Bob Denard

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Colonel Bob Denard ou Said Mustapha Mahdjoub (né Robert Denard le 7 avril 1929 à Grayan-et-l'Hôpital et mort à Paris le 13 octobre 2007[1], [2]), était un militaire, plus connu en tant que mercenaire français.

Ce mercenaire est sûrement le plus influent et le plus connu de tous les mercenaires ayant opéré en Afrique depuis les indépendances des pays de ce continent. Il a affirmé avoir effectué plusieurs de ses opérations avec l'aval de l'état français.

Sommaire

[modifier] Biographie

Il est fils d'un militaire de la coloniale[3]. Résistant à 16 ans, il s'engage ensuite comme volontaire pour l'Indochine en tant que matelot seconde classe en 1944. Devenu quartier-maître dans les commandos de la marine en Indochine et en Algérie, il quitte l'armée en 1952 après une bagarre dans un bar[4], et accepte une place de conducteur d'engins et de mécanicien au Maroc. Il entre ensuite dans la police de ce pays toujours sous protectorat français. "En 1954, il a été reconnu coupable de complot pour assassiner le premier ministre Pierre Mendès France et condamné à 14 mois de prison."[5]

À partir des années 1960, anticommuniste convaincu, il œuvre dans les tumultueux conflits post-coloniaux. Il participe à des opérations militaires impliquant des mercenaires en Rhodésie (Zimbabwe) en 1977, au Yémen, en Iran, au Nigeria, au Bénin, au Gabon (où il est instructeur de la garde présidentielle) , en Angola en 1975, au Cabinda en 1976, au Zaïre et aux Comores, l'un des pays les plus instables de la planète.

De 1960 à 1963, il sera l'un des chefs des « affreux » du Katanga, une province du Congo belge (Zaïre), en soutenant Moïse Tshombé qui vient de déclarer l'indépendance du Katanga le 11 juillet 1960. Il s'est notamment distingué en faisant défiler tous ses officiers qu'ils soient noirs ou blancs dans une stricte égalité (jusque là, les blancs passaient en premier). Le 21 janvier 1963 c'est la chute de Kolwezi et la défaite des mercenaires, qui se réfugient en Angola avec l'accord du régime portugais. Ils seront rapatriés en France où ils seront accueillis par les gendarmes.

Puis, il part d’août 1963 à la fin 1964 pour le Yémen pour le compte du MI6[6] avec 17 mercenaires, dans la 1re armée royaliste, financée par l'Arabie saoudite, contre les républicains soutenus par les Égyptiens de Nasser. Il est chargé d'encadrer les Touaregs. La France donne son accord tacite, non officiel,[7].

Il revient fin 1964 au Congo R D, à la tête du 1er choc qu'il a créé, plus précisément le 22 Février 1965 (voir Le roi de Fortune ). En prenant des mercenaires issus des Paras et de la Légion, il forme ce petit bataillon avec l'aide d'une poignée de Katangais. Il contribue à la victoire sur les rebelles communiste de Gbenie, Soumialot et Mulele. En intervenant sur un territoire grand comme la moitié de la France, tout en ayant de nombreux morts et blessés, il permettra à la population de réintégrer leur villes et villages. En 1967, arriva la tragédie des mercenaires pris au piège de Mobutu.

Denard intervient de nouveau pour le MI6[6] en Angola en 1975 avec l'UNITA de Jonas Savimbi.

À la demande de la France, le lieutenant-colonel Denard intervient une première fois dans la République fédérale islamique des Comores qui venait, unilatéralement, de proclamer son indépendance depuis le 5 septembre 1975. Il arrête le président Ahmed Abdallah qui venait de proclamer l'indépendance, et le remplace par Ali Soilih.

Il rate un coup d'État au Bénin en 1977 et est pressenti[6] en 1977 pour déstabiliser le régime de James Mancham aux Seychelles. En 1978, il revient dans la RFI des Comores avec 43 hommes pour mettre fin au régime sanguinaire de Soilih. Il replace Ahmed Abdallah au pouvoir. Ali Soilih meurt dans d'étranges circonstances le 29 mai 1978.

Bob Denard s'occupe dès lors d'organiser une garde présidentielle forte de 600 Comoriens encadrés par une poignée d'officiers européens qui entrent en concurrence avec les forces armées comoriennes. Il se marie sur place, se convertit à l'islam sous le nom de Saïd Mustapha Mahdjoub, s'occupe de développement (construction de routes, ferme de 600ha à Sangali, etc.). Son autorité est alors incontestée. La RFI des Comores devient le centre d'un trafic qui permet à l'Afrique du Sud, sous embargo international, de se fournir en armes. La RFI des Comores sert également de base logistique pour ses opérations militaires contre les pays africains qui lui sont hostiles : le Mozambique et l'Angola.

En 1989, Ahmed Abdallah signe un décret donnant l'ordre à la Garde présidentielle, dirigée par Bob Denard, de désarmer les forces armées pour cause de coup d'État probable, toujours selon Denard. Quelques instants après la signature du décret un officier des forces armées serait entré dans le bureau du président Abdallah et l'aurait alors abattu blessant également Bob Denard lorsqu'arriva un officier "européen" de la GP qui tua à son tour l'assassin du président. Mohamed Taki Abdulkarim, favorable à la France, devient président. Bob Denard est évacué quelques jours plus tard par les parachutistes français vers l'Afrique du Sud.

