Siège d'Uxellodunