Affaire sur la liquidation de la Compagnie des Indes

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L'Affaire sur la liquidation de la Compagnie des Indes, se déroule en octobre et novembre 1793.

Sommaire

[modifier] Historique

[modifier] Compagnie française des Indes

Compagnie financière et commerciale créée en 1719 à l'instigation du financier John Law et qui reçut en 1722 le monopole du commerce maritime français (sauf en Amérique). Malgré les réussites de Louis-Charles Mahe De La Bourdonnais (colonisation de la Réunion et de l'île Maurice) et de Joseph François Dupleix (établissements français aux Indes), la Compagnie, ruinée par les guerres coloniales et maritimes (guerre de succession d'Autriche, Guerre de Sept Ans), perdit son monopole (1769). Reconstituée par Louis XVI de France sous le nom de "Nouvelle Compagnie des Indes" (1785), elle fut définitivement supprimée par la Convention (1794), ce qui donna lieu à un scandale où furent mêlés en particulier Georges Jacques Danton et Fabre d'Églantine.

[modifier] Suppression de la Compagnie des Indes

Après une campagne menée par Joseph Delaunay, soutenu par Charles-François Delacroix, contre des transferts d'actions faits en violation de la loi, et une campagne plus précise contre la Compagnie des Indes, un décret du 24 août 1793 avait supprimé les compagnies financières et les sociétés par actions.

Parmi les instigateurs de cette mesure radicale, soucieux de se populariser en période de disette et de baisse des changes, on trouvait Fabre d'Églantine et les députés d'affaires Joseph Delaunay, Claude Basire, Jean Julien dit "de Toulouse" et François Chabot qui jouaient au même moment à la baisse les actions des sociétés menacées.

[modifier] L'affaire de la Compagnie des Indes

Joseph Delaunay, François Chabot et Jean Julien dit de "Toulouse" étaient membres de la commission des finances chargée de rédiger le décret de liquidation de la Compagnie des Indes. Ayant exercé un chantage sur la Compagnie, ils se sont fait acheter par ses actionnaires pour la somme rondelette de 500 000 livres. Ils sauvent la Compagnie dans le projet de décret présenté le 8 octobre 1793 par Joseph Delaunay à la Convention. Les formulations ambiguës du texte laisse à la Compagnie des Indes la possibilité de procéder elle-même à sa liquidation. Fabre d'Églantine, soutenu par Maximilien de Robespierre, proteste avec énergie. La Convention modifie le texte : la liquidation sera effectuée par le gouvernement (amendement Fabre), la nation n'entendant pas se charger d'un éventuel déficit (amendement Pierre Joseph Cambon).

[modifier] Corruption

Lorsque le décret, après le renvoi en commission pour une nouvelle rédaction et un délai anormalement long de dix-neuf jours, paraîtra au Bulletin révolutionnaire, les amendements auront disparu. Le nouveau texte permet à la Compagnie d'échapper aux amendes encourues par elle et de se liquider elle-même sous la surveillance symbolique de commissaires nationaux chargés de la liquidation des sommes dues à la nation. L'opération passe inaperçue. Joseph Delaunay a confié à l'imprimeur un texte signé par Fabre d'Églantine distrait ou préalablement acheté, lui aussi ? On ne le saura sans doute jamais.

[modifier] François Chabot dévoile l'affaire de la Compagnie des Indes et ses dessous

François Chabot, excédé d'être mis seul sur la sellette, dévoile l'affaire de la Compagnie des Indes et ses dessous. Il dénonce la conspiration ourdie par le baron Jean de Batz, pour ruiner la République. L'affaire de la Compagnie des Indes n'est qu'une ramification du complot.

[modifier] Le complot de Jean de Batz selon François Chabot

Bénéficiant de la protection de Louis-Marie Lullier, procureur-général-syndic du département, et de plusieurs membres éminents de la Commune de Paris, le baron Jean de Batz, disposait de deux leviers maniés tour à tour par Benoist, un ancien agent de Georges Danton : la corruption (en manœuvrant Fabre d'Églantine, Joseph Delaunay et les députés d'affaires) et la dénonciation outrancière, la diffamation (par le relais des Hébertistes). Au centre du dispositif : Jacques-René Hébert et le baron Jean de Batz. François Chabot proposait de les faire arrêter chez lui, en flagrant délit de collusion avec d'autres acteurs de la conspiration. La dénonciation de François Chabot suivant celle de Fabre d'Églantine, va augmenter le trouble de Maximilien de Robespierre. Elle confirme l'existence d'une "grande conspiration". La suspicion va s'installer dans les hautes sphères de l'État et accréditer que l'or de William Pitt et de l'étranger se trouve derrière toutes les tentatives des oppositions.

C'est peut-être le caractère outré de l'accusation portée contre Jacques-René Hébert qui a fait échouer François Chabot.

[modifier] Découverte de l'"original" du décret de la liquidation de la Compagnie des Indes

Le 12 nivôse an II (1er janvier 1794), on découvira lors de l'examen des scellés de Joseph Delaunay, l'"original" du décret - en réalité sa première mouture - retouché de la main de Fabre d'Églantine, ce qui permettra au Comité de sûreté générale de négliger les révélations de François Chabot pour en faire une simple affaire de faux et de fraude.

[modifier] Fabre d'Églantine est écarté de l'instruction de l'affaire de la Compagnie des Indes

Fabre d'Églantine lui-même, bien qu'il soit laissé en liberté, est écrasé de soupçons depuis l'examen du faux décret de la liquidation de la Compagnie des Indes par le Comité de sûreté générale. Le 6 nivôse an II (26 décembre 1793), Fabre d'Églantine a été écarté de l'instruction de l'affaire de la Compagnie des Indes.

[modifier] Jean-Pierre-André Amar s'acharne sur Fabre d'Églantine

Jean-Pierre-André Amar, dans un rapport assez malhonnête où il confond à dessein les deux textes signés par Fabre d'Églantine, puis Marc Vadier, qui ne se préoccupe pas de savoir si les corrections litigieuses sont ou non de la main de Fabre d'Églantine, s'acharnent contre cet adversaire des Comités avec mauvaise foi.

[modifier] Arrestations concernant l'affaire de la Compagnie des Indes

François Chabot sera arrêté en novembre 1793. Fabre d'Églantine sera arrêté le 24 nivôse an II (13 janvier 1794). Les députés financiers, François Desfieux, Jacob Pereira et Pierre-Ulric Dubuisson sont arrêtés entre le 28 brumaire et le 2 frimaire an II (18 novembre et le 22 novembre 1793). Berthold Proli en fuite n'est arrêté qu'en février 1794.

[modifier] Georges Danton, Camille Desmoulins connaissent le détail de la conspiration de Batz-Hébert

Georges Danton, Camille Desmoulins et peut-être plusieurs autres connaissent le détail de la conspiration de Batz-Hébert. Ils savent que Maximilien de Robespierre et Louis Antoine Léon de Saint-Just la connaissent également. De même, ces derniers ont compris que les Indulgents ou Dantonistes avaient en main le dossier (par des lettres envoyées par François Chabot à Danton.)

Dévoiler l'affaire de la Compagnie des Indes, pour Maximilien de Robespierre, serait déshonorer la Montagne et la République, ruiner le régime lui-même. Pour Georges Danton, malgré l'espoir d'un bouleversement politique dont il pourrait tirer profit, il y a le risque majeur de voir discréditer, à travers Fabre d'Églantine ou Joseph Delaunay, tout le parti dantoniste...

Personne par conséquent n'osera rompre le silence.