Massacre de la Saint-Barthélemy

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Le Massacre de la Saint-Barthélemy, d'après François Dubois
Le Massacre de la Saint-Barthélemy, d'après François Dubois

Le massacre de la Saint-Barthélemy est le massacre perpétré à Paris par les catholiques sur les protestants le 24 août 1572, jour de la Saint-Barthélemy. Ce massacre s'est prolongé dans la capitale pendant plusieurs jours, puis s'est étendu à plus d'une vingtaine de villes de province durant les semaines suivantes.

Cet épisode tragique des Guerres de religion résulte d'un enchevêtrement complexe de facteurs multiples, aussi bien religieux et politiques que sociaux. Il est la conséquence des déchirements militaires et civils de la noblesse française entre catholiques et protestants, notamment de la vendetta entre le clan des Guise et celui des Châtillon-Montmorency. Il est le résultat d'une sauvage réaction populaire, ultra-catholique et hostile à la politique royale d'apaisement. Il reflète également les tensions internationales entre les royaumes de France et d'Espagne, avivées par l'insurrection aux Pays-Bas.

Pendant longtemps, la tradition historiographique a fait du roi Charles IX et de sa mère Catherine de Médicis les principaux responsables du massacre. Faute de sources, les historiens se partagent encore aujourd'hui sur le rôle exact de la couronne.

Sommaire

[modifier] Contexte du massacre

Le massacre de la Saint-Barthélemy se place à la suite d'une série d'événements dont il est la conséquence :

[modifier] Une paix et un mariage impopulaires

La paix de Saint-Germain met fin à trois années de terribles guerres civiles entre catholiques et protestants. Cette paix est précaire car les catholiques les plus intransigeants ne l'acceptent pas. Le retour des protestants à la cour de France les choque, mais la reine-mère Catherine de Médicis et son fils le roi Charles IX sont décidés à ne pas laisser la guerre reprendre. Conscients des difficultés financières du royaume, ils défendent la paix et laissent Gaspard de Coligny, le chef des protestants, revenir dans le conseil royal. Pour concrétiser la paix entre les deux partis religieux, Catherine de Médicis projette de marier sa fille Marguerite de Valois avec le prince protestant Henri de Navarre, futur Henri IV. Le mariage princier est prévu le 18 août 1572. Il n'est accepté ni par les catholiques intransigeants, ni par le pape. Celui-ci et le roi d'Espagne, Philippe II, condamnent vigoureusement la politique de la reine-mère.

[modifier] Une ville sous tension

Le Louvre d'Henri II
Le Louvre d'Henri II

Le mariage occasionne la présence à Paris d'un très grand nombre de gentilhommes protestants venus escorter leur prince. Or, Paris est une ville farouchement anti-huguenote. Les Parisiens, catholiques à l'extrême, n'acceptent pas leur présence. Du fait du martèlement des prédicateurs, capucins au premier chef, le mariage d'une princesse de France avec un protestant leur est une horreur. Le Parlement de Paris lui-même décide de bouder la cérémonie du mariage. Le peuple parisien est très remonté. En outre, les récoltes ont été mauvaises. Les hausses des prix et le luxe déployé à l'occasion des noces royales accentuent la haine du peuple.

La cour est elle-même très tendue. Catherine de Médicis n'a pas obtenu l'accord du pape pour célébrer ce mariage exceptionnel. Par conséquent, les prélats français hésitent sur l'attitude à adopter. Il faut toute l'habileté de la reine-mère pour convaincre le cardinal de Bourbon à unir les époux. Par ailleurs, les rivalités entre les grandes familles réapparaissent. Les Guise ne sont pas prêts à laisser la place aux Montmorency. François duc de Montmorency et gouverneur de Paris, ne parvient pas à contrôler les troubles urbains. Cédant face au danger parisien, il préfère quitter la ville quelques jours après le mariage.

[modifier] La tentative d'assassinat de Coligny

Gravure représentant l'attentat perpétré contre Coligny.
Gravure représentant l'attentat perpétré contre Coligny.

