Garde nationale (Révolution française)

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Fusilier de la Garde nationale, 1791
Fusilier de la Garde nationale, 1791

La Garde nationale est le nom donné lors de la Révolution française à la milice de citoyens formée dans chaque ville, à l’instar de la garde nationale créée à Paris. Elle a existé de 1789 à 1871 et a connu tous les régimes politiques de la France dans cette période.

Sommaire

[modifier] Création

A l'origine de la Garde nationale, il y a la garde bourgeoise. Datant de l'ancien régime cette garde bourgeoise avait comme but de défendre les biens et les personnes. Dans le pays il pouvait y avoir des insurrections contre la perception des impôts, et les gens du bas peuple, craignant de manquer de grains et de blés, pouvaient attaquer des boutiques et des convois de blés. Le 13 juillet 1789, la population parisienne, affamée par une disette, se soulève et commence le pillage des boutiques et des armureries. Craignant un débordement trop populaire, la municipalité de Paris décide de canaliser la tension montante en créant une garde parisienne. De nombreux volontaires issus de couches les plus aisés de la société y adhèrent spontanément. Cette milice bourgeoise joue un rôle très important dans la journée du lendemain lors de la prise de la Bastille. Le 15 juillet, le roi Louis XVI reconnaît le marquis de La Fayette comme commandant en chef de la garde parisienne. Le mouvement de grande peur qui, dans les jours suivants, affole les campagnes et de nombreuses villes, provoque la formation de milices sur le modèle parisien dans tout le pays.


[modifier] Mise en place et organisation de la Garde nationale

Fusilier de la Garde nationale, 1790-1791
Fusilier de la Garde nationale, 1790-1791

La création et la mise en place de la Garde nationale sont le résultat d'un long débat au niveau de l'assemblée constituante. Le 27 juillet 1789, le comité propose un article à partir duquel le roi reste dépositaire de la force publique. Beaucoup de députés pensaient alors qu'il serait dangereux de replacer Louis XVI dans cette situation de force. Avant de lui rendre la direction de la force publique, il paraissait indispensable de la régir par des règles très stricts et en accord avec la nouvelle organisation du pouvoir. L'idée était d'empêcher les forces de l'état d'opprimer le peuple et l'armée d'intervenir dans les conflits intérieurs. Finalement, l'assemblée adopta, le 24 août 1789, un texte inspiré par Champion de Cicé, archevêque de Bordeaux. Il fut introduit dans l'article 12 de la constitution, le 5 septembre, avec la déclaration suivante "La garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique; cette force est donc instituée pour l'avantage de tous et non pour l'utilité particulière de ceux à qui elle est confié". Cette déclaration ne donnait, malgré tous, pas d'organisation à la force publique. Hors il était urgent d'y répondre car la France s'était couverte de milices qui ne répondaient à aucune règle. Le 7 janvier 1790, les députés décidèrent que les gardes nationaux devaient prêter serment d'être fidèle à la Constitution. Les gardes nationaux étaient ainsi confirmés dans le rôle de gardiens de la Constitution. L'armée avait la seule tâche de défendre l'état contre les ennemis extérieurs. Cette décision est confirmée par le décret du 28 février 1790, imposant aux soldats et aux officiers un simple serment de fidélité à la Constitution. Dans ces conditions, il était alors possible de restituer au roi ces anciennes prérogatives de chef suprême de l'armée, alors que les gardes nationales, qui, par les décrets des 12 décembre 1789 et 2 février 1790, étaient soumises aux seules réquisitions administratives et municipales, échappaient totalement à son autorité directe et pouvaient même la contrecarrer.

Le 24 juin 1791, un décret donnait la possibilité aux généraux de l'armée d'obtenir le concours des gardes nationaux des villes et des bourgs mis provisoirement à leur disposition. Cela était en contradiction avec la loi sur la Garde nationale, votée les 27 et 28 juillet 1789 et concernant uniquement une organisation sédentaire. A partir de ce moment, la Garde nationale constituait une sorte d'armée parallèle. Pour les libéraux, elle était un moyen de faire contrepoids à l'armée royale, les patriotes l'avaient utilisé pour renforcer leur main mise sur les magistratures municipales, La Fayette avait ensuite tenté d'en faire un rempart face à l'anarchie envahissant le royaume. Il n'en reste pas moins que de 1789 à 1791, il n'y avait pas de doctrine bien établie pour la Garde nationale.

