Pharmacocinétique

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La pharmacocinétique, qui suit la phase biopharmaceutique, a pour but d'étudier le devenir d'un principe actif contenu dans un médicament dans l'organisme. Elle comprend 4 phases, se déroulant simultanément : l'absorption - la distribution - le métabolisme et l'élimination du principe actif.

La détermination des paramètres pharmacocinétiques d'un principe actif apporte les informations qui permettent de choisir les voies d'administration et la forme galénique, et d'adapter les posologies pour son utilisation future.

Sommaire

[modifier] Absorption

Le principe actif doit traverser les membranes biologiques du site d'absorption vers le sang pour pénétrer dans la circulation systémique.

Quatre points sont à considérer en particulier :

  • Les obstacles à franchir pour passer dans la circulation systémique : il s'agit des membranes biologiques, de type lipidique, comme :
-la paroi du tube digestif lors de l'administration de comprimés
-la peau lors de l'administration de pommades
-la paroi du rectum lors de l'administration de suppositoires.
-etc...
  • Les conditions d'absorption relatives au médicament absorbé :
-le principe actif doit être suffisamment hydrosoluble pour être dissous
-le principe actif doit être suffisamment liposoluble pour franchir les barrières biologiques lipophiles
-le principe actif doit être sous forme neutre pour franchir les barrières biologiques
-la taille des molécules du principe actif peuit aussi avoir son importance
-etc...
  • Conditions d'absorption relatives au milieu :
-absorption dans l'estomac : les principes actifs acides faibles sont absorbés au niveau de l'estomac, car ils ne sont pas ionisés en milieu acide ; sous forme non-ionisée liposoluble, ils sont par conséquent capables de franchir les barrières biologiques lipophiles. Les principes actifs bases faibles sont eux faiblement absorbés au niveau de l'estomac, car ils sont ionisés en milieu acide.
-absorption au niveau de l'intestin grêle (milieu plutôt basique). Les principes actifs acides faibles sont faiblement absorbés au niveau de l'intestin grêle, car ils sont ionisés en milieu basique ; sous forme ionisée hydrosoluble, ils franchissent difficilement les barrières biologiques lipophiles. Les principes actifs bases faibles, eux, sont bien absorbés à ce niveau !
-l'importance de la vidange gastrique. Si elle est trop rapide, les médicaments absorbés par l'estomac n'auront pas suffisamment de temps pour franchir les parois de l'estomac ; si elle est trop lente, les médicaments absorbés par l'intestin grêle parviendront dans le milieu sanguin avec un certain retard.
  • La notion de premier passage :

Lors de la prise orale d'un médicament, suivie d'une absorption gastro-intestinale, le principe actif est d'abord transporté par la veine porte vers le foie avant d'atteindre la circulation systémique. Le principe actif peut ainsi subir une métabolisation hépatique présystémique avant d'atteindre la circulation générale : c'est l'effet de premier passage hépatique. C'est en général le plus important quantitativement, mais il existe également un premier passage pulmonaire et un premier passage digestif. L'importance de chacun est différente selon les caractéristiques physico-chimiques et biologiques de la molécule en question.

L'organisation du système vasculaire permet d'éviter en grande partie l'effet de premier passage hépatique en cas d'administration par suppositoire : un tiers seulement du sang circulant dans les veines rectales passe par le foie avant d'atteindre la circulation générale. Ce premier passage est totalement évité par administration sub-linguale (médicament à faire fondre sous la langue) : le principe actif est absorbé et éversé dans les veines jugulaires, aboutissant directement dans la circulation au niveau de l'arc aortique. Cette caractéristique fait une grande partie de l'interêt de ces modes d'administration en cas d'urgence relative (un quart d'heure à une demi-heure de délai d'action).

Il faut enfin noter que l'administration d'un principe actif par injection permet un passage direct dans la circulation, sans avoir à se soucier des problèmes liés à l'absorbtions évoqués ci-dessus. Ceci en fait la voie d'administration privilégiée dans les cas d'urgence.

[modifier] Distribution

Le principe actif parvenu à la circulation systémique peut se lier plus ou moins fortement et de façon réversible aux protéines plasmatiques (albumine, globulines ou lipoprotéines) :

-Exemple de médicaments fortement liés aux protéines plasmatiques : dicoumarol (anticoagulant), phénytoïne (antiépiléptique)
-Exemple de médicaments moyennement liés aux protéines plasmatiques : phénobarbital (antiépiléptique, hypnotique), théophylline (antiasthmatique),...
-Exemple de médicaments faiblement liés aux protéines plasmatiques : digoxine (cardiotonique), paracétamol (analgésique, antipyrétique),...

En fonction de ses propriétés physico-chimiques et biochimiques, le principe actif peut également s'accumuler dans certains organes ou tissus contenant ou non des récepteurs pharmacologiques:

-affinité pour les protéines tissulaires
-affinité pour les acides nucléiques
-affinité pour les graisses
-affinité pour les tissus cibles contenant les récepteurs pharmacologiques

On peut notamment calculer le volume de distribution de la molécule pour caractériser la distribution dans le corps humain.

[modifier] Métabolisme

C’est la transformation du médicament par le système enzymatique de l’organisme, en particulier au niveau du foie (organe contenant beaucoup d’enzymes).

Les métabolites ainsi produits peuvent alors avoir :

  • aucune activité (directement éliminés)
  • une activité medicamenteuse avant élimination
  • une activité toxique avant élimination

Les substances métabolisées peuvent être transformées en un autre produit actif. Ce phénomène peut être exploité pour concevoir un médicament inactif sous sa forme administrée au patient, mais conduisant à des métabolites actifs. On parle alors de médicament pro-drogue. Cet artifice peut être particulièrement utile quand la forme active du principe actif présente des difficultés d'administration ou d'absorbtion telle quelle.

