Guerre franco-allemande de 1870

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Guerre franco-allemande de 1870

Le siège de Paris
Jean-Louis-Ernest Meissonier (1815 - 1891)
Informations générales
Date du 19 juillet 1870
au 28 janvier 1871
Lieu France et Allemagne
Casus belli Dépêche d'Ems
Issue Victoire allemande
Belligérants
France France Drapeau de la Confédération Confédération de l'Allemagne du Nord
Commandants
Napoléon III
puis Léon Gambetta
Helmuth von Moltke
Forces en présence
500 000 hommes 550 000 hommes
Pertes
139 000 morts
143 000 blessés
320 000 malades
147 000 morts
128 000 blessés
100 000 malades
Batailles et sièges
WissembourgForbach-SpicherenWœrthBorny-ColombeyStrasbourgMars-la-TourGravelotteMetzBeaumontNoisevilleSedanBellevueChâteaudunBouvet et Météor (navale)CoulmiersAmiensBeaune-la-RolandeOrléansl'HallueBapaumeVillersexelLe MansLizaineDijon - St-QuentinBuzenvalParisBelfort

La guerre franco-allemande (19 juillet 1870 - 28 janvier 1871) opposa le Second Empire français et les royaumes allemands unis derrière le royaume de Prusse (aussi est-elle parfois appelée guerre franco-prussienne). Le conflit marqua le point culminant de la tension entre les deux puissances, résultant de la volonté prussienne de dominer toute l'Allemagne, qui n'était alors qu'une fédération d'États quasi-indépendants. La défaite entraîna la chute de l'Empire français.

Sommaire

[modifier] L'exploitation de la fébrilité de la France

La candidature le 21 juin 1870 du prince allemand Leopold de Hohenzollern-Sigmaringen au trône d'Espagne, vacant depuis la révolution de septembre 1868 est l'élément déclencheur de la guerre. Le 6 juillet le duc de Gramont, ministre des Affaires étrangères annonce que la France s'oppose à cette candidature. Le 12 juillet Léopold de Hohenzollern-Sigmaringen retire sa candidature, ce qui est annoncé par son père le prince Antoine. Le 13 juillet, alors que la France lui demande, par l'intermédiaire de son ambassadeur Benedetti envoyé auprès de lui dans la ville d'eaux d'Ems, de garantir le retrait de Léopold, le roi Guillaume de Prusse, agacé, fait confirmer la renonciation du prince, en ajoutant qu'il « n'a plus rien d'autre à dire à l'ambassadeur ».

Cependant son télégramme (la dépêche d'Ems) relatant son entretien avec l'ambassadeur de France est réécrit par le premier ministre de Prusse Bismarck (même si Léopold s'est bien retiré), pour laisser croire à un congédiement humiliant de l'ambassadeur de manière à provoquer l'indignation des Français. Le premier ministre cherche en effet à abaisser une France arrogante, dont la position diplomatique est un obstacle pour souder les États allemands et ouvrir la voie à l'unité allemande. Or, après le succès de la Bataille de Sadowa lors de la guerre austro-prussienne et la rebuffade de la crise luxembourgeoise (1867), embarrasser la diplomatie française, plus qu'une nouvelle guerre victorieuse, lui apparaît comme le moyen le plus efficace d'atteindre son but. Même s'il ne cherche pas forcément la guerre, le premier ministre Bismarck est bien informé des réalités de l'armée française, vieillissante non préparée à une guerre européenne, démoralisée par le désastre de l'expédition au Mexique, soldats mal équipés, mauvais positionnement des dispositifs, aucun chef de valeur. Il sait en conséquence qu'une guerre pourrait servir les objectifs allemands de la Prusse.

