Bataille des Cardinaux

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Bataille de la baie de Quiberon

La bataille de la baie de Quiberon, Nicholas Pocock, 1812. National Maritime Museum
Informations générales
Date 20 novembre 1759
Lieu Baie de Quiberon
Issue victoire britannique
Belligérants
France Grande-Bretagne
Commandants
Hubert de Brienne de Conflans Sir Edward Hawke
Forces en présence
21 navires de ligne,

environ 13 500 à 16 000 hommes

23 navires de ligne,

12 790 hommes

Pertes
5 navires de ligne perdus, 2 capturés, 2 500 morts 2 navires de lignes perdus, 1 capturé, 300 à 400 morts
Batailles et sièges
Europe

Minorque (navale) — Lobositz — Reichenberg — Prague — Kolin — Hastenbeck — Gross-Jägersdorf — Moys — Rossbach — Breslau — Leuthen — Krefeld — Domstadl — Zorndorf — Saint-Cast — Tornow — Hochkirch — Lutzelberg (1758) — Bergen — Kay — Minden — Kunersdorf — Neuwarp (navale) — Hoyerswerda — Maxen — Meissen — Landshut — Emsdorf — Warburg — Legnica — Kloster Kampen — Torgau — Villinghausen — Kolberg — Wilhelmstahl — Burkersdorf — Lutzelberg (1762) — Freiberg — Baie de Quiberon (navale)


Amérique du Nord
Jumonville Glen — Fort Necessity — Fort Beauséjour — Monongahela — Petitcoudiac — Lac George — Fort Bull — Fort Oswego — Kittanning — Fort William Henry — Louisbourg — Cran — Fort Carillon — Fort Frontenac — Fort Duquesne — Fort Ligonier — Fort Niagara — Beauport — Plaines d'Abraham — Sainte-Foy — Ristigouche (navale) — Mille-Îles — Signal Hill


Inde
Plassey — Gondelour — Negapatam (navale) — Pondichéry (navale) — Wandiwash


Philippines
Manille

La bataille des Cardinaux est une bataille navale ayant opposé les flottes française et britannique qui eut lieu lors de la guerre de Sept Ans, le 20 novembre 1759, dans la baie de Quiberon. La flotte française se saborda, laissant la victoire à la flotte britannique.

Sommaire

[modifier] Contexte

La guerre de Sept Ans est à son plus fort en août 1759, et les marines britanniques et françaises sont à égalité, la première ayant remporté sur la seconde une victoire à Gibraltar, la seconde ayant battu la première à Saint-Cast. Quatre petits rochers à l'ouest de Hoëdic, les rochers des Cardinaux, donnent leur nom à une bataille navale.

Aussi, à l'amirauté germe l'idée d'un coup décisif : une invasion des îles Britanniques ; et donne pour ce faire instructions à l'escadre de Brest d'aller chercher des troupes basées dans le Morbihan. Vingt et un vaisseaux, trois frégates et deux corvettes dotés de 1500 canons pour embarquer l'infanterie, soit au total environ 14 000 hommes, placés sous les ordres de l'amiral de Conflans, âgé de 70 ans. Les navires sont rassemblés dans le golfe du Morbihan, prêts à transporter le corps expéditionnaire qui doit débarquer en Écosse.

[modifier] Situation

Pour appareiller, le convoi attend l'escadre de Brest. Les Britanniques sont bien renseignés sur les défenses et les engagements de forces français, aussi alignent-ils trente-quatre vaisseaux, ainsi que dix frégates et corvettes armés de plus de 2 000 canons et comptent sur une supériorité numérique d'environ 3 500 hommes.

Les îles sont bien pourvues en hommes et équipements : Belle-Île, Houat, Hoëdic, l'île Dumet fortifiée par le vainqueur de Saint-Cast, le duc d'Aiguillon. L'amiral de Conflans pense qu'il faut amener l'ennemi, dirigé par l'amiral Hawkes, en baie de Quiberon, où il espère compenser son infériorité numérique par une subtile manœuvre : les placer entre la côte rocheuse très dangereuse (et ses batteries terrestres) et la flotte française.

Mais on ne commande pas aux éléments, et dans l'après-midi du 20 novembre, le vent est très frais et il n'y a plus guère de visibilité (les ordres se transmettaient par pavillons de couleur). L'amiral ne parvient pas à organiser correctement son convoi et le combat s'engage trop tôt, entre le Four, l'île Dumet et les Cardinaux.

[modifier] Le combat

La position en ligne très prisée à l'époque (jusqu'à Trafalgar) et demandée par le commandant ne peut pas être respectée très longtemps, surtout que le vent a changé et qu'il faut virer sous peine d'être bloqué à la côte, et ceci en laissant suffisamment d'espace entre chaque navire pour la manœuvre.

Le Tonnant manque à virer, et coule. Le Britannique, au vent, s'infiltre et engage le combat.

