Eugène Le Roy

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Eugène Le Roy est un écrivain français né au château de Hautefort à Hautefort (Dordogne) le 29 novembre 1836 et mort à Montignac le 4 mai 1907.

[modifier] Vie et œuvres

  • 1836 : naissance d'Eugène Le Roy, fils d'un couple de domestiques du baron Ange Hyacinthe Maxence, baron de Damas, ancien ministre, propriétaire du château de Hautefort. Leur emploi force ses parents à le placer en nourrice chez une paysanne des environs. Ses souvenirs d'enfance marqueront fortement son œuvre future, dans laquelle abondent les enfants abandonnés, comme dans beaucoup d'autres romans contemporains. Chez Georges Sand, où les thèmes de la bâtardise, de l’abandon, de l’adultère, des chagrins d’amour, de l’anticléricalisme et de la ‘‘haine’’ des nobles (les faux surtout, comme chez Le Roy) sont aussi récurrents ; chez G. Bruno, alias Augustine Fouillée, qui met en scène deux orphelins dans Le tour de la France par deux enfants ; chez Hectot Malot (Sans famille) . L’abandon d’enfants est une réalité sociale indéniable qui devient un des poncifs du romantisme populaire de l’époque.
  • 1841-1847 : école rurale d'Hautefort à une époque où la majorité des enfants demeurent analphabètes.
  • 1848 : de son séjour à Périgueux, où il fréquente l'École des Frères, Eugène retiendra surtout le souvenir de la plantation d'un Arbre de la Liberté pour célébrer l'avènement de la Deuxième République.
  • 1851 : refusant le séminaire, l'adolescent se retrouve commis épicier à Paris ; il fréquente des artisans socialistes et, la rage au cœur, assiste à la mise en place du Second Empire. Nous n'avons en réalité aucune preuve de sa main concernant les socialistes dont il est question ici : ce sont des personnagres de ses romans, Le Moulin du Frau par exemple, mais nous n'avons aucune preuve de leur réalité historique. Par contre, ses convictions politiques sont établies dès 1860, date à laquelle il passe le concours de l'administration fiscale.
  • 1859 : engagé dans un régiment de Chasseurs à cheval, il participe aux campagnes d'Algérie puis d'Italie. Cassé de son grade de brigadier pour indiscipline, il démissionne au bout de 5 ans.
  • 1860 : reçu au concours des Contributions directes, Eugène Le Roy devient aide percepteur à Périgueux.
  • 1870 : après la débâcle du Second Empire, il s'engage dans les Francs-tireurs pour combattre l'envahisseur prussien pendant la Guerre franco-allemande. Il répond à l'appel de Gambetta qui sera son modèle en politique.
  • 1871 : une fois la défaite française définitive, il rejoint la perception de Montignac.
  • Il tombe très malade mais guérit seulement au bout d'un an.
  • 1877 : le 14 juin <<Marcel Secondat, Eugène Le Roy, Les Éditions du Périgord Noir, 1978, p. 222>>, à la grande indignation de la bonne société, le futur écrivain épouse civilement sa compagne Marie Peyronnet, dont il a déjà un fils de trois ans, reconnu lors de sa naissance le 27 octobre 1874. Son non-conformisme, mais surtout son républicanisme, entraîne sa révocation comme des milliers d'autres fonctionnaires que le grouvernement de Mac-Mahon révoquer pour les mêmes causes. Il obtiendra difficilement sa réintégration l'année suivante, pour la bonne raison que Mac-Mahon se maintient au pouvoir jusqu'en 1879. Bientôt, il consacrera la majeure partie de ses loisirs à l'écriture, utilisant les matériaux emmagasinés pendant toute son existence.

En 1877, il fait une demande d'admission à la loge maçonnique "Les Amis Persévérants et l'Étoile de Vesone Réunis" à l'Orient de Périgueux. Mais le préfet de la Dordogne a reçu l'ordre du ministre de l'Intérieur, Oscar Bardy de Fourtou, de fermer certaines Loges dont celle-ci. Eugène Le Roy n'est initié qu'en 1878 après que Mac Mahon ait perdu les élections d'octobre 1877 (Histoire de la Franc-Maçonnerie en Périgord, Fanlac, 1989 ). A partir de ce moment, Eugène Le Roy écrit dans les journaux locaux, Le Réveil de la Dordogne notamment, des articles républicains et anticléricaux. Il suit en cela l'orientation politique et philosophique de la Franc-Maçonnerie radicale de la fin du XIXe siècle qui orientera les gouvernements vers la Séparation des Églises et de l'État. Le Moulin du Frau, première œuvre romanesque d'Eugène Le Roy publiée en 1891, est une véritable leçon de radicalisme sous la IIIe République.

  • 1890 : Le Moulin du Frau.

(Traditions et Révolutions en Périgord pendant la seconde moitié du XIXe siècle.

_ « C’était à Périgueux, le soir de la Saint-Mémoire de l’année 1844. Nous étions à souper dans notre petit logement de la rue Héras ; il y avait là mon oncle Sicaire, le meunier du Frau, et son vieux camarade et ami, M. Masfrangeas, chef de bureau à la Préfecture, puis moi troisième, jeune drôle de seize ans. La quatrième place était celle de ma mère ; mais la pauvre femme ne s’asseyait que par moments, tant elle était occupée du service, comme c’est la coutume chez les petites gens, dans notre vieux Périgord… »

  • 1891 : Études critiques sur le christianisme

De 1891 à 1901, Eugène Le Roy rédige un volumineux manuscrit (1086 pages) intitulé Études critiques sur le christianisme. Ce texte, déposé aux Archives Départementales de la Dordogne sous la cote J2222, est publié par les éditions de La Lauze à Périgueux en 2007. Les introductions de Guy Penaud, Richard Bordes et Jean Page détaillent de façon très précise la vie d'Eugène Le Roy, ses opinions politiques et son parcours maçonnique. Il s'agit d'un pamphlet anticlérical sans concession où Le Roy cherche à montrer que la collusion entre les pouvoirs temporel et spirituel est néfaste à une nation. Il tire de ce travail des conclusions sans appel : « Ainsi on le voit, l’évangile n’a pas inventé une morale particulière ; il n’y a pas la morale de Jésus, celle de Cicéron, celle de Confucius etc., il y a une morale universelle, qui ne fait acception ni des temps, ni des lieux, ni des personnes, qui plane sereine et immuable sur les sectateurs de Jéhovah, de Jupiter, de Bouddha et du Christ. C’est à cette morale impersonnelle, produit spontané de la conscience humaine, morale formulée de temps immémorial par une foule d’hommes de bien, que l’évangile a emprunté ses plus beaux préceptes…" (Études critiques, p. 353). La somme des ouvrages concernant l’histoire et la religion chrétiennes que Le Roy a consultés pour rédiger cet énorme travail est impressionnante : s’il se réfère continuellement à Voltaire, principalement au Dictionnaire philosophique, mais aussi aux Annales de l’Empire, il puise également chez Denis Diderot, Jean-Jacques Rousseau, Paul Henri Thiry d'Holbach, Proudhon, Ernest Renan, Louis De Potter (Histoire du christianisme et des Églises chrétiennes), Sauvestre, Paul Bert (La morale des Jésuites), Victor-Henri Debidour, Paul Parfait, Augustin Fabre, Mage et Alfred Loisy dont il a sans doute lu L’Évangile et l’Église publié en 1902 ; il cite également Pierre Leroux, franc-maçon de Limoges et père de la surprenante théorie du circulus qui a fait hurler de rire la Chambre des Députés ; il a également travaillé sur Les origines de la France contemporaine, d’Hippolyte Taine et sur L’origine de tous les cultes de Charles-François Dupuis, ouvrage publié en 1822, sur L’Ancien Régime et la Révolution d’Alexis de Tocqueville (cité p. 573) ; mais il a lu aussi des auteurs catholiques, Bossuet, le Dictionnaire de Théologie de Nicolas-Sylvestre Bergier, le Traité sur l’apparition des esprits de Dom Calmet et bien d’autres ouvrages encore dont on soupçonne la présence au fil des pages, comme Brantôme ou la Nobla Leyczon vaudoise dont il cite quatre vers de mémoire, ou encore Les Huguenots : cent ans de persécution (1685-1789), de Charles Alfred de Janzé. Cet ouvrage montre sans conteste la vraie personnalité de Le Roy et son dégoût pour les injustices et les intolérances religieuses.

  • 1896 : Mademoiselle de la Ralphie.

(Déchéance d’une fille de la noblesse dévorée par la passion pendant la Monarchie de Juillet.)

_ « Le petit castel de Guersac est situé sur les bords de la Vézère, non loin de la région des grottes préhistoriques qui ont fait une célébrité à ces cantons si pittoresques et autrefois si inconnus du Périgord… »

  • 1897 : Jacquou le croquant

(Révoltes d’un petit paysan contre les injustices sociales de son temps, depuis la Restauration jusqu’à la fin du XIXe siècle.)

_ « Le plus loin dont il me souvienne, c’est 1815, l’année que les étrangers vinrent à Paris, et où Napoléon, appelé par les messieurs du château de l’Herm “ l’ogre de Corse ”, fut envoyé à Sainte-Hélène, par-delà les mers. En ce temps-là, les miens étaient métayers à Combenègre, mauvais domaine du marquis de Nansac, sur la lisière de la Forêt Barade, dans le haut Périgord… »

  • 1899 : Les gens d'Auberoque.

(Bourgeoisie provinciale et affairisme sous le Second Empire et la Troisième République.)

_ « C’était une pluvieuse après-midi de novembre de l’année 1866. Sur le seuil du bureau des messageries sis place Francheville, à Périgueux, un grand jeune homme, en caban de voyage, attendait, accoté au chambranle… »

  • 1900 : La petite Nicette et le grand Milou.

(L’enfance abandonnée : Restauration et Monarchie de Juillet)

« Dans la nuit obscurcie de froides brumes, les murailles lépreuses de l’hospice d’Hautefort se voient à grand’peine. À trente pas du pignon de l’ancien logis des chapelains, tout contre le mur du petit cimetière des pauvres, où dorment tant de générations de misérables que la mort a délivrés, un homme est assis sur les talons, guettant. »

  • 1902 : L'Année Rustique en Périgord.

(Tableaux champêtres au long des mois du calendrier révolutionnaire.)}
Eugène Le Roy prend sa retraite à Montignac.

  • 1904 : Refus de la Légion d'Honneur.

Au pays des pierres. (Scènes de la vie campagnarde pendant les dix-huitième et dix-neuvième siècles.)

« Dans la vaste cuisine de l’ancienne communauté paysanne des Agrafeils, à une extrémité de la grande table barlongue, une quinzaine de personnes étaient assises. Au bout haut siégeait le “ maître ” Bertrand Agrafeil, vieil homme de soixante ans. À sa droite était Françoise Agrafeil, la “ ménagère ”, fille ancienne aux environs de la cinquantaine… »

  • 1907 : Inhumé civilement, Eugène Le Roy laisse un dernier ouvrage : Le Parpaillot, qui paraîtra six ans après son décès sous le titre : L'Ennemi de la Mort

(Combat solitaire et vain d’un médecin de campagne contre les préjugés, les conformismes et les égoïsmes.) Il laisse également inédit un pamphlet voltairien, " La Damnation de saint Guynefort ” qui ne sera publié qu'en 1937.

_ « On ne peut pas dire au juste duquel des trois fils de Noé qui étaient dans l’arche les Charbonnières sont issus. Dans la famille, jadis, on en disputait. Le défunt docteur Nathan, bonhomme eu demeurant, mais un brin raillard à ses heures, disait que c’était de Cham, à cause que tous ceux de la parentèle étaient moricauds un petit… »

[modifier] Citations

  • « Mon existence n'a point été sans peine, mais elle s'est écoulée du moins sans regrets et surtout sans remords, ce qui n'est pas peu de chose. »
  • « L’égoïsme m’indigne, la méchanceté m’exaspère, l’injustice me révolte, la misère me saigne le cœur. »
  • « Mes bonshommes sont des personnages, non d'imagination, mais d'observation. »

[modifier] Pour en savoir plus

  • Principales éditions :
    • Œuvres complètes aux Éditions du Périgord Noir, Périgueux
    • Choix (Le Moulin du Frau ; Jacquou le Croquant ; Les gens d’Auberoque ; Nicette et Milou) au Livre club Diderot.
    • Plusieurs titres aux éditions Fanlac, dont « La belle coutelière » et « La damnation de saint Guynefort ».
    • En collections de poche : Jacquou le Croquant et l’Ennemi de la Mort.
    • Au cours du premier semestre 2007, les Éditions de La Lauze, de Périgueux, ont publié le dernier texte inédit d'Eugène Le Roy : « Études critiques sur le christianisme », avec des introductions de Guy Penaud, Richard Bordes et Jean Page.
  • Le numéro 3 des « Cahiers de Vésone » est consacré à Eugène Le Roy (éditions Fanlac).
  • Guy Penaud et José Correa, La cuisine rustique au temps de Jacquou le Croquant, 2004, Éditions de La Lauze, Périgueux (France)
  • Guy Penaud et José Correa, Le Roy à Hautefort, 2007, Éditions de La Lauze, Périgueux (France)
  • Guy Citerne, La vie traditionnelle dans le Périgord d’Eugène Le Roy, BT2 N° 167, CEL 1984.
  • Guy Citerne, Traditions et Révolutions dans le Périgord d’Eugène Le Roy, BT2 N° 167, CEL 1984.
  • Marcel Secondat, Eugène Le Roy connu et inconnu, Éditions du Périgord Noir, 1978.
  • Site du château de l'Herm qui inspira Eugène Le Roy pour son roman Jacquou le Croquant.