comte de Forcalquier, elle n'a été rattachée au Dauphiné qu'en 1232, alors que le Briançonnais appartenait déjà en 1030 à Guigues, sire de Vion et comte d'Albon. Pour remonter plus haut dans le temps, avant d'être une communauté provençale, à l'époque romaine Freissinières faisait partie des Alpes-Cottiennes. On ne sait cependant pas si, lorsque Embrun devint la capitale, en 333, de la nouvelle province des Alpes-Maritimes, Freissinnières resta ou non dans les Alpes-Cottiennes. En effet, la position de la frontière diverge selon les sources ; certains la font passer au niveau de la combe de l'Etroit, près de Châteauroux, d'autres à Champcella et d'autres, enfin, au Pertuis-Rostan.

[modifier] Démographie

Évolution démographique
(Source : INSEE[5])
1690 1796 1826 1876 1901 1916 1931 1962 1968 1975 1982 1990 1999
850 688 935 792 618 591 454 148 216 199 172 167 169
Nombre retenu à partir de 1968 : population sans doubles comptes

C'est donc en 1826 que Freissinières a eu le plus d'habitants : 935, soit 5,5 fois plus qu'en 1999.

[modifier] Économie

[modifier] Lieux

À l'entrée de la vallée, près de Pallon, le gouffre du Gourfouran, avec des falaises rocheuses de près de 100 m de haut, creusé par la Byaisse avant de se jeter dans la Durance, près de Rame.

Dormillouse, dernier hameau toujours habité de la zone centrale du Parc national des Écrins, qui a servi de lieu de refuge aux Vaudois au Moyen Âge puis aux protestants pendant les persécutions. On y voit toujours la maison de Félix Neff et le temple protestant qui possède un bénitier car, à l'origine, ce lieu de culte était une église catholique qui n'accueillait guère que les bergers de Provence en été.

Le moulin des Ribes, construit en 1620 par le seigneur du village et qui a fonctionné jusqu'en 1945.

[modifier] Personnalités liées à la commune

  • Les frères Berthalon (Théophile et Félix), connus pour leur refus de participer à la guerre de 1914-1918 en raison de leurs convictions religieuses. Ils restèrent pendant douze ans chez eux, dans le hameau des Viollins et, prévenus par leur famille, couraient se réfugier dans des grottes et des chalets de haute montagne lorsque les gendarmes faisaient leur apparition. Ils furent arrêtés en 1927 au temple des Viollins et condamnés à trois ans de prison avec sursis par le tribunal militaire de Lyon. Ils vécurent ensemble dans leur hameau, tous les deux célibataires, jusqu'à leur mort.
  • Jean Baridon, de Dormillouse, membre du conseil du district d'Embrun de 1792 à 1795.
  • Jean Baridon, médecin et administrateur des hôpitaux de Lyon. Adjoint au maire de Lyon, conseiller général de Lyon et membre du conseil régional Rhône-Alpes. Suppléant de Louis Joxe, il fut député en 1967 et en 1977 puis, à nouveau en 1978 en tant que suppléant de Raymond Barre devenu Premier ministre.
  • Félix Neff, pasteur genevois arrivé à Freissinières à la fin de l'année 1823, qui devait mériter le nom d'apôtre des Hautes-Alpes.
  • Benjamin Valloton, écrivain suisse dont la mère était originaire de Dormillouse, séjournait régulièrement à Freissinières ; il publia plusieurs ouvrages inspirés par la vie dans la vallée : Sur le roc, L’Homme de la grotte, Victoire ! Félix Neff vous parle, Figures d’autrefois, Jardiniers du paradis.

[modifier] Galerie

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles de Wikipédia

[modifier] Liens externes

[modifier] Sources

  • Eliane Agati, L'émigration des vaudois français en Algérie. Aix-en-Provence, Faculté des lettres, 1956.
  • Gabriel Audisio, en collaboration avec Alain Bouyala, Guide historique du Luberon vaudois, Les Alpes de Lumière / Parc naturel régional du Luberon.
  • Eugène Arnaud, Histoire des protestants du Dauphiné. Réédition, Davin, Gap.
  • Florimond Baridon, Le Val de Freissinières, Monographie communale. Gap, Louis Jean, 1934.
  • Louis Brunel, Les vaudois des Alpes et de Freissinières en particulier. Paris, Librairie Fischbacher, 1890.
  • Jules Chevallier, Mémoire historique sur les hérésies en Dauphiné avant le XVIe siècle. Valence, Jules Céas et fils, 1890.
  • Georges de Manteyer, Le livre-journal tenu par Fazy de Rame en langage embrunais (6 juin 1471–10 juillet 1507), 2 vol. Gap 1932
  • Pierrette Paravy, De la chrétienté romaine à la Réforme en Dauphiné. École française de Rome, 1993.
  • Eugène Réveillaud, L’Établissement d'une colonie de vaudois français en Algérie. Paris, Librairie Fischbacher, 1893.

[modifier] Notes

  1. Florimond Baridon, Le Val de Freissinières, Monographie communale. Gap, Louis Jean, 1934.
  2. Joseph Roman, Tableau historique du département des Hautes-Alpes, Paris, Alphonse Picard, 1887.
  3. Marguerite et Fernand Bœuf, Histoire des Hautes-Alpes, Gap, 1938.
  4. Site de la préfecture des Hautes-Alpes, consulté le 9 mai 2008 (fichier au format Excel)
  5. Freissinières sur le site de l'Insee