Le Thésée, vaisseau de 74 canons, vire précipitamment. Il coule près de l'embouchure de la Vilaine, les sabords de sa batterie basse étant restés ouverts avec 630 de ses hommes dont Guy François, comte de Kersaint et deux de ses fils Jacques Guy François et Guy François.

Pendant et après la bataille, les Britanniques et les Français sauvent les adversaires naufragés, et ils soignent ceux qu'ils peuvent.

Le Formidable est capturé et ses hommes faits prisonniers, le Superbe (70 canons) est coulé, le Soleil Royal (navire amiral, 80 canons, 2 500 tx) se réfugie près de la côte, et au matin se trouve relativement esseulé (il n'y a plus que le Héros qui l'attend).

Sept vaisseaux, trois frégates et une corvette, après s'être allégés en passant leur artillerie par-dessus bord, se sont enfuis vers la Vilaine

Le Héros s'est laissé dériver pour protéger son navire amiral et n'est plus qu'une épave.

L'amiral de Conflans se retrouve donc seul devant l'escadre de Hawke, et préfère se saborder plutôt que de se rendre à l'ennemi. Il incendie son vaisseau, passe lui aussi ses superbes canons par-dessus bord.

[modifier] Suites

Le gouverneur du Croisic, le marquis de Broc, fait donner ses batteries pendant plusieurs jours, et les Britanniques ne peuvent emmener, plusieurs semaines après, que la figure de proue du vaisseau amiral : une statue de Louis XV.

Les bateaux réfugiés en Vilaine restent presque deux ans, bien gardés par une marine britannique toujours présente ; parmi eux, l'Inflexible ne peut pas être relevé d'une vasière près d'Arzal, après rupture de ses amarres. L'amiral, lui, peste contre les terrestres. Les bouches à feu primitives étaient construite à partir de barres de fer réunies par forgeage, puis cerclées ; elles tiraient des boulets de pierre sphériques. Au XVe siècle, les volées de canon furent coulés d'une seule pièce, au siècle suivant, ils furent coulés en bronze, puis l'âme fut creusée après la coulée. Ils se chargeaient par la bouche pour garder une plus grande résistance. On utilisa des boulets de fer. Grâce à des poudres de meilleure qualité, leur portée fut agrandie. Le largage des canons français à cette bataille des Cardinaux, serait dû à l'existence d'un nouveau type d'engin à allumage par silex (et non par boute-feu) : il ne fallait pas qu'ils passent à l'ennemi. En ce temps là, avec une cadence de tir d'environ 10 à 15 coups à l'heure, les canons ne résistaient pas longtemps, et devaient être refondus régulièrement. Ceux de certains vaisseaux étaient décorés, gravés comme si cette ornementation avait une valeur guerrière. Aujourd'hui un canon du Soleil Royal est visible au Croisic, un second venant de l'Inflexible, est visible à La Roche-Bernard (face à la maison du canon), un troisième dans cette même cité et visible sur le site du rocher, provient du vaisseau le Juste. Quant aux rochers des Cardinaux, ils sont aujourd'hui flanqués d'un phare du même nom qui remplace celui Hoëdic. Une tourelle éponyme est implantée sur les lieux du naufrage du Soleil Royal.

En commentaire, on peut réfléchir au terme « vaisseaux de ligne ». Souvent les batailles voyaient un affrontement de lignes de vaisseaux, à coup de canons. Et les Britanniques étaient non seulement mieux équipés, mais aussi beaucoup plus entraînés que les Français. Il faut attendre la bataille de Trafalgar pour que Nelson prouve l'inefficacité de ce dispositif, en s'infiltrant lui aussi entre les rangs des bateaux de l'amiral de Villeneuve avec le résultat que l'on sait. La suprématie du bateau le plus manœuvrant devient évidente, elle était d'ailleurs bien connue des corsaires qui n'hésitaient pas, avec des petits gabarits, à entrer en chasse de bateaux beaucoup plus lourds et plus armés.

[modifier] Conséquences

Les Britanniques ont perdu 300 à 400 hommes, les Français 2 500.

On peut aussi sourire quant aux négociations qui sont menées par le duc d'Aiguillon et l'amiral Hawke pour des échanges de prisonniers. Après beaucoup de politesses et d'envois de présents, elles commencent à l'initiative des Britanniques, et leur délégation aborde à Pénerf du 23 à fin novembre (le navire amiral mouillant à un mille au large) pour la restitution des prisonniers du Formidable, entre autres, dont 114 blessés entrent aux hôpitaux de Vannes avant la fin du mois.

Le canon tonna encore dans l'embouchure de la Vilaine pour protéger les réfugiés, et au Croisic jusqu'à mi-décembre, ponctuant les aléas politiques de ces tractations…

[modifier] Les flottes en présence

[modifier] Les vaisseaux français

Nom Commandement canons hommes Commentaires
Soleil Royal Cap. B. de Chézac 80 950 Sous la marque de Conflans – brûlé
Orient Cap. N. de la Filière 80 750 Marque du chevalier de Guébridant Budes – réfugié à Rochefort
Formidable Cap. St André 80 800 Marque de Saint André du Vergé – pris
Tonnant Cap. St Victoret 80 800 Marque du chevalier de Bauffremont – réfugié à Rochefort
Magnifique Bigot de Morogues 74 650 Réfugié à Rochefort
Intrépide Chastologer 74 650 Réfugié à Rochefort
Héros Vicomte de Sanzay 74 650 Brûlé
Thésée Coëtnempren de Kersaint 74 650 Coulé
Robuste Fragnier de Vienne 74 650 Réfugié en Vilaine
Glorieux Villars de la Brosse 74 650 Réfugié en Vilaine
Dauphin Royal Chevalier d'Uturbie Fragosse 70 630 Réfugié à Rochefort
Northumberland Belingant de Kerbabut 70 630 Réfugié à Rochefort
Juste François de Saint Allouarn 70 630 Échoué en Vilaine
Superbe Montalais 70 630 Pris
Dragon Vassor de la Touche 64 450 Réfugié en Vilaine
Eveillé Prévalais de la Roche 64 450 Réfugié en Vilaine
Brillant Keremar Boischateau 64 450 Réfugié en Vilaine
Bizarre Prince de Montbazon 64 450 Réfugié à Rochefort
Solitaire Vicomte de Langle 64 450 Réfugié à Rochefort
Hébé 40 300 Rentre à Brest
Vestale Réfugié en Vilaine
Aigrette Réfugié en Vilaine
Calypso Réfugié en Vilaine
Prince Noir Réfugié en Vilaine
Vengeance
Sphinx Goyon 64
Inflexible Tancrede 64 Perdu en entrant en Vilaine

[modifier] Les vaisseaux britanniques

The HMS. Royal George Hawkes flag-ship at Quiberon Bay Gravure sur une réplique d'une dent de baleine

Nom Commandement canons hommes Commentaires
Royal George Captain Campbell 100 880 portant la marque de Edward Hawke
Union Captain J. Evans 90 770 Sous la marque de Sir Charles Hardy
Duke Cap. St André 80 800 Marque de Saint André du Vergé – pris
Namur M. Buckle 90 780
Resolution H. Speke 74 600 Échoué au Four
Hero G. Edgecombe 74 600
Warspite Sir John Bentley 74 600
Hercules W. Forterscue 74 600
Torbay Augustus Keppel 70 520
Magnanime Lord Viscount Howe 70 520
Mars Commodore J. Young 70 520
Swiftsure Sir Thomas Stanhope 70 520
Dorsetshire P. Denis 70 520
Burford G. Gambier 70 520
Chichester W. S. Willet 70 520
Temple Hon. W. Shirley 70 520
Essex Lucius O'Brien 64 480 Échoué au Four
Revenge J. Storr 64 480
Montague Joseph Rowley 60 400
Kingston Thomas Shirley 60 400
Intrepid J. Maspleden 60 400
Dunkirk R. Digby 60 420
Defiance P. Raird 60 420

[modifier] Témoignage sur la « Bataille navale de Conflans »

« Le 20 novembre 1759 eût lieu le combat entre la flotte française, composée de 21 vaisseaux de ligne et 5 frégates, et la flotte anglaise, composée de 45 vaisseaux de ligne. La première était commandée par le maréchal de Conflans, vice-amiral de France, la seconde par l'amiral Howe [...] un de nos vaisseaux le Formidable a été pris par les Anglais ; deux autres ont été brûlés, le Héros par les Anglais, et le Soleil royal par ordre de M. de Conflans ; et cela après qu'ils ont été échoués sur la côte du Croizic. Deux autres ont coulé à fond, grâce à la quantité d'eau qui est entrée par les sabords de la batterie basse, et desquels il ne s'est sauvé personne. Un autre vaisseau est allé se perdre dans la rivière de Loire, après avoir été criblé de coups de canon, et duquel il ne s'est sauvé qu'environ 150 hommes". D'autres vaisseaux se sont réfugié dans la Vilaine : le Glorieux ; le Robuste ; le Brillant ; l'Eveillé ; le Sphinx ; le Dragon ; le Bizarre ; l'Inflexible, ainsi que les frégates la Vestale ; l'Aigrette ; le Calypso ; le Prince Noir »[1].

[modifier] Voir aussi

[modifier] Notes et références

  1. Bataille navale de Conflans, extrait d'un mémoire de M. l'abbé Piéderrière (1857) [d'après un manuscrit trouvé dans la sacristie de Marzan). Société archéologique du Morbihan, 1857, deux pages.

[modifier] Bibliographie

  • Le Moing Guy, La bataille des Cardinaux, 20 novembre 1759, Economica, Paris , 2003, ISBN 2717845038.
  • P de La Condamine, Le combat des cardinaux, Réédition Alizés - L'Esprit Large, 2004, ISBN 2911835034.


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