Techniques de production de feu

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Projet:Savoir-faire
Se nourrir
Eau - Eau potable
Céréales - Riz - Carottes
Feu- Pain -Vinaigre
S'habiller
Vêtements
S'entourer
Domestiquer des animaux
Construire
Four alimentaire
Béton - Charpente
Créer
Dessin - Cinéma
Méta
Alphabétique - Chronologique
Portail:Savoir-faire
Participez !

Il existe de nombreuses techniques de production de feu. Les systèmes d'allumages traditionnels se divisent en deux catégories principales :

  • les procédés par friction, utilisant l'échauffement produit par la friction de deux éléments en bois ;
  • les procédés par percussion, utilisant les étincelles produites par le choc d'une roche dure telle que le silex et d'un minerai de fer, tel que la marcassite (sulfure de fer).

Il est intéressant de noter que les deux techniques modernes les plus répandues, respectivement le briquet et les allumettes, utilisent précisément les mêmes principes.

Un grand feu.
Un grand feu.
Étincelles produites par un briquet en acier frappé contre un silex.
Étincelles produites par un briquet en acier frappé contre un silex.

Sommaire

[modifier] Archéologie du feu

La question de la date à laquelle les humains ont maîtrisé l'usage du feu est encore discutée au sein de la communauté scientifique. Certains sites très anciens (Chesowanja, Gadeb, Koobi Fora en Afrique de l'Est, Aldène, L'Escale en France) ont livré des indices directs (charbons) ou indirects (pierres brûlées, argile calcinée) de combustion mais l'absence de structure de combustion organisée interdit d'exclure d'éventuels incendies naturels.

Certains auteurs estiment que dans un premier temps les groupes humains auraient simplement utilisé le feu prélevé lors des incendies provoqués par la foudre ou les éruptions volcaniques. La capacité de produire véritablement du feu serait plus récente. Cette vision est extrêmement difficile à argumenter : elle est en tout cas conforme à certains récits antiques, tels que le De rerum natura de Lucrèce, ou aux fictions préhistoriques telles que La Guerre du feu. Pour C. Perlès, ce débat présente peu d'intérêt, d'une part parce que l'existence de ces deux phases est indémontrable à partir des données archéologiques, d'autre part parce que l'étape la plus importante reste le passage de la non-utilisation à l'utilisation du feu, qu'il soit produit ou non [1]. La maîtrise du feu constitue effectivement l'une des caractéristiques qui distinguent la lignée humaine du reste du monde animal. La peur du feu chez les animaux doit en revanche être relativisée dans la mesure où certains rapaces et les guépards semblent tirer parti des feux de brousse qui rabattent leurs proies [2].

Les plus anciens foyers incontestables apparaissent à partir d'environ 400 000 ans BP (Menez-Dregan à Plouhinec, Lunel Viel en France, Vértesszőlős en Hongrie) et se multiplient vers 200 000 ans BP (Terra Amata, Caune de l'Arago, Orgnac III, Cagny l'Épinette en France, Bilzingsleben en Allemagne, Torralba et Ambrona en Espagne) [3].

Certaines méthodes de production de feu remontent donc probablement au Paléolithique inférieur, même si les preuves archéologiques directes ne remontent pas à plus de 9 000 ans BP pour les méthodes par friction (grotte de Guitarrero au Pérou).

Les exemples archéologiques de briquets à percussion sont un peu plus nombreux et plus anciens, même si la marcassite présente aussi des problèmes de conservation liés à son oxydation. Les exemplaires les plus probants sont les suivants :

  • Paléolithique supérieur
    • grotte de Vogelherd, Allemagne (Aurignacien, environ 30 000 ans BP)
    • Laussel, Dordogne (Gravettien, 27 à 20 000 ans BP)
    • Trou de Chaleux, Belgique (Magdalénien supérieur, 12 500 BP)
    • Starr Carr, Royaume-Uni
  • Mésolithique
    • Trou al'Wesse, Belgique
  • Néolithique
    • Portalban et Montilier, Suisse (Néolithique Horgen, 3 200 ans av. J.-C.)
  • Chalcolithique
    • Ötzi, l'homme découvert congelé dans un glacier alpin, était équipé d'un nécessaire à feu composé d'un briquet en silex, d'un morceau d'amadou et d'un fragment de pyrite réduit à l'état de poussière (entre 3350 et 3100 av. J.-C.) [4].

