Affaire Mohammed al-Durah

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Mohammed al-Durah (arabe : محمد الدرة, parfois transcrit en al-Dura ou al-Doura ou al-Durrah, avec ou sans tiret) est un enfant arabe palestinien de 12 ans dont les circonstances de la mort dans la Bande de Gaza ont été l’objet d’une affaire médiatique dès le début de la seconde Intifada.

Sommaire

[modifier] Affaire

Les évènements ayant conduit à la mort de Mohammed al-Durah firent tout d'abord l'objet d'une enquête issue des mileux militaires israéliens qui conclut que le petit palestinien avait été tué par des balles de l'armée israélienne[1].

L’affaire se développa ensuite lorsque les équipes de France 2 transmettent un reportage présentant la mort de l’enfant dans les bras de son père, où il semble être abattu par des soldats de Tsahal au cours d’affrontements au carrefour de Netzarim, le 30 septembre 2000, deuxième jour de l’« Intifada Al-Aqsa ». Le reportage de Talal Abou-Rahma (le vidéaste) et Charles Enderlin (journaliste) a été mis en libre diffusion par France 2 aux télévisions du monde le jour même. Une controverse remet en question les faits relatés par le reportage en s’appuyant sur une étude balistique pour écarter la responsabilité israélienne sur la mort de l’enfant.

Mohamed Al-Durah est devenu, suite à ce reportage, l’un des symboles de la nouvelle Intifada, et donc du conflit entre Israël et les Palestiniens.

[modifier] Controverse

La version de France 2, qui fait des soldats israéliens les tueurs présumés de l’enfant, est mise en doute par certains commentateurs, notamment en France[réf. nécessaire]. Certains d’entre eux affirment que Mohamed Al-Durah est mort sous des balles palestiniennes, d’autres qu’il n’a en fait pas été tué. Cette affaire n’a pas fait l’objet de débats en Israël, où des reportages sont revenus sur cette affaire sans mettre en avant la thèse d’une manipulation, et où le gouvernement avait décidé de ne pas attaquer juridiquement un media[2]. L’armée israélienne a admis dans un premier temps sa probable implication dans la mort de l’enfant, avant de soutenir que Mohamed Al-Durah avait tout aussi bien pu être tué par des tirs palestiniens.

Ceux qui soutiennent la thèse d’une manipulation affirment que la position occupée par le père et l’enfant les mettait hors de vue, et donc de tir, des soldats israéliens[réf. nécessaire]. Ils soutiennent par ailleurs qu’il s’agit d’une mise en scène, de laquelle Talal Abou-Rahma, le preneur d’images de France 2, est partie prenante. Ils remarquent que la reconstitution des événements est devenue délicate du fait que les structures en place sur le carrefour de Netzarim ont été rapidement rasées par l’armée israélienne[réf. nécessaire]. Ils affirment également que les images diffusées par France 2 n’appuient ni l’idée de la mort de l’enfant, ni une responsabilité israélienne dans cette affaire.

En octobre 2002, certains mouvements juifs tels que l’UPJF ou le mouvement radical sioniste Ligue de Défense Juive ont attribué à Charles Enderlin, le "Prix de la Désinformation"[3], dit aussi par certains « Prix Goebbels »[4] et démentis par d’autres.

Une pétition pour exiger que France 2 rende publique l’ensemble des images a été signée en 2006 par plus de 4 000 personnes dont un sénateur de droite et un député[5]. France 2 affirme que les images sont authentiques, que l’enfant est bien mort, et que l’ensemble de la bande filmée le prouve, mais que l’intensité dramatique de la scène d’agonie interdit déontologiquement sa diffusion complète.

Le vendredi 22 octobre 2004, après de nombreuses pressions, France 2 accepte de diffuser en cercle privé la totalité de la cassette. Deux journalistes présents, dont le directeur de l’Express rapportent que la vidéo ne contient pas les scènes insoutenables d’agonie auxquelles il avait été fait allusion. Dans un article paru dans le Figaro, leurs conclusions sont mitigées et ils concluent à l’absence de mise en scène, ce qui tempère les propos de leur première interview radiophonique du 1er février, disponible sur le site www.acmedias.org . Le 18 novembre 2004, suite à l’extension de la polémique, France 2 diffuse toujours en privé des images tournées au même moment par une équipe de Reuters, des images du cadavre de l’enfant à la morgue ainsi que des images récentes du père de l’enfant montrant ses blessures. Elle maintient sa position et annonce également avoir porté plainte contre X pour diffamation[6].

La plupart des instances représentatives juives françaises, comme le CRIF, qui en d’autres occasions ont pris position sur le traitement médiatique du conflit israélo-palestinien en France, ont refusé de prendre part à la polémique sur les images. Ménahem Macina, de UPJF (Union des patrons juifs de France), après une synthèse faite en novembre 2005 très complète de l’affaire[7], « estime contreproductive, voire nuisible à la cause juive, en général, et à celle d’Israël, en particulier, la poursuite de ces actions ». Néanmoins, par la suite, il a revu sa position.

[modifier] Action judiciaire

Le 19 octobre 2006, la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris a condamné pour diffamation publique le directeur du site Web Media-Ratings[8] qui avait relayé les soupçons de trucage du reportage exprimés par l’agence de presse francophone israélienne Metula News Agency (MENA). Le tribunal a estimé que la contre enquête menée par la MENA se basait « essentiellement sur des extrapolations et des amalgames ». Le tribunal poursuit en affirmant qu’« aucune autorité officielle israélienne […] n’ont jamais accordé le moindre crédit [à la contre enquête du MENA] »[9].

Le 28 novembre 2006, le tribunal correctionnel de Paris a débouté la société France 2 et son correspondant en Israël, Charles Enderlin, de leurs demandes contre Pierre Lurçat poursuivi pour diffamation dans le cadre de l’affaire al-Dura. Il n’a pas examiné au fond les propos incriminés. Il a aussi débouté le prévenu de sa demande de dommages intérêts pour avoir été attrait en justice sans raison.

Il a reproché notamment aux parties civiles de n’avoir pas prouvé que Pierre Lurçat fût le directeur de la publication du site www.liguededefensejuive.com qui a publié un texte appelant à manifester le 2 octobre 2002 pour remettre le Prix de la désinformation à France 2 et à M. Enderlin. Me David Dassa-Le Deist, avocat du prévenu, s’est réjoui de ce jugement qui rappelle les principes fondamentaux du droit pénal garantissant que nous sommes dans une société de liberté. Me Bénédicte Amblard, avocate des parties civiles, s’est indignée de ce jugement. En début d’après-midi, elle n’avait pas encore décidé avec ses clients d’interjeter appel[10].

Le 19 septembre 2007, la Cour d’appel de Paris, examinant la requête du site media-ratings condamné en première instance, a demandé à France 2 de lui présenter l’intégralité des images tournées. La communication de l’intégralité des images tournées étant une demande permanente des opposants à France 2, elle devrait avoir le mérite de clarifier la situation, en faisant définitivement taire les critiques ou en provoquant un scandale de grande ampleur.

Le 3 octobre 2007, la cour d’appel de Paris a confirmé sa demande de se voir communiquer les 27 minutes d’images tournées le 30 septembre 2000 par le caméraman de France 2, Talal Abou Rahma. Cet arrêt a confirmé la décision qui avait été annoncée oralement lors de l’audience du 19 septembre dernier. Les images seront visionnés le 14 novembre prochain.

Le 14 novembre 2007 Charles Enderlin a présenté une version expurgée (moins 9 minutes) des rushes. Il s’est justifié des coupures en affirmant qu’elles n’avaient pas de lien avec cette journée, alors que Richard Landes, présent à l’audience pour authentifier la vidéo, remarque qu’elles cachent des éléments essentiels montrant la manipulation. La vidéo présentée a cependant bien montré que Mohammed Al Dura était vivant après la dernière image publique, à l’opposé de ce qu’affirmait Charles Enderlin[11], dans Télérama notamment.

Le 27 février 2008, l’audience d’appel a eu lieu devant la 11e chambre de la Cour d’appel de Paris. Un rapport balistique[12], remis à la Cour le 19 février 2008, va dans le sens de la partie appelante.

Le 12 mai 2008, le cabinet d’avocats "Israel Law Center – Shurat ha-Din" (Tel Aviv) a demandé à la Cour Suprême de l’État d’Israël la révocation des accréditations de Charles Enderlin et de Talal Abou Rahma[13].

Le 21 mai 2008, la présidente de la Cour d’Appel de Paris, Madame Laurence Trébucq a relaxé Philippe Karsenty, directeur du site Web Media-Ratings. Selon la Metula News Agency[14], l’audience a duré moins de deux minutes, la décision n’ayant pas été explicitée. Vers la fin du journal de 20h sur France 2, le jour même, David Pujadas a présenté le jugement en affirmant que la Cour d'Appel avait "reconnu la diffamation mais accordé le bénéfice de la bonne foi à l'auteur de ces propos diffamatoires" et annoncé que la chaîne "a décidé de se pourvoir en Cassation". Lors de ce communiqué de 3 secondes, France 2 a réaffirmé qu'al-Durah avait été tué au cours de la scène filmée par France 2 mais pas que les tirs étaient d'origine israélienne, contrairement à son accusation originale. Dans son commentaire du même jour sur le site Pajamas Media[15], Philippe Karsenty présente cette décision comme une victoire de la liberté de penser par soi-même face à la propagande, demande à France 2 de "reconnaître qu'elle a créé et continue de perpétuer la pire diffamation antisémite de notre époque" et affirme qu'il est de la responsabilité du Gouvernement et au final du Président de la République, qui sont les plus hauts dirigeants de France 2, de révéler la vérité. Le texte de l'arrêt, mis en ligne par Richard Landes le 24 mai[16], montre que le tribunal a rejeté "l'exception de vérité" (invoquée par Philippe Karsenty) parce que démontrer que le reportage était faux ne peut suffire à démontrer "le fait d'avoir sciemment diffusé un "faux reportage""[17] et la reconnaissance que Philippe Karsenty a "exercé de bonne foi son droit de libre critique" sans avoir dépassé les limites de la liberté d'expression, considérant que les éléments de l'enquête "constituent une base factuelle suffisante pour que les propos litigieux, souvent proches d'un jugement de valeur, aient pu être tenu par l'auteur de l'article et du communiqué"[18].

[modifier] Liens externes

[modifier] Liens soutenant la version de la chaîne ou en soutien au journaliste Charles Enderlin

[modifier] Liens soutenant la version d’une manipulation de la chaîne

[modifier] Liens vers des centaines d'articles traitant de l'affaire

Du côté de la presse "alter/media libres/critique media":

[modifier] Documentation

Juridique :

texte intégral de l'arrêt de la cour d'appel acquittant P. Karsenty le 21 mai 2008

copie en PDF de l'original de l'arrêt de la cour d'appel acquittant P. Karsenty le 21 mai 2008


Documents vidéos de référence :

le reportage diffusé sur France 2 le 30 septembre 2000

les 18 minutes de rushes de France 2, les 9 premières minutes

les 18 minutes de rushes de France 2, les 9 dernières minutes

images présentées à la cour par C. Enderlin

blog Charles Enderlin sur Al Dura images et textes


Autres actions juridiques :

France 2 contre Desinfo pour avoir publié un communiqué de la Mena : relaxe partielle de Desinfo.

France 2 contre le webmaster de Voxdei pour avoir publié un communiqué de la Mena : condamné avec sursis.


Initiatives citoyennes :

AC médias lance la pétition dite des 4000 pour que les rushes soient communiqués au public.

Serge Farnel dépose en vain en 2004 2 recours en conseil d'Etat pour demander à France Télévisions de rectifier son information attribuant, avec certitude, l’origine des tirs qui auraient touché Mohamed Al Dura aux forces israéliennes, en mettant cette annonce au conditionnel. (Ni la chaîne, ni le CSA n'avaient répondu à ses courriers).

charte de France télévision

[modifier] Notes

  1. c.f. entre autres, ce reportage de CNN.
  2. http://www.infolive.tv/web_chapter.php?chgLan=1&num=2095&content=7
  3. Liste des associations cautionnant ce prix, beaucoup d’entre-elles, mais pas toutes sont juives : ABSI - Keren Or (Association pour le bien-être du soldat israélien), AJGE (Association des jeunes juifs des grandes écoles), Amitiés judéo-chrétiennes de Boulogne, Amitiés judéo-chrétiennes de Toulouse, Association France-Israël, Avocats sans frontières, Centre Simon Wiesenthal, Cercle d’études hébraïques de Loire-Atlantique, CIMO (Comite information Moyen-Orient) Comité mondial pour la justice et la paix Forum citoyen juif, G2PI, HEVEL (Association internationale d’aide aux victimes de la violence), Ligue de défense juive (French branch of Jewish Defense League founded by Meir Kahane), Ligue contre la désinformation, Maccabi-inter Créteil Maccabi-inter Sarcelles MIGDAL, SASSOUN (Association d’amitié du peuple arménien avec le peuple juif), SIONA, TASK FORCE, UPJF (Union des patrons juifs de France).
  4. Prix de la désinformation. Consulté le 3 mai 2008
  5. ACMEDIAS : Observatoire de l’information et des medias
  6. Archives
  7. Affaire Al-Dura : la bonne et la mauvaise presse selon AcMedias, Menahem Macina
  8. Media-Ratings : la Première Agence de Notation des Médias
  9. Charles Enderlin et France 2 gagnent leur procès, Le Monde, 20 octobre 2006
  10. Guysen.com - Affaire al-Dura
  11. Affaire Enderlin / Al Dura
  12. Rapport établi[pdf] par Jean-Claude Schlinger.
  13. http://www.menapress.com/article.php?sid=2055 Menapress : Vipères lubriques (1ère partie) - Par Stéphane Juffa (14 mai 2008)
  14. Scoop: La Cour d’Appel de Paris relaxe Karsenty (info # 012105/8)
  15. "French Court Vindicates Al-Dura Hoax Critic" May 21, 2008 - by Philippe Karsenty
  16. Texte de l'arrêt du 21 mai 2008 de la Cour d'Appel de Paris
  17. Page 8 de l'Arrêt du 21 mai 2008 : "Qu'en faisant valoir que ses offres de preuves établiraient "un montage douteux, largement contesté à la date de diffusion des propos incriminés", le prévenu ne peut prétendre démontrer le fait d'avoir sciemment diffusé un "faux reportage", tant il est vrai que la première imputation ne constitue au mieux qu'un diminutif de l'imputation poursuivie;"
  18. Page 12 de l'Arrêt du 21 mai 2008