Amygdale (cerveau)

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coupe transversal des noyaux amygdaliens, situé par rapport à l'hippocampe
coupe transversal des noyaux amygdaliens, situé par rapport à l'hippocampe

L'amygdale ou complexe amygdalien est un groupe de neurones du cerveau en forme d'amande (d'où son nom) situé au pôle rostral du lobe temporal, en avant de l'hippocampe. Elle fait partie du système limbique et est impliquée dans les émotions en particulier dans la peur et l'agression.

L'amygdale a fait l'objet de nombreux travaux en neurosciences mais son rôle exact reste encore mal compris. Suivant les théories, elle est considérée comme l'interface entre souvenir et désir[1], comme l'association entre stimulus et renforcement[2], comme un système de conditionnement affectif[3], ou comme un filtre sensoriel transmettant un message activateur selon la signification affective du stimulus[4].

L'amygdale reçoit des afférences de toutes les modalités sensorielles et est connectée aux structures cérébrales assurant l'expression physiologique de la peur (augmentation de la pression sanguine et de la fréquence cardiaque, contraction des muscles, sudation, immobilisation...).

L'amygdale comprend trois groupes de noyaux selon leur connectivité:

  • les noyaux cortico-médians sont connectés avec le bulbe olfactif et le cortex olfactif
  • les noyaux baso-latéraux, avec le cortex cérébral, en particulier avec les aires sensorielles associatives
  • les noyaux centraux et antérieurs, avec le tronc cérébral, l'hypothalamus et avec les régions viscéro-sensibles comme le noyau du faisceau solitaire.

Elle grossit vers l'âge adulte, et ses actions deviennent plus importantes.

Sommaire

[modifier] Amygdale et la peur

[modifier] Le circuit de la peur

Cette structure fait partie du circuit de la peur que l'on peut diviser en une voie courte (Traitement sensoriel -> thalamus -> Amygdale -> Réponse) et une voie longue (Traitement sensoriel -> Thalamus -> Cortex cérébral -> Hippocampe / Amygdale -> Réponse). L'analyse du stimulus par le cortex va maintenir ou freiner l'action de l'amygdale sur les structures cérébrales responsables de l'expression physiologiques de la peur.

Le serpent de Joseph LeDoux (1994) illustre l'action de ce circuit. Un promeneur marche dans les bois et voit ce qui ressemble à un serpent. La voie courte va activer une réponse quasi-immédiate à la peur. Par la voie longue, après une courte latence, l'information arrive au Cortex visuel (lobes occipitaux) puis au Cortex Sémantique (lobes temporaux). S'il s'agit bel et bien d'un serpent, le cortex visuel renforcera l'action amygdalienne et maintient les réponses corporelles. S'il s'agit d'un bâton, l'action amygdalienne est freinée et les réponses corporelles s'estompent.

L'action amygdalienne a un rôle de survie : il vaut mieux prendre le bâton pour un serpent et agir en toute sécurité plutôt que de risquer de prendre un serpent pour un bâton.

[modifier] L'apprentissage de la peur

Les expériences chez le rat, concernant le conditionnement de la peur (LeDoux, 1997) montrent que ce circuit est déjà présent très en avant dans l'échelle phylogénétique. Selon le modèle d'étude de LeDoux, on associe un stimulus désagréable "non-équivoque" (décharge électrique par exemple), le stimulus de peur non-conditionné, à un stimulus en soi neutre (un son par exemple), le stimulus de peur conditionné. Le stimulus neutre, seul, entraîne uniquement une action exploratoire chez le rat. Après répétition de l'association, le rat va réagir de la même manière au stimulus conditionné qu'au stimulus non-conditionné, même en absence de ce dernier, et se fige.

Cette méthodologie valide l'hypothèse du circuit de la peur puisque si on lèse le cortex auditif ou l'hippocampe du rat après le conditionnement, la réponse à la peur est maintenue. En revanche, elle est éliminée si on lèse l'amygdale. Cet apprentissage correspond donc bien à des phénomènes de plasticité dans plusieurs structures amygdaliennes. Le noyau latéral basal serait le lieu de convergence entre les informations non-conditionnées et les informations conditionnées, et c'est celui-ci que LeDoux associe à la peur. D'un point de vue physiologique, ce noyau est bel et bien connecté avec le thalamus et le cortex d'où il reçoit des afférences, et avec l'hippocampe (connections réciproques), jouant un rôle dans la mémoire et dans la motivation. Chez le rat, l'information met 12 millisecondes pour atteindre l'amygdale par le circuit court, et le double via le circuit long.

[modifier] La reconnaissance des émotions

La reconnaissance des émotions implique de multiples structures cérébrales faisant parties des structures limbiques ou paralimbiques. L'amygdale a un rôle prédominant dans la reconnaissance des expressions faciales de peur (Morris et al, 1996, 1998).

[modifier] L'expression de la peur

une lésion au niveau des amygdales entraine une incapacité d'exprimer ses émotions. S'il y a un serpent devant lui, il dira : je suis sensé avoir peur; mais il n'aura pas peur ( il n'y aura aucune manifestation somatique de cette peur).

[modifier] Amygdale et Neuropsychologie

Pour LeDoux (1998), les troubles anxieux seraient dûs à l'activation pathologique du circuit court. Des traumatismes psychologiques très précoces marqueraient l'amygdale et le circuit de la peur pendant la maturation du cerveau. Ces perturbations seraient permanentes. L'activation de l'amygdale (imagerie fonctionnelle) serait exagérée chez les sujets anxieux (Thomas et al, 2001), de dépression, de phobie sociale, de stress post-traumatique.

En revanche, une lésion des amygdales provoque une absence de la reconnaissance de la peur, ce qui a des conséquences psycho-sociales dramatiques. Les jugements sociaux sont alors impossibles (Damasio) et une lésion bilatérale peut provoquer un syndrome de Klüver & Bucy.

[modifier] Références

  1. Mishkin
  2. Weiskrantz
  3. LeDoux
  4. Rolls
  • DAMASIO A. R. (1999) : Le sentiment même de soi, Odile Jacob, Paris.
  • LEDOUX J. (1994) : Émotion, mémoire et cerveau, Pour La Science, 202 : 50-57.
  • LEDOUX J. (1998) : The emotional brain. Weidenfeld & Nicolson, London.
  • LEDOUX J. E. & MULLER J. (1997) : Emotional memory and psychopathogy, Phil. Trans. R. Soc. Lond. B 352 : 1719-1726.
  • MORRIS J.S., FRISTON K.J., BÜCHEL C., YOUNG A.W., CALDER A.J., & DOLAN R.J. (1998) : A neuromodulatory role for the human amygdala in processing emotional facial expressions. Brain, 121 : 47-57.
  • MORRIS J.S., FRITH C.D., PERRETT D.I., ROWLAND D., YOUNG A.W., CALDER A.J. & DOLAN R.J. (1996) : A differential neural response in the human amygdala to fearful and happy facial expressions, Nature, 383 : 812-815.
  • THOMAS K.M., DREVETS W.C., DAHL R.E., RYAN, N.D. BIRMAHER, B. ECCARD C.H., AXELSON D. WHALEN P.J. & CASEY B.J. (2001) : Amygdala response to fearful faces in anxious and depressed children, Anch Gen Psychiatry, 58 :1057-1063