Joseph ibn Caspi

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Joseph ibn Caspi, Joseph ben Abba Mari ben Joseph ben Jacob Caspi de son nom complet (1279, L'Argentière - 1340), également connu sous son nom provençal de Sen Bonfos ou Don Bonafoux de l'Argentière (Don Bonafous de Largentera), est un Rabbin et philosophe juif averroïste du XIIIe siècle

Sommaire

[modifier] Biographie

Issu d'une famille érudite, fils du célèbre adversaire de la philosophie, Abba Mari, il voit le jour en 1279 à L'Argentière dans le Languedoc (où dès l'époque romaine on y exploitait des mines d'argent et d'où l'origine de son nom כספי, argent כסף = "Kessef" en Hébreu) . En 1306, il s'installe à Tarascon, probablement suite à l'expulsion des Juifs de France.

Il effectuera de là de nombreux et longs voyages, dont les plus notables sont :

  • de 1312 à 1314en Espagne et en Orient,
  • en 1315, à Fès, dans le but de rencontrer les descendants de Maïmonide, afin de recueillir des informations sur sa philosophie religieuse, mais il déchanta rapidement.
  • de 1330 à 1331 en Espagne et à Majorque.

En 1317, il s'établit à Arles, en Provence, où il se lia avec Kalonymos ben Kalonymos (Shem Tov ben Shem Tov) ben Meïr, et où il rédigea son introduction au Pentateuque, le Tirat Kessef (cf. infra), qui lui valut de se brouiller avec Kalonymos ben Kalonymos et les maîtres de celui-ci.

Il mourut en 1340, vraisemblablement au cours d'un voyage

[modifier] Sa philosophie

Influencé par Maïmonide, Averroès et particulièrement Abraham ibn Ezra, dont il suit l'idée de construction la grammaire philosophique hébraïque, il défend l'idée que le sens littéral des Ecritures sont à prendre... au pied de la lettre, et n'hésitera pas à critiquer l'exégèse qu'en fait Maïmonide, pour lequel beaucoup de récits prophétiques sont à prendre comme des allégories.

De façon peu surprenante, son ouvrage le plus connu est le Sefer ha-Shorashim, livre des racines, où il établit un dictionnaire en vertu de l'étymologie et l'homonymie des termes bibliques.

Il partage néanmoins l'attitude rationalisante d'Averroès envers les miracles, les considérant comme des phénomènes naturels dont nous ne possédons pas la connaissance de toutes les causes physiques y présidant. Pour comprendre un miracle, il faut se mettre dans le contexte de ses narrateurs, et comprendre leurs points de vue et leurs connaissances à ce moment précis.

De même, il faut interpréter la prophétie en tenant compte du fait qu'elle devait produire un effet marquant sur les foules, et si nous n'en comprenons pas tous les aspects, il faut en imputer notre éloignement vis-à-vis du moment de l'occurrence des faits et discours prophétiques. Le prophète comprend le futur, car il analyse parfaitement les tenants et aboutissants du présent et leurs conséquences. En fin de compte, Ibn Caspi y laisse peu de place à l'aspect divin.

Bien des assertions religieuses ne tendent pas tant à délivrer un message "vrai", qu'à enseigner aux foules comment se comporter et les motiver à le faire.

Lorsque la prophétie et la philosophie divergent, nous devons nous rappeler qu'elles ne sont pas de même nature et ne peuvent donc coïncider, puisque, malgré tout, nous ne savons pas pourquoi ils disaient ce qu'ils disaient, et pourquoi les miracles prennent la forme qu'ils prennent. Si nous le savions, peut-être nous apercevrions-nous que la prophétie pourrait être ramenée, à peu de choses près, à des vérités philosophiques plus aisément compréhensibles par le commun des mortels.

Cependant, notre compréhension des assertions n'étant pas, et ne pouvant être totale, nous devons les accepter, en tant qu'aspects de notre foi, bien que nous puissions rester convaincus que ces assertions sont assez équivalentes aux vérités philosophiques.

