Judaïsme reconstructionniste

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Le judaïsme reconstructionniste est le courant judaïste progressiste le plus tardivement individualisé et aussi celui qui compte le moins d'adhérents officiels. Il fut fondé en 1968 aux États-Unis par le rabbin Mordechai Kaplan et Ira Eisenstein, sur une base idéologique élaborée entre les années 1920 et les années 1940. Il est essentiellement présent aux États-Unis et dans une moindre mesure au Canada.

[modifier] Le fondateur

Le fondateur du mouvement est le rabbin Mordecai Menahem Kaplan (11 juin 1881- 8 novembre 1983). Né en Lituanie, il fut ordonné rabbin en 1902 au séminaire conservateur de New York (Jewish Theological Seminary of America - JTS). Il obtint son premier poste dans la synagogue orthodoxe Kehillath Jeshrun à New York. En 1909, il commença à enseigner au JTS et ne quittera le séminaire qu'en 1959. En 1912, il prit part avec Israel Friedlander à la fondation du mouvement orthodoxe moderne Young Israel, ainsi qu'à l'établissement de centres communautaires, deux types d'institution visant à permettre aux immigrants juifs de maintenir une pratique religieuse tout en travaillant dans un milieu non-juif.

Il développa progressivement à partir des années 20 une théologie naturaliste proche de la pensée de John Dewey , explicitée dans deux ouvrages : The Meaning of God in Modern Jewish Religion et Judaism as a Civilization. Pour lui, Dieu n'est pas personnalisé et ne fait pas de miracles, il se manifeste dans l'ensemble des processus naturels qui permettent d'aboutir au développement spirituel et moral, visant en particulier à améliorer la société, à limiter la violence et l'exploitation. Cette position l'a fait accuser d'athéisme, mais il semble qu'il ait tout de même cru en l'existence d'une divinité ontologique, il serait donc plutôt théiste, et certains aspects de son Dieu rappellent le kabbalisme. L'importance qu'il accorde à l'influence du groupe sur la pratique religieuse individuelle répond à l'idée du sacré comme solidarité sociale d'Émile Durkheim. Il rejetait l'idée du peuple élu et voyait dans la halakha et la Torah des produits de la sagesse humaine et non d'une révélation divine. Il promouvait l'égalité religieuse entre les sexes ; en 1922, sa fille Judith fut la première jeune fille juive à faire sa Bat Mitzvah à la Société pour l'avancement du judaïsme qu'il avait contribué à créer, et qui deviendra la première synagogue reconstructionniste.

Sa vision du judaïsme comme civilisation et non seulement religion fut bien acceptée de ses collègues et élèves du séminaire, mais son idée du divin et ses autres positions, beaucoup moins. Les orthodoxes le considérèrent comme hérétique ; Young Israel le renia et l'effaça de la liste de ses fondateurs. Encouragé par ses partisans, il se décida à fonder son propre mouvement en 1968, en créant le Séminaire reconstructionniste (Reconstructionist Rabbinical College - RRC).

[modifier] Principes

Le mouvement reconstructionniste définit le judaïsme comme la culture religieuse en constante évolution du peuple juif. En effet, il accorde une grande importance à tous les aspects de la culture juive. La langue, l'histoire, la philosophie, la littérature sont aussi importantes que la religion au sens strict. Cette culture est néanmoins définie comme religieuse car le divin est considéré comme central. Toujours présent dans le cœur humain, il est à l'origine du désir d'accomplissement spirituel et moral et se concrétise dans les processus qui y mènent. Le judaïsme reconstructionniste considère comme aussi importantes que la prière et l'étude les actions en faveur de la justice et de l'harmonie sociale, ainsi que de la protection du globe et de l'environnement. Au-delà de ces principes de base, différentes représentations de la divinité sont acceptables, et les fidèles sont encouragés à explorer divers attributs et formes du divin, sans se limiter à la figure traditionnelle du maître de l'univers personnifié et plutôt masculin. Kaplan lui-même soutenait que la représentation anthropomorphique de Dieu en était une approximation imparfaite.

Le qualificatif de "reconstructionniste" exprime une vision du judaïsme comme voie de recherche du sens de la vie, un chemin de questionnement et d'étude d'où les moments de doute ne sont pas absents, et où chaque individu ou communauté doit le reconstruire constamment. Ainsi, la halakha n'est pas une loi immuable dictée par Dieu, mais une tradition humaine. Elle est de grande valeur et mérite d'être étudiée, mais en tant qu'expression de la culture juive, de la sagesse avec laquelle les juifs d'autrefois ont réagi aux circonstances de leur temps. Elle peut être adoptée "par défaut" si l'on n'y trouve rien à redire, mais doit être modifiée sans hésitation, reconstruite dans ses formes ou son sens par quiconque ne la trouve plus adaptée. Selon la formule du rabbin Kaplan : « La tradition a un droit de vote, mais pas de véto ». La transmission d'un ensemble d'obligations est remplacée par l'encouragement à célébrer, créer et transmettre la tradition à travers la culture et les pratiques juives, comme l'observance des fêtes traditionnelles, l'étude de la Torah, l'usage de l'hébreu et le port de la kippa, du tallit (châle de prière) et du teffilin (phylactères) pendant les services.

Le reconstructionnisme accorde une grande importance à la vie religieuse et culturelle de groupe et aux pratiques en commun. Il considère en effet qu'elles jouent un rôle capital dans le renforcement de la pratique individuelle. Ce groupe est égalitaire, hommes et femmes ayant les mêmes possibilités, et les laïques participant aux décisions de concert avec les rabbins et les spécialistes. Le rabbin Kaplan rejetait l'idée que les Juifs étaient le peuple élu, y voyant une position arrogante, fermée au monde. Le reconstructionnisme actuel affirme néanmoins l'aspect exceptionnel et la place spéciale du judaïsme, mais sans connotation de supériorité, et ouvert aux conversions. Les membres non-juifs des familles des fidèles, dans la mesure où ils soutiennent son engagement dans le judaïsme, peuvent être à un certain degré inclus dans la communauté, selon des modalités spécifiées par chaque congrégation. Les enfants qui reçoivent une éducation juive y sont admis quel que soit le sexe de leur parent juif.

Le reconstructionisme est sioniste depuis sa fondation, l'aliyah est encouragé, mais la diaspora joue un rôle aussi important dans la civilisation juive qu'Israël . Le mouvement est affilié à l'Union Mondiale du Judaïsme Progressiste dont il soutient l'action pour la liberté religieuse en Israël.

En conformité avec ses principes, il reconnait les autres formes de judaïsme : orthodoxe, masorti, libéral. Par contre, ses positions le font rejeter par les orthodoxes, la majorité des masortis et une partie des libéraux.

Né et implanté essentiellement aux États-Unis, le reconstructionnisme estime se situer dans la ligne de ce qu'il considère comme le meilleur de la civilisation américaine : la religion et la morale comme moteur de l'action en vue de la justice sociale.

Le mouvement s'incarne dans trois organismes : la Fédération du judaïsme reconstructionniste (Jewish Reconstructionist Federation - JRF), l'Association des rabbins reconstructionnistes (Reconstructionist Rabbinical Association - RRA) et le Séminaire reconstructionniste (Reconstructionist Rabbinical College - RRC)

Les principes de base du mouvement, établis par le RRA et la Fédération des congrégations reconstructionnistes ont été publiés en 1986 en tant que recommandations sur le bulletin de la fédération.

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