[modifier] Techniques traditionnelles

Production de feu par friction à l'aide d'un archet planchette en lierre et foret en pin
Production de feu par friction à l'aide d'un archet
planchette en lierre et foret en pin
Production de feu par friction à l'aide d'un archet planchette et foret en lierre, vue rapprochée
Production de feu par friction à l'aide d'un archet
planchette et foret en lierre, vue rapprochée

[modifier] Friction

Habitants des Vanuatu faisant du feu
Habitants des Vanuatu faisant du feu

Les techniques de production de feu par friction consistent à utiliser l'échauffement produit par le frottement de deux éléments en bois. Le phénomène d'allumage peut se décomposer en deux temps :

  • dans un premier temps, la sciure produite par le frottement va s'accumuler près du point de friction. Elle est, à ce stade, carbonisée mais non encore embrasée.
  • dans un deuxième temps, l'augmentation de température au sein de la sciure permet la naissance d'une petite braise de sciure (embrasement par source de chaleur proche).

Cette petite braise de sciure de bois pourra enflammer un combustible fin, comme de la paille, de l'herbe séchée, des feuilles, des aiguilles de conifères sèches ou de l'amadou, à la condition d'un apport suffisant d'oxygène par ventilation buccale ou manuelle. Une fois le combustible primaire embrasé, il est possible d'utiliser du petit bois pour obtenir une flamme importante. Le gros bois sera rajouté après, l'essentiel étant de faire croître le feu progressivement, sans l'épuiser tout de suite sur une bûche qui prendra feu difficilement.

Le frottement peut s'exercer de différentes façons : sciage d'une planchette aménagée avec une autre planchette ou une baguette, friction longitudinale oblique d'une baguette sur un socle à rainure, giration (forage d'une planchette aménagée par une baguette taillée en pointe). Dans ce dernier cas, il est possible de faciliter le mouvement de rotation en utilisant un « arc-à-feu » ou « archet à feu ». L'élément mobile doit pouvoir aller et venir rapidement sans sortir de la cavité aménagée dans le bois fixe. L'arc-à-feu facilite l'obtention du feu. Il a été utilisé chez les Amérindiens, dans l'ancienne Égypte, en Australie… Le principe de l'archet a également été utilisé pour réaliser des outils à percer en contexte pré-industriel.

Contrairement à une croyance très répandue, la dureté relative des deux éléments en bois n'est pas importante : en revanche, au moins un des deux éléments en jeu, doit être un bois riche en fibres microscopiques longues produisant une sciure aérée (lierre, laurier, marronnier, noisetier, tilleul, bambou, vergerette du Canada…). Ces bois sont dits auto-allumeurs. La dureté n'intervient que secondairement, dans la facilité à produire la sciure. Des bois plutôt tendres (dureté = 3 en moyenne) seront donc préférés aux bois durs. [5]

Production de feu par percussion : matériel utilisé par J. Collina-Girard.en bas : minerais de fer (pyrite, marcassite)au-dessus : amadouau-dessus : lame de silex utilisée pour percuter le minerai de feren haut : reproduction de briquet historique en acier.
Production de feu par percussion : matériel utilisé par J. Collina-Girard.
en bas : minerais de fer (pyrite, marcassite)
au-dessus : amadou
au-dessus : lame de silex utilisée pour percuter le minerai de fer
en haut : reproduction de briquet historique en acier.

[modifier] Percussion

Pour qu'il y ait étincelle, il faut percuter tangentiellement un sulfure de fer, comme la pyrite ou la marcassite, à l'aide d'une pierre dure (comme du silex, du quartz, du granite ou même un autre nodule de sulfure de fer). Les particules de soufre arrachées au sulfure de fer s'oxydent immédiatement dans l'air (réaction d'oxydation exothermique) générant des étincelles particulaires, incandescentes et chaudes, dont la durée de vie est suffisamment longue pour qu'on puisse les récupérer sur une matière combustible fine.

Le choc de deux silex ne permet pas d'allumer un feu car les étincelles produites sont d'une part, trop froides, et d'autre part, non particulaires et pas suffisamment stables pour pouvoir être captées (simple phénomène de triboluminescence, comparable aux étincelles que l'on peut produire en frottant deux morceaux de sucre dans l'obscurité).

Les étincelles obtenues de cette manière doivent être immédiatement réceptionnées sur un combustible comme par exemple du linge carbonisé, des feuilles sèches et fines préalablement carbonisées, des champignons inflammables comme l'amadou ou certaines moelles de végétaux. Ce combustible primaire, qui transforme l'étincelle reçue en braise, est nommé initiateur. L'initiateur doit ensuite être placé dans une matière végétale fine (foin, aiguilles de conifères…) pour générer une flamme après ventilation.

[modifier] Techniques modernes

[modifier] Magnification de la lumière du Soleil

Utilisation du soleil pour défendre Syracuse
Utilisation du soleil pour défendre Syracuse

L'utilisation d'une loupe, d'un miroir concave ou d'un ensemble de miroirs permet de concentrer la lumière solaire en un point situé sur un combustible et d'y allumer un feu. Pour faire un feu avec une loupe, il faut faire varier la hauteur de la loupe afin de concentrer les rayons du Soleil en un seul point (le point focal image).