Chasseur de la Garde nationale de Paris
Chasseur de la Garde nationale de Paris

Le 29 septembre 1791, l'assemblée constituante, votait une loi sur la Garde nationale qui fut approuvée par le roi le 14 octobre 1791. Le décret était divisé en section avec la première section intitulé "De la composition des listes de citoyens", la deuxième "De l'organisation des citoyens pour le service de la Garde nationale", la troisième "Des fonctions des citoyens servant en qualité de gardes nationales", la quatrième "De l'ordre du service" et la cinquième "de la discipline des citoyens servant en qualité de gardes nationales". La première section précisait que seuls les citoyens actifs, c'est à dire pouvant voter, ayant une résidence continue depuis plus d'une année pouvait servir dans la Garde nationale (L.I, art.1). Les citoyens passifs qui avaient servit sans interruption depuis le début de la révolution et qui étaient jugés " bien intentionnés" pouvaient continuer à figurer sur le registre d'inscription (art.3). Les fils de citoyens actif, à partir de 18 ans, devaient également être inscrits (art.5). Ce service était un privilège mais également une obligation sans contrepartie financière. Ne pas être inscrit supprimait l'exercice des droits du citoyen (art.2). Le fait de manquer son service, même une fois, obligeait à payer une taxe égale à deux journées de travail (art.15). Ceux qui manquaient trois fois leur service dans le cycle d'une seule année se voyaient, en plus, suspendus pendant un an du service et du droit de voter ou de se faire élire (art.15). La seconde section établissait le mode d'organisation de la garde nationale. Elle était, dans les campagnes, organisé par cantons et par districts et non plus par municipalités (L.II.art.1). Dans les villes, la base du dispositif restait la section électorale ou le district (art.2). Chaque canton, section ou district, fournissait les effectifs d'un ou de plusieurs bataillons de quatre compagnies (art.3 et 4). Les bataillons, au niveau du district, se regroupaient en une légion ou en une réunion de légions (art.10 et 11). L'élément de base était la compagnie. Elle se composait dans les villes des citoyens d'un même quartier et dans les campagnes des citoyens des communautés les plus voisines (art.13). A partir du 14 juillet 1792, l'uniforme national bleu, blanc et rouge devait être adopté partout (art.25 et 26). Chaque année, les citoyens actifs inscrits dans les compagnies se réunissaient sans uniforme, le deuxième dimanche de mai, au chef-lieu du canton pour élire ensemble leur capitaine ainsi que les officiers et les sous officiers jusqu'au grade de caporal. Une fois élus, les officiers et les sergents choisissaient à la majorité absolue le commandant en chef du bataillon et ses adjoints (art.19). Réunis entre officiers de compagnies, ceux-ci élisaient à leur tour, au chef-lieu de district, l'état-major des légions (art.20). Tous ces chefs étaient élus pour un an seulement (art.23). Les insignes de grades étaient les mêmes que ceux de la troupe de ligne (art.24). Les drapeaux étaient tricolores avec les mots "Le peuple français, la liberté ou la mort" (art.27). La troisième section de la loi fixait le rôle et les formes d'actions de la Garde nationale. Les gardes nationaux avaient les fonctions de maintenir l'ordre et de garantir l'obéissance aux lois (L.III, art.1). Ils pouvaient dissiper "toutes émeutes populaire et attroupement séditieux", arrêter et livrer à la justice "les coupables d'excès et violences", employer "la force des armes" dans le cadre de la loi martiale ou de la loi sur l'action de la force publique (art.10). Les autres clauses étaient beaucoup plus restrictives et prouvaient la défiance des constituants envers les citoyens armés. A par pour les patrouilles, le service ordinaire et journalier ou les exercices, les chefs ne pouvaient prendre aucune initiative (art.6). Ils ne pouvaient agir que sur réquisition particulière en période calme (art.8 et 9). Ces demandes d'intervention ne leur étaient adressées qu'à défaut d'un nombre suffisant de gendarmes, de gardes soldés ou de troupes de ligne (art.3). Les commandants devaient les exécuter sans discussion, mais ils pouvaient exiger qu'elles fussent écrites (art.2). Sans injonction légale, les officiers ne pouvaient pas réunir leurs troupes et sans ordre les citoyens ne pouvaient pas non plus se réunir (art.5). Il était interdit de se rendre en arme à une assemblée électorale ou politique (ar.17). Le serment fédératif avait lieu chaque année le 14 juillet au chef-lieu de district (art.20). L'organisation de toute fédération particulière était considérée comme un attentat "à l'unité du royaume et à la fédération constitutionnelle de tous les français" (art.21). L'article 12 prévoyait qu'en cas d'invasion du territoire français par des armées étrangères, le roi ferait parvenir ses ordres au nombre de gardes nationaux qu'il jugerait nécessaire. Il y avait donc la possibilité d'utiliser des citoyens contre un ennemi extérieur. En cas d'action militaire de la par des gardes nationaux, le commandant supérieur serait toujours un gendarme ou un officier de ligne (art.11). La quatrième section déterminait l'ordre du service et le rang des compagnies qui étaient fixés annuellement par le sort. On demandait aux officiers élus de se comporter "comme des citoyens qui commandent des citoyens" (art.1). Aucun moyen de force ne pouvait être utilisé contre des récalcitrants qui refusaient de se soumettre à leurs obligations. La désobéissance, l'abandon de poste, le manque de respect, l'insubordination, étaient punis d'arrêt ou de peine de prisons d'une durée maximum de huit jours, sans distinction de grade (art.6 à 13). Il était possible de refuser la peine mais cela entraînait la perte des droits de citoyens et le paiement de la taxe de remplacement (art.14).

