Jacques Bergier

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Jacques Bergier, né le 8 août 1912 à Odessa (Ukraine) et décédé le 23 novembre 1978 à Paris d'une hémorragie cérébrale, est un ingénieur chimiste, alchimiste, espion, journaliste et écrivain de nationalité française et polonaise.

Salué dans la francophonie pour la grande diversité de ses connaissances et ses nombreux ouvrages, il a largement contribué à la promotion des pseudo-sciences en France, notamment avec Le Matin des magiciens, écrit en collaboration avec Louis Pauwels.

Sommaire

[modifier] Biographie

[modifier] L'ingénieur chimiste

Le site de Peenemünde, base des fusées V1 et V2
Le site de Peenemünde, base des fusées V1 et V2

Après des études secondaires au lycée Saint-Louis, il poursuit ses études à la Faculté des sciences de Paris et à l'École nationale supérieure de chimie de Paris. Ingénieur chimiste, licencié ès sciences, il se consacre alors à la recherche scientifique, notamment à la chimie nucléaire. En 1936, il découvre avec le physicien atomiste André Helbronner[1], l’utilisation de l'eau lourde pour le freinage des électrons, et réalise la première synthèse d’un élément radioactif. Très vite, il développe un penchant pour l'alchimie (renforcé par une rencontre supposée avec Fulcanelli en juin 1937), et affirme au début des années 1950 avoir obtenu par transmutation alchimique du béryllium à partir de sodium.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il est résistant à Lyon au sein du trio des ingénieurs, puis du réseau Marco-Polo mieux structuré à compter de décembre 1942. Grâce à des renseignements fournis par un ingénieur russe travaillant sur place et transmis à Londres, son groupe est ainsi à l'origine du bombardement de la base d'expérimentation de fusées V2 de Peenemünde. Il est arrêté à Lyon le 23 novembre 1943 par la Gestapo, et soumis à la torture à 44 reprises. Il est enfermé dans les camps nazis de mars 1944 à février 1945[2].

[modifier] L'agent secret

Après la guerre, il fait partie du BCRA (Bureau central de renseignements et d'actions, le futur SDECE) jusqu'en 1950, en tant que capitaine de la DGER (Direction générale des études et recherches), au sein de laquelle il dirige la branche française du CIOS (Centre interarmée de contre-espionnage alliés). Il participe ainsi durant la 2e moitié de 1945 à la MIST (Mission d'information scientifique et technique), dirigée par le capitaine Albert Mirlesse chef du 2e bureau de l'État-Major Général de l'Air -EMGA-, et rattachée au CIOS, pour des missions secrètes en Allemagne afin d'interroger des savants atomistes, et de trouver des armes secrètes dérivées de l'eau lourde. Il fait également partie des services britanniques de contre-espionnage, au même titre que son ami George Langelaan.

[modifier] L'écrivain

Ses déplacements l'amènent à fréquenter plusieurs écrivains. Il fut ainsi l'ami intime de Jean Bruce et de son épouse Josette Bruce (créateurs d'OSS 117), de Victor Alexandrov, et de bien d'autres auteurs parmi lesquels Arthur C. Clarke, spécialiste en ondes radar pour l'armée anglaise durant la guerre, qu'il rencontre vers 1941, et Ian Fleming, rencontré une première fois à Lisbonne fin 1942 lors de ses activités au sein du « trio des ingénieurs ». Bergier affirma à plusieurs reprises lui avoir fourni l'idée du personnage de James Bond. En 1956, il entame une collaboration avec une autre de ses relations suivies, Robert Amadou pour sa revue La Tour Saint-Jacques.

Après la mort de son compagnon de résistance Guivante "Paul" de Saint-Gast au début des années 1950, Bergier décide de délaisser son activité d'ingénieur-conseil et de « chasseur de tête » scientifique au sein de la société "Recherches et Industrie" pour se lancer dans l'écriture. Il est le premier à traduire en français Lovecraft, pour lequel il a une immense admiration, et dont il est le « correspondant » par l'interposition de la revue Weird Tales.

En 1953, il soumet à Robert Laffont un projet de collection d'anticipation hexagonale qu'il dirigerait conjointement avec le mathématicien François Le Lionnais. Mais la collection ne voit pas le jour. Il écrit de nombreux ouvrages sur l'espionnage puis publie chez Gallimard en 1960, le livre Le Matin des magiciens en collaboration avec Louis Pauwels, qu'il a connu en 1954, (suivi de l'Homme éternel dix ans plus tard), qui constitue le manifeste du mouvement réaliste fantastique.

La mise en forme de cet ouvrage nécessita cinq années, d'après une volumineuse documentation répertoriée en 2007 à la Bibliothèque nationale de France dans le Fonds Pauwels[3]. L'idée initiale germa dans l'esprit de Bergier alors qu'il était alité à l'infirmerie de Güsen, annexe du camp de Mauthausen. Bien que très critique face aux arts divinatoires en général et à l'astrologie en particulier[4]), Bergier fait la part belle dans ce livre à des thèmes ésotériques, aux civilisations disparues et aux religions occultes.

En 1961, toujours avec Louis Pauwels (et François Richaudeau[5]), il crée la revue Planète, à laquelle participeront ses grands amis Aimé Michel, Charles Noel Martin, Remy Chauvin et George Langelaan. Ces travaux sont un mélange entre des éléments réellement scientifiques, des éléments qui relèvent plutôt de la science-fiction, et d'autres de l'occultisme. Si le courant issu du Matin des Magiciens relève clairement de la pseudo-science, on ne peut être que fasciné par la créativité de Louis Pauwels et Jacques Bergier.

Avec son vieux complice Georges H. Gallet, lui aussi grand collectionneur de pulps, il codirige plusieurs collections chez Albin Michel de 1970 à 1975, dont la collection Science-fiction de l'éditeur. Bergier est également codirecteur de la collection Les Classiques de la S-F du Club du livre d'anticipation (CLA) aux éditions Opta avec Michel Demuth, de 1968 à 1970. Dans Admirations (réédité en 2000 aux éd. Œil du Sphinx), il rend hommage à John Buchan, Abraham Merritt, Robert E. Howard, Tolkien, etc.

[modifier] Théories

À travers ses écrits, Jacques Bergier a émis plusieurs théories liées à des domaines généralement exclus par la science officielle : phénomènes paranormaux, alchimie, civilisations disparues, OVNI, etc. Pour lui, le cerveau humain dispose de pouvoirs quasi-illimités, et l'humanité a établi des contacts avec des extra-terrestres, notamment par l'intermédiaire d'anciennes civilisations disparues.

[modifier] Les hommes en noir

Dans Les livres maudits, Bergier dit avoir vu à toutes les conférences consacrées à Planète « un groupe d'hommes en noir à l'aspect sinistre, toujours les mêmes », dont le rôle serait « d'empêcher une diffusion trop rapide et trop étendue du savoir ». Il fait remonter l'existence de cette conspiration à la plus haute Antiquité, leur attribuant notamment la destruction de la bibliothèque d'Alexandrie.

[modifier] L'existence des extraterrestres

Dans Le Matin des magiciens et dans la plupart de ses autres ouvrages, Jacques Bergier suppose l'existence d'extraterrestres. Il cite plusieurs phénomènes comme preuve de leur existence, notamment l'existence de traces de ventouses sur les montagnes.

[modifier] Le « réalisme fantastique »

Icône de détail Article détaillé : Réalisme fantastique.

Le Matin des magiciens, co-écrit avec Louis Pauwels, est à l'origine du mouvement appelé réalisme fantastique. Ce courant de pensée et de recherche se veut avant tout scientifique, et a pour objet l'étude de domaines généralement exclus par la science officielle.

Le modèle absolu de Jacques Bergier est Charles Fort, auteur du Livre des damnés (1919), qui enquêtait sur divers phénomènes inexpliqués relatés dans les journaux (pluies de grenouilles, de sang, de gélatine, observations d'objets volants non-identifiés, disparitions mystérieuses...) et proposait, avec une liberté totale, des explications qui défiaient toutes les théories habituellement admises par la science.

Comme Charles Fort, Jacques Bergier estimait que la science a tendance à se fermer à tous les phénomènes qui viennent bouleverser ses convictions. Les domaines de prédilections de Jacques Bergier sont cependant plus ésotériques que ceux de Fort : alchimie, civilisations disparues, parapsychologie... Deux des grandes lignes du réalisme fantastique sont la croyance au pouvoir quasi-illimité du cerveau humain, et la croyance en l'existence des extra-terrestres et des nombreux contacts de l'humanité avec eux, notamment par le passé. Jacques Bergier croyait qu'il existait avant les civilisations connues, voire même avant la préhistoire, des civilisations qui auraient totalement disparu, suite à leur autodestruction par une technologie trop avancée. C'est cette théorie qui a donné naissance à celle des hommes en noir, qui seraient là pour empêcher de nouvelles destructions.

[modifier] La futurologie

Dans Visa pour Demain, Bergier expose comment il est possible de connaître le futur, non pas par la divination, mais par la science. Il est, dit-il, possible, en observant les découvertes actuelles dans les sciences théoriques d'imaginer l'arrivée d'inventions utilisant ces découvertes 50 ans plus tard. Bergier aurait ainsi prévu toutes les technologies de l'an 2000, sauf la téléphonie mobile (« Il est à peu près aussi intelligent de brûler de l'essence dans nos moteurs que d'alimenter un chauffage central avec des billets de banque! »).

