Légion des volontaires français contre le bolchevisme

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Ne pas confondre avec la légion française des combattants
Affiche de recrutement de la LVF
Affiche de recrutement de la LVF
Affiche de propagande de la LVF
Affiche de propagande de la LVF

La Légion des volontaires français contre le bolchévisme (dite Légion des volontaires français ou LVF), connue sous le nom Infanterieregiment 638 par les Allemands, est créée le 8 juillet 1941, 15 jours après le déclenchement de l’opération Barbarossa (l'invasion de l'URSS par l'Allemagne). Cette naissance est portée par une galaxie de partis collaborationnistes, notamment le RNP de Marcel Déat, le PPF de Jacques Doriot, et le MSR d'Eugène Deloncle. Elle est dissoute en 1944.

Sommaire

[modifier] La création

La LVF, association loi de 1901, était dirigée dans la Zone occupée par un Comité central chargé du recrutement, dont faisaient partie Eugène Deloncle, Jacques Doriot, Marcel Déat, Marcel Bucard, Pierre Constantini, Paul Chack et Pierre Clémenti, tandis que le recrutement dans la Zone libre était confié à un Comité d'actionMarseille), dirigé par Simon Sabiani. Un Comité d'honneur donnait une sorte de caution morale par des personnalités intellectuelles, figures éminentes de la collaboration, qui seront toutes condamnées après-guerre (à l'exception du cardinal Baudrillart, décédé) telles que : Jean Luchaire, Abel Bonnard, le cardinal Baudrillart, Georges Claude, Alphonse de Châteaubriant, ainsi que des dirigeants du Parti national breton[1].

Son organe de presse était Le Combattant européen, rédigé par Marc Augier.

L'initiative ne reçoit qu'un soutien du bout des lèvres du régime de Vichy, jusqu'à l'obtention du soutien de l'ambassadeur allemand Otto Abetz.

Le projet avait été envisagé auparavant par Jacques Benoist-Méchin, sous le nom de la « Légion tricolore », qui aurait été une unité spéciale de l'Armée française. La manœuvre échoue sous pression de l'ambassadeur allemand, Otto Abetz.

De son côté, Hitler accepte le concours de volontaires français avec beaucoup de réticence. Il refuse que la création de la LVF entraîne une quelconque obligation envers le gouvernement français et que son effectif dépasse les 15 000 hommes[2].

Sur les 100 000 combattants espérés au départ, seuls 12 000 s'enrôlent. Malgré la création de la Milice, la poignée de main lors de l'Entrevue de Montoire entre Philippe Pétain et Adolf Hitler, la déclaration de Pierre Laval « Je souhaite la victoire de l'Allemagne, parce que, sans elle, le bolchevisme s'installerait partout », le régime de Vichy était officiellement neutre dans le conflit mondial et restait rétif à tout ce qui pouvait déboucher sur une collaboration militaire. Vichy interdit ainsi aux officiers d'active de l'armée de s'engager dans la LVF. Pétain a cependant ouvertement déclaré sa sympathie pour l'initiative dans une lettre adressée en novembre 1941 à un officier de la LVF : « En participant à cette croisade dont l'Allemagne a pris la tête, acquérant ainsi de justes titres à la reconnaissance du monde, vous contribuez à écarter de nous le péril bolchevique. […] À la veille de vos prochains combats, je suis heureux de savoir que vous n'oubliez pas que vous détenez une part de notre honneur militaire »[3].

[modifier] Difficultés de recrutement

Une fois la LVF créée sur le papier, les partis collaborationnistes qui la composent en organisent le recrutement. Des bureaux sont ouverts en Zone libre et en Zone occupée.

La propagande s'empare du sujet et les partis donnent des chiffres abracadabrants. Déat parle de 10 000 volontaires inscrits le 16 Juillet 1941[4]. La presse et la radio ne sont pas en reste. Dans les faits le recrutement est extrêmement difficile. La population française est plus que réticente à l'idée de voir des soldats français combattre avec les Allemands. De plus les responsables allemands ne voient pas non plus d'un bon oeil ces soldats qu'ils ont sans peine écrasés en 1940…

Devant le peu de succès du recrutement auprès de l'armée d'active (l'armée d'armistice), on comprend aisément le peu d'enthousiasme des Allemands à investir dans cette opération qui nécessiterait de former des gens n'ayant aucune expérience au combat et manquant de discipline. C'est pourquoi les conditions de recrutement sont draconiennes et écartent les 2/3 des aspirants.

Face à cette situation, les partis réagissent en promettant monts et merveilles aux Français, comme la libération de deux prisonniers de guerre en échange d'un soldat à la LVF. La LVF donne aussi parfois lieu à de véritables escroqueries. En effet, l'engagement donnait le droit à une prime. Certains disparaissent dans la nature une fois l'argent touché, d'autres s'inscrivent plusieurs fois etc. Ces fraudes ne sont pas punissables comme des désertions car la LVF n'est pas une autorité militaire mais une association.

[modifier] Critères de recrutement et rémunération

Sur le plan administratif, il faut être Français de souche aryenne, avoir un casier judiciaire vierge. Il faut avoir entre 18 et 30 ans pour les soldats, jusqu'à 40 ans pour les officiers. Il faut avoir une excellente condition physique, mesurer au moins 1 m 60, avoir une bonne vision et une excellente dentition.

Les soldes sont réglées par l'Allemagne et elles sont les mêmes que dans l'armée allemande. Un soldat célibataire touche 1 200 francs (un ouvrier gagne en France environ 25 francs par jour travaillé[5]), 2 400 s'il est au front.

Un adjudant peut gagner 5 000 francs et un commandant 10 000 francs[6]. Ces soldes sont définies dans le guide Légion des Volontaires Français contre le Bolchevisme - Ce que tout Français doit savoir[7].

[modifier] Effectifs

Sur les 13 400 hommes qui se sont présentés pour s'engager tout au long de l'existence de la légion des volontaires français, 4 600 ont été refusé à la fameuse visite médicale (une mauvaise denture était un facteur éliminatoire), 3 000 ont été exclu pour diverses raisons, au total seuls 5 800 hommes ont été recrutés[8].

Plus globalement, les faibles effectifs de la LVF traduisent une difficulté profonde des Français des années sombres à l'engagement militaire : avec jamais plus de 6 500 combattants simultanément engagés, la France eut la plus faible contribution en volontaires de toute l'Europe collaborationniste, seules la Suisse et la Suède, pays neutres, en fournissant moins. À titre de comparaison, le collaborationniste Léon Degrelle leva plus de 20 000 volontaires belges, pour une population dix fois inférieure.

La LVF recruta un certain nombre de collaborationnistes convaincus (Jacques Doriot, Jean Mayol de Lupé), mais également une proportion considérable d'aventuriers, de marginaux, de repris de justice, quelques russes blancs, et même (mais de façon marginale) des anciens des Brigades internationales[9] en rupture avec le communisme. De nombreux cadres et soldats furent réformés ou chassés pour ivrognerie, vols ou incompétence. La qualité combative n'y gagna rien[10].

[modifier] Entraînement

La caserne nationale de la LVF se trouvait à Versailles (caserne de Borgnis-Desbordes). Ce fut là que lors du premier défilé de la LVF à peine constituée, le 27 août 1941, le résistant Paul Collette tira devant les caméras sur Pierre Laval et Marcel Déat, qu'il blessa tous deux. Aussitôt arrêté, il avouera qu'il s'était engagé uniquement pour réaliser cette action. Le geste, retentissant, eut lieu en présence des plus hauts dignitaires de la collaboration et d'éminents représentants des autorités allemandes.

Fait symbolique de la collaboration, c'est dans la caserne qui accueillait le premier défilé de la LVF que le drapeau français flotta pour la première fois depuis 1940[11].

La Wehrmacht se méfiait de ces soldats français, dont l'état-major était divisé entre divers mouvement politiques rivaux, et la troupe issue pour une partie de la pègre. On entendit le maréchal Walther von Brauchitsch, commandant en chef de la Wehrmacht proclamer qu'il utiliserait la LVF à décharger les patates[12]

Seule une moitié de ces recrues est retenue pour former le 638e régiment d'infanterie de la Wehrmacht basé au camp de Deba en Pologne. Il leur faut revêtir l'uniforme allemand, seul un insigne tricolore surmonté du mot « France » les différenciant du reste des troupes. Quelques volontaires vont préférer rompre leur engagement à ce moment là, dont Marcel Bucard, pour d'autres comme Edgar Puaud ce n'est pas un problème : « Oh ! Je le sais, on l'a traînée dans la boue. Elle porte l'uniforme "Feldgrau", cela suffit… Dites seulement aux Français que ceux qui se battent à l'Est sont de vrais Français qui se battent pour leur pays. »[13].

[modifier] Sur le front

Fin novembre, les deux premiers bataillons arrivent en Russie. Ils montent en première ligne le 1er décembre 1941 au sud du lac de Djoukova, à une soixantaine de kilomètres de Moscou. Ils sont décimés par les combats et surtout par le froid intense. Les survivants sont relevés le 7 décembre. La LVF se disloque : seuls quelques dizaines de rescapés reviendront en France.

Au printemps 1942, la LVF est reconstituée avec les rescapés de l'hiver et plusieurs centaines de volontaires. Elle ne sera plus engagée directement sur le front, mais participe à combattre les groupes de partisans de la région de Briansk et à des opérations de représailles massives contre les civils russes, aidant la Wehrmacht et la Waffen-SS à brûler et assassiner des villages entiers. Toutefois, à d'autres moments, comme au printemps 1943, les légionnaires français sont prudents et préfèrent adopter une sorte de modus vivendi tacite avec les redoutables partisans soviétiques.

Fin 1943, à un meeting qui se tient au Vel’ d’Hiv’, les membres de la LVF prètent serment à Adolf Hitler. Jacques Doriot est quant à lui décoré de la Croix de fer allemande pour sa campagne en Russie.

Le commandant Edgar Puaud dirige la LVF de septembre 1943 jusqu'à sa dissolution en juillet 1944. Son premier porte-drapeau, grièvement blessé au combat et mort à Paris des suites de ses blessures le 4 juillet 1943, Constantin Amilakvari, ancien adjudant-chef de la la Légion étrangère, est le frère du colonel Dimitri Amilakvari tué le 24 octobre 1942 sur le plateau d'El Himeimat, lors de la bataille d'El Alamein, à la tète de la 13eme DBLE. L'oncle du Président Georges Pompidou, le lieutenant Frédéric Pompidou, y sert également ; après la guerre, il s'engage dans la Légion étrangère et finit sa carrière comme capitaine à Sidi-Bel-Abbès.

Durant leur retraite fin juin 1944, la LVF a pour ordre de stopper l'avance des Russes et se battent près de la rivière Bobr en Russie blanche.

En juin 1944, la LVF est entraînée dans la débâcle du front russe. Elle s'illustre cependant à quelques kilomètres de la Berezina en livrant une véritable bataille et en bloquant l'armée Rouge pendant plusieurs jours.

[modifier] Passage à la Waffen SS

En juillet 1944, Heinrich Himmler donne l'ordre du démantèlement de la LVF. Son intention est d'intégrer ses membres et d'une manière générale tous les volontaires étrangers dans la Waffen-SS, qui comprend déjà un certain nombre de volontaires français depuis le 23 juillet 1943. La dissolution officielle de la LVF est prononcée le 1er septembre 1944. L'aumônier général Jean Mayol de Lupé intervient pour apaiser les inquiétudes des légionnaires liées a l'intégration dans l'armée allemande.

La plupart des 1200 rescapés de la LVF sont regroupés avec les survivants d'autres unités auxiliaires de la Wehrmacht dans la 33e Division SS Charlemagne qui sera pratiquement anéantie au début de l'année 1945 (engagement en Poméranie).

Ironie de l'histoire, la LVF livra des combats particulièrement durs devant Dantzig, six ans après que le futur chef collaborationniste Marcel Déat eut exhorté ses compatriotes à ne pas « mourir pour Dantzig ». De même, il arriva aux Waffen-SS français de se heurter à des troupes d'antifascistes allemands constituées en URSS : c'était symboliser combien dans la Seconde Guerre mondiale, le conflit idéologique inédit l'emportait sur la dimension classique d'affrontement entre nations.

Quelques Français de l'ex-LVF figureront encore parmi les derniers défenseurs du bunker de Hitler à Berlin, fin avril - début mai 1945 face à l'armée rouge. Ces soldats français auraient été parmi les derniers défenseurs de Berlin.

[modifier] Après guerre

Jusque dans les années 1990, les pensions étaient versées aux anciens combattants français de la division SS Charlemagne par le gouvernement allemand[14].

L'un des derniers combattants français sous l'uniforme allemand, Henri Fenet, un chef de bataillon, est mort en septembre 2002. Il avait reçu la croix de chevalier de la croix de fer en avril 1945[15].

[modifier] Voir aussi

[modifier] Ouvrages généralistes

  • Jean-Paul Brunet, Jacques Doriot. Du communisme au fascisme, Fayard, 1986
  • Philippe Burrin, La France à l'heure allemande, Seuil, 2000
  • Marc Ferro, Pétain, Paris, Fayard, 1987 (ISBN 2213018332)
  • Pierre Giolitto, Volontaires français sous l'uniforme allemand - Perrin, 1999
  • Henry Rousso, Un château en Allemagne. La France de Pétain en exil. Sigmaringen, 1944-1945, Seuil, 1980
  • Olivier Dard, Les archives Keystone sur la LVF, Éditions Jacques Grancher, 2005

[modifier] Récits historiques romancés

  • Jean Mabire et Eric Lefebvre, Par -40 degrés devant Moscou, Éditions Grancher, Paris ;
  • Jean Mabire et Eric Lefebvre, La légion perdue, face aux partisans 1942, Éditions Grancher, Paris ;
  • Jean Mabire et Eric Lefebvre, Sur les pistes de la Russie Centrale 1943, Éditions Grancher, Paris.

[modifier] Romans

  • Saint-Paulien, Les Maudits. Tome 1 : La Bataille de Berlin, Plon, Paris, 1958

[modifier] Témoignages personnels

Témoignage de Christian de la Mazière dans Le Chagrin et la Pitié, film de Marcel Ophüls, 1969[16].

  • Saint-Loup, Les volontaires[17], Paris, Presses de la Cité, 1965
  • Eric Labat, Les places étaient chères, (lieu d'édition?), (Editeur?), (Date d'éditions?), (ISBN?)
  • Pierre Rostaing, Le prix d'un serment, (lieu d'édition?), (Editeur?), (Date d'éditions?), (ISBN?)
  • Pierre Rusco, Stoi, (lieu d'édition?), (Éditions Grancher), (Date d'éditions?), (ISBN?)
  • Martin Laurier, Il reste le drapeau noir et les copains, éd. Regain-Monte-Carlo, 1953 (rééd. L'Homme libre, 2002).

[modifier] Archives vidéos

Documents d'époque issus de la propagande du régime de Vichy :

  • Réunion de la LVF au Velodrome d'hiver, discours de Deloncle, Déat, Doriot et Clementi - France Actualités - 25/07/1941 [1]
  • Fort Cambrone - La LVF sur le front de l'est - 01/01/1943 [2]
  • Départ de volontaire pour le front - France Actualités - 19/03/1943 [3]
  • Réunion de la LVF au Velodrome d'hiver - France Actualités - 21/04/1944 [4]

[modifier] Notes et références

  1. Comme Alan Heusaff, Yves Le Négaret, Taldir Jaffrennou
  2. Marc Ferro, Pétain, Paris, Fayard, 1987, p.330
  3. M. Ferro, op.cit., p.331
  4. Volontaires français sous l'uniforme allemand - Pierre Golitto - page 47
  5. Site de l'Université de Caen
  6. L'Ain dans la guerre - Yves Martin
  7. Sur histoquiz-contemporain.com
  8. 30 000 Français sous l'uniforme allemand - Historia hors série n°32, 1973, p 106
  9. Saint-Loup, Les Volontaires, Presses de la cité, 1971 (p.15)
  10. Philippe Burrin, La France à l'heure allemande, Seuil, 2000)
  11. Archives INA : actualités collaborationnistes de 1941
  12. Saint-Loup, op.cit., p.135
  13. France Actualités - 31/03/1944 - http://www.ina.fr/
  14. « Quel prix peut avoir le sang versé ? », Le Point, 21 septembre 2006.
  15. La Chute de Berlin - Antony Beevor
  16. Extraits
  17. Il apparaît sous le nom de « Le Fauconnier »
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