Contrairement à Maimonide et Averroès, Ibn Caspi ne pensait pas que les secrets de l'interprétation étaient à réserver à l'intelligentsia. Au vu des différences entre les contextes, époques, audiences, connaissances, langages, etc., il s'était forcément creusé un fossé qu'il ne fallait pas tenter de combler. En conséquence, le secret demeurait secret.

[modifier] Ses œuvres

[modifier] Ouvrages exégétiques

  • Mishne Kessef (à ne pas confondre avec Kessef Mishne de Yossef Karo) est un commentaire kabbalistique et éthicophilosophique sur le Pentateuque, en deux parties.
    • Tirat Kessef - Sefer haSod, la partie kabbalistique qui analyse chaque livre du Pentateuque dans son entièreté, et non par chapitre ou par section, se focalisant sur la partie non-législative du Texte.
    • Matzref leKessef est un commentaire se focalisant sur le sens simple des versets, mais avec une vue éthico-philosophique, contrairement aux commentaires de Rachi ou d'Ibn Ezra.
  • Adne Kessef : commentaire de Josué, des Juges, des Rois, d'Isaïe, de Jérémie, d'Ezéchiel et des Petits Prophètes.
  • Hatsotsrot Kessef : commentaire du Cantique des Cantiques, des Proverbes et de l'Ecclésiaste
  • Shoulhan Kessef, commentaire de Job
  • Kapot Kessef, commentaire de Ruth et des Lamentations
  • Glile Kessef, commentaire d'Esther
  • Hagorat Kessef, commentaire d'Ezra, Néhémie, et des Chroniques
  • Supercommentaire des passages ésotériques du Commentaire du Pentateuque d'Abraham ibn Ezra
  • Parshat Kessef, ou Sod HaTorah, supercommentaire général du Commentaire du Pentateuque d'Abraham ibn Ezra
  • Ouvrages non conservés
    • Kfore Kessef, présentation de ses interprétations du Pentateuque divergeant d'ibn Ezra et de Maïmonide
    • Mizreqè Kessef, commentaire sur le récit de la création
    • Masmerot Kessef, commentaire des Psaumes
    • Ke'arot Kessef, commentaire de Daniel

[modifier] Ecrits lexicographiques

  • Sharsherot Kessef, dictionnaire hébreu
  • Retouqot Kessef, introduction critique à la grammaire hébraïque, non imprimé
  • Commentaire du Sefer haRiqmah d'Ibn Jannah (non conservé)

[modifier] Œuvres philosophiques

  • Commentaire du Guide des Egarés (vers 1330), en deux parties:
    • Amoude (ou "Neqoudot) Kessef
    • Maskiyot haKessef (sur les éléments ésotériques de la théologie)

Inspiré du Moreh haMoreh, commentaire du Guide de Shem Tov Falaquera, dont ibn Caspi reprend souvent les arguments (surtout les citations à partir des sources arabes), ce commentaire inspirera Narboni, Efodi, et d'autres

  • Tsror haKessef : abrégé de logique, vulgarisant les œuvres de logique d'Averroès et Al-Farabi (non imprimé)
  • Troumat haKessef (1329): traité d'éthique, inspiré de Platon et Aristote (non imprimé)
  • Menorat Kessef:interprétation philosophique des passages bibliques relatifs au Char Céleste

[modifier] Autres

  • On lui attribue des piyouttim (poèmes liturgiques) repris notamment dans le rituel d'Alger, mais il est probable que ce soit par confusion avec Joseph ben Shalom Kaspi, qui vécut au XVIe siècle.

[modifier] Sources

  • Jacob Gordin, "Joseph Kaspi", article publié dans l'Encyclopaedia judaïca, Berlin, Eschkol, 1932, tome 9, p. 1025- 30; traduit de l'allemand par Cyril Aslanoff;
    • in "Jacob Gordin : Ecrits - Le renouveau de la pensée juive en France", collection Présences du Judaïsme, éditions Albin Michel, ISBN 2-226-07785-5


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