La loi du 14 octobre 1791 ne prévoyait pas une organisation centrale chargée d'animer, de contrôler et de diriger ces citoyens armés. Le roi n'y était associé qu'à travers son ministre de l'intérieur. C'est aux administrations des départements et des districts qu'il appartenait de veiller à son application et d'en dénoncer les contraventions au corps législatif.

Il y avait une grande méfiance des constituant à l'égard de la Garde nationale. Les citoyens armés se retrouvaient relégués à des taches de seconds ordres et restaient soumis à un contrôle très strict. Le service était obligatoire donc astreignant pour les citoyens. Le service était donc onéreux. La charge était la plus lourde pour ceux qui étaient les moins fortunés et qui avaient besoin de leur temps pour travailler. Cette inégalité était aggravée par le fait que les officiers municipaux et les magistrats, recrutés souvent parmi les plus aisés, en étaient dispensés contre le paiement d'une modeste taxe. Cette loi voulait canaliser une force révolutionnaire dont on redoutait les débordements.

[modifier] La Garde nationale sous la monarchie constitutionnelle (1791-1792)

A l'automne 1791, le roi acceptait la nouvelle constitution. Dans cette période, en province, la Garde nationale connaît de graves crises de désunions. Les gardes nationaux des différentes villes s'affrontaient en fonction des conflits religieux ou sociaux. Ainsi dans les Cévennes, la réorganisation de la Garde nationale sur les bases de la loi du 14 octobre 1791 fournit à la base catholique l'occasion attendue pour éliminer les officiers protestants. A Arles, la Garde nationale locale fut attaqué par quatre milles gardes nationaux levés autour de Marseille et qui prirent la ville le 29 mars 1792.

Sur le plan extérieur, la guerre éclate le 29 mars 1792 avec une coalition contre la France. Des gardes nationaux furent réquisitionnés pour être envoyés aux frontières qui étaient attaqués. Ainsi, le général Lamorlière, chef de l'armée du Rhin, requérait quatre mille gardes nationaux dans les communes situés sous son commandement.

[modifier] La Garde nationale sous la première République (1792-1799)

Le 21 septembre 1792, la France devenait une république. la Garde nationale prit parti pour la Révolution. Au début de l'année 1793, la garde nationale comptait Cent seize milles hommes. Le 21 janvier 1793, Louis XVI était exécuté. La Garde nationale y maintient l'ordre. Cette exécution provoqua une extension du conflit avec, en plus de l'Autriche et de la Prusse, l'entrée en guerre de l'Angleterre et de la Hollande le 1er février 1793. Cette extension de la guerre demandait de nouveaux effectifs. La Garde nationale fut peu à peu utiliser comme un réservoir pour l'armée. Les membres de la Garde les plus riches payaient des gens plus pauvres pour les remplacer dans des tâches qui ne les intéressaient pas. En septembre 1793 fut supprimé "le bureau particulier pour les gardes nationales" du ministère de la défense. De cette manière était achevé l'évolution vers l'armée nationale de la garde.

Les journées de Vendémiaire an IV (octobre 1795) virent l'affrontement à coup de canon entre vingt cinq milles insurgés des sections réactionnaires de l'ouest de Paris, composés de royalistes, et cinq milles soldats, sous le commandement de Barras, qui l'emportèrent. Cet évènement confirma la supériorité de l'armée sur les gardes nationaux pour maintenir l'ordre. Le décret du 16 Vendémiaire an IV (8 octobre 1795) décapita la garde parisienne en supprimant l'état-major général ainsi que celui des divisions et des sections. Toute l'organisation hiérarchisée mise en place par La Fayette était réduite à la juxtaposition de bataillons placés sous les ordres du chef militaire de la place de Paris. Le 16 Vendémiaire an IV fut mis en place un décret supprimant les grenadiers, les chasseurs, les canonniers ainsi que la cavalerie. Ces dernières dispositions furent étendues à toutes les gardes nationales. De cette Façon le Directoire voulait maintenir la Garde nationale en dehors de toute action politique.

En 1799, on mobilisa à nouveau des citoyens en masses face à la pousser d'une nouvelle coalition contre la France. Cette mobilisation fonctionnait beaucoup sur le tirage au sort. Il fut levé plus de quatre cents milles hommes.

[modifier] Le coup d'état de 1799

Lors du coup d'état de brumaire an VIII de Napoléon Bonaparte, la Garde nationale ne joua pas un rôle de premier plan. Elle contribua seulement à maintenir l'ordre. A ce moment les guerres de la révolution avaient fait que la Garde nationale s'était progressivement assimilés aux militaires de métiers. La Garde nationale sédentaire, qui maintenait l'ordre à l'intérieur des frontières, était médiocre et formé de citoyens peu motivés.

[modifier] La Garde nationale du Consulat

La constitution de l'an VIII consacrait l'existence de la garde nationale. L'article quarante-huit distinguait la Garde nationale en activité et la Garde nationale sédentaire. La première, qui comptait essentiellement les hommes des armées de terres et de mers, était placée sous les ordres du gouvernement (art.47). La seconde ne dépendait que de la loi. En septembre 1800, le ministère de l'intérieur rédigea un projet imposant le service à tous ceux qui exerçaient les droit du citoyen, mais en autorisant le remplacement. L'élection fut écartée et il fut prévu la nomination des officiers par le préfet et celle des sous-officiers par le chef de bataillon. La Garde nationale était considéré, par le nouveau régime, comme impuissante.

Napoléon se méfie de cette force bourgeoise, autant capable de maintenir l’ordre et de réprimer les émeutes que de renverser le pouvoir établi. Le 12 Vendémiaire an XI (3 octobre 1802) un arrêté des Consuls créait une garde municipale de deux milles trois cents hommes, à Paris, placé sous les ordres de militaires nommés par le chef de l'état. La mission des gardes municipaux restait à peu près la même qu'avant. Leur solde était désormais assurée par une contribution de un million huit cents milles francs, payé par la population parisienne. En contrepartie de quoi les citoyens n'étaient plus tenus de faire un service régulier et journalier. Cette décision fut bien accueillie. La population se sentait déchargée d'un service militaire lourdement ressenti. Les artisans et autres travailleurs ne perdraient plus leur temps à monter la garde ou ne paierait plus de remplaçants.

