Théorème de Riesz

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En mathématiques, et plus particulièrement en théorie des espaces vectoriels normés réels ou complexes, le théorème de Riesz établit un lien entre la notion de compacité, une propriété topologique, et celle de dimension, une notion algébrique. Il est nommé ainsi en l'honneur du mathématicien Frigyes Riesz.

Sommaire

[modifier] Énoncé

Plus précisement, le théorème de Riesz s'énonce de la façon suivante :

Théorème
Soit E un espace vectoriel normé réel ou complexe. Les quatre propositions suivantes sont équivalentes :
  1. E est de dimension finie.
  2. Toute partie bornée de E est relativement compacte.
  3. La boule unité fermée de E est compacte.
  4. E est localement compact.

[modifier] Contre-exemples sur d'autres corps

La droite réelle est un espace vectoriel rationnel de dimension infinie et normé par la valeur absolue usuelle, mais sa boule unité fermée est compacte, toute partie bornée est relativement compacte et l'ensemble est localement compact.

Inversement, le corps des rationnels constitue un espace vectoriel de dimension 1 sur lui-même mais aucun voisinage de l'origine n'est compact.

L'espace des suites à valeurs dans le corps fini \mathbb{F}_2, muni de la norme constante égale à 1 en dehors de la suite nulle, est localement compact (car discret) mais de dimension infinie et sa boule unité fermée n'est pas compacte.

[modifier] Démonstration

[modifier] Sens direct

Dans ce sens, il s'agit d'un corollaire théorème de Bolzano-Weierstrass. Si E est de dimension finie, tout fermé borné dans E est compact.

[modifier] Sens réciproque, en utilisant la propriété de Borel-Lebesgue =

Pour la réciproque, il est commode d'utiliser la caractérisation des compacts de Borel-Lebesgue.

En effet, B \subset \bigcup_{x \in B} B\left(x,\frac{1}{2}\right). Donc si B est compacte, il existe un recouvrement fini de cet ouvert par des boules de centre xi et de rayon 1/2 : B \subset \bigcup_1^p B\left(x_i,\frac{1}{2}\right).

Soit alors F=\mathrm{Vect}(x_1,\ldots,x_p). Montrons que B est incluse dans F.

Soit x \in B, il existe  i \in [1, p] tel que x \in B\left(x_i,\frac{1}{2}\right) et x-x_i \in B\left(0,\frac{1}{2}\right) donc B \subset F + B\left(0,\frac{1}{2}\right).

Montrons maintenant que B\left(0,\frac{1}{2}\right) \subset F + B\left(0,\frac{1}{4}\right).

Si x \in B\left(0,\frac{1}{2}\right), 2x \in B donc 2x = f + yf \in F et y \in B\left(0,\frac{1}{2}\right) d'où x = \frac{f}{2} + \frac{y}{2}, et enfin x \in F + B\left(0,\frac{1}{4}\right).

Par récurrence sur n, on a alors \forall n \in \mathbb{N}, B \subset F + B\left(0,\frac{1}{2^n}\right). Soit alors x \in B, \forall n \in \mathbb{N}, il existe x_n \in F tel que x-x_n \in B\left(0,\frac{1}{2^n}\right). Donc \lim_{n\rightarrow \infty}x_n = x, et B \subset \overline{F}. Mais F est un espace vectoriel de dimension finie, donc est fermé : B \subset F donc E \subset F : E est de dimension finie.

[modifier] Sens réciproque, sans utiliser la propriété de Borel-Lebesgue

Comme on peut définir la compacité par la propriété de Bolzano-Weierstrass, donnons une démonstration de la réciproque plus élémentaire.

[modifier] Propos heuristiques

On considère un espace vectoriel E de dimension infinie. Typiquement, on prend E=\mathbb{R}^\mathbb{N}, le \mathbb{R}-espace vectoriel des suites (infinies dénombrables) de nombres réels.

On cherche dans cet espace E une suite (xn) qui n'admette aucune sous-suite convergente, c'est-à-dire qui contredise la propriété de Bolzano-Weierstrass, et qui ainsi démontre que notre espace E n'est pas compact.

La première suite qui vient à l'esprit, c'est la base canonique de E, c'est-à-dire la base formée des vecteurs e_i=(0,\ldots, 0, 1, 0, \ldots), où le 1 est à la i-ième place.

Et, effectivement, si (E, (\cdot |\cdot)) est un espace préhilbertien réel ou complexe de dimension infinie, si (e_i)_{i \in I} est une base orthonormée de E et si (i_j)_{j \in \mathbb{N}} est une suite injective à coefficients dans \mathbb{N} et à valeurs dans I, alors, la suite (f_j=e_{i_j})_{j\in \mathbb{N}} est une suite qui n'a aucune valeur d'adhérence.


Il nous faut donc trouver l'analogue d'une base orthonormée dans un espace vectoriel E qui n'a pas de produit scalaire. Désormais, (E,||\cdot|| ) est un \mathbb{R} ou \mathbb{C}-EVN de dimension infinie.

[modifier] L'analogue de l'orthonormalisation de Schmidt

On se donne une famille libre (x_i)_{i\in \mathbb{N}}. On va construire une suite (ei) qui sera une pseudo-orthonormalisée de Schmidt de (xi).

D'abord, on pose e_0=\frac{x_0}{||x_0||}, de telle sorte que | | e0 | | = 1.

Puis, pour e1, on procède ainsi. On note E0 l'espace vectoriel de dimension finie engendré par e0 ; c'est une fermé de E. En particulier, il existe un point y_0\in E_0 tel que ||x_1-y_0||=\inf_{y\in E_0}||x_1-y||=d(x_1, E_0). Dans le cas des espaces préhilbertiens, c'est normalement le projeté orthogonal de x1 qui joue le rôle de y0. S'inspirant alors de l'orthonormalisation, on pose e_1=\frac{x_1-y_0}{||x_1-y_0||}.

On itère ensuite la construction : E1 est engendré par e0 et e1 ; y2 réalise la distance de x2 à E1, etc.

[modifier] La démonstration

On montre alors que la suite en contredit la propriété de Bolzano-Weierstrass. Par l'absurde, supposons que la suite en admette une valeur d'adhérence a.

Pour aboutir à une contradiction, rappelons quelques propriétés de la distance à un sous-espace vectoriel : si F est un sous-espace vectoriel de l'EVN E et si x\in E, alors, pour tout f\in F et tout λ dans \mathbb{R} ou \mathbb{C}, on a :

  • d(x + f,F) = d(x,F)
  • dx,F) = λd(x,F)

On a donc d(e_{n}, E_{n-1})=\frac{d(x_{n}, E_{n-1})}{d(x_{n}, E_{n-1})}=1.

Or, par définition de ce que'est une valeur d'adhérence, il existe deux indices n < m, tels que \|e_n-a\|<1/2 et \|e_m-a\|<1/2. L'inégalité triangulaire donne : \|e_n-e_m\|<1 ce qui est absurde puisque e_n\in E_{m-1}.

[modifier] Voir aussi