[modifier] Elimination

Lorsqu'il est présent dans la circulation générale, le principe actif du médicament a tendance à être évacué par l'organisme, qui utilise de nombreux mécanismes d'élimination (excrétion et/ou métabolisation). Le principe actif est éliminé par l'organisme soit sous forme inchangée, soit sous forme d'un ou de plusieurs métabolites généralement inactifs, soit encore sous les deux formes, dans des proportions variables. Cette “auto-épuration” de l'organisme se quantifie par le paramètre de clairance.

[modifier] La clairance (CL)

Tout organe présente un courant d'entrée (flux artériel) et un courant de sortie (flux veineux). La présence d'une concentration médicamenteuse moindre au niveau veineux qu'au niveau artériel prouve que l'organe a éliminé une partie du médicament. Cette capacité d'épuration de l'organe correspond au processus de la clairance. On définit généralement la clairance sanguine ou plasmatique d'un médicament par un organe comme le volume sanguin ou plasmatique totalement débarrassé de la substance par unité de temps. Ce paramètre correspond à un débit exprimé en ml/min

La clairance est caractérisée par :

-la concentration du médicament à l'entrée de l'organe CA (sang artériel)
-la concentration du médicament à la sortie de l'organe CV (sang veineux)
-le débit sanguin Q de l'organe concerné

Dès lors, la réaction médicament/organe s'exprime en terme de clairance selon la relation suivante:

CL_{organe} = Q \cdot \frac{(C_A - C_V)}{C_A}

[modifier] La clairance totale

L'épuration d'un médicament par l'organisme n'est généralement pas le fait d'un seul et unique organe. En effet, les possibilités pour l'organisme de se débarrasser d'une substance médicamenteuse sont multiples.

Deux mécanismes peuvent néanmoins être envisagés :

-l'élimination directe du composé
-l'élimination du composé après biotransformation (métabolisation)

La métabolisation d'une substance médicamenteuse est en règle générale principalement due au foie. Cependant, de nombreux autres organes peuvent y jouer un rôle : poumons, intestin, cerveau.

Les voies d'excrétion sont elles aussi multiples. De manière logique, les voies prédominantes sont généralement la voie urinaire ou la voie biliaire (fécès). Cependant, de nombreux autres organes peuvent participer à cette élimination : les poumons, la peau (transpiration), les glandes salivaires, les glandes lacrymales...

Ainsi, un médicament subit généralement plusieurs processus d'épuration. La clairance totale correspond à la somme des clairances partielles (rénale, hépatique, intestinale, pulmonaire,...). Très schématiquement, on distingue la clairance rénale et la clairance extrarénale.

La clairance extrarénale est le résultat :

-de la clairance hépatique provenant de l'addition des valeurs de clairance biliaire et de la clairance métabolique hépatique
-des différentes clairances métaboliques liées à l'activité de biotransformation des poumons, des intestins ou d'autres organes.

[modifier] En résumé

On peut dire que :

  • Le foie est le site principal de la biotransformation du principe actif: métabolisation du principe actif en dérivés hydrosolubles, actifs ou inactifs. Dans une moindre part, il constitue un organe d'excrétion (élimination biliare).
  • Le rein est le principal organe d'excrétion du principe actif inchangé et des métabolites plus hydrosolubles:
-filtration glomérulaire de la fraction libre du médicaments métabolisé ou non
-sécrétion tubulaire des formes cationiques
-réabsorption

[modifier] Influence de la dose administrée

L'effet pharmacologique ou thérapeutique d'un médicament est davantage lié à la valeur des concentrations plasmatiques qu'à la quantité totale présente dans l'organisme ou à la quantité absorbée. Partant de ce principe, on peut définir:

  • un seuil thérapeutique: concentration minimale en-dessous de laquelle aucune activité n'est obtenue
  • une limite supérieure: concentration maximale au-delà de laquelle apparaissent des effets indésirables
  • un intervalle thérapeutique: zone intermédiaire dans laquelle les concentrations sont à la fois actives et non-toxiques.

L'importance de l'écart entre les concentrations actives et toxique est variable. Cet écart est appelé index thérapeutique. Ainsi, on distingue les médicaments à index thérapeutiques élevé et les médicaments à index thérapeutique faible. Pour ces derniers, les posologies d'administration doivent être bien définies afin que les concentration plasmatiques restent strictement dans l'intervalle thérapeutique. C'est le cas du lithium, de la phénytoïne, de la digoxine, de la théophylline,...

Il faut savoir que la pharmacocinétique d'une substance médicamenteuse peut être fortement influencée par l'alimentation, par les variables physiologiques comme l'insuffisance rénale ou l'insuffisance hépatique, par l'âge du patient et également par les médicaments pris en co-médication.

[modifier] Influence de la fréquence d'administration

Les médicaments font l'objet, d'un manière très générale, d'administrations réitérées. Les objectfs à atteindre sont les mêmes que lors d'une administration unique :

- obtenir une efficacité thérapeutique dans les meilleurs délais ;
- maintenir en permanence une concentration plasmatique active dans l'intervalle thérapeutique ;
- éviter tout phénomène d'accumulation pouvant conduire à l'apparition d'effets toxiques.

Partant du principe de base que la dose choisie est bien adaptée, la fréquence d'administration est le facteur fondamental permettant de respecter les exigences énoncées. Les concentrations plasmatiques vont osciller entre deux valeurs, l'une maximale et l'autre minimale. Pour une efficacité optimale, la concentration maximale doit être inférieure au seuil toxique et la concentration minimale doit être supérieure au seuil thérapeutique.

[modifier] Voir aussi