Le 22 août 1572, un attentat par tir d'arquebuse est perpétré contre Gaspard de Coligny. Si aujourd'hui, il est impossible de connaître l'auteur exact de cet attentat, l'historiographie a retenu trois noms :

  • Les Guise : ce sont les suspects les plus probables. Meneurs du parti catholique, ils veulent venger la mort de François de Guise, assassiné dix ans auparavant, sur l'ordre de Coligny, selon eux. Le coup de feu tiré sur l'amiral est tiré depuis une maison appartenant à un de leurs familiers. Le cardinal de Lorraine et le duc d'Aumale et la duchesse douairière de Guise Antoinette sont les membres de la famille les plus déterminés. Néanmoins, certains historiens pensent que les Guise étaient beaucoup trop soucieux de revenir en grâce auprès du roi pour commettre l'imprudence de l'irriter contre eux.
  • Le duc d'Albe gouverneur des Pays-Bas au nom de Philippe II : Coligny projette d'intervenir militairement aux Pays-Bas pour les libérer du joug espagnol, suivant l'alliance qu'il avait contractée avec les Nassau. Au mois de juin, il a envoyé plusieurs troupes clandestines au secours des protestants de Mons, assiégés par le duc d'Albe. Suite au mariage de Henri de Navarre et de Marguerite de Valois, Coligny espère enfin déclencher la guerre contre l'Espagne afin de consolider davantage l'union entre catholiques et protestants français. Aux yeux des Espagnols, l'amiral représente donc une menace. Toutefois, la correspondance de don Diego de Zuñiga, ambassadeur espagnol en France, du duc d'Albe ou de Philippe II ne permet pas de prouver l'implication de la couronne espagnole dans l'attentat contre le chef huguenot. Au contraire, Don Diego de Zuñiga juge dans ses dépêches que la présence de l'amiral aux côtés de Charles IX constitue plutôt un frein à la guerre ouverte aux Pays-Bas : selon l'ambassadeur, la couronne française ne « jetterait pas le masque » et continuerait à pratiquer une guerre « couverte » contre l'Espagne afin de ne pas renforcer inconsidérément l'influence de Coligny en le plaçant officiellement à la tête de troupes royales[1].
  • Catherine de Médicis : selon la tradition, Coligny aurait acquis trop d'influence sur le jeune roi. Charles IX en aurait fait son favori en l'appelant familièrement « mon père ». Inévitablement, la reine mère en aurait conçu de la « jalousie » ainsi qu'une vive crainte de voir son fils entraîner le royaume dans une guerre aux Pays-Bas contre la puissance espagnole, conformément aux conseils politiques de l'amiral. Cependant, la plupart des historiens contemporains trouvent difficile de croire en la culpabilité de Catherine de Médicis au vu de ses efforts accomplis pour la paix intérieure et la tranquillité de l'État. Par ailleurs, il n'est pas prouvé que Coligny exerçât une influence décisive sur Charles IX.
  • Enfin, il reste l'hypothèse d'un acte isolé, commandité par un personnage relativement peu important, proche du milieu guisard et pro-espagnol.

[modifier] Déroulement du massacre

[modifier] Une justice exceptionnelle

La tentative d'assassinat de Coligny est l'événement déclencheur de la crise qui va mener au massacre. Les protestants protestent contre cet attentat contre leur chef le plus respecté, et réclament vengeance. La capitale est au bord de la guerre civile entre les partisans des Guise et les huguenots. Pour rassurer Coligny et les protestants, le roi vient avec sa cour au chevet du blessé, et lui promet justice. Devant la reculade du roi face aux protestants, les Guise font mine de quitter la capitale laissant le roi et la reine mère dans le plus grand désarroi. Charles IX et Catherine de Médicis prennent peur de se retrouver seul avec les protestants. Depuis la surprise de Meaux en 1567, la reine mère a toujours eu la plus grande appréhension à l'égard des protestants. Pendant le repas de la reine-mère, des protestants viennent bruyamment lui réclamer justice.