[modifier] La Garde nationale sous l'Empire

Tout au long du règne de Napoléon, les gardes nationaux ont servit de réserve à l'armée et on été mobilisés au grés des guerres de l'empire. Par exemple avec la reprise de la guerre contre la Prusse, le 17 septembre 1806, l'empereur ordonna la levé, le 23 octobre, de 3000 grenadiers et chasseurs de la Garde nationale de Bordeaux pour renforcer la défense des côtes. Le décret du 12 novembre 1806, signé à Berlin, réaffirmait l'obligation de tous les français, âgés de 20 à 60 ans, d'effectuer le service de la garde nationale. Il en confirmait également l'incompatibilité pour ceux travaillants dans la fonction publique, l'administration ou étant ecclésiastiques. Les autres pouvaient se faire remplacer. Les compagnies de grenadiers et de chasseurs composées d'hommes, si possible, de 20 à 40 ans, pouvaient être appelés à effectuer un service intérieur dans les villes de plus de cinq milles habitants, ou un service militaire. Dans ce cas ils étaient assimilés aux troupes de ligne.

Le 29 juillet 1809, 49 000 anglais firent une tentative ratée de débarquement à Walcheren, aux Pays-Bas, alors aux mains des français. Cet évènement fit prendre conscience à Napoléon de la menace que représentait un éventuel débarquement anglais sur les côtes française. A partir de 1809, l'empereur décida d'appuyer, en parti, la protection des côtes et des frontières sur les gardes nationaux.

Le 14 mars 1812, un décret demandait le recrutement de 88 cohortes de 888 hommes recrutés par départements et proportionnellement au chiffre de la population. Ils étaient chargés de renforcer la surveillance des côtes et des frontières. Le décret du 12 janvier 1813 absorba les cohortes de gardes nationaux dans 22 régiments de ligne. Les 88 compagnies d'artilleurs furent incorporées dans le corps impérial de l'artillerie et leurs effectifs répartis dans des régiments à pieds ou dans les compagnies en service dans la grande armée.

A partir du 21 décembre 1813, la France était envahi. Le 30 décembre 1813 et le 6 janvier 1814 furent pris les décrets levants cent un milles six cents quarante hommes. Ces personnes étaient souvent âgées ou invalides. Le 30 mars 1814, Paris tombait malgré la participation à sa défense des gardes nationaux. Dans de nombreuses villes du Sud comme Marseille ou Bordeaux, les gardes nationaux royalistes avaient accéléré la chute de l'empire en agissant pour le retour de la monarchie.

[modifier] la Garde nationale sous la Restauration

Le 15 mai 1814, le comte d'Artois fut nommé colonel général des gardes nationales de France. Le général Dessolles devint son major général tout en gardant le commandement de la garde parisienne. La création du poste de colonel général témoignait de la volonté de centraliser la direction de la Garde nationale. Une ordonnance du 16 juillet 1814 précisait que les gardes nationales ne devaient plus être que sédentaires. Leur déplacement en dehors de la ville ou en dehors du canton ne pouvait avoir lieu qu'exceptionnellement et serait déterminé par une loi spéciale. Le but de l'institution était de réunir les hommes les plus intéressés par le maintient de l'ordre avec les propriétaires territoriaux ou les industriels. Seul était admis au service ordinaire ceux qui pouvaient s'armer, s'habiller et s'équiper. Ils étaient peu nombreux.

Durant les cent jours les gardes nationales n'offrirent pas de résistances au retour de Napoléon. Elles n'y jouèrent pas non plus un rôle crucial.

En 1815 lors du second retour de Louis XVIII, la Garde nationale retrouvait son organisation de 1814, avec le comte d'Artois à sa tête. Elle représentait à peu près la seule force sur laquelle pouvait compter les préfets.

Le 17 juillet 1816, fut proclamé une nouvelle ordonnance. La Garde nationale restait une obligation pour tous les français de 20 à 60 ans, imposés ou fils d'imposés, au rôle de contributions directes (art.3). Les listes étaient faites par des conseils de recensements composés du maire et de notables nommés par le préfet (art.17 à 20). L'ordonnance accordait toujours une dispense aux ecclésiastiques, aux militaires et aux fonctionnaires (art.23 à 29). Elle faisait la différence entre le "contrôle ordinaire" et le "contrôle de réserve" (art.21). Le premier concernait les citoyens aisés et le second les citoyens pour qui le service était une charge et qui ne pouvaient être requis d'exceptionnellement. Les officiers étaient nommés par le roi (art.7). Le commandant de la garde communale dirigeait sous l'autorité du maire (art.6) et un commandant de la garde d'arrondissement dirigeait sous l'autorité du préfet (art.4). Il y avait des mesures restrictives à l'égard de la Garde nationale, signe que le régime s'en méfiait. Il était interdit de se réunir pour prendre des délibérations (art.9). Interdiction pour le commandant de publier les ordres du jour sans l'autorisation du préfet (art.10). Interdiction de prendre les armes et de s'assembler sans ordres des chefs et de l'administration (art.35). Il était créé un conseil de discipline devant juger les fautes et délits des gardes nationaux durant leur service.

