Douris de Samos

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Douris de Samos, né vers 340 av. J.-C., mort vers 270[1], est un historien grec contemporain des diadoques dont l'œuvre principale est une histoire du royaume de Macédoine, les Macédoniques. Il a été un temps le tyran de Samos.

Sommaire

[modifier] Biographie

Prétendument descendant d'Alcibiade[2], Douris est peut-être né en exil, Samos ayant été vidée de ses habitants et occupée de 342 à 324 av. J.-C. par des clérouques athéniens. Encore jeune homme, il triomphe à une épreuve de boxe aux Jeux Olympiques ; une statut est érigée sur le site d'Olympie pour commémorer cette victoire[3]. A son retour sur l'île de Samos, il en obtient la tyrannie de 301 jusqu'à une date inconnue. On sait qu'il a survécu à l'année 281 puisqu'une mention de Pline l'Ancien prouve qu'il a écrit au cours de cette année[4].

Il est le frère de Lyncéos de Samos, auteur de comédies et élève du philosophe péripatéticien Théophraste. Une tradition forgée par l'érudit grec Adamántios Koraïs, qui se base sur une interprétation erronée des Deipnosophistes d'Athénée, voudrait que Douris soit aussi l'élève de Théophraste au Lycée. Pour autant les fragments de Douris semblent démontrer une proximité morale avec les péripatéticiens.

[modifier] Œuvre

Véritable polygraphe, Douris a composé de très nombreux ouvrages, qui sont tous perdus, dont les plus notables sont l’Histoire d’Agathocle[5] et surtout les Macédoniques (Makedonika). On se pose néanmoins la question de savoir si les Macédoniques sont un ouvrage distinct ou bien une partie d'une Histoire de la Grèce de plus grande ampleur. Il a aussi rédigé les Annales de l'Histoire de Samos, fréquemment citées par les anciens, et un ouvrage sur les tragédiens Euripide et Sophocle[6].

Les Macédoniques, sa principale œuvre historique, s'étendent de la mort d'Amyntas III jusqu'à la bataille de Couroupédion (370 à 281 av. J.-C.). Les Macédoniques ont été utilisées par des auteurs antiques plus tardifs pour écrire l'histoire des diadoques et du royaume de Macédoine :

D’après les fragments conservés, l'œuvre de Douris démontre à travers un idéal tragique une conception de l’histoire éloignée du pragmatisme de Thucydide et de l'historiographie rhétorique. Douris s’attache en effet à rendre compte des menus détails, des faits anecdotiques qui révèlent le tempérament des grands hommes, la biographie tragique étant le genre de prédilection des Péripatéticiens desquels il est prôche[7]. Hiéronymos de Cardia semble avoir écrit son Histoire des Successeurs d'Alexandre en réaction aux Macédoniques de Douris, prompt à l'embellisement littéraire et à la dramatisation. Quant à Plutarque, il cite plusieurs fois Douris comme une source tout en mettant en doute la véracité de son propos[8].

Selon certains historiens modernes, Douris ne pas témoigne d’une grande considération envers les Macédoniens ; il aurait opposé par patriotisme grec les vertueux Démosthène, Phocion et Eumène de Cardia aux diadoques excessifs et immoraux : Polyperchon manifeste un goût immodéré pour la boisson ; Démétrios se perd dans le luxe et la tempérance. Pour autant Elien, qui s’inspire là de Douris, compare négativement les origines supposées modestes d'Antigone, Eumène et Polyperchon[9]. Quant aux remarques de Douris sur les mœurs des diadoques, elles n’entament guère leur prestige politique. La Vie de Démétrios, que Plutarque a puisé en partie dans les Makedonika, ne témoigne en effet d’aucune hostilité à l’égard des Antigonides. Douris semble également avoir ménagé Lysimaque, roi de la Thrace voisine. Pausanias, en s’inspirant ici de Douris, réfute en effet les accusations d’impiétés formulées contre Lysimaque par Hiéronymos de Cardia et atténue sa responsabilité dans le meurtre de son fils, Agathoclès[10]. Enfin Douris ne témoigne d'aucune hostilité à l'égard de Cassandre, protecteur des Péripatéticiens auquel Théophraste a dédié un traité peri basileas.

[modifier] Notes

  1. Ces dates restent sujettes à caution.
  2. Plutarque, Vies parallèles [détail des éditions] [lire en ligne], Vie d'Alcibiade, 32.
  3. Pausanias, Périégèse, VI, 13, 5.
  4. Pline l'Ancien, Histoire Naturelle, VIII, 40.
  5. Pour les événements de Sicile, l'Histoire d'Agathoclès est l'une des sources de Diodore de Sicile, Bibliothèque historique [détail des éditions] [lire en ligne], XIX.
  6. Athénée, Deipnosophistes [détail des éditions] [lire en ligne], IV ; XIV.
  7. Aristote, Ethique, IV, 7, 1127 a : « Les paroles, les actions, la conduite révèlent l’homme ».
  8. Plutarque, Vie de Périclès, 28 ; Vie de Démosthène, 19 ; Vie d'Alcibiade, 32, Vie d'Eumène, 1.
  9. Elien, Histoires Variées, 12, 43.
  10. Pausanias, Périégèse, VI, 9, 8 ; 10, 3.

[modifier] Sources

[modifier] Bibliographie

  • Robert B. Kebric :
    • « A Note on Duris in Athens », CP, no 69 (1974), p 286-287 ;
    • In the shadow of Macedon : Duris of Samos, Historia Einzelschriften, 29, 1977, 99 p. ;
  • Paul Pedech, Historiens compagnons d’Alexandre, Collection des Etudes Anciennes, 1984, p.255-389.