Civilisation germanique

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Alors que la tradition historiographique française confine les peuples germaniques à des tribus inconnues réfugiées dans des forêts humides au-delà du Limes en Germanie (jusque l'antiquité tardive), puis à l'emploi systématisé du terme barbare lors du Haut Moyen Âge, il est possible de décrire une civilisation germanique unifiant les traits des anciens peuples d’Europe du Nord précédant leur christianisation.

Cette description n'a donc de sens que dans la situation de l'âge du fer germanique, antérieur à l'âge des Vikings selon les découpes de l'historiographie anglo-saxonne. Compte tenu des trajets des peuples, les Germains de la mer du Nord émanent d'une culture scandinave à compter du IIe siècle, identique à celle des futurs conquérants Vikings.

Des découvertes récentes réalisées depuis les cinquante dernières années et prises en charge par des universités allemande dans les sections archéologiques permettent d'en révéler les traits, ce qui bouscule la manière dont cette civilisation était présentée jusqu'alors à partir des chroniques rédigées par ceux que ces peuples avaient envahis [1].

Les divers peuples germaniques grignotent progressivement les territoires des celtes historiques et entrent en contact avec les Romains, qui nomment cette terre la Germanie (d'après Tacite). Cette carte compare chronologiquement leur expansion, jusque 300, avec celle de l'Empire romain, jusque 117.
Les divers peuples germaniques grignotent progressivement les territoires des celtes historiques et entrent en contact avec les Romains, qui nomment cette terre la Germanie (d'après Tacite). Cette carte compare chronologiquement leur expansion, jusque 300, avec celle de l'Empire romain, jusque 117.

Sommaire

[modifier] Contextualisation

Le contexte de cet article est donc chronologiquement du IIe au Ve ; il commence par l'arrivée de peuples en Germanie provenant de Scandinavie ou d'îles hypothétiquement originelles (Bornholm, Gotland) situées en mer Baltique. Géographiquement, il comprend la Germanie connue des Romains étendue jusque la Pologne et les limites primitives de la Russie historique (Novgorod était connue des Svears [2], voire fut développée par eux.)

Leurs emplacements en Germanie sont aujourd'hui reconstituées par le relevé des cultures archéologiques, travail plutôt ardu attendu que les traces d'une hutte en bois et pierres ne permet pas de distinguer si elle fut bâtie par des Burgondes ou des Alamans. On peut éventuellement parler de protohistoire pour décrire leurs implantations précédant leur contact avec la civilisation romaine, dans la mesure où après 325 les annalistes de Rome n'ont plus d'éléments pour les relater dans leurs écrits.

La dynamique d'expansion du monde latin sous l'égide de l'Empire n'a pas fonctionné pour ces peuples, là où elle avait marché pour les Celtibères et les Gaulois, pour ne citer qu'eux ; les provinces taillées au delà des frontières naturelles que forment le Rhin et le Danube telles que la Rhétie ne se sont pas stabilisées et ont été régulièrement ravagées.

Cet article donne donc l'opportunité de développer les traits propres à ces peuples, en dehors du scope des latins et de la manière de les considérer (lire l'article idéologique barbare sur ce sujet).

[modifier] Identification

Icône de détail Article détaillé : peuples germaniques.

Les peuples germaniques sont divisés en 2 ou 3 branches principales, selon la période considérée et pour des raisons ethnolinguistiques :

  • le rameau nordique ou Scandinaves
  • le rameau westique ou Germains occidentaux
  • le rameau ostique ou Germains orientaux

Population : 1 à 4 millions Tribus indépendantes des autres : il n'y a pas d'unité politique.

[modifier] Description de la civilisation germanique

[modifier] Gouvernement

Il est propre à chaque peuple. Il n'y a pas d'administration, éventuellement un conseil des sages sur le mode scandinave, mais cette assertion provient plus d'une déduction propre à l'origine de certains des peuples.

La manière d'élire les chefs des tribus et peuples est très différente de celle issue de l'Empire romain, et forme la base des futures structures monarchiques et de l'aristocratie en expérience lors du Haut Moyen Âge qui va s'ouvrir. La transmission héréditaire d'un titre n'est absolument pas un trait identifié à ce moment, ceci relevant vraisemblablement d'une construction ultérieure par dévoiement des titres de l'administration romaine.

Il n'y a pas à proprement parler de roi avant l'existence des premiers royaumes sédentaires, hors contexte de cet article.

Les chefs conduisent leur peuple (lire dux) parce qu'ils sont les plus aptes (Braves) pour le faire, et reconnus par l'aristocratie dominante de ce peuple.

[modifier] Culture germanique

[modifier] Droit germanique

C'est un droit de tradition orale sur le mode scandinave, propre à l'identité de chaque peuple.

Icône de détail Article détaillé : Droit germanique.

Forcément, les Germains ne savent pas écrire latin ou grec, hormis les enfants des peuples fédérés (lètes) élevés par des précepteurs byzantins ou romains.

Dans les royaumes sédentarisés du Ve siècle, il fusionne graduellement avec certains concepts du droit romain en passant par des édits rédigés : lire droit romano-germanique.