Dans la nuit du 27 au 28 septembre 1995, Denard renverse Said Mohamed Djohar avec une trentaine d'hommes débarqués de Zodiacs sur les côtes comoriennes. Une fois la mission terminée, Denard et son équipe sont rapatriés vers la métropole par les services secrets français.

Il meurt le 13 octobre 2007, d'un arrêt cardiaque , il était atteint depuis plusieurs années de la maladie d'Alzheimer.

[modifier] Ennuis judiciaires

Soutenu par Paris, Mohamed Taki Abdulkarim succède à Said Mohamed Djohar à la présidence comorienne. Bob Denard est dans le Médoc en attendant son procès pour assassinat à l'encontre de Ahmed Abdallah. Son lieutenant, Dominique Malacrino, est aussi inculpé. Quelques jours avant le procès, la famille d'Abdallah se rétracte et fait savoir qu'elle ne désire plus ce procès qui aboutit à un non-lieu faute de preuve. Mohamed Taki fait savoir qu'il refuse que Bob Denard rentre au pays. Le 6 novembre 1998, il meurt dans d'étranges circonstances. La famille crie à l'empoisonnement et demande une autopsie. Rapidement, l'affaire est étouffée et l'autopsie oubliée. Mohamed Taki est officiellement décédé de mort naturelle.

En 2001, Guido Papalia, procureur de la ville de Vérone, au Nord-Est de l'Italie, le poursuit pour avoir tenté de recruter des mercenaires dans les milieux de l'extrême droite italienne afin de renverser le colonel Azali Assoumani qui s'oppose aussi à son retour.

Bob Denard a été jugé à partir du 21 février 2006. Un avocat, maître Elie Hatem, lui a été commis d'office. Libéré en 1996, il avait alors annoncé sa retraite, et même son retour dans son Médoc natal. À l'époque, il rêvait de construire, sur le terrain familial de la commune de Grayan-et-l'Hôpital, un musée de la Décolonisation. Avec bien sûr quelques souvenirs personnels… Le terrain a depuis longtemps été vendu. Car, s'il a pu gagner beaucoup d'argent, Bob Denard en aurait aussi pas mal perdu ces dernières années. Il a d'abord fallu payer la note des avocats, mobilisés pour les deux précédents procès, et lors de cette dernière instruction, qui a duré dix ans. Et puis de mauvaises affaires, comme l'achat d'un garage Citroën à Lesparre dans les années 1980, auraient aussi entamé le trésor de guerre. Son nouvel avocat affirme même que les problèmes d'argent du vieux « corsaire de la République », comme il s'était autoproclamé, pouvaient compromettre sa stratégie de défense : « J'ai été commis d'office dans ce dossier, et M. Denard bénéficie de l'aide juridictionnelle », confie Elie Hatem, qui ne cache pas une réelle proximité avec l'ancien mercenaire. « J'aurais voulu faire citer plus de témoins à la barre, comme par exemple Alain Juppé, qui était Premier ministre au moment du coup d'État de 1995. Mais l'autorisation que j'ai sollicitée pour couvrir des frais d'huissiers est intervenue trop tard »[8]. Son trésor de guerre s'est peu à peu amenuisé et récemment Bob Denard ne vivait "que sur 250 euros par mois" : retraite due à ses états de service pendant la guerre d'Indochine. Il pouvait ne pas assister à son procès, souffrant de la maladie d'Alzheimer.

[modifier] Médias

  • Corsaire de la République, livre de Bob Denard et Georges Fleury, Robert Laffont, 1998, 437 p. (ISBN 2876452154)
  • Bob Denard, profession mercenaire, documentaire de Thomas Risch, production Doc en Stock pour 13ème rue.
  • La chanson Manimal (album Le Code de l'honneur, sorti en 1999) premier album solo du rappeur français d'origine comorienne Rohff dénonce les magouilles de Denard, soutenu, puis protégé par la France.
  • Un autre rappeur proche de Rohff, Kery James, a également « dédicacé » un titre à Bob Denard sur la chanson Hardcore 2005 présent sur son second album, sorti en 2005.

[modifier] Notes et références

  1. Dépêche AFP/Google
  2. LeMonde.fr : Mort de l'ancien mercenaire Robert Denard
  3. Article paru dans l'Humanité en 1999
  4. LeMonde.fr : "Bob Denard a toujours agi pour le compte de l'Etat français"
  5. Article de la BBC 15 oct. 07
  6. abc Source dans MI6 de Stephen Dorril
  7. il affirmera, dans le reportage TV "Bob Denard, profession mercenaire" de Thomas Risch, ne jamais intervenir en cas de "feu rouge" de la France.
  8. Quotidien de la Réunion

[modifier] Source

  • Bob Denard et Georges Fleury, Corsaire de la République, Robert Laffont, 1998, 437 p. (ISBN 2876452154)

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes


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