Le soir même du 23 août, le roi aurait tenu une réunion avec ses conseillers pour décider de la conduite à suivre. Il s'y trouvaient la reine-mère, le duc d'Anjou, le garde des sceaux René de Birague, le maréchal de Tavannes, le baron de Retz, et le duc de Nevers. Il n'existe aucun document permettant d'affirmer avec certitude que la décision d'abattre les principaux chefs militaires protestants ait été prise lors de cette réunion. Vu les circonstances, le conseil décida de procéder à une justice extraordinaire et l'élimination des chefs protestants fut décidée. Il s'agissait de mettre hors d'état de nuire tous les capitaines de guerre protestants. Le conseil épargna les jeunes princes du sang, le roi de Navarre et le prince de Condé.

[modifier] La nuit de la Saint-Barthélemy

Le massacre de la Saint-Barthélemy par Giorgio Vasari, 1572-1573
Le massacre de la Saint-Barthélemy par Giorgio Vasari, 1572-1573

Peu de temps après cette décision, les autorités municipales de Paris furent convoquées. Il leur fut ordonné de fermer les portes de la ville et d'armer les bourgeois afin de prévenir toute tentative de soulèvement. Il est aujourd'hui difficile de déterminer la chronologie des évènements et de connaître le moment exact où commença la tuerie. Un signal fut donné, semble-t-il, par la sonnerie de matines (au sens strict, entre minuit et l'aube), à la cloche de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois, proche du Louvre et paroisse des rois de France. Auparavant, les nobles protestants furent chassés du palais du Louvre puis massacrés dans les rues. L'amiral de Coligny fut tiré de son lit, achevé et défenestré. Les corps sont traînés dans les rues et rassemblés dans la cour du Louvre[2].

Au petit matin, le peuple, découvrant le massacre, se mit à pourchasser les protestants dans toute la ville. Le massacre dura plusieurs jours, malgré les tentatives du roi pour le faire arrêter. Les étudiants étrangers, les libraires, les changeurs sont massacrés par le peuple, encouragé par les prêtres[3] ; les cadavres sont jetés dans la Seine. Celui de Coligny, retrouvé par la foule, est émasculé, plongé dans la Seine, où il pourrit trois jours avant d’être pendu au gibet de Montfaucon (crime rituel selon Mandrou et Estèbe).

Au cimetière des Innocents, le dimanche 24 août 1572 à midi, un buisson d'aubépine, desséché depuis des mois, se met à reverdir près d'une image de la Vierge. À la rumeur du prodige, les gavroches en transe accourent et des femmes sont hystériques, car ils l'interprètent comme un signe de la bénédiction divine à ces multiples meurtres. [4]

Le massacre des protestants ne fut pas général. Certains d'entre eux parvinrent à se cacher chez des amis catholiques et d'autres trouvèrent refuge à l'hôtel de l'ambassadeur d'Angleterre Francis Walsingham, protégé par les gardes du roi, ou encore à l’hôtel de Guise et l'hôtel de Nemours, où la duchesse de Ferrare Renée de France, princesse de sang protestante s’est réfugiée avec une partie de sa suite. Enfin, les familiers de la famille royale comme la duchesse d'Uzès, amie de Catherine de Médicis et les princes, les princesses de sang et quelques membres de leur suite, trouvèrent un abri sûr derrière les murs du Louvre.

Les chefs protestants présents à Paris le 24 août qui survécurent sont surtout ceux qui logeaient hors de la ville, dans le faubourg Saint-Germain.

[modifier] La saison des Saint-Barthélemy

Quoi qu'il en fût, le 26 août, le roi tint un lit de justice où il endossa la responsabilité de l'exécution des chefs de guerre protestants. Il déclara alors qu'il avait voulu :

«  prévenir l'exécution d'une malheureuse et détestable conspiration faite par ledit amiral, chef et auteur d'icelle et sesdits adhérents et complices en la personne dudit seigneur roi et contre son État, la reine sa mère, MM. ses frères, le roi de Navarre, princes et seigneurs étant près d'eux.  »

Mais le massacre de la Saint-Barthélemy fut suivi par bien d'autres : il dure toute une saison, selon l’expression de Michelet. Averties par des témoins, des courriers de commerçants, encouragées par des agitateurs comme le comte de Montsoreau dans le val de Loire[5], les villes de province déclenchèrent leurs propres massacres. Le 25 août, la tuerie atteint Orléans (où elle aurait fait un millier de victimes) et Meaux ; le 26, La Charité-sur-Loire ; le 28 et 29, à Angers et Saumur ; le 31 août, à Lyon ; le 11 septembre, à Bourges ; le 3 octobre, à Bordeaux ; le 4 octobre à Troyes, Rouen, Toulouse ; le 5 octobre, à Albi, Gaillac ; Bourges, Romans, Valence, Orange, furent aussi touchées. On manque de sources pour reconstituer la violence dans d'autres villes.

La réaction des autorités est variable : parfois elles encouragent les massacres, comme à Meaux où c’est le procureur du roi qui en donne le signal[6], ou encore à Bordeaux (le massacre est organisé par le Parlement), Toulouse (le duc de Joyeuse, gouverneur, y est très favorable)[7]. Assez souvent, elles tentent de protéger les huguenots, en les mettant en prison (au Mans, à Tours). Cela ne marche pas toujours, et les prisons sont forcées et les protestants y sont massacrés (comme à Lyon, Rouen, Albi). Les gouverneurs militaires contredisent ceux qui prétendent que le roi ordonne et approuve les massacres (ce qui ne suffit pas toujours à les empêcher).

Au total, le nombre de morts est estimé à 2 000 à Paris, et de 5 000 à 10 000 dans toute la France.

Médaille commémorative à l'effigie du pape Grégoire XIII.
Médaille commémorative à l'effigie du pape Grégoire XIII.

En apprenant la nouvelle du massacre, le pape Grégoire XIII fit chanter un Te Deum et une médaille à l'effigie du souverain pontife fut frappée afin de célébrer l'événement. Grégoire XIII commanda également au peintre Vasari une série de fresques relatant le massacre (ci-dessus, un détail de la peinture toujours présente dans la Sala Regia au Vatican). Philippe II d'Espagne fit part de sa satisfaction et aurait déclaré : « C'est le plus beau jour de ma vie ». Élisabeth Ire d'Angleterre prit le deuil et fit faire le pied de grue à l'ambassadeur français avant de paraître accepter, pour raisons diplomatiques, la thèse du complot huguenot et du « massacre préventif ».

Le massacre de la Saint-Barthélemy déclencha la quatrième guerre de religion.

[modifier] Interprétation historiographique

[modifier] Tradition historiographique

Le massacre de la Saint-Barthélemy est devenu très tôt un enjeu historiographique. Devant les contradictions de la politique royale, chacun y est allé de son interprétation. Chez les protestants, on incrimine le roi et la reine-mère coupables à leurs yeux de n’avoir pas su protéger les huguenots, voire d'avoir ordonné le massacre. Des écrivains comme d’Aubigné n’hésitent pas à exagérer les chiffres et à transformer l’évènement comme résultant du seul fait religieux. Du côté des protagonistes catholiques, on cherche à se disculper en rejetant la faute sur l’autre, c’est le cas du maréchal de Saulx-Tavannes, ou encore de Marguerite de Valois, qui dit n'avoir jamais rien su. En réalité, la complexité et la rapidité du drame fut telle que personne n’a jamais su vraiment saisir les différentes phases de son déroulement (De Thou). En revendiquant –tardivement– le massacre, Charles IX en est devenu le principal responsable devant la postérité. Une autre interprétation schématique du massacre consiste à n'en retenir que l'aspect religieux. Sous la Révolution française, une pièce de théâtre qui le met en scène connaît un grand succès : Charles IX ou la Saint Barthélemy (1790) de Marie-Joseph Chénier. L’époque est à la déchristianisation et le massacre de la Saint-Barthélemy est utilisé pour vitupérer le fanatisme catholique. Au XIXe siècle, Alexandre Dumas pérennise cette tradition en romançant l’événement.

Aujourd'hui, certaines traditions historiographiques sont remises en cause comme la fameuse phrase prononcée par le roi, le soir du 23 août. Il se serait écrié de colère, sous les conseils répétitifs de sa mère, excédé : « Eh bien soit ! Qu’on les tue ! Mais qu’on les tue tous ! Qu’il n’en reste plus un pour qu’on ne puisse me le reprocher ! ».

[modifier] Nouvelle orientation historiographique

Si aujourd'hui, les historiens dissocient l'exécution des chefs protestants du massacre populaire proprement dit, ils débattent encore des responsabilités de la famille royale. L'enjeu est de connaître le degré de leur implication ou de leur inaction dans l'organisation du massacre.

  • L'interprétation traditionnelle, soutenue par Janine Garrisson, fait de Catherine de Médicis et de ses conseillers catholiques les responsables principaux. Paniqués à l'idée d'être découverts d'avoir commandité l'attentat de Coligny et de subir la vengeance des protestants, ils auraient forcé la main à un roi hésitant et velléitaire pour décider l'exécution des principaux chefs militaires. Cette interprétation depuis longtemps acquise est aujourd'hui peu à peu abandonnée, y compris Janine Garrisson qui l'avait reprise.
  • Denis Crouzet replace le massacre dans le contexte idéologique de l'époque : le néoplatonisme. Charles IX et Catherine de Médicis n'ont pu avoir le dessein d'assassiner Coligny, car c'eût été contraire à leur désir de maintenir l'harmonie et la concorde autour de la personne royale. C'est une fois que l'assassinat consume la rupture et que la guerre civile menace de nouveau l'équilibre, que la position du roi et de la reine mère change. Par crainte de voir la guerre reprendre et la montée d'une insurrection protestante, ils auraient choisi d'étouffer celles-ci dans l'œuf. Le principe néo-platonique cher à Catherine de Médicis qui tend à conserver l'unité autour de la personne du roi, les a poussés à sacrifier les principaux chefs protestants et à consentir malgré eux au massacre.
  • Pour Jean-Louis Bourgeon, ce sont les Parisiens, les Guise et les agents du roi Philippe II d'Espagne qui sont les véritables responsables de l'attentat et du massacre. Charles IX et Catherine de Médicis y seraient absolument étrangers. L'historien souligne l'état quasi-insurrectionnel de la ville au moment du mariage. En décembre 1571, plusieurs maisons protestantes avaient déjà été pillées. Les Guise, très populaires à Paris, ont profité de cette situation pour faire pression sur le roi et la reine-mère. Charles IX aurait donc été contraint de précéder la future émeute, qui aurait été le fait des Guise, de la milice bourgeoise et du peuple.
  • Selon Thierry Wanegffelen, l'un des principaux responsables de la famille royale dans cette affaire est le duc d'Anjou. À la suite de l'attentat manqué contre l’amiral de Coligny, qu’il attribue aux Guise et à l'Espagne, les conseillers italiens de Catherine de Médicis ont sans doute préconisé en Conseil royal le meurtre d'une cinquantaine de chefs protestants pour profiter de l'occasion d'éliminer le danger huguenot, mais la reine mère et le roi s'y sont très fermement opposés. Cependant Henri d'Anjou, lieutenant général du royaume, présent à cette séance du Conseil, a pu voir dans l'accomplissement de ce crime d’État une bonne occasion de s'imposer au gouvernement. Il a pris contact avec un autre jeune homme ambitieux, en mal d'autorité et de pouvoir, le duc Henri de Guise (dont l'oncle, le clairvoyant cardinal Charles de Lorraine était alors retenu à Rome), et avec les autorités parisiennes. La Saint-Barthélemy parisienne est issue de cette conjonction d'intérêts, et elle s'explique d'autant mieux que les hommes du duc d'Anjou agissaient au nom du lieutenant général du royaume, donc dans les mentalités de l'époque, au nom du roi. On comprend pourquoi, le lendemain du déclenchement du massacre, Catherine de Médicis ait fait condamner par déclaration royale de Charles IX les crimes, et ait menacé les Guise de la justice royale. Mais lorsque Charles IX et sa mère ont appris l'implication du duc d'Anjou, ils se sont trouvés liés à son entreprise, si bien qu'une seconde déclaration royale, tout en demandant la fin des massacres, en prête l'initiative à la volonté de Charles IX de prévenir un complot protestant. Dans un premier temps le coup d’État de Henri d'Anjou est un succès, mais Catherine de Médicis se serait ingénié à l'écarter du pouvoir en France : elle l'envoie avec l'armée royale s'enliser devant La Rochelle et le fait élire roi de Pologne.

[modifier] Chronologie

1571
  • 11 octobre : bataille de Lépante
  • décembre : émeute parisienne anti-protestante pour empêcher la destruction de la croix Gastine, ordonnée par le roi. Cette croix avait été érigée pour commémorer la mort des frères Gastine, deux marchands protestants : ils avaient été assassinés et leur maison incendiée durant la dernière guerre.
1572
  • janvier : arrivée à Blois du légat Alessandrino chargé par le pape de faire entrer la France dans la ligue chrétienne et proposer un prince du Portugal pour Marguerite de France.
  • arrivée à Blois de Sir Thomas Smith ambassadeur extraordinaire de l'Angleterre pour faire entrer la France dans la ligue protestante
  • 21 février: refus officiel de Charles IX d'entrer dans la ligue chrétienne du pape
  • 3 mars : arrivée à Blois de Jeanne d’Albret et de Louis de Nassau
  • 11 avril : signature du contrat de mariage entre Marguerite et Henri de Navarre. La dot est de 300 000 écus d'or.
  • 19 avril : signature du traité d'alliance entre la France et l'Angleterre. Les deux pays doivent se porter mutuellement secours contre l'Espagne.
  • 1er mai : mort du pape Pie V
  • 24 et 29 mai : prise de Mons et de Valenciennes par Louis de Nassau. Charles IX et Catherine de Médicis quittent les bords de la Loire pour se rendre à Paris.
  • 5 juin : arrivée du roi et de toute la cour à Paris
  • 9 juin : mort de Jeanne d'Albret
  • préparatifs de la guerre contre l'Espagne
  • 25 juin : grand conseil au château de Madrid (bois de Boulogne) pour décider de la rupture avec l'Espagne, indécision et départ du roi pour la chasse en région parisienne
  • 8 juillet : entrée de Navarre à Paris
  • 17 juillet : défaite de Genlis, envoyé par Coligny à la tête de 4 000 hommes pour secourir Nassau enfermé dans Mons
  • 4 août : retour à Paris de Catherine de Médicis et d'Henri d'Anjou, inquiets des projets militaires des protestants restés dans la ville.
  • 9 août : grand conseil où Catherine de Médicis résiste à Coligny et à son parti belliciste
  • 10 août : départ de Catherine de Médicis pour Montceaux où sa fille Claude est tombée malade et départ des protestants pour Blandy (Melun) pour les noces du prince de Condé avec Marie de Clèves
  • dimanche 17 août : fiançailles de Henri de Navarre et de Marguerite de France
  • lundi 18 août : Mariage à Notre-Dame de Paris et réception au Palais de la Cité
  • mardi 19 août : bal chez le duc d'Anjou et soirée au Louvre
  • mercredi 20 août : pantomime-tournoi donnée à l'hôtel de Bourbon
  • jeudi 21 août : tournoi sur la place du Louvre
  • vendredi 22 août : attentat manqué contre Coligny (un peu avant midi) et visite du roi au chevet de l'amiral (vers 14 h)
  • samedi 23 août : dans la nuit, lancement du massacre des chefs protestants
  • dimanche 24 août : début du massacre général
  • mardi 26 août : déclaration de Charles IX devant le parlement

[modifier] Voir aussi

[modifier] Personnalités présentes à Paris durant les événements

La famille royale
* catholiques
* protestante
* Les princes du sang protestants
Les protestants
Les catholiques

[modifier] Massacres similaires

Dans le cadre de guerres de religion :

Autres :

[modifier] Bibliographie sur la Saint-Barthélemy

  • Pierre de Vaissière, Récits du temps des troubles (XVIe siècle). De quelques assassins, Paris, Émile-Paul Éditeur, 1912. (chapitre II. « "Le tueur du roy" : Charles de Louviers, seigneur de Maurevert », p.93-156 ; chapitre III. « Jean Yanowitz, dit Besme, meurtrier de Coligny », p.157-195).
  • Lucien Romier, « La Saint-Barthélemy. Les événements de Rome et la préméditation du massacre », in Revue du seizième siècle, 1, 1913.
  • Janine Garrisson :
    • Tocsin pour un massacre : la saison des Saint-Barthélemy (sous le nom de Janine Estèbe). Éditions d'Aujourd'hui, collection « Les Introuvables », 1975. 216 p. Reproduction en fac-simile de l'édition de 1968, parue aux éditions Le Centurion, en collection « Un Brûlant passé ».
    • 1572, La Saint-Barthélemy, Bruxelles, Complexe, 1987.
  • Denis Crouzet :
    • Les Guerriers de Dieu. La violence au temps des troubles de religion vers 1525-vers 1610, Champvallon, 1990 (ISBN 2876730944).
    • La nuit de la Saint-Barthélemy. Un rêve perdu de la Renaissance, Fayard, coll. « Chroniques », 1994 (ISBN 2213592160).
    • « La nuit de la Saint-Barthélemy : confirmations et compléments », in Le second ordre : l'idéal nobiliaire. Hommage à Ellery Schalk, s.d. Chantal Grell et Arnaud Ramière de Fortanier, Paris, Presses de l'Université de Paris-Sorbonne, coll. « Mythe, Critique et Histoire », 1999 (p.55-81) (ISBN 2-84050-137-6).
    • Le haut cœur de Catherine de Médicis. Une raison politique aux temps de la Saint-Barthélemy, Albin Michel, coll. « Histoire », 2005 (ISBN 2226158820).
  • Jean-Louis Bourgeon :
    • « Les légendes ont la vie dure : à propos de la Saint-Barthélemy et de quelques livres récents », in Revue d'histoire moderne et contemporaine, tome XXXIV, janvier-mars 1987, Société d'histoire moderne et contemporaine (p.102-116).
    • « Pour une histoire, enfin, de la Saint-Barthélemy », in Revue historique, 113e année, tome CCLXXXII, juillet-septembre 1989, Paris, Presses universitaires de France (p.83-142).
    • « La fronde parlementaire à la veille de la Saint-Barthélemy », in Bibliothèque de l'école des Chartes, 1990, vol. 148, n°148-1 (p.17-89).
    • L'assassinat de Coligny, Genève, Droz, 1992.
    • Charles IX devant la Saint-Barthélemy, Genève, Droz, coll. « Travaux d'histoire éthico-politique », 1995 (ISBN 2600000909).
  • Donald R. Kelley, « Martyrs, Myths, and the Massacre : The Background of St. Bartholomew », in The American Historical Review, vol.77, n°5, décembre 1972, p.1323-1342.
  • Nicola Mary Sutherland, The Massacre of St Bartholomew and the European Conflict, New York, Barnes and Noble, 1973. Traduction partielle en français : « Le massacre de la Saint-Barthélemy : la valeur des témoignages et leur interprétation » in Revue d’histoire moderne et contemporaine, tome XXXVIII, octobre-décembre 1991 (p.529-554).
