Breton vannetais

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Le breton vannetais est la variété de breton parlée dans la partie bretonnante du Morbihan (56), à l’exception des cantons du Faouët et de Gourin (où l’on parle cornouaillais). Le canton finistérien d’Arzano parle aussi vannetais.

Le Pays vannetais est l’autre région de grande tradition littéraire en langue bretonne, avec le Léon. En effet, ce pays correspondait à l'évéché de Vannes (du moins à sa partie bretonnante) et ses prêtres, étant formés au séminaire de cette ville, y apprenaient à lire et écrire le breton local. Qui plus est, nombre de ces prêtres furent également écrivains.

Aujourd’hui, le breton vannetais est parfois ignoré des apprenants et laissé de côté par les professeurs, car il présente des caractéristiques trop spécifiques par rapport aux autres dialectes bretons (plus unis et majoritaires). Cependant plusieurs méthodes (notamment Oulpan de Skol an Emsav et la méthode Assimil de Fanch Morvannou) présentent et le KLT et le vannetais. Enfin, d'autres méthodes, tel Selaou, Selaou de Mona Bouzec présentent entre autre le cornouaillais de la frontière avec le vannetais (de Briec à Gourin et au Faouët), qui partage certains traits avec le vannetais (palatisation de certains sons, chuintement de certains s, ...)

Ce dialecte est très intéressant, pour le linguiste parce qu’il est sans conteste, avec le léonard, l'un des dialectes bretons les plus archaïques pour sa syntaxe, sa morphologie et sa phonologie ; et pour l'amateur de chant populaire ou de conte de part ses caractéristiques musicales et son « esprit », relativement éloigné de ceux du Centre-Bretagne ou du Léon.

Sommaire

[modifier] Orthographes

Diverses orthographes vannetaises standard se sont succédé jusque dans le milieu du XXe siècle, et il arrive encore que certaines personnes les utilisent. Ensuite sont apparues des graphies-orthographes désireuses d'intégrer le vannetais, notamment l'orthographe unifiée dite peurunvan fondée sur une volonté d'unification du KLT et de l'orthographe vannetaise traditionnelle, et dénommée également KLTG (G pour Gwened = Vannes). Certains pensent que le vannetais et le KLT sont trop différents pour qu’une seule et même orthographe puisse convenir à les noter phonétiquement de manière satisfaisante. Cependant la graphie "skolveurieg" du vannetais est proche de la graphie "skolveurieg" du KLT.

La majorité des écrivains et auteurs vannetais d'aujourd'hui utilisent le peurunvan : Daniel Doujet, François Louis, Daniel Carré, Jorj Belz (a également écrit en orthographe vannetaise traditionnelle), Herri ar Borgn (a également écrit en interdialectal).

[modifier] Dialectes

Nombreuses sont les divergences entre vannetais et KLT : les deux ont connu une évolution en partie différente, à partir de l’époque du vieux-breton.

Le vannetais lui-même se divise en trois sous-dialectes :

[modifier] Morphologie du breton vannetais

[modifier] Morphologie verbale

Voici les paradigmes des verbes vannetais, conjugaison marquée (la marque de personne est incluse dans la forme verbale – c’est par exemple la forme qu’on utilise au négatif en général). L’abréviation BV précède les variantes bas-vannetaises.



