Zyklon B

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Récipients de Zyklon B exposés à Auschwitz
Récipients de Zyklon B exposés à Auschwitz
Boite utilisée de Zyklon-B (Musée Auschwitz-Birkenau)
Boite utilisée de Zyklon-B (Musée Auschwitz-Birkenau)

Zyklon B est le nom d'un produit de la firme allemande Degesch, un pesticide à base d'acide cyanhydrique. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les nazis s'en sont servis dans les chambres à gaz des camps d'extermination : les premiers tests ont été faits sur des prisonniers de guerre soviétiques, mais la majeure partie des victimes du Zyklon B ont été les Juifs d'Europe tués durant la Shoah.

Ce pesticide, mis au point par le chimiste allemand et prix Nobel de chimie de l'année 1918 pour la synthése de l'ammoniac, Fritz Haber, créé dans le seul but d'écourter la guerre, sous prétexte d'utilisation pour la dératisation et la désinsectisation (élimination des poux) afin de lutter contre le typhus, notamment à bord des navires, fut utilisé dans les tranchées dés sa phase de développement, notamment à Ypres.

Sommaire

[modifier] Propriétés

Ce pesticide fait partie de la catégorie des anoxiants.

Lors de son utilisation, le Zyklon B dégage du cyanure d'hydrogène (acide prussique, "Blausäure" en allemand, d'où le symbole B), un gaz toxique, rapidement mortel à de faibles concentrations.

Le Zyklon B est un gaz qui tue par asphyxie. La mort survenait entre 3 et 10 minutes après l'introduction du produit dans la chambre à gaz[1]. L'agonie était douloureuse surtout en raison du produit irritant ajouté par le fabricant, la Degesch, au moment de la confection des cristaux de Zyklon B : le Zyklon B étant officiellement un désinfectant très dangereux à manipuler (en raison de sa haute toxicité), il fallait lui ajouter un produit qui signale aux personnes chargées de la désinfection des locaux que du Zyklon B s'évaporait (soit dans la pièce à désinfecter soit d'un emballage défectueux). Ayant compris à quoi servaient en réalité les quantités astronomiques commandées, et dans un effort dérisoire de limiter les souffrances chez les victimes d'un système criminel qu'il ne pouvait dompter, l'un des officiers nazis en charge des achats centralisés à Berlin, Kurt Gerstein, a demandé à la Degesch de ne plus mettre d'irritant dans les boîtes qui lui étaient livrées; cette requête inhabituelle a mis la puce à l'oreille du directeur de la fabrique sur la véritable utilisation de son produit, sans pour autant le faire réagir plus avant. On ne connait pas de prise de conscience de la part des ouvriers[2].

[modifier] Histoire du Zyklon B

Le Zyklon B est célèbre de par son utilisation par les nazis, durant la Seconde Guerre mondiale, dans les chambres à gaz des camps d'extermination d'Auschwitz et de Majdanek (près d'un million de victimes). Il est constitué d'acide cyanhydrique (acide prussique), d'un stabilisant et d'un parfum (pour signaler les fuites) imprégnés sur divers substrats. Il était stocké dans des containers étanches; exposé à l'air, le substrat dégage du cyanure d'hydrogène gazeux.

Ce gaz de combat utilisé comme pesticide avait été mis au point par Fritz Haber, chimiste juif allemand qui tenta de fuir l'Allemagne en 1933 pour le Royaume-Uni puis les Etats-unis, via la Suisse ; où il mourut le 29 janvier 1934 à Bâle.

Il était produit durant la Première Guerre mondiale par TASCH (Technischer Ausschuss für Schädlingsbekämpfung, ou Comité technique pour le contrôle de la peste) comme agent contre les poux. De TASCH fut créée Degesch, la Deutsche Gesellschaft für Schädlingsbekämpfung mbH, qui joua un rôle important dans la fabrication du Zyklon B durant la Seconde Guerre mondiale. De nombreuses firmes allemandes avaient des intérêts dans Degesch mais, finalement, ils les vendirent au géant Degussa au début des années 1920. Degussa développa le procédé de fabrication du Zyklon B en cristaux, celui qui fut utilisé durant la Seconde Guerre mondiale. Pour trouver des capitaux, Degussa vendit une partie de son contrôle sur Degesch à IG Farben en 1930: chacune des sociétés possédant 42,5 % du capital, le reste étant dans les mains de Th. Goldschmidt AG de Essen.

À ce moment, le rôle de Degesch se limitait à l'acquisition de brevets et des propriétés intellectuelles, mais elle ne fabriquait pas le Zyklon B.

La fabrication était à charge de la Dessauer Werke für Zucker et de la Chemische Werke qui achetait le stabilisant à IG Farben, le parfum de sécurité à Shering AG et l'acide prussique à Dessauer Schlempe et assemblait le tout pour parfaire le produit final.

L'acide prussique était extrait du sous-produit de purification du sucre de betterave. De 1943 à 1945, les Kaliwerken de la ville de Kolin en Bohême-Moravie, ont fourni l'acide prussique à Dessauer Werke. Quand le Zyklon B commença à être utilisé dans les chambres à gaz, les nazis donnèrent l'ordre de retirer le parfum, en conflit avec la loi allemande.

Pour diminuer les frais, Degussa vendit les droits de marché à deux intermédiaires : la Heerdt et Linger GmbH (Heli) et Tesch et Stabenow (Tesch und Stabenow, Internationale Gesellschaft für Schädlingsbekämpfung m.b.H.) ou Testa d'Hambourg. Ces deux firmes étendirent leurs ventes le long de l'Elbe avec Heli ayant ses clients vers l'ouest et Testa vers l'est[3].

Selon l'historienne Annie Lacroix-Riz, une usine en France (la filiale franco-allemande du groupe Ugine à Villers-Saint-Sépulcre dans l'Oise) aurait fortement augmenté les quantités de Zyklon B fabriquées entre 1940 et 1944 (passant d'une tonne annuelle en 1940, à 37 tonnes mensuelles en 1944), ce qui laisse penser que la production n'était alors plus uniquement destinée à la desinfection des locaux, mais également aux chambres à gaz nazies[4]. L'utilisation pour la Shoah de Zyklon B produit en France est cependant réfutée par d'autres historiens[5].

En France toujours, le Zyklon B a été homologué en 1958 sous le numéro 5800139 pour la protection des semences de céréales et la protection des céréales stockées. Ce produit commercial de la compagnie « L'Eden Vert » a été interdit en 1988[6].

Le Zyklon B est encore produit en République tchèque à Kolin sous le nom de « Uragan D2 », et vendu pour la lutte contre les insectes et les rongeurs.[réf. nécessaire]

Étiquette de boîte allemande de Zyklon B, en 1946. On peut lire : « Poison gazeux, ne doit être ouvert que par des personnes expérimentées. »
Étiquette de boîte allemande de Zyklon B, en 1946. On peut lire : « Poison gazeux, ne doit être ouvert que par des personnes expérimentées. »

[modifier] Utilisation du Zyklon B par les nazis

Dans leur recherche d'une méthode d'extermination de masse, les nazis testèrent le Zyklon B en décembre 1941 sur des prisonniers soviétiques à Auschwitz. Rudolf Hoess, le commandant d'Auschwitz, jugea le procédé plus efficace que le monoxyde de carbone et l'adopta pour le génocide des Juifs et des Tziganes.

Les nazis construisirent ensuite des chambres à gaz dans des camps d'extermination, qui permettaient de gazer en même temps plusieurs centaines, voire plusieurs milliers[7], de personnes à l'aide du Zyklon B. Ils utilisèrent ces chambres à gaz jusqu'en 1944.

Les victimes, après avoir été enfermées dans des salles sans fenêtre, étaient mises en contact avec le Zyklon B par insertion de ce dernier par des cheminées à couvercle. En 20 à 30 minutes, toute la chambre étaient décimée et les Sonderkommandos qui entraient alors dans le bunker avec des masques à gaz, avaient pour mission première de les arroser à l'aide de jets d'eau puissants pour éviter que leurs sphincters ne se relâchent et que les cadavres ne "relarguent" des selles avant d'être brûlés[réf. nécessaire].

Le gaz mettait longtemps pour s'élever dans l'atmosphère, et les condamnés étaient inlassablement retrouvés en piles s'élevant jusqu'au plafond: du plus faible (enfant, vieillard), au plus fort en haut[8].

Le Zyklon B était encore actif quelques heures après utilisation, d'où le port des masques même lors de l'admission de nouveaux déportés dans la chambre[réf. nécessaire].

[modifier] Notes

commons:Accueil

Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur Zyklon B.

  1. Léon Poliakov, Bréviaire de la haine, Calmann-Lévy (Poche), 1974, p. 309.
  2. Pierre Joffroy, L'espion de Dieu. La passion de Kurt Gerstein, Robert Laffont, 2002, pp. 303-306.
  3. (en) en:Zyklon B] cite Emil Proester, Vraždeni čs. cikanu v Buchenwaldu (The Murder of Czech Gypsies in Buchenwald). Document No. UV CSPB K-135 on deposit in the Archives of the Museum of the Fighters Against Nazism, Prague. 1940. (Quoted in: Miriam Novitch, Le Génocide des Tziganes sous le régime nazi (Genocide of Gypsies by the Nazi Regime), Paris, AMIF, 1968)
  4. Interview de Annie Lacroix-Riz dans L'Humanité du 11 mars 1997.
  5. Reproduction de l'article de Libération du 23 décembre 1999 sur le site amnistia.net.
  6. E-phy, Ministère français de l'agriculture et de la pêche. Consulté le 15 mai 2008.
  7. Jusqu'à 3000 personnes dans les crématoires II et III d'Auschwitz : Témoignage de Filip Müller, in Shoah de Claude Lanzmann
  8. Témoignage de Filip Müller, in Shoah de Claude Lanzmann

[modifier] Bibliographie

Hervé JOLY, « L’implication de l’industrie chimique allemande dans la Shoah : le cas du Zyklon B », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 47-2, avril-juin 2000, p. 368-400. http://halshs.archives-ouvertes.fr/index.php?halsid=c75f4343ea92c344c82b323bcfd1352e&view_this_doc=halshs-00188958&version=1