Une journée particulière

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Une journée particulière est un film italo-canadien réalisé par Ettore Scola et sorti en 1977.

Sommaire

[modifier] Synopsis

Ce qui suit dévoile des moments clés de l’intrigue.

En pleine période fasciste italienne, nous assistons à la rencontre de deux êtres que tout semble séparer. Le pays en est à sa 16e année de fascisme et vit un tournant avec une fuite en avant : alliance Allemande, lois raciales, déclaration de guerre (référence historique au 16 mai 1938). À Rome, le 8 mai 1938, Hitler rencontre Mussolini. Tous les Romains ont déserté leurs habitations pour aller assister à la cérémonie. Dans un grand immeuble, Antonietta, en bonne mère de famille nombreuse (conformément à l’endoctrinement mussolinien : un mari tout ce qu’il y a de plus machiste et six enfants), est contrainte de rester à la maison pour s’occuper des tâches ménagères alors qu’elle serait bien allée voir le Duce comme tout le monde. Le hasard va la mettre en contact avec un homme esseulé qu'elle a aperçu dans un appartement de l’autre côté de la cour. Il s’agit de Gabriel, un intellectuel homosexuel qui, pour cette raison, a été exclu de la radio nationale où il était présentateur et est menacé de déportation. Antonietta et Gabriel, sur fond de retransmission radiodiffusée de la parade militaire émanant de chez la concierge, vont d’abord s’affronter idéologiquement avant de se reconnaître dans leur commune et profonde solitude pour finalement vivre d’intenses émotions. À l’issue de cette journée particulière, chacun va de nouveau se retrouver emprisonné : la police vient arrêter Gabriel tandis qu’Antonietta, une fois la famille revenue, va se soumettre, comme d’habitude, au devoir conjugal.

[modifier] Commentaire

L'organisation de l'ensemble d'immeubles et leur équipement intérieur traduisent la politique sociale de l'Italie fasciste.
Les immeubles sont disposés autour d'une cour rectangulaire au centre de laquelle a été construit un jardinet dont la forme rappelle celle des cirques de la Rome antique, comme le Circus Maximus. Les habitants sont obligés, pour sortir de l'immeuble, de contourner cette structure qui évoque la splendeur passée et présente de la Rome impériale. On débouche dans la rue par un porche percé dans l'un des immeubles, sur lequel veille Madame Cécilia, la concierge veuve, qui tout autant que le cerbère chargé de la propreté des lieux, est la garante du respect des bonnes mœurs et de l'orthodoxie fasciste. On l'imagine aisément servir d'indicateur pour la police politique, l'OVRA (Organizzazione di Vigilanza Repressione dell'Antifascismo). La concierge n'est d'ailleurs pas seule à surveiller les habitants de la cité, puisque la cour est juste assez exiguë pour que chacun puisse surveiller son vis-à-vis depuis ses fenêtres. On retrouve dans l'habitat moderne de l'Italie des années 1930 la volonté fasciste de nier l'individu au profit des masses agissantes, orientées vers un la réalisation d'un idéal commun. Les appartements sont spacieux et très bien équipés pour l'époque : évier avec eau courante chaude et froide, salle de bain, toilettes, sans doute chauffage central. La famille Tiberi dispose par ailleurs d'un réfrigérateur et Gabriel a le téléphone. Les habitants appartiennent à la classe moyenne plutôt aisée et les Tibéri doivent sans doute leur présence dans l'immeuble au statut de fonctionnaire affilié PNF (Parti national fasciste). L'OND (Œuvre nationale du temps libre) veille dans l'Italie de Mussolini au bien-être des Italiens. Bien que l'on tente de lutter contre l'exode rural, il est nécessaire de se lancer dans une politique ambitieuse de construction de logements, qui s'inscrit dans les grands travaux que le régime totalitaire (voir totalitarismeva lancer afin de moderniser le pays et d'occuper la main-d'œuvre.

Les immeubles sont pratiquement vides en cette singulière journée, Antonietta mère de famille nombreuse et Gabriel, homosexuel, sont reclus.

Non représentatifs de cette nouvelle Italie en marche, ils n’ont pas le droit d’acclamer les maîtres du moment.

Ces quelques heures vont permettre à ces deux cas extrêmes curieusement associés par leurs différences de communiquer.

La distance des incompréhensions va peu à peu diminuer. Cette mère « truie » porteuse d’abord réticente au discours hors norme de cet homme refoulé suite à sa non-conformité va se laisser conquérir et remettre en question son statut de sous femme, créature soumise aux désirs de son mari nerf de la guerre d'un régime considérant l'homme comme seigneur et maître.

Sa vue baisse, Antonietta est vieille avant l'âge, les tâches quotidiennes épuisantes ne sont porteuses d’aucune reconnaissance de la part d’un régime qualifiant uniquement les femmes d’organismes de reproductions et de machines à dépoussiérer.

Antonietta est harassée par les nombreuses tâches quotidiennes ménagères à effectuer : lits à faire, lessives, repas qu’il faut préparer pour ce troupeau qui rentrera affamé sans considération aucune sur les états d’âmes d’une femme épuisée par le labeur domestique.

Gabriel par ses propos est convaincant, Antonietta grisée se reconsidère puis cède à cette nouvelle passion mais celui-ci se rétracte.

Une journée particulière bénéficie d’une couleur amputée au maximum, à la limite du noir et blanc.

L’image blafarde est le visage terni d’Antonietta, un regard creusé, une exceptionnelle métamorphose acceptée par une grande comédienne perdant de sa superbe pour incarner une femme fanée, détruite par des théories imbéciles non durables à long terme.

Antonietta, en lente destruction morale et physique, trouve l’espace d’un moment une lueur d’espoir véhiculée par un homme courageux digne dans l’acceptation d’un état différent de la normalité.

L’État broyeur de marginaux déportera ce « parasite homosexuel » de société.

Antonietta résignée continuera sa longue agonie.

[modifier] Symbolique

Les objets symboliques du film reflètent la situation de l'Italie fasciste :

  • Robe d'hôtesse d'Antonietta, ses pantoufles, ses bas usés.
  • Le lustre lampadaire
  • La radio : son obsession
  • Image de Gabriele qui contredit le son de la radio
  • Un espace fermé (qui met en place les 3 unités du théâtre classique)
  • Tenue noire de la concierge, en deuil de son mari, idéologie nazie
  • Tableaux, BD d'enfants, journaux : divers objets de propagande du régime

[modifier] Fiche technique

  • Titre : Une journée particulière
  • Titre original : Una Giornata particolare
  • Réalisation : Ettore Scola
  • Scénario : Ettore Scola, Ruggero Maccari, Maurizio Costanzo
  • Musique : Armando Trovajoli
  • Directeur de la photographie : Pasqualino De Santis
  • Cadreur : Idelmo Simonelli
  • Assistants-réalisateur : Silvio Ferri, Marco Pettini
  • Décorateur : Luciano Ricceri
  • Ingénieur du son : Carlo Palmieri
  • Costumes : Enrico Sabbatini
  • Maquilleur : Franco Freda
  • Coiffeuse : Ada Palombi
  • Scriptes : Paola Scola, Ilde Muscio
  • Monteur : Raimondo Crociani
  • Pays d’origine : Italie Italie, Canada Canada
  • Producteur : Carlo Ponti
  • Directeur de production : Giorgio Scotton
  • Sociétés de production : Compagnia Cinematografica Champion (Rome), Canafox (Montréal)

[modifier] Distribution

[modifier] Autour du film

[modifier] Distinctions

[modifier] Vidéographie

[modifier] Liens externes