  • La Saint-Barthélemy dans la littérature française, Revue d'histoire littéraire de la France, septembre-octobre 1973, 73e année, N°5, Paris, Armand Colin.
  • Alfred Soman (s.d.), The Massacre of St. Bartholomew, Reappraisals & Documents, La Hague, Martinus Nijhoff, 1974.
  • Actes du colloque "L'amiral de Coligny et son temps" (Paris, 24-28 octobre 1972), Paris, Société de l'histoire du protestantisme français, 1974. 796 p. (Annexe séparée de cartes historiques, 10 p.). Divers articles :
    • Robert McCune Kingdon, Quelques réactions à la Saint-Barthélemy à l'extérieur de la France (pp.191-204)
    • Henri Dubief, L'Historiographie de la Saint-Barthélemy (p.351-365)
    • Amedeo Molnar, Réactions à la Saint-Barthélemy en Bohême (p.367-376)
    • Marguerite Soulié , La Poésie inspirée par la mort de Coligny : exécration et glorification du héros (p.389-405)
    • Janusz Tazbir, La Nuit de la Saint-Barthélemy, ses échos en Pologne (p.427-433)
    • Janine Estèbe, Les Saint-Barthélemy des villes du Midi (p.717-729)
  • Philip Benedict, « The Saint Bartholomew's Massacres in the Provinces », in The Historical Journal, vol.21, n°2, juin 1978, pp.205-225.
  • Robert McCune Kingdon, Myths about the St. Bartholomew's Day Massacres, 1572–1576, Londres, Harvard University Press, 1988.
  • James R. Smither, « The St. Bartholomew's Day Massacre and Images of Kingship in France: 1572-1574 », in Sixteenth Century Journal, vol.22, n°1, printemps 1991, p.27-46.
  • Barbara B. Diefendorf :
    • Beneath the Cross: Catholics and Huguenots in Sixteenth-Century Paris, New York, Oxford University Press, 1991.
    • « La Saint-Barthélemy et la bourgeoisie parisienne », in Histoire, économie et société, 1998, 17e année, n°3, L'État comme fonctionnement socio-symbolique (1547-1635), (p.341-352).
    • The Massacre of St. Bartholomew's Day : A Brief History With Documents, Bedford/St Martins, 2008.
  • Marc Venard, « Arrêtez le massacre ! », in Revue d’histoire moderne et contemporaine, 39, octobre-décembre 1992 (p.645-661).
  • Thierry Wanegffelen, Catherine de Médicis. Le pouvoir au féminin, Payot, 2005.
  • Arlette Jouanna, La Saint-Barthélemy : Les mystères d'un crime d'État, 24 août 1572, Paris, Gallimard, collection « Les journées qui ont fait la France », 2007.

[modifier] Représentations artistiques

commons:Accueil

Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur le massacre de la Saint-Barthélemy.

[modifier] Sources de l’article

[modifier] Notes

  1. Arlette Jouanna, La Saint-Barthélemy : Les mystères d'un crime d'État, 24 août 1572, Paris : Gallimard, 2007, p. 90-91 et p.114.
  2. Pierre Miquel, Les Guerres de religion, Club France Loisirs, 1980, (ISBN 27274207858), p 284
  3. Pierre Miquel, Les Guerres de religion, Club France Loisirs, 1980, (ISBN 27274207858), p 285
  4. [(http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-781732,36-941606,0.html]
  5. Pierre Miquel, Les Guerres de religion, Club France Loisirs, 1980, (ISBN 27274207858), p 286
  6. Pierre Miquel, Les Guerres de religion, Club France Loisirs, 1980, (ISBN 27274207858), p 286
  7. Pierre Miquel, Les Guerres de religion, Club France Loisirs, 1980, (ISBN 27274207858), p 287-288

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