Salah Ben Youssef

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Salah Ben Youssef
Portrait de Salah Ben Youssef
Portrait de Salah Ben Youssef
Naissance 11 octobre 1907
à Djerba
Décès 12 août 1961 (à 53 ans)
à Francfort-sur-le-Main (Allemagne)
Nationalité Tunisie Tunisie
Profession homme politique
Occupation SG du Néo-Destour
ministre de la justice
Formation avocat

Salah Ben Youssef (صالح بن يوسف), né le 11 octobre 1907 à Djerba et assassiné le 12 août 1961 à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), est un homme politique tunisien et l'un des principaux chefs de file du mouvement indépendantiste tunisien aux côtés de Farhat Hached et Habib Bourguiba.

Sommaire

[modifier] Dauphin

Né dans une famille de commerçants influents et riches, il suit une formation d'avocat puis s'engage en politique où il est promis par ses qualités à l'avenir que lui assure son rôle de dauphin de Bourguiba. Il débute sa carrière politique en tant que secrétaire général du Néo-Destour, poste où il joue un rôle de premier plan pendant l'exil de Bourguiba. En août 1950, il est désigné ministre de la justice dans le gouvernement de M'hamed Chenik. Chargé de porter à l'ONU, réunie à Paris, une plainte tunisienne en mars 1952, il échappe de peu à l'arrestation et à la déportation. Alors qu'il voyage à travers le monde pendant plus de trois ans — où il est reçu par Gamal Abdel Nasser, Jawaharlal Nehru ou encore Zhou Enlai —, les accords avec la France sur l'autonomie interne sont signés.

[modifier] Confrontation

Ce fait accompli sans lui et qu'il prend pour « un pas en arrière et une entrave » l'ulcère. L'évacuation des troupes françaises de l'ensemble du territoire tunisien est pour lui un préalable indiscutable à une véritable indépendance nationale. De lieutenant et ami de Bourguiba, rentré au pays le 1er juin 1955, il devient son ennemi irréductible[1]. Selon Ben Youssef, son adversaire est coupable de pratiquer une « politique de reniement et de trahison » à l'égard du peuple tunisien et de la révolution algérienne. Rentré pour sa part en Tunisie depuis Le Caire le 13 septembre, il met en œuvre un plan d'agitation dans tout le pays.

Les partisans de Bourguiba et ceux de Ben Youssef, les « bourguibistes » et les « youssefistes », multiplient alors les meetings pour dénoncer et battre en brèche la position de la partie adverse[2]. Réuni le 8 octobre, sous la présidence de Bourguiba, le bureau politique du Néo-Destour décide de tenir un congrès et d'y demander la destitution de Ben Youssef et son exclusion du parti. Déchu de ses fonctions et exclu du parti suite au congrès tenu du 15 au 19 novembre, Ben Youssef continue à faire campagne dans le sud du pays où il organise à la fin novembre un certain nombre de réunions qui donnent lieu à des affrontements avec les partisans de Bourguiba[2]. Il reste néanmoins fidèle à son activisme jusqu'en janvier 1958.

[modifier] Exil et assassinat

À deux reprises, en janvier 1957 et en novembre 1958, Ben Youssef est condamné à la peine de mort. Mais son évasion, le 28 janvier 1956[2], lui permet d'échapper à ces deux sentences. Traqué, il fuit à Tripoli puis au Caire où il bénéficie d'une brouille passagère entre Bourguiba et Nasser. Mais bientôt sa présence devient gênante. Toujours intraitable à l'égard de Bourguiba qui le reçoit une dernière fois à Zurich le 3 mars 1961, Ben Youssef, affecté d'un eczéma aux jambes, s'installe le 2 juin 1961 dans un hôtel de Wiesbaden, aux environs de Francfort, afin d'y suivre une cure thermale[3]. Le 12 août, il est assassiné dans un hôtel de Francfort où l'attirent deux compatriotes.

Certaines sources publiées avancent que les protagonistes du projet d'élimination physique de Ben Youssef sont Bourguiba, son épouse Wassila, Mohamed Masmoudi, Hassen Belkhodja, Taïeb Mehiri et Béchir Zarg Layoun[3]. Le ministre de l'intérieur Mehiri aurait sollicité la contribution de deux personnages dont Zarg Layoun afin de recruter des hommes de mains capable de passer à l'action. Le plan élaboré consiste à faire croire à Ben Youssef que des officiers de l'armée tunisienne veulent le voir pour l'informer et affiner en sa présence un projet de coup d'État[3]. Moins de vingt jours après la fin de la crise de Bizerte et profitant de l'euphorie patriotique des Tunisiens, Bourguiba juge que le moment est propice pour se débarrasser de son principal rival politique[3]. Arrivé à Francfort, il laisse son épouse Soufia dans un café de la Kaiserstrasse et se dirige vers l'hôtel Royal situé dans la même rue où il est accueilli par deux hommes de mains et montent avec eux dans leur chambre pour étudier le plan. L'un d'eux l'abat alors à bout portant d'une seule balle vers 16h30[3]. Ce n'est que trois heures plus tard que son épouse le découvre baignant dans son sang. Plongé dans le coma, il est conduit à l'hôpital universitaire de Francfort où il décède vers 22h45 sans avoir repris connaissance[3].

Il est ramené au Caire puis y est inhumé. Sa veuve ne rentrera en Tunisie que le 22 décembre 1987 après plus de 30 ans d'exil au Caire. Elle est reçue le 2 janvier 1988 par le président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali. En juin 2007, le producteur Fethi Doghri prépare un film sur le parcours de Ben Youssef.

[modifier] Bibliographie

  • Omar Khlifi, L'assassinat de Salah Ben Youssef, éd. Media Com, Paris, 2005[4]

[modifier] Références

  1. (fr) Kamel Labidi, « Deuil subversif en Tunisie », Le Monde diplomatique, mai 2000, p. 3
  2. abc (fr) Les accords : objet de discorde entre les directions daltoïdiennes (50e anniversaire de l'indépendance)
  3. abcdef (fr) « Bonnes feuilles. L'ordre d'assassinat », Réalités, 18 août 2005
  4. (fr) Ali Ben Samir, « Le livre évènement de Omar Khlifi. L'assassinat de Salah Ben Youssef », Réalités, 18 août 2005
Autres langues