[modifier] Le surhomme

De même que Louis Pauwels, Bergier accréditait la thèse du surhomme psychique (et non physique) à venir, lui-même se reconnaissant à différentes périodes de sa vie deux pouvoirs psychologiques inexpliqués : la sensation d'être suivi toujours avérée, et la perception de la sensation de faim chez autrui[6]. Mensan, il était également doté d'hyperosmie... mais devint pratiquement aveugle à la fin de sa vie, suite à l'évolution accélérée d'une rétinopathie diabétique instable sur fond d'une forte myopie.

[modifier] Anecdotes

Jacques Bergier maîtrisait 14 langues modernes et anciennes, dont l'araméen... mais avouait ne pouvoir retenir le finnois.

Sur sa carte de visite, il se présentait comme « Amateur d'insolite et scribe des miracles ».

Sa mémoire eidétique lui permettait une capacité de lecture surprenante, atteignant parfois dix livres par jour, au mieux de sa forme physique jusqu'au début des années 1970[7]. Elle lui permit aussi d'assurer de 1977 à 1978 le rôle de L'Incollable dans l'émission-jeu télévisée de RTL TV du même nom présentée par l'animateur Fabrice. Il répondait de la sorte aux questions de Maître Jacques Chaussard, lorsque les trois célébrités francophones invitées faisaient des erreurs. Bergier avoua lui-même présenter « de grandes lacunes » mais « uniquement en sport et en politique locale ». À son décès, l'émission se maintint encore durant quelques semaines, désormais simplement avec des colles sur la vie quotidienne.

Jacques Bergier apparaît dessiné par Hergé dans l'album de Tintin Vol 714 pour Sydney (il est personnifié par Mik Ezdanitoff, de la revue Comète), et par Franquin dans l'album le Voyageur du mésozoïque. Il est aussi l'un des personnages centraux du roman de François Darnaudet, le Papyrus de Venise, publié en 2006.

En 2002 a été créé le « prix Jacques Bergier » qui récompense des ouvrages de science-fiction et de fantastique.

[modifier] Œuvres

  • Économie politique d'un enfer, Les Cahiers du Sud, 1947
  • Cinquante années de découvertes (Collectif) 1950
  • Visa pour demain (avec Pierre de Latil) 1954
  • Agents secrets contre armes secrètes 1955, Editions "J'ai lu leur aventure" n°101
  • Quinze hommes, un secret (avec P. de Latil) 1956
  • Les Mystères de la vie 1957
  • L'Énergie H 1958
  • Les Dompteurs de force 1958
  • Les Murailles invisibles 1959
  • Le Sous-marin de l'espace (avec Françoise d'Eaubonne et Jean-Charles) 1959
  • Les Merveilles de la chimie moderne 1960
  • Le Matin des magiciens (avec L. Pauwels) 1960
  • Le Plasma, quatrième état de la matière 1961
  • Visa pour l'humour (Collectif) 1962
  • À l'écoute des planètes 1963
  • Rire avec les savants 1964
  • Nos pouvoirs inconnus (avec P. Duval) 1966
  • L'Actuelle guerre secrète (avec P. Nord) 1967
  • La Guerre secrète du pétrole (avec Bernard Thomas) 1968
  • L'Espionnage industriel 1969
  • La Guerre scientifique (avec J-Ph. Delaban) 1970
  • Les Extraterrestres dans l'histoire 1970 ; J'ai lu, n° A250, coll. « L'Aventure mystérieuse »
  • Admirations 1970
  • L'Homme éternel (avec L. Pauwels) 1970
  • Guerre secrète sous les océans (avec V. Alexandrov) 1970
  • Les Frontières du possible (rééd. Aux limites du connu) 1971
  • L'Espionnage scientifique 1971
  • Les Livres maudits 1971 ; J'ai lu, n° A271, coll. « L'Aventure mystérieuse »
  • Les Empires de la chimie moderne 1972
  • Le Livre de l'inexplicable 1972 ; J'ai lu, n° A324, coll. « L'Aventure mystérieuse »
  • Vous êtes paranormal 1972
  • L'Espionnage politique 1973
  • L'Espionnage stratégique (avec J.-Ph. Delaban) 1973
  • Visa pour une autre terre 1974 ; J'ai lu, n° A351, coll. « L'Aventure mystérieuse »
  • Les Maîtres secrets du temps 1974 ; J'ai lu, n° A312, coll. « L'Aventure mystérieuse »
  • Les Nouveaux mystères de l’archéologie (avec P. Chwat) 1974
  • Le Livre du mystère (avec G. H. Gallet) 1975 ; J'ai lu, n° A374, coll. « L'Aventure mystérieuse »
  • La Troisième guerre mondiale est commencée 1976
  • Je ne suis pas une légende (autobiographie) 1977
  • Le Livre des anciens astronautes (avec G. H. Gallet) 1977 ; J'ai lu, n° A388, coll. « L'Aventure mystérieuse »
  • La Grande Conspiration russo-américaine 1978
  • La Guerre secrète de l’occulte 1978 ; J'ai lu, n° A361, coll. « L'Aventure mystérieuse »
  • Encyclopédie internationale des sciences et des techniques (sous sa direction) 1961
  • Encyclopédie de l’inexpliqué (sous sa direction) 1976
  • Les Douze Meilleurs Romans de science-fiction (sous sa direction) 1963
  • La Tribune des Nations 1947 à 1975 (journal; près de 30 années d'articles puis de chroniques hebdomadaires, sous le pseudonyme de Jérôme Cardan)
  • Tout Savoir 1957 à 1968 (magazine)
  • Planète 1961 à 1971 (encyclopédie)
  • Nostra 1972 à 1978 (journal; puis magazine)