L'utilisation de miroirs ardents est attribuée à Archimède, qui les aurait utilisés pour brûler les vaisseaux romains attaquant Syracuse. De nombreux éléments historiques et expérimentaux permettent de considérer cet épisode comme un mythe (voir Le siège de Syracuse et les miroirs d'Archimède).

Les fours solaires modernes tels que celui de Font-Romeu fonctionnent sur le principe de la concentration de la lumière du Soleil.

Certains survivalistes proposent d'appliquer le principe du miroir convergent en utilisant une canette en aluminium dont on aurait poli le culot avec un abrasif (chiffon, voire chocolat ou dentifrice[6]). Une fois que l'on dispose d'un bon miroir, il faut encore en déterminer le point de convergence. Un papier foncé permet de facilement le trouver, en le plaçant au dessus du culot de la canette orienté face au soleil, et en le déplaçant de manière à obtenir le disque lumineux le plus petit possible. Une fois trouvé, il suffit alors d'y placer un matériau inflammable, comme par exemple une brindille, qui devrait alors s'enflammer très rapidement. Il est possible ensuite de transmettre la flamme à des combustibles plus importants, en soufflant doucement pour activer la combustion.

[modifier] Allumettes

Icône de détail Article détaillé : allumette.
Une pile d'allumettes
Une pile d'allumettes

L'invention des allumettes date du XIXe siècle, mais le mot allumette date des environs de l'an 1200. Il désignait alors une petite bûche destinée à faire prendre le feu.

[modifier] Briquet

Icône de détail Article détaillé : briquet.
Un briquet à gaz
Un briquet à gaz

L'allumoir est un ancêtre du briquet. Ce dernier contient une réserve de combustible sous forme de gaz, qui permet de maintenir une flamme une fois que des étincelles ont été fournies par la pierre à briquet.

[modifier] Arc électrique

Un arc électrique peut être utilisé pour enflammer un gaz inflammable, tel que le gaz de ville ou le mélange oxy-acétylène employé pour les chalumeaux. Cette technique est utilisée couramment pour allumer les gazinières ou les briquets dits électroniques, l'arc électrique étant produit par un cristal piézoélectrique.

[modifier] Voir aussi

[modifier] Références

  1. C. Perlès, Préhistoire du feu, 1977, Paris, Masson, 180 p.
  2. J. Goudsblom, « The human monopoly on the use of fire ; its origins and conditions », Human Evolution, vol. 1, n° 6, pp. 517-523.
  3. Perlès, C., « L'apparition du feu », in: Le temps de la Préhistoire, 1989, vol. 2, Société Préhistorique Française, Édition Archeologia, pp. 110-112.
  4. Photo du matériel d'Ötzi
  5. J. Collina-Girard, Le feu avant les allumettes, Expérimentation et mythes techniques
  6. (en)conseils sur wildwoodsurvival.com

[modifier] Bibliographie

  • P. Cattelain, « La flamme jaillit... et la lumière fut ! », in Les grandes inventions de la Préhistoire, C. Bellier et P. Cattelain (dir.), Treignes, CEDARC, 1998, p. 19-26.
  • J. Collina-Girard, « Le feu domestiqué », "Pour la Science", 1999, p 56-61.
  • J. Collina-Girard, Le feu avant les allumettes, Expérimentation et mythes techniques, , Collection Archéologie expérimentale et Ethnographie des techniques, XIV, Éditions de la Maison des Sciences de l'homme, Paris, 1998, 150 pages dont 24 ill. et 16 pl. en couleurs.
  • J. Parmentier, « Faire du feu comme nos ancêtres », Éditions Eyrolles, Paris, 2003, 120 pages et un CD-ROM. (ISBN 2-212-11370-6)
  • C. Perlès, « L'homme préhistorique et le feu », La Recherche, 1975, vol. 6, n° 60, pp. 829-839.
  • B. Roussel et al. (2002).- L’Amadouvier, grande et petite histoire d’un champignon. Supplément hors-série des Annales de la Société d’Horticulture et d’Histoire Naturelle de l’Hérault, 48 p.
  • B. Roussel et P. Boutié, "La grande aventure du feu", Edisud, 2006, 96p , ISBN 2-7449-0630-1 .

[modifier] Liens internes

[modifier] Liens externes

b:Accueil

Wikibooks propose un ouvrage abordant ce sujet : Techniques de production de feu.

commons:Accueil

Wikimedia Commons propose des documents multimédia libres sur Catégorie:équipement pour faire du feu.