[modifier] Droit germanique : bibliographie

Voir : Jori, Alberto, Hermann Conring (1606-1681): Der Begründer der deutschen Rechtsgeschichte, Tübingen, 2006. ISBN 3935625596.

[modifier] Structure sociale

Les sociétés germaniques, jusqu'à la période des Grandes Invasions, ont une structure sociale assez souple. Les rois, les chefs de guerre, les prêtres n'ont qu'un pouvoir de circonstance fondé sur le consensus. L'instance supérieure est l'assemblée des hommes libres, autour d'un sanctuaire commun, où les décisions se prennent à l'unanimité par acclamations. Le groupe familial est très solidaire et collectivement responsable, notamment pour l'exercice de la vengeance et le paiement du wergeld (prix du sang).

La coutume reconnaît une hiérarchie sociale: les nobles (ceux qui, probablement, fournissent les rois et les chefs de guerre), les simples hommes libres, les "lètes" (affranchis ou descendants d'affranchis). Le tarif du "wergeld" et les autres pénalités sont déterminés en fonction du rang social. Les esclaves n'ont aucune personnalité légale, ils n'ont ni biens ni liens familiaux et sont une simple propriété de leurs maîtres. La femme est toute sa vie sous la tutelle d'un homme, son père ou autre parent masculin, puis son mari, et, si elle est veuve, la parenté mâle de son mari.

Dans les royaumes barbares du Haut Moyen Age, les rois s'efforcent de maintenir l'identité légale du peuple conquérant, considéré comme la classe guerrière qui élit le roi et l'accompagne au combat. En fait, il y a une fusion sociale progressive entre les descendants des Goths, Burgondes, Lombards, etc, et ceux des peuples conquis.

  • Karol Modzelewski, "L'Europe des Barbares", Aubier 2005

[modifier] Pratiques guerrières

Lire armement des Germains.

[modifier] Agriculture

Les Germains sont des sédentaires, à bien distinguer des nomades des steppes avec qui ils sont en contact. Ils pratiquent une agriculture extensive avec de longues jachères, qui leur permettent d'entretenir un bétail nombreux. L'archéologie révèle qu'une partie de la population, sans doute les classes inférieures, souffrait souvent de la faim.

Tacite nous apprend que chaque tribu faisait autour d'elle de vastes espaces déserts, afin d'assurer sa propre sécurité.

Cependant, Les Germains réalisent certains progrès techniques comme la culture du seigle, mieux adapté que le blé aux climats frais.

[modifier] Religion germanique primitive

Icône de détail Article détaillé : Mythologie germanique.

Jules César réduit la religion des Germains au culte des éléments naturels, mais c'est plutôt une vision philosophique. Tacite a une information plus précise, et certains éléments, comme les sacrifices humains dans les marécages, sont confirmés par l'archéologie. Comme dans d'autres religions indo-européennes, elle est polythéiste, avec une complémentarité entre les divinités chtoniennes (Nerthus/Erda, la Terre) et les divinités célestes. Celles-ci sont connues par les jours de la semaine, usage romain adopté probablement vers le IVe siècle:

Lundi (jour de la lune) = Monday, Montag (même sens)

Mardi (jour de Mars) = Dienstag, Tuesday (jour de Tyr/Tuiston, dieu des assemblées)

Mercredi (jour de Mercure) = Wednesday (jour de Wotan/Woden/Odin, dieu suprême)

Jeudi (jour de Jupiter) = Donnerstag, Thursday (jour de Donner/Thor, dieu de la foudre)

Vendredi (jour de Vénus) = Freitag, Friday (jour de Freya, déesse de l'amour)

Samedi (jour de Saturne), sans équivalent germanique: Samstag, Saturday ne sont que des déformations du nom romain.

Dimanche, anciennement Dies Solis (jour du soleil) = Sonntag, Sunday (même sens)

Certaines dynasties royales des Grandes Invasions font remonter leur lignée à Wotan.

Le paganisme norrois des années 1000 est connu, mais il a probablement évolué dans le temps. Le chamanisme et les pratiques divinatoires étaient l'apanage de certaines femmes, les Völvas.

[modifier] Mythologie

Éventuellement à distinguer de la mythologie nordique par la figure de Nerthus (fertilité).

[modifier] Voir aussi

[modifier] Postérité

Conquérants de l'Empire romain au Ve siècle, les Germains sont « conquis par leur conquête ». Ils adoptent la religion des vaincus, le christianisme, leur langue écrite, le latin. Leurs structures politiques et leur droit sont profondément modifiées au contact du modèle romain. L'expansion de l'Empire carolingien vers la Saxe, l'action des missionnaires chrétiens dans les royaumes anglo-saxons puis en Scandinavie, feront tomber dans l'oubli une grande partie de la civilisation germanique primitive, sans l'effacer tout à fait.

[modifier] Références

  1. La Germanie de Tacite en est un ouvrage fondateur, puis les écrits obtenus de Grégoire de Tours polissent les Francs et les distinguent des exactions des autres présentés comme des barbares, lire aussi Sidoine Apollinaire qui fut manifestement au contact des Burgondes.
  2. Svears : zone originelle Gamla Uppsala, voir aussi varègue.

[modifier] Articles connexes