[modifier] Articles parus dans Science et Vie

  • n° 443, août 1954, « L'utilisation industrielle de l'énergie atomique en Angleterre » (avec Pierre de Latil)
  • n° Hors-Série « L'homme dans l'espace », 1960, « Applications des satellites : laboratoires de l'espace » et « Colonisation de la lune »
  • n° 736, janvier 1979, « Cet elfe qu'était Jacques Bergier » (à son décès)

[modifier] Articles parus dans Sciences et Avenir

  • n° 111, mai 1956, « Les travaux de Pontecorvo en URSS, pour découvrir l'anatomie du proton »
  • n° 112, juin 1956, « L'oxygène atomique de la haute atmosphère, combustible des engins téléguidés de demain »* n°114, aout 1956, « Quand l'industrie annexe l'alchimie »
  • n° 115, septembre 1956, « Le 17 septembre, la planète Mars ne sera qu'à 59 700 000 km de la terre »
  • n° 117, novembre 1956, « Qu'est-ce que le feu ? »
  • n° 118, décembre 1956, « Les dernières équations d'Einstein recèlent-elles les secrets de l'antigravitation ? »
  • n° 122, avril 1957, « Les déchets des piles atomiques feront naître demain une radio-chimie »
  • n° 123, mai 1957, numéro spécial « Les portes de l'an 2000 », auteurs non différenciés (Pierre de Latil, Albert Ducrocq, Jacques Bergier, etc.) Présomption articles de JB : « Les hommes de demains raisonneront-ils avec des machines » et Au-delà des usines sans hommes, la nation automatique »
  • n° 125, juillet 1957, « La plus grande révolution de la physique depuis Einstein : le principe de parité s'effondre »
  • n° 128, octobre 1957, « Des progrès décisifs dans la domestication de l'énergie H »

[modifier] Interview

[modifier] Bibliographie critique

  • Yves Galifret (sous la dir. de), Le crépuscule des magiciens: le réalisme contre la culture, 1965, Éditions de l'union rationaliste
  • Charles Moreau, Jacques Bergier, résistant et scribe de miracles, Anthropos, Montréal, 2002
  • Louis Pauwels, Blumroch l'admirable ou le déjeuner du surhomme, Albin Michel, 1976, puis Folio, 1977 (livre commenté par Pauwels le 6 février 1976 à l'émission Apostrophe[8].

[modifier] Notes et références

  1. Extrait d'un article de Science & Vie n° 736, janvier 1979.
  2. D'abord au camp de Neue Bremme puis au camp de Mauthausen.
  3. Le Fonds Bergier est, lui, actuellement rattaché à la bibliothèque de Saint-Germain-en-Laye
  4. Bergier aimait à redire : « La voyance ?... J'aimerais bien voir ! »
  5. Entretien avec François Richaudeau
  6. L'ayant éprouvée plus qu'à son tour en déportation -39 kilos à son retour-, il répondit un jour avec dérision à la question « Que faites-vous contre la faim dans le monde ? » d'un journaliste: « Je mange ! »... réaffirmant encore quelques années plus tard « la spiritualité commence à 2500 calories par jour »
  7. Soit plus de 4 millions de caractères par heure, voir l'article « Vous pouvez apprendre à lire plus vite » de la revue Planète, n°26
  8. Extrait sur le site de l'INA

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes