Oxymore
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Un oxymore, ou oxymoron est une figure de style qui réunit deux mots en apparence contradictoires. (Ex. : un silence éloquent.). Il est voisin du terme de paradoxisme, qui lui est une figure de la rhétorique.
En exprimant ce qui est inconcevable, le poète crée ainsi une nouvelle réalité poétique qui suscite un effet de surprise, en ajoutant de la force à la vérité décrite.
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[modifier] Étymologie
Le terme oxymore provient du grec ὀξύμωρος :oxumôron (de ὀξύς :oxus « aigu, pénétrant » et μωρός : môros, « émoussé, sot »).
Le mot antilogie est faussement considéré comme synonyme d'oxymore, car l'antilogie est par définition illogique, voisine du non-sens ; poussant l'antithèse jusqu'à l'absurde.
[modifier] But
Si certains oxymores ont été imaginés pour attirer l'attention du lecteur ou de l'auditeur, d'autres le sont pour créer une catégorie verbale décrivant une réalité qui ne possède pas de nom spécifique. Ce sont les oxymores discrets : étant entrés dans le langage courant, ils sont peu remarqués en tant que tels.
Ainsi les noms composés tels que clair-obscur (de l'italien chiaro oscuro) ou aigre-doux, doux-amer, réalité virtuelle sont des oxymores.
Les termes comme "aigre-doux" sont malgré tout passés dans le vocabulaire. On ne ressent plus la figure de rhétorique lorsqu'on les utilise. Un véritable oxymore doit être relativement créatif, ou poétique, par exemple, on parlera de "flammes glacées", ou d'un "horrible plaisir", afin que puisse se réaliser une certaine réciprocité quasi spéculative des contraires.
Les baroques affectionnaient l'oxymore car il pouvait répondre à leur recherche : la rencontre des contraires.
Le troisième type d'oxymore a pour objectif de manipuler l'opinion. Il consiste à accoler un mot qui possède une connotation négative par exemple le mot "guerre" avec un mot qui possède une connotation positive par exemple "propre". On obtient ainsi "guerre propre" qui laisse espérer qu'une guerre puisse être autre chose que sanglante. Dans le même type, on a "frappe chirurgicale" qui laisse espérer que seuls les méchants soient frappés.
[modifier] Dérivations
L'humour ou une stratégie plus polémique peut amener à qualifier d'oxymore une expression qui ne l'est pas, par exemple : musique contemporaine, cuisine anglaise, intelligence économique, culture américaine, art moderne, développement durable ou génie militaire.
Jean-Pierre Chevènement par exemple accusait l'expression « Fédération d’États-nations » d'être un oxymore.[1]
[modifier] Exemples
[modifier] Littérature
- « Ne l'entendez-vous pas, cette cruelle joie, » (Racine, Berenice)
- « La clarté sombre des réverbères » (Charles Baudelaire, Les Paradis artificiels)
- « Cette petite grande âme venait de s'envoler » (Victor Hugo, Les Misérables, mort de Gavroche)
- « Elle se hâte avec lenteur » (Jean de La Fontaine, Le Lièvre et la Tortue). A rapprocher du proverbe festina lente (hâte-toi lentement) des Anciens, repris par Nicolas Boileau.
- « Les fous normaux » (Pierre Desproges)
- « L'homme que vous adorerez détester » (surnom de l'acteur Erich von Stroheim, interprète de rôles de méchants)
- « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles » (Pierre Corneille, Le Cid)
- « Je la comparerais à un "soleil noir" » (Baudelaire)
- « Un affreux soleil noir d'où rayonne la nuit » (Victor Hugo)
- « Mon luth constellé porte le soleil noir de la mélancolie » (Gérard de Nerval, El desdichado)
- « Je sais que c'est la coutume / D'adorer ces "nains géants" » (Victor Hugo)
- « Jeune vieillard » (Molière, Le Malade imaginaire)
- « La légèreté pesante de ses idées » (Norbert Poulard)
- « Un merveilleux malheur » (titre d'un essai de Boris Cyrulnik publié en 1999)
- « Micromégas » (Voltaire)
- « La variation des constantes » (méthode mathématique de résolution d'équations différentielles)
- « Ridés et non vieillis » (Victor Hugo, Soleil couchant, extrait de "Les feuilles d'automne")
- « Un silence assourdissant » (Albert Camus, La Chute)
- « Splendeurs invisibles » (Arthur Rimbaud)
- « Une sublime horreur » (Honoré de Balzac, Le Colonel Chabert)
- « Un minuscule infini » (Julie CHVETZOFF, « L'inconnue célèbre »)
- « Sa belle figure laide sourit tristement » (Alphonse Daudet, Le Petit Chose)
- " Ta haine a pris plaisir à servir ma misère : Jean Racine,Andromaque , v.1617
[modifier] Chanson
- « Mon plus beau cauchemar » (titre d'une chanson d'Ez3kiel)
- Georges Moustaki termine par un double oxymore sa chanson Le Métèque :
Et nous ferons de chaque jour
toute une éternité d'amour
Que nous vivrons à en mourir