Verbe régulier (ici, dire) Verbe être Verbe avoir Verbe aller
Présent ponctuel je - on (BV oun) ’m-es -
tu - ous (BV oh) ’tes (BV ‘pes) -
il - é ; é ma ’nes -
elle - é ; é ma ’des, ‘nes -
nous - omb hon-es (BV ni-bes) -
vous - oh hues (BV ‘pes) -
ils,elles - int ’nes -
Impersonnel - eur - -
. . . . . .
Présent progressif je on é laret - - on é vonet
tu ous (BV oh) é laret - - ous (BV oh) é vonet
il é ma é laret - - é ma é vonet
elle é ma é laret - - é ma é vonet
nous omb é laret - - omb é vonet
vous oh é laret - - oh é vonet
ils, elles é mant é laret - - é mant é vonet
Impersonnel eur é laret - - eur é vonet -
. . . . . .
Présent habituel je laran vezan, vèn ’m-bé an
tu laréz (BV laret) véz (BV vèh) ’té (BV ‘pè) éz (BV et)
il lar (BV lara) ’vé ’n-devé a
elle lar (BV lara) ’vé ’n-devé a
nous laramb ’vèmb hor-bé (BV ni-bé) amb
vous laret ’vèh ’pé et
ils, elles larant ’vènt (BV veint) ’n-devé ant
Impersonnel larer ’vèr ’vè èr -
. . . . . .
Imparfait je laren oen ’moè èn
tu lares (BV lareh) oes (BV oeh) ’toè (BV ‘poè) ès
il larè oè (BV aussi oa, ò) ’noè è
elle larè oè (BV aussi oa, ò) ’noè è
nous laremb oemb hor-boè (BV ni-boè) emb
vous lareh oeh ’poè eh
ils, elles larent oent ’noè ent
Impersonnel - - - - -
. . . . . .
Futur je larein vein ’mo ein
tu lari (BV lareh) vi (BV vèh) ’to (BV ‘po) i
il larou (BV larei) vo ’no ei
elle larou (BV larei) vo ’no ei
nous laréemb (BV larimb) véemb (BV vimb) hor-bo (BV ni-bo) éemb (BV imb)
vous laréet (BV larèh) véet (BV vèh) ’po éet (BV èh)
ils, elles laréent (BV lareint) véent (BV veint) ’no éent (BV eint)
Impersonnel - - - - -
. . . . . .
Conditionnel prés. je larehen vehen ’mehè ehen
tu larehes (BV lareheh) vehes (BV veheh) ’tehè (BV ‘pehè) ehes (BV eheh)
il larehè vehè ’nehè ehè
elle larehè vehè ’nehè ehè
nous larehemb vehemb hor-behè (BV ni-behè) ehemb
vous lareheh veheh ’pehè eheh
ils, elles larehent vehent ’nehè ehent
Impersonnel - - - - -
. . . . . .
Un temps composé : le passé composé je ’mes laret on bet (BV oun pet) ’mes bet on oeit
tu ’tes laret (BV ‘pes laret) ous bet (BV oh pet) ’tes bet (BV ‘pes pet) ous oeit (BV oh oeit)
il ’nes laret é ma bet ’nes bet é ma oeit
elle ’nes laret é ma bet ’nes bet é ma oeit
nous hon-es laret (BV ni-bes laret) omb bet hon-es bet (BV ni-bes pet) omb oeit
vous hues laret (BV ‘pes laret) oh bet hues bet (BV ‘pes pet) oh oeit
ils, elles ’nes laret int bet ’nes bet int oeit
Impersonnel - - - - -
. . . . . .
Nom verbal laret bout en-dout (BV kaout) mon(e)t
Adjectif verbal laret bet bet oeit
. . . . . .

[modifier] Syntaxe du breton vannetais

Du point de vue de la syntaxe, le breton vannetais présente un grand nombre d’archaïsmes, et quelques innovations également.

  • Le pronom personnel COD est presque systématiquement (sauf au nord-ouest du bas-vannetais, sous influence du cornouaillais) un adjectif possessif, et n’est jamais remplacé par une périphrase avec une préposition. C’est ce qu’on retrouve dans les autres langues brittoniques (gallois, cornique, plus archaïques) et dans les états plus anciens de la langue (moyen-breton).
Me ia d’hou kuélet. (Je vais vous voir. « je vais votre voir »).
N’hé homprenan ket. (Je ne la comprends pas. « je ne son comprends pas »).
É mant doh me hlah. (Ils sont en train de me chercher. « ils sont en train de mon chercher »).
  • Dans les phrases dans des temps composés, le pronom COD est, à la 3e personne, à la même forme que le pronom COD, et se place juste avant le participe passé.
Me em-es hi kleuet. (Je l’ai entendue. « j’ai elle entendu »).
N’ou-des ket éan guélet. (Ils ne l’ont pas vu. « ils n’ont pas il vu »).
  • La mutation adoucissante sur les noms et les adjectifs est moins fréquente en vannetais qu’en KLT.
  • L’ordre des mots normal dans les propositions principales ou indépendantes est presque toujours SVO,
Me zad en-des cherret ur villeten hanter-hant euro (Mon père a ramassé un billet de 50€).
É kér, me zad en-des cherret ur villeten hanter-hant euro (En ville, mon père a ramassé un billet de 50€).
sauf dans les phrases avec le verbe être (où l’on peut commencer par le prédicat, surtout à la 3e personne du singulier, ou par le verbe lui-même, au présent), ou avec le verbe aller (on commence par ce verbe).
Chuih é (il est fatigué, « fatigué il-est »)
Éh on é chonjal (je suis en train de réfléchir)
Éh an de Uéned (je vais à Vannes)
Dans les subordonnées cependant, et dans les phrases interrogatives commençant par un mot interrogatif, comme la conjonction ou le mot interrogatif commence obligatoirement la phrase, le verbe suit, et le sujet vient ensuite.
Me em-es laret dehè / é tehè Iehann de eih ér (Je leur ai dit / que Jean viendrait à huit heures. « J’ai dit à-eux / que viendrait Jean à huit heures »).
É-men é kaùéemb avaleu ? (Où trouverons-nous des pommes ? « Où trouverons nous pommes ? »)

[modifier] Phonologie du breton vannetais

  • L’accent tombe sur la dernière syllabe des mots (comme en vieux-breton; en KLT en revanche l'accent tonique s'est déplacé sur l'avant-dernière syllabe. En bas-vannetais, l’accent tonique est plus faible et mobile, et tombe sur la première syllabe des mots de trois syllabes.
  • Les anciennes diphtongues ae et ao sont conservées en haut-vannetais, et réduites à è et ô en bas-vannetais. Ex : du lait : HV liah ; BV lèh. Garçon : HV paotr ; BV pôtr.
  • Un w étymologique se prononce / ɥ / avant un < e > ou un < i >.
  • K et g se palatalisent généralement quand ils sont suivis de < e >, < i > ou < u >. Ki, keu, gué.
  • L’accent tonique étant sur la dernière syllabe, les syllabes finales sont conservées (contrairement au KLT), ex. :
-our : kañnour (KLT kaner),
-(i)on : soñnerion (HV), soñnerian (BV) (KLT sonerien),
-aou : koèdeu (HV), koèdaou (BV) (KLT koajoù).
  • Le th étymologique (du vieux-breton) se prononce /h/ en vannetais (contre /z/ en KLT). V-breton cath > Vannetais kah.
  • Les /h/ étymologiques se prononcent en BV, mais sont muets en HV.
  • -ôn- étymologique vieux-breton devient –an- en vannetais (-eun- en KLT). Lon (plein) > lan. (KLT leun)
  • Le groupe –nt- perd souvent son –n- en milieu de mot : français fontaine > feutan. V-breton *cintam > ketan.
  • Le groupe sk- se prononce généralement /ʃ/ devant < é >, < i >, < u >.
  • Le s du groupe –st- est toujours chuinté.
  • Le –ô- étymologique vieux-breton devient é en haut-vannetais, reste ô en vannetais du littoral, et devient eu en bas-vannetais. Ex : v-breton brodr (frère) > HV brér, Vlit brôr, BV breur.
  • Les < i > accentués sont diphtongués en /ej/ sur le littoral. Ex : Mari > Marei, un ti > un tei, etc.

[modifier] Vocabulaire du breton vannetais

Voici une liste de quelques mots vannetais emblématiques (en orthographe traditionnelle) que vous pourrez comparer aux mots KLT (et aux mots gallois très proches).

Abréviations : HV= haut-vannetais ; BV = bas-vannetais

Français Vannetais Breton KLT
allé oeit aet
aller monet (HV) ; monet, mont (BV) mont
an blé bloaz
arrivé arriù erru(et), arru(et)
autre aral (HV) ; erel (BV) (cf. gallois : arall) all
avec ; par get gant
beaucoup paot-mat (HV) ; ur bochad, é-leih (BV) kalz
bois koèd (cf. gallois : coed) koad
celui-ci hennen (HV) ; hinna (BV) hemañ, hennañ
chaise kadoér (cf. gallois : cadair) kador, kadoar
chanson kanen (HV) ; soñnen (BV) kanaouenn, son
chaud tuem (HV) ; tchom (BV) tomm
cheval ; chevaux jao ; ronsed ; marh, kezeg marc’h ; kezeg ; jav
comme èl, aval (HV) ; èl, mod (BV) evel
contre (emplacement) doh ouzh, oc’h, deus
cueillir, récolter cherreh (HV) ; jaerrah (BV) dastum, daspugn, serriñ
« de-contre » a-zoh, doh diouzh, dioc’h, deus
de (origine) a (HV) ; diar, doh (BV) eus, deus, eus a, a
donné reit roet
d’où ? a ven ?, a beban ? (HV) ; diar ven ? doh men ? (BV) (d)eus pelec’h ?
« en train de + verbe » é é ; o
être bout (cf. gallois : bod) bezañ
excellent ag er choéj eus an dibab, eus ar c'hentañ
faire gobér, gobir, goubir (HV) ; gober (BV) ober
fait groeit graet
festin, banquet gloé, gloé freill (cf. gallois : gwledd) banvez ar peurzorn, gloez/glez
fini achiù echu
gens de maison goskor (cf. gallois : gosgordd) mevelien, koskor
ils, elles gi (HV) ; hè (BV) i, int, int-i
laver golhein (cf. gallois : golchi) gwalc'hiñ, gwelc'hiñ
le grand en hani bras an hini bras, an heni bras, an heñi bras
mieux guèl gwelloc'h, gwell
minuit kreiznoz hanternoz
mur magoér (cf. gallois : magwyr), mur moger, magoar
où ? é-men ? (HV) ; men ? ba-ven ? (BV) (e) pelec’h ?
pire goah (HV) ; goèh (BV) gwashoc’h, gwazh
pour aveit, eit, eùit evit
quand ? pegourz ? pegoulz ? peur ? pedavare ?
quand même ur sort, alkent memestra
sans hemb, nemb hep
sauf nameit, ‘meit nemet
savoir gouiet gouzout, goût, gouvezout
sous édan, dizan (HV) ; didand, ba-dan (BV) dindan, indan
sur àr (cf. gallois : ar) war
tôt kourz abred
tout rah ; tout tout, holl
venu deit deuet

[modifier] Lexicographie

Turiaw ar Menteg Dastumad gerioù a rannyezhoù ar gevred (Dictionnaire de vannetais breton-français) Hiziv An Deiz, 2007, 253 pages, ISBN 978-2-9516246-1-0.

[modifier] Lien externe


Autres langues