Napoléon III et Bismarck, le 2 septembre à Donchery, entrevue après la bataille de Sedan
Napoléon III et Bismarck, le 2 septembre à Donchery, entrevue après la bataille de Sedan

La presse parisienne dénonce l'affront. La mobilisation, arrêtée secrètement le 13 juillet, est signée le 14. Le 15, elle est approuvée par le Corps législatif. Malgré les ultimes avertissements d'Adolphe Thiers, le Corps législatif français vote aussi les crédits de guerre. Le 16 juillet, le maréchal Bazaine est placé à la tête du 3e corps de l'Armée du Rhin. Il reçoit autorité sur les armées des généraux Frossard et Ladmirault ainsi que sur la Garde impériale.

Le général Chabaud-Latour est chargé des travaux de défense de la capitale. Des travaux sont entrepris au Mont Valérien, aux forts de Montrouge, de Bicêtre, d'Ivry, de Vanves, d'Issy, puis le 3 août aux forts de l'Est, et à Saint-Denis plus d'une vingtaine de redoutes sont construites. Le 17 juillet lors d'un rassemblement populaire d'étudiants et d'ouvriers à la Bastille, Émile Ollivier poussé par l'opinion publique, déclare la guerre à la Prusse (déclaration notifiée deux jours plus tard). Le 19 juillet Émile Ollivier déclare, devant le Corps législatif, accepter la guerre « d'un cœur léger ». Les États allemands prennent alors parti pour la Prusse qui parait agressée. Napoléon III, pacifiste mais malade, laisse faire. Le 19 juillet la France déclare la guerre à la Prusse. Cette décision provoque un rassemblement enthousiaste des Parisiens devant le palais des Tuileries. Peu se rendent compte que l'armée française est mal préparée à cette guerre.

[modifier] Armements et troupes

"Nous sommes prêts et archi-prêts, il ne manque pas à notre armée un bouton de guêtre." Général Le Boeuf de l'Armée Française.

[modifier] Fusils

Le Chassepot modèle 1866 français, avec une munition de 11 mm, a une portée d'un kilomètre nettement supérieure au Dreyse allemand, avec une munition de 15 mm.

Mais la France a la mauvaise idée d'acheter les munitions à la manufacture belge de Herstal en omettant le simple fait que le Kronprinz était l'actionnaire principal de cette manufacture belge. Les commandes de munitions n'arrivèrent pas à temps à Sedan. Sans munitions, Napoléon III se rend pour éviter un carnage désespéré. La Manufacture d'Herstal explique par courrier cette défaillance de livraison du fait de la désorganisation qui règne sur les routes à cette époque et les chariots empêtrés…
La Manufacture d'Herstal présente sa facture qui est réglée par la IIIe République.

[modifier] Canons

Le Krupp allemand en acier se charge par la culasse tandis que son homologue français datant des guerres Napoléoniennes est en bronze et se charge par la gueule. Ces avantages sont cependant limités par la qualité du métal. La supériorité allemande vient plutôt de l'utilisation d'obus percutant plutôt que fusant. L’obus percutant, en 1870, s'enfonce dans la terre meuble et fait fougasse sans grands dégâts. L’obus fusant à shrapnel était dangereux dans un rayon de 100 mètres. L’infériorité vient surtout, d’après le général Suzanne directeur de l’artillerie en 1870, du mode d'emploi de l’artillerie française. Pas de grande batterie, duel avec l’artillerie adverse avec pour seul résultat d'attirer sur elle une concentration des batteries adverses. Une seule grande batterie fut constituée par le colonel de Montluisant à Saint Privat le 18 août. Elle infligea de fortes pertes à la Garde prussienne. Enfin, il faut citer les canons à balles, ces mitrailleuses, qui tiraient environ 125 coups à la minute. Chaque fois que les officiers, commandant ces batteries, comprennent qu’il valait mieux ne pas engager la lutte contre l’artillerie adverse mais contre l’infanterie, des résultats visibles sont obtenus. Il semble même que la majorité des pertes prussiennes leur soit imputable.


[modifier] Cavalerie

La précision des fusils tels que le Chassepot et l'utilisation d'obus percutant rendent les charges de cavalerie inutiles. A ce titre, la guerre franco-allemande marque le déclin irrémédiable de cette arme qui avait dominé les champs de bataille pendant 150 ans.

[modifier] Troupes

La guerre de 1870: Gardes nationaux, Gardes mobiles, Pompiers et Volontaires français
La guerre de 1870: Gardes nationaux, Gardes mobiles, Pompiers et Volontaires français

Au début du conflit la France dispose de 265 000 soldats réunis dans l'Armée du Rhin contre 500 000 soldats prussiens auxquels s'ajoutent les forces de quatre États allemands du sud, soit un total de 800 000 soldats. On ne peut prendre en compte que les forces disponibles sur le champ de bataille. Force est de constater que dans la majorité des cas ce sont les Prussiens qui étaient en nombre inférieur. 30 000 Français contre 14 000 Prussiens à Spicheren, 120 000 contre 35 puis 70 000 Prussiens le 16 août.

[modifier] Bref rappel des faits

[modifier] Une victoire sans appel de l'Allemagne

"Discussions sur la guerre dans un café parisien", paru dans The Illustrated London News le 17 septembre 1870
"Discussions sur la guerre dans un café parisien", paru dans The Illustrated London News le 17 septembre 1870

Mal préparés, très inférieurs en nombre et très mal commandés, les Français sont sévèrement battus dans plusieurs batailles, où ils font cependant quelque fois preuve de panache: menacé d'encerclement par l'armée du Kronprinz à Frœschwiller, Mac Mahon sacrifie sa cavalerie pour dégager un axe de retraite vers Metz et Verdun. À la bataille de Frœschwiller-Wœrth, les régiments cuirassés chargent héroïquement dans Frœschwiller et dans Morsbronn où ils sont écrasés par les coalisés : des premiers et deuxièmes régiments de cuirassés il ne restera que peu de survivants[1]. Le 2 septembre, à la bataille de Sedan, l'empereur français Napoléon III se rend avec 100 003 soldats, 419 canons et 6000 chevaux. Cela entraîne deux jours plus tard une révolution sans violence à Paris et la création d'un gouvernement de défense nationale. Une nouvelle défaite française écrasante a lieu à Metz, où le maréchal Bazaine se rend avec 180000 soldats le 29 octobre. Un armistice est signé le 28 janvier 1871, dix jours après la proclamation de Guillaume comme empereur allemand à Versailles. La stratégie de Bismarck est une réussite. Victoire sans appel : c’est vite dit. « L'armée française, vigoureuse et aguerrie, constituait un instrument redoutable. Maniée par des chefs résolus, elle aurait pu balancer la fortune et tirer des succès, sinon la victoire, de maintes occasions qui s’offrirent »[2]. À tous les combats qui l'ont opposée aux forces prussiennes, c’est elle qui est restée maître du champ de bataille. Elle s’est retirée non pas parce qu’elle avait l’épée dans les reins mais sur ordre du haut commandement. La différence des pertes, surtout lors de ce que les Prussiens appellent « les journées critiques » des 16 et 18 août 1870, est énorme. Le 16, pertes françaises globales : 9 279 ; pertes prussiennes : 15 790. Le 18, la différence est encore plus grande : Prussiens : 20 100 ; Français : 8 331. C’est le haut commandement français qui a offert la victoire aux ennemis.

[modifier] Les pertes humaines

Cette guerre fait 147 000 morts dans les rangs de l'armée allemande soit 14% des effectifs, (dont la moitié de maladie), 128 000 blessés et 100 000 malades.

Elle coûte à la France 139 000 morts (au combat ou de maladie), 143 000 blessés et 320 000 malades. Ces chiffres comprennent aussi les civils touchés par les bombardements et la famine, et les tragédies telle celle du camp des bretons de Conlie.

[modifier] L'insurrection de la Commune

Cependant, la Garde nationale et les ouvriers de Paris refusent d'accepter la défaite, critiquant le gouvernement conservateur pour n'avoir pas su organiser une résistance nationale efficace, et prennent le contrôle de la capitale le 18 mars, mettant en place un gouvernement insurrectionnel : la Commune de Paris. Avec l'accord tacite des Prussiens, celle-ci est combattue puis écrasée lors de la « Semaine sanglante (21-28 mai) par le gouvernement d'Adolphe Thiers réfugié à Versailles.

[modifier] Un traité de paix, considéré comme humiliant par la France

Le traité de paix préliminaire franco-allemand, signé à Versailles le 26 février, est confirmé par le traité de Francfort (10 mai 1871). La France doit rendre à l'Allemagne les pays annexés par Louis XIV en 1681 : les quatre anciens départements de l'Alsace-Moselle (Haut-Rhin sauf Belfort, Bas-Rhin, une très grosse partie du département de la Moselle, une grosse partie du département de la Meurthe et une toute petite partie du département des Vosges) (qui constituent jusqu'en 1919 la province allemande d'Alsace-Lorraine) et payer une indemnité de guerre de 5 milliards de francs or. Les troupes allemandes occupent une partie de la France jusqu'à ce que le total des indemnités soit versé en septembre 1873. L'annexion devait concerner la Moselle et l'Alsace dont le territoire de Belfort, mais étant donné la bravoure des troupes françaises du colonel Pierre Philippe Denfert-Rochereau lors du siège de Belfort, ce territoire reste à la France.

[modifier] Conséquences de la guerre : naissance du IIe Reich allemand et de la IIIe République française

Alors que la guerre unit tout l'Empire allemand sous la couronne prussienne, la France devient une république (février 1875) où la mémoire de la Commune divise longtemps la droite et la gauche. Une conséquence indirecte de la guerre est que les États pontificaux, qui ne sont plus sous protection française, sont annexés (le 20 septembre 1870) par l'Italie, complétant l'unification du pays.

La conséquence immédiate de cette guerre est l'avènement de l'Allemagne bismarckienne qui va dominer seule l'Europe continentale pendant près de trente ans. La France évincée est diplomatiquement isolée. Mais en animant plus que jamais les nationalismes, reste en France le sentiment d'une revanche à prendre qui s'amplifie jusqu'en 1914 et atteint ses ultimes et dramatiques conséquences (Première Guerre mondiale).

[modifier] Notes et références

  1. C'est par analogie que certains donnent à cet épisode le nom de "Charge des cuirassés de Reichshoffen" : les cuirassés sont basés dans ce village avant la charge.
  2. Charles de Gaulle, La France et son armée, Paris, Plon, 1938, p.198

[modifier] Orientations bibliographiques

[modifier] Ouvrages historiques

  • Pierre Lehaucourt, Histoire de la guerre de 1870-1871, Berger-Levrault, 1893-1907 (quinze tomes)
  • Lt-Colonel Rousset, Histoire générale de la guerre franco-allemande (1870-1871), Librairie illustrée Jules Tallandier, vers 1910 (deux tomes)
  • Henri Guillemin, Cette curieuse guerre de 70 : Thiers, Trochu, Bazaine, Gallimard, Collection La suite des Temps, 1956, 266 pages.
  • Henri Guillemin, L'héroïque défense de Paris (1870 - 1871), Gallimard, Collection La suite des Temps, 1959, 422 pages.
  • Henri Guillemin, La capitulation (1871), Gallimard, Collection La suite des Temps, 1960, 410 pages.
  • François ROTH, La guerre de 1870, Fayard, 1990
  • Roland Hoyndorf et Willy Schneider La perte de l'Alsace Lorraine, Éditions Coprur.

[modifier] Romans

[modifier] Nouvelles

[modifier] Voir aussi

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[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes