Breiz Atao

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Breizh Atao (en breton « Bretagne toujours ») est le nom de plusieurs revues éditées par diverses branches du mouvement breton. Il a paru entre 1918 et 1939. Par extension, le terme « Breiz atao » a servi à désigner les nationalistes bretons durant l'entre-deux-guerres, puis après la Seconde Guerre mondiale, les nationalistes qui s'étaient compromis avec l’occupant.

Sommaire

[modifier] Création

Le journal Breiz Atao fut créé par le Groupe régionaliste breton (GRB). Son premier numéro parait en janvier 1919.

En mai 1920, il devient l'organe du Groupe régionaliste breton (Unvaniez Yaouankiz Vreiz, UYV).

En 1919, Morvan Marchal écrit dans cette revue, influencé par Maurras et l'Action française :

« La vie bretonne : Les Rouges. Parfaitement, Rennes l'a eue aussi sa petite manifestation pour Jaurès. (…) La voilà la jeunesse bretonne. Laisse crier les loups rouges après les loups bleus. Notre heure viendra, à nous aussi, ce sera l'heure de la Bretagne, l'heure du sain positivisme, du catholicisme et de la tradition, et ce sera aussi l'heure de la vieille et saine France. [1] (article complet : [1]) »

Dans ce même numéro, la référence à Maurras est explicite, de le part de Henri Prado, un des fondateurs :

« Et qu'est-ce que la "Libre Pensée" de M. Le Febvre ? En quoi peut-elle consister ? Laissons causer le grand penseur Charles Maurras dont je m'honore grandement d'être le fervent disciple. [2] (source de l'image : [2] ; article complet : [3]) »

Breiz Atao se réclame du fascisme mussolinien en 1922 :

« Après le triomphe fasciste et devant l’inanité des efforts à tendance parlementaire et respectueux de l’ordre étatique, on est en droit de conclure en faveur de certain esprit et de certaines méthodes. [3] (article complet : [4]) »

En décembre 1922, Breiz Atao porte en exergue de la préconisation de la torture meurtrière des Chemises noires de Mussolini, qui viennent de prendre le pouvoir  :

« En 1919 : la majorité des Députés sont partisans de l'enseignement du breton, à tous les degrés. En 1922 : Deux seulement. Pour leur rafraichir la mémoire… l’huile de ricin [4] (mis en gras dans le texte, source de l'image : [5], Une complète : [6]) »

En 1924, Morvan Marchal écrit un éditorial adoptant le "nordisme", qui marque l'orientation de Breiz Atao, et regrette l'éclipse des cultures germaniques, celtiques,... par la Renaissance d'origine italienne, thème diffusé dans les réseaux pangermanistes :

« le génie latin brisa triomphalement, en un demi-siècle, l'œuvre de six cent ans de travail Nordique. Ce fut la Renaissance (…) la suppression brutale d'un progrès continu de six siècles (…) ; c'est la nuit pour l'Intelligence du Nord. (…) le flambeau latin (…) vacille et va s'éteindre, pour faire place à la torche revivifiée des Nordiques. Les Celtes, et particulièrement la Bretagne, ont leur place parmi les porteurs du Feu Nouveau. Ils furent autrefois, face à Rome, les premiers d'entre les Barbares. (…) nous avons le devoir, par notre passé et par notre tradition raciale de participer à la formidable partie. [5] (article complet : [7]) »

Ce fait est cité par Georges Cadiou, dans L'hermine et la croix gammé (Mango, p. 38), où cet auteur relève qu'Olier Mordrel, comme Morvan Marchal défendent les nordiques, selon le schéma des mythes de Thulé, ainsi que Roparz Hémon, .

Breiz Atao adopte la croix gammée en 1924, publiée dans Breiz Atao début 1925 [6] (source de l'image : [8] ; page complète : [9]).

À la même époque, il écrit : « La même préoccupation tient au cœur des nationalistes de tous les petits pays en réveil : arracher l'intelligence de leur peuple à la culture étrangère imposée, et reconstituer une civilisation nationale sur le vieux fonds racial et traditionnel. "» [7]

La diffusion de Breiz Atao est extrêmement faible : 250 abonnés, dont 50 à jour. Parmi ces abonnés, Hans-Otto Wagner, qui travaille pour les Affaires étrangères allemandes, et qui est membre d’une association pangermaniste. L’Allemagne apporte un soutien financier à cette revue : Robert Ernst, financier pour le gouvernement allemand des mouvements autonomistes et irrédentistes, a pris des parts dans la revue [8]. Lors du congrès de Rosporden, le Parti autonomiste breton (PAB) est créé en septembre 1927. Breiz Atao devient son organe.

Maurice Duhamel est alors chargé dans ce parti de suivre la politique française, en particulier les relations avec la gauche française, et devient rédacteur en chef de Breiz Atao. Maurice Duhamel est également en relation avec d’autres mouvements autonomistes français, notamment flamands et alsaciens, et européens, via le Congrès européen des nationalités (CEN). Ces groupes se signalent par des liens avec l’Allemagne, et une idéologie qui rejoint le national-socialisme [9].

[modifier] 1re interruption

Suite aux querelles internes du PAB qui aboutissent à sa disparition de fait en 1930-1931 et à son éclatement entre les fédéralistes internationalistes d'une part et les nationalistes d'autre part, Breiz Atao cesse de paraitre durant l'été 1931. En effet, le congrès du 11 avril 1931 n'a pas réussi à résoudre les divergences ; les fédéralistes l'emportent mais les divergences ne cessent de grandir. Au congrès de Guingamp d'août, le PAB cesse d'exister et il est décidé l'abandon du journal Breiz Atao dont le dernier numéro parait en juin 1931.

Les fédéralistes créent la ligue fédéraliste de Bretagne dont le nouveau journal est La Bretagne fédérale. Il existe également un éphémère parti de gauche autonomiste, le parti national révolutionnaire Breton.

[modifier] Deuxième journal

De leur côté, les nationalistes crééent le Parti national breton au congrès de Landerneau le 27 décembre 1931. Ils décident de lancer le journal La nation bretonne qui remplace Breiz Atao. Cependant, certains préfèrent relancer un journal qui réutilise le titre de Breiz Atao, simple organe de liaison entre les militants (dont Yann Sohier), qui reparait dès novembre 1931 . C'est un nouveau journal, qui ne reprend pas la raison sociale du précédent, notamment les dettes.

Ils publient également le journal War Zao, journal des nationalistes du Trégor, Goëlo, Haute-Cornouaille, qui réclame un retour au nationalisme sans exclure le séparatisme.

Breiz Atao fait appel à une rhétorique éditoriale anti-impérialiste (soutien au soulèvement basque contre les franquiste, soutien aux aspirations anti-coloniales au Maghreb, ...).

Breiz Atao cesse de paraître lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, son dernier numéro datant du 27 août 1939 (son secrétaire Louis Maubré est arrêté la semaine suivante). Le Parti national breton remplace Breiz Atao par L'Heure bretonne.

[modifier] Troisième journal

En mai 1944, Célestin Lainé, en dissidence du PNB (qui se veut non aligné et exclue certains cadres jugés pro -allemands), créé un deuxième Parti national breton et relance un journal reprenant le titre de Breiz Atao. Seuls quelques numéros, pro-nazis, paraissent.

[modifier] Après guerre

Au fil du temps et par amalgame, tout breton militant (dans quelque mouvement qu'il soit) deviendra, dans l’esprit des gens, un « Breiz Atao » avec souvent une connotation péjorative, du fait qu'une partie (la plus visible et organisée)des nationalistes ont choisi la carte allemande (notamment Olier Mordrel qui glisse franchement vers le fascisme dans les années 1930 et Célestin Lainé).

Par contre, une part importante d'adhérents et ex adhérents du PNB rejoindra la Résistance et les FFL, en groupes constitués pour certains et de manière dispersées pour d'autres comme l'a montré l'historien Jean Jacques Monnier, dans son ouvrage "résistance et conscience bretonne,1940-1945, l'hermine contre la croix gammée".

Le terme de Breiz Atao semble avoir perdu une partie de sa connotation négative. Il est tantôt un slogan revendicatif dans la bouche de celui qui l'emploie dans le cadre d'une revendication identitaire, "Breiz Atao!", tantôt sert à désigner familièrement les individus très attaches à la culture et la langue bretonnes ou favorable à l'indépendance ou l'autonomie de la Bretagne, "Lui c'est un Breiz Atao!". Maintenant les bretons lui préfèrent l'expression "Breizh da viken" qui signifie bretagne à vie.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Publications

  • Le nationalisme breton, aperçu doctrinal. Breiz Atao - Rennes. 1925.

[modifier] Bibliographie

[modifier] Notes et références

  1. Breiz Atao, n° 4, avril 1919, p 2
  2. Breiz Atao, n° 4, avril 1919, Une
  3. Breiz Atao n° 46-47, octobre-novembre 1922, p 249
  4. Breiz Atao n° 48, 12/1922, exergue de Une
  5. Breiz Atao n° 61-62, janvier-février 1924, p. 5
  6. Breiz Atao n° 74, février 1925, p. 534
  7. Françoise Morvan, Le Monde comme si, Actes sud, 2002
  8. Lionel Boissou. L’Allemagne et le nationalisme breton (1939-1945). in Bretagne et identités régionales durant la Seconde Guerre mondiale, sous la direction de Christian Bougeard. Brest : Centre de recherches bretonnes et celtiques, 2002. p 324
  9. Lionel Boissou. L’Allemagne et le nationalisme breton (1939-1945). in Bretagne et identités régionales durant la Seconde Guerre mondiale, sous la direction de Christian Bougeard. Brest : Centre de recherches bretonnes et celtiques, 2002. p 322 et suivantes.
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