L'oeuvre de centralisation, de la Garde nationale, du comte d'Artois fut finalement abandonné par le régime.

Le 29 avril 1827, le roi Charles X signait l'ordonnance de licenciement de la Garde nationale parisienne. Là encore la méfiance du pouvoir avait principalement motivé cette décision. Cette mesure fut malgré tous accueillit avec soulagement par des personnes qui n'avaient plus à faire leur service. Seul les opposants au régime et les libéraux firent des protestations.

[modifier] La Garde nationale lors de la Révolution de Juillet

Le 25 juillet 1830, Charles X publia trois ordonnances qui provoquèrent la révolution de juillet. Le 29 juillet La Fayette, âgé de 73 ans, fut renommé à la tête de la Garde nationale. Celui-ci rétablit la Garde nationale parisienne. Le 31 juillet, La Fayette accueillit Louis-Philippe Ier à l'Hôtel de Ville de Paris. Louis-Philippe passa en revue la Garde nationale de Paris, forte de 60 000 hommes. Devant les acclamations des contribuables en armes, il s'écria, en embrassant La Fayette : « Cela vaut mieux pour moi que le sacre de Reims ! ». Cela souligne l'importance attachée à la milice bourgeoise du régime, garante de l'ordre public et de l'alliance de la monarchie de Juillet et des propriétaires. Le roi confia à La Fayette le commandement de toutes les Gardes nationales. Elles furent réactivées dans toute la France pour mettre fin aux échauffourées.

[modifier] La Garde nationale sous la Monarchie de Juillet

La Garde nationale démontra son importance en décembre 1830, à l'occasion du procès des ministres de Charles X, où elle parvint à maintenir le calme dans Paris. Louis-Philippe, qui rendit visite, le 23 décembre, aux douze arrondissements de la garde parisienne pour leur exprimer ses remerciements, fut soulagé, mais il réalisa aussi le danger qu'il y avait, pour la monarchie, à dépendre d'une seule force pour assurer l'ordre public : il demanda au ministre de la Guerre, le maréchal Soult, de réorganiser sans tarder l'armée de ligne. Il décida également de se débarrasser de La Fayette, trop peu fiable à ses yeux.

Le 22 décembre, le roi écrivit à La Fayette pour le remercier d'avoir donné, « dans ces jours d'épreuves, l'exemple du courage, du patriotisme et du respect pour les lois », mais, en sous-main, il manœuvra à la Chambre des députés qui engagea, dès le 24 décembre, le débat sur l'organisation de la garde nationale requis par l'article 69 de la Charte de 1830, selon lequel des lois doivent pourvoir « dans le plus court délai possible » notamment à « l'organisation de la Garde nationale, avec intervention des Gardes nationaux dans le choix de leurs officiers ». Or, durant le débat, des députés fidèles du Palais-Royal démontrèrent que la fonction de commandant en chef de toutes les unités du royaume est contraire à la Charte et firent voter sa suppression à la condition de donner à La Fayette « quelque marque de regret et quelque compensation ». Dès le lendemain, La Fayette démissionna. Le président du Conseil, Jacques Laffitte, et le ministre de l'Intérieur, Camille de Montalivet, lui-même colonel de la Garde nationale, cherchèrent à trouver un compromis, mais La Fayette posa des conditions extravagantes : il voulait la formation d'un nouveau ministère où n'entreraient que ses amis, la dissolution de la Chambre des députés et l'abolition de l'hérédité de la pairie. Le 26, il maintenait sa démission. Louis-Philippe en prit aussitôt acte dans une brève et sèche lettre de regret. Le Roi nomma alors le général Mouton de Lobau Commandant de la Garde Nationale.

L'article 69 de la Charte révisée avait renvoyé à une loi « L'organisation de la Garde nationale, avec intervention des gardes nationaux dans le choix de leurs officiers ». Venu en discussion le 24 décembre 1830, le projet fut voté le 5 mars par les députés, le 10 par les pairs, et promulgué le 22. La Garde nationale est chargée de défendre la monarchie constitutionnelle, la Charte et les droits qu'elle consacre, pour maintenir l'obéissance aux lois, conserver ou rétablir la paix et l'ordre publics. En revanche, toute délibération prise par la garde nationale sur les affaires de l'État, du département ou de la commune est une atteinte à la liberté publique et un délit contre la chose publique et la Constitution (article 1).

La Garde nationale est théoriquement composée de tous les Français âgés de 20 à 60 ans (articles 2 et 9) mais la loi distingue le service ordinaire et le service de réserve (article 19), la répartition entre les deux étant faite par le conseil de recrutement de la commune, qui n'appelle au service ordinaire que ceux qui ont les moyens de supporter les frais d'habillement et d'armement et disposent du temps nécessaire pour le service. Aussi ne trouve-t-on dans le service ordinaire, le seul qui soit effectif, que des hommes aisés : ceci donne à la garde son caractère de milice bourgeoise, rempart des propriétaires contre le désordre.

Force civile, elle est organisée dans chaque commune (article 4) et placée sous l'autorité des maires, des préfets et du ministre de l'Intérieur (article 6).

Le refus du service est puni de quelques jours de détention.

En province, l'efficacité de la garde nationale restait relative. Ainsi, lors de la révolte des canuts à Lyon, en novembre 1831, sur 15 000 gardes nationaux d'appelés, 500 se présentèrent. Certains étaient même dans le camp de l'insurrection. Beaucoup de républicains furent élus officiers. La Garde nationale devenait un foyer d'opposition.

La Garde nationale était aussi un signe d'ascension sociale. Ainsi en 1837, Balzac publia le roman, César Birotteau, dans lequel le personnage principal était un riche parfumeur qui s'était enrichi et dont les promotions dans la Garde nationale constituaient un signe d'ascension sociale.

[modifier] La Garde nationale et la révolution de 1848

En décembre 1847, des gardes nationaux de Paris, inscrits dans la douzième légion, voulurent organiser un banquet réformiste avec comme revendication d'élargir le suffrage censitaire. Il fut interdit par le ministre de l'intérieur. Le journal "Le National" répliqua en convoquant le 22 février 1848, place Madeleine, toute la Garde nationale, sans armes mais en uniforme, pour former une haie d'honneur aux convives. La Garde nationale n'y répondit pas.

En février 1848, la Garde nationale fut généralement passive aux combats. Après le départ de Louis-Philippe Ier, c'est principalement à la Garde nationale que revint la Tâche de ramener l'ordre. Le 8 mars 1848, un décret affirmait que "tout citoyen de 21 à 55 ans, ni privé ni suspendu de ses droits civique est garde national et y exerce le droit de suffrage pour tous les grades d'officiers". C'était la confirmation du suffrage universel. Le 25 février 1848, le gouvernement provisoire rétablissait dans tous leur droits les gardes nationales que la monarchie de juillet avait dissoutes. Le 26 mars 1848, un décret confirmait que les officiers des gardes nationaux en provinces seraient élus dans les mêmes conditions qu'à Paris. Les colonels ne seraient plus nommés par le gouvernement.

L'insurrection du 15 mai 1848 vit une rupture entre garde nationaux bourgeois et des parties de gauches. Les insurrections ouvrières de juin 1848 furent surtout réprimées par l'armée et les gardes nationaux parisiens avaient participés à l'insurrection.

[modifier] La Garde nationale sous la deuxième République et sous le second Empire

En janvier 1849, un décret du président de la république supprima la moitié des bataillons de gardes nationaux et réorganisa les autres. On se méfiait de la Garde nationale. Les gardes nationaux mobile furent finalement et définitivement licenciés le 31 janvier 1850. Il leur était reproché leur indiscipline et d'engendrer plus de discorde que d'en résoudre.

Lors du coup d'état du 2 décembre 1851, la garde nationale parisienne, avec à sa tête le général Lawoestine, n'intervint pas.

Le décret du 11 janvier 1852, prévoyait cette fois la sélection des gardes nationaux par un conseil du recensement, le président, lui, nommait les officiers. En 1853, les officiers prêtèrent serment de fidélités à la Constitution et d'obéissance à l'empereur. Napoléon III la cantonne pendant le second empire dans des tâches subalternes afin de réduire son influence libérale et républicaine.

Le 14 janvier 1868, fut voté la loi Niel qui permettait le création d'une garde mobile, auxiliaire de l'armée active, pour la défense des frontières et des places fortes ainsi que pour le maintien de l'ordre intérieur. Elle ouvrait la voie au service universel avec un engagement massif. Cela était fait en réaction aux crises extérieures, en particulier concernant la Prusse.

[modifier] La Garde nationale dans la guerre contre la Prusse

Lors de l'éclatement de la guerre entre la France et la Prusse en juillet 1870, la Garde nationale fut d'abord faiblement mobilisé. Le décret du 16 juillet 1870 ne concernait que les gardes nationaux habitants les régions militaires du Nord, de l'Est et de la région parisienne. Il y avait une absence de préparation. Le 10 août, le parlement votait une loi visant à compléter les forces des gardes sédentaires et mobiles. Le 18 août 1870, une autre loi y incorporait 40 000 jeunes supplémentaires. Le décret du 23 août 1870 les formait en régiments provisoires d'infanterie et la loi du 29 août 1870 les plaça dans l'armée active. Cela démontrait que la Garde nationale était utilisé comme un ultime moyen de défense.

[modifier] La Garde nationale dans la commune

Cachet d'une pièce administrative (1871)
Cachet d'une pièce administrative (1871)

Le 4 septembre 1870, après la défaite de Sedan et la capture de l'empereur du 2 septembre, le gouvernement de la défense nationale est mis en place. Le 6 septembre 1870, tous les électeurs inscrits de la ville de Paris sont convoqués. Les gardes nationaux furent utilisés pour le reste de la guerre et envoyés massivement au front. 590 000 gardes nationaux furent mobilisés pendant la guerre. Les gardes nationaux participèrent à la défense de Paris assiégés.

Dès octobre des gardes nationaux anarchistes firent des actions anti-gouvernementales. Durant toute la durée du siège, la garde sédentaire n'apporta aucune aide sérieuse. Des bataillons de gardes nationaux étaient soumis à la propagande révolutionnaire. Entre le 1er février et le 3 mars 1871, 2000 délégués réunis élaborèrent puis adoptèrent les statuts d'une Fédération républicaine de la Garde nationale. Un comité central protestait contre toute éventuelle tentative de désarmement de la Garde nationale. Elle ne voulait pas reconnaître d'autres chefs que ceux qu'elle se donnerait. Le 18 mars 1871, le gouvernement tenta de faire reprendre, par l'armée, les canons appartenant à la Garde nationale parisienne. Les gardes nationaux parisiens participèrent alors à la commune. Celle-ci a duré du 18 mars au 28 mai 1870, et s'est terminée dans le sang, avec une grande répression menée par les troupes gouvernementales.

[modifier] La fin de la Garde nationale

Le 25 août 1871, suite aux évènements de la commune, fut voté la dissolution des gardes nationales dans toutes les communes de France.

La loi du 27 juillet 1872 prévoit que "tout corps organisé en armes et soumis aux lois militaires, fait partie de l'armée et relève du ministère de la guerre" (art.6). La Garde nationale était, ainsi, définitivement supprimée.

[modifier] Bibliographie

  • Sous la direction de BIANCHI Serge et DUPUY Roger, La Garde nationale entre nation et peuple en armes. Mythes et réalités. 1789-1871, Presses Universitaires de Rennes, 2006, Rennes.
  • CARROT Georges, La Garde nationale (1789-1871). Une force publique ambiguë, Avant-propos de J.L Loubet del Bayle, L'Harmattan, Collection "Sécurité et société", 2001, 350 p.
  • DESPRES Claire, Approche de la garde nationale dans le district de Laval (1791-1795)Université du Maine, 1996, Le Mans.

[modifier] Sitographie

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