Guerres baussenques

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Les Guerres baussenques (1144-1162) qui durent moins de vingt ans au milieu du XIIe siècle gardent dans la mémoire provençale une place importante : elles sont le souvenir « idéalisé » de la résistance des provençaux et d'une de ses plus illustres familles, la maison des Baux, à l’« occupant » catalan. Sur le plan politique, elles contribuent par le succès de la maison de Barcelone, à l'établissement de la deuxième dynastie des comtes de Provence.

Sommaire

[modifier] Des causes à l'épilogue

[modifier] Les causes : 1112 - 1144

L'origine de ces guerres se situe à la fois dans la rivalité qui oppose la maison de Toulouse à la maison de Barcelone, dans les problèmes successoraux de la première dynastie des comtes de Provence et dans les ambitions d’une grande famille provençale, la maison des Baux.

Initialement il s'agit d'un conflit d'intérêts entre le comté de Toulouse et celui de Barcelone qui crée une situation de tension, avec ses opportunités politiques, dans toute la Provence.
Arrêtés vers le sud, les comtes catalans tournent leurs ambitions vers le littoral méditerranéen, au pied des Cévennes et jusqu'au Rhône où ils se heurtent à la maison de Toulouse. L'opposition des intérêts crée le conflit. En 1112, le mariage avec l'héritière du comté de Provence avive les tensions. En effet, ce mariage probablement à l'initiative de l'Eglise [1], de Raimond Béranger de Barcelone avec Douce, fille de Gerberge qui possède le comté de Provence, le Gévaudan, le Carladais et une partie du comté de Rodez, vaut au comte catalan un surcroît d'autorité en Provence. Cette union force Alphonse Jourdain, de la maison de Toulouse, à signer en 1125 un traité délimitant les zones d'influence de chacun [2].

A ce conflit d'intérêts se rajoutent des problèmes successoraux relatifs au comté de Provence entre l' ambitieuse maison des Baux et celle de Barcelone.
En effet, Douce a une sœur cadette, Etiennette, en principe déjà dotée et mariée à un comte des Baux. Jusqu'en 1127, date de la mort de Douce, les chartes concernant leurs domaines sont signées à la fois par Douce et par son mari. Après cette date elles ne portent plus que la signature de Raimond Béranger qui se substitue entièrement à sa femme. Tant que Raimond Béranger est en vie, Etiennette n'émet pas de revendication. Il n'en est plus de même quand les biens de sa mère à la mort de ce dernier (1131) reviennent à ses propres neveux et qu'à la suite d'un partage la Provence échoit à l'un d'eux. Or Etiennette est mariée à Raimond des Baux (jusqu’à cette date fidèle allié du comte de Provence) qui ne se fait pas faute de soutenir les droits que sa femme tiendrait de sa mère Gerberge.

[modifier] Les acteurs et les mouvements collatéraux

Du coup le Midi se divise en deux clans :

  • d'une part, celui du neveu d'Etiennette, cadet de la maison de Barcelone, soutenu par son frère aîné, ainsi que par les vicomtes de Carcassonne, de Béziers et de Nîmes ;
  • d'autre part, celui d'Etiennette et de son mari, soutenu par les Toulousains, le comte de Foix, la ville d'Arles (du moins jusqu'en 1150) et même les Gênois à qui on peut imputer le débarquement de Melgueil au cours duquel périt le neveu d'Etiennette en 1144.

Cette situation provoque des bouleversements collatéraux auprès d'acteurs secondaires au conflit. Ainsi, la cité d'Arles est en pleine effervescence : d’après l’historien arlésien Anibert, elle se dote dès cette époque (1131) d’un consulat pour faire face à cette situation de guerre :

les préparatifs de guerre que faisaient sourdement les Seigneurs des Baux , contre la Maison de Barcelone à la mort de Raymond-Berenger premier (il s’agit de Raimond Berenger III comte de Barcelone, 1082-1131, parfois appelé Raimond Berenger Ier comte de Provence) et peut-être quelque temps auparavant, durent décider les Arlésiens à ce grand changement, et engager l’Archevêque à s’y prêter. Les circonstances exigeaient qu’on donnât à la Ville des Chefs capables de porter les armes au besoin … [3].

[modifier] Les conflits : 1144 - 1162

Dans un premier temps, Raimond des Baux s'adresse à l'empereur Conrad III qui possède sur la région une autorité théorique de suzerain afin qu'il reconnaisse les droits d’'Etiennette et de lui-même issus de l'héritage de Gerberge. Le 4 août 1145, l'empereur valide leurs titres sans en préciser trop le contenu, et leur donne le droit de battre monnaie, à Arles et à Trinquetaille, avantage attaché à la souveraineté.

Toutefois cette décision est contestée par les armes : dès le début de 1147 la maison de Barcelone en guerre avec Raimond des Baux soutenu par les arlésiens, emporte un succès décisif dû en grande partie à l'absence du comte de Toulouse occupé à la croisade. Son impuissance convainc Raimond de composer et l'incite à négocier avec Barcelone : il fait sa soumission et meurt en Espagne avant la signature du traité de paix. Etiennette, et ses quatre fils : Hugues, Guillaume, Bertrand et Gilbert sont amenés à renoncer à leurs droits sur le comté de Provence. Le traité mettant fin à ce premier épisode est signé à Arles en 1150.

Moins de cinq ans plus tard, Etiennette et ses fils relancent le conflit en 1155. Allié au comte de Toulouse, Hugues des Baux obtint un premier succès d'ordre diplomatique : il reçoit de la part de l'empereur germanique Frédéric Barberousse la confirmation des titres de sa maison. Mais les hostilités une fois encore tournent à sa confusion. La maison des Baux doit s'avouer battue (1156) et s'engage à ouvrir le château de Castillon et diverses places fortes à première réquisition. Le château des Baux, siège de la cette famille, et quelques-unes de ses défenses avancées, dont le château de Trinquetaille (à vérifier?) sont exclus de cette humiliante condition.

En 1162 lors du troisième et dernier conflit, les Catalans s’assurent définitivement de leurs adversaires. Le château des Baux est rasé et le territoire avoisinant ravagé. La maison de Barcelone fait reconnaître sa victoire militaire par les chancelleries, bien qu’Hugues des Baux, essaye de contrarier cette démarche en faisant état auprès de Frédéric Barberousse des deux diplômes pourvus de la bulle d'or impériale, émanant l'un de Conrad, l'autre de Frédéric Barberousse lui-même. Mais Frédéric Barberousse se garde bien de donner raison au vaincu.

[modifier] Epilogue

Pendant près de vingt ans (1144-1162) la maison des Baux a ainsi tenté de s'imposer dans une Provence où le pouvoir des comtes n'est pas encore réellement affirmé. Les droits nés d'un mariage s'éclipsent dans un mariage : l'empereur donne sa nièce à Raimond Béranger III, de la maison de Barcelone, fidèle au prénom porté par le mari de Douce. Maîtresse des champs de bataille, la dynastie catalane se couvre d'une reconnaissance impériale, à la vérité plus flatteuse qu'efficace, mais qui est le point de départ du véritable pouvoir de cette dynastie dans cette province appelée Provence.

[modifier] Notes

  1. L'Eglise se heurte alors à cette époque aux comtes de Toulouse : excommunication de Raymond IV de Toulouse en 1076, soutien de la maison de Toulouse à Aicard, l'archevêque d'Arles destitué en 1080, ... . Elle profite de l'absence du comte alors en croisade pour sécuriser l'héritage de la Provence dans des mains plus dociles en unissant l'héritière de cette province aux comtes de Barcelone.
  2. Tout le pays au nord de la Basse Durance et sur la rive droite du Rhône, les châteaux de Beaucaire et de Valabrègue, l'Argence sont dévolus au comte de Toulouse : c'est le marquisat de Provence. La partie comprise entre le Rhône, la Durance, les Alpes et la mer est la part du comte de Barcelone. Avignon, Pont de Sorgues, Caumont et le Thor restent indivis.
  3. Mathieu Louis Anibert - Mémoires historiques et critiques sur l'ancienne République d'Arles - 1779

[modifier] Voir aussi

[modifier] Articles connexes

[modifier] Liens externes

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