Boulangisme

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Le boulangisme— ou la Boulange— est un mouvement politique français de la fin du XIXe siècle (1889-1891) qui constitua une menace pour la Troisième République. Son nom est dérivé de celui du général Georges Boulanger, militaire de prestance qui devint ministre de la Guerre, se rendit populaire par ses réformes mais inquiéta le gouvernement par son discours belliqueux. Au départ de ce mouvement, une affaire d'espionnage avec l'Allemagne. Boulanger fut à l'origine d'une politique d'espionnage et de d'utilisation de fonctionnaires français connaissant la région pour surveiller l'Alsace-Lorraine, ce qui conduit en 1887 à l'affaire Schnaebelé.

Sommaire

[modifier] Historique du boulangisme

Autour du général Boulanger se regroupèrent à partir de 1886, des républicains révisionnistes (pour la plupart, des radicaux), et des monarchistes désireux de renverser la République. En 1887, Boulanger a le soutien de la gauche et de l'extrême-gauche qui voient en lui un général républicain qui a rendu le service militaire obligatoire pour les ecclésiastiques ("les curés sac au dos"), expulsé les princes d’Orléans de l’armée (1886) et amélioré les conditions de vie du soldat (réduction du temps du service militaire, fusil Lebel). Le 13 mars 1886, Boulanger a même évoqué une possible fraternisation entre la troupe et les mineurs en grève de Decazeville.

Le boulangisme connut le succès en reposant sur deux passions populaires :

  • L'espoir de la Revanche contre l'Allemagne.
  • L'espoir d'une politique sociale (porté par les radicaux boulangistes) voire socialiste (porté par les socialistes boulangistes, notamment les blanquistes qui quittent le Comité révolutionnaire central d'Edouard Vaillant pour créer le Comité central socialiste révolutionnaire, boulangiste).

Sur le plan institutionnel, le boulangisme reposait donc sur une grande ambiguïté :

  • Les républicains espéraient une "révision" des institutions installées de façon provisoire en 1875, « pour aboutir à une république définitive et incontestée » (cf. programme électoral de Barrès de 1889).
  • Mais les monarchistes et les bonapartistes espéraient profiter de la révision de la constitution pour renverser la République. La droite (notamment la duchesse d’Uzès, les familles d’Orléans et Bonaparte) apporta donc un soutien financier au boulangisme.

En janvier 1888, les monarchistes promirent leur soutien au candidat à la Présidence de la république qui s'engagerait à prendre Boulanger comme ministre de la Guerre. À la même époque le général rencontre le prince Napoléon qui lui promit son soutien, notamment financier. Cette année-là malgré son inéligibilité - car militaire - il est présenté aux élections dans 7 départements sous étiquette bonapartiste. La même année il sollicite la duchesse d'Uzès (héritière de la plus riche maison de vins de Champagne) pour 25 000 francs puis 3 millions au nom du Roi.

Rayé des cadres de l'armée, Boulanger se présenta à plusieurs élections avec un programme simple : la mise en place d'une Assemblée constituante. À force de promesses secrètes à ses différents concurrents, il finit par remporter des succès électoraux grandissants. Son arrivée à la Chambre le 12 juillet 1888 est suivie par une foule importante.

En même temps les Boulangistes parviennent à présenter un candidat dans chaque département.

Le 27 janvier 1889 il se présentait comme candidat à Paris. La situation était inquiétante pour ses adversaires. Le président du Conseil général de la Seine, Jacques lui fut opposé. La campagne fut intense. Boulanger l'emporta par 244 000 voix contre 160 000 à son adversaire. Au moyen du système de candidature multiple, il s'était présenté et a été élu à peu près partout. Alors qu'il célébrait sa victoire en présence de 50 000 personnes, certains de ses partisans, dont Alfred Naquet, lui suggérèrent alors d'effectuer un coup d'État en marchant sur l'Élysée mais il se refusa à les suivre sur cette voie.

Un mandat d'arrêt fut lancé contre lui pour complot contre la sûreté de l'État, et il dut s'enfuir en Belgique. Le gouvernement fit interdire le cumul des candidatures et aux élections du 22 septembre 1889 les boulangistes n'eurent que 44 élus contre 166 monarchistes et 366 républicains. Le boulangisme s'effondra, et le général Boulanger se suicida le 30 septembre 1891 sur la tombe de sa maîtresse.

En 1889, la moitié ou les deux-tiers des députés boulangistes viennent de la gauche et de l’extrême-gauche. À Paris, le boulangisme perce dans les quartiers populaires et non bourgeois. Goguel évoque : « Les troupes du boulangisme parisien, journalistes faméliques, camelots, ouvriers, épaves sociales, dressées contre les gros bourgeois du parlement et de la finance. » (Goguel François, La Politique des partis sous la Troisième République). En province, le boulangisme pénètre très peu dans les fiefs de la droite traditionnelle, monarchiste et cléricale (cf.les études d'André Siegfried).

[modifier] Signification du boulangisme

  • Pour Zeev Sternhell, le boulangisme tient une place importante dans l'histoire politique française, première synthèse entre le nationalisme et certaines formes de socialisme, qui donnera plus tard naissance au fascisme. Cette vision est cependant minoritaire.
  • Le boulangisme marque probablement pour les monarchistes de l'époque le dernier espoir de restauration de la monarchie en France. Après cela, dans les années 1890, viendra la politique de ralliement des monarchistes à la République.
  • Pour autant, le boulangisme constitue aussi un authentique mouvement socialiste si l'on considère le grand nombre de socialistes (en particulier blanquistes) qui le rejoignirent. Pour Jean Jaurès, le boulangisme est « un grand mouvement de socialisme dévoyé ». Pour Paul Lafargue, « le boulangisme est un mouvement populaire justifiable à beaucoup de titres. » (lettre à Engels).
  • Le boulangisme a dédramatisé la question du socialisme en France, encore tabou quelques années après la Commune. Pour François Goguel, « le boulangisme a donné naissance à la fois au nationalisme et au socialisme moderne » (La Politique des partis sous la Troisième République). Pour René Rémond, « le boulangisme a frayé la voie au socialisme » (Les droites en France).
  • Le boulangisme a été une étape de l'éclosion de la doctrine antinationaliste de la gauche française, qui s'approfondira sous l'affaire Dreyfus. En réaction au boulangisme est créée La société des Droits de l'Hommes et du Citoyen (par Clemenceau et Ranc).

[modifier] L’état-major boulangiste

Boulangistes de droite

  • Albert de Mun, théoricien du corporatisme chrétien.
  • Arthur Dillon, ou comte Dillon (1834-1922) (officier de cavalerie, ami de Boulanger depuis Saint-Cyr, puis secrétaire général de la Compagnie du câble transatlantique, financier du Boulangisme, élection de député invalidée en 1889) ([1])
  • Georges Thiébaud (journaliste bonapartiste) qui lance, avec Dillon, une campagne de presse « à l’américaine » (comme on dit déjà à l’époque) en faveur de Boulanger.
  • Maurice Barrès (républicain nationaliste).
  • Armand de Mackau (député de l’Orne en 1866-1918 (sauf 1870-1876). Un des leaders monarchistes. Après l’échec du boulangisme, se rallie à la République à l’Action libérale de Jacques Piou) ([2]).
  • Charles Lalou (1841-1918) (industriel, directeur des mines de Bruay, patron de presse (La France), boulangiste, député du Nord (1889-1893)) ([3]).
  • Louis-Gaston Villemer (nationaliste militaire comme Driant ?).
  • Émile Driant (1855-1916) (officier de zouaves, député de Meurthe-et-Moselle en 1910-1916 (Action libérale), grand écrivain d’anticipation militaire sous le nom de capitaine Danrit) ([4])
  • Alfred Koechlin (1829-1895) (industriel, député du Nord en 1888-1889) ([5])

Boulangistes radicaux

  • Henri Rochefort (1831-1913) (+cf avant 89 ! ! ! !, journaliste, radical, républicain et anticlérical, député en 1869, membre du gouvernement de la défense nationale, député de la seine de 1885 à 1886. Directeur du journal l’Intransigeant. Après le boulangisme devient de plus en socialiste, mais n’est pas dreyfusard) ([6]).
  • Paul Déroulède (1846-1914) (journaliste-écrivain de la Revanche de 1870, jacobin social mais anti-communard, disciple de Gambetta, fondateur de la Ligue des patriotes en 1882, député de Charentes en 1889-1899, anti-Dreyfus) ([7])
  • Alfred Naquet (1834-1916) (député du Vaucluse en 1876-1883, sénateur du Vaucluse en 1883-1890, député de la Seine en 1893-93, puis du Vaucluse en 1893-1898) ([8])
  • Jean Prosper Turigny (1822-1905) (médecin, député de la Nièvre de 1876 à 1905, gauche radical-socialiste, maire de Chantenay) ([9]),
  • René-Felix Le Hérissé (1857-1922), (député puis sénateur d’Ille-et-Villaine de 1886 à 1920, radical puis groupe de la gauche démocratique) ([10])
  • Jean-Baptiste Saint-Martin (1840-1926) (député du Vaucluse et de la Seine en 1877-1893 et 1906-1910, radical socialiste, directeur de l’École des Beaux-Arts d’Avignon) ([11]).
  • Eugène Mayer (financier (Lazard Frères), il relance La lanterne en 1877, journal radical-socialiste, anticlérical),
  • Maurice Vergoin (1850-1892) (avocat républicain radical, député de Seine-et-Oise en 18895-1889) ([12]).
  • Louis Andrieux (1840-1931) (avocat, député du Rhône et des Basses-Alpes en 1876-1889 et 1910-1924. Après le boulangisme : républicain de gauche) (A.pdf).

Boulangistes socialistes blanquistes

  • Ernest Granger (1844-1914) (leader blanquiste sous le second empire avec Blanqui, Eudes et Tridon ; Communard, cofondateur du Comité révolutionnaire central, rédacteur en chef du Cri du peuple après la mort d’Eudes, député de la Seine en 1889-1893) ([13]).
  • Alexandre Froger député de la Sarthe en 1885-1889 puis de la Mayenne en 1889-1893, socialiste chrétien
  • Ernest Roche (1850-1917) (ouvrier graveur, membre du comité blanquiste de Bordeaux, scerétaire de la chambre syndicale des mécaniciens, délégué des association suyndicales ouvrières au Congrès socialiste de Marseille, député de la Seine en 1889-1906 et 1910-1914, un des fondateurs des soupes populaires) ([14]).
  • Breuillé,
  • Gabriel Terrail dit « Mermeix » (1859-1930) (journaliste et écrivain, fonde la Cocarde (boulangiste) en 1888, député de la Seine en 1889-1893) ([15])

Boulangistes députés du « groupe ouvrier » de 1885

  • Charles-Ange Laisant (1841-1920)(scientifique, député de Loire-Inférieure en 1876-1885 et de la Seine en 1885-1893, dreyfusard) ([16]),
  • Georges Laguerre (1856-1912) (avocat, député du Vaucluse 1883-1889 et 1910-1912 et député de la Seine en 1889-1893) ([17]),
  • Henri Michelin (1847-1912) (juriste, président du conseil municipal de Paris en 1884, député de la seine en 1885-1889 et 1893-1898) ([18]).
  • Clovis Hugues (1857-1907) (premier député ouvrier socialiste en France. Réélu député de Marseille en 1885, il prend part au mouvement boulangiste. Il est député socialiste de la Seine entre 1893 et 1906 (19e arrondissement)) ([19]).
  • Paul Susini, dit Paul de Susini (1843-1901) (médecin, socialiste, député de la Corse en 1885-1889) ([20]).

Autres boulangistes

  • Francis Laur (1844-1934) (député de la Loire en 1885-1889 puis de la seine en 1889-1893, socialiste national) ([21]).

[modifier] Voir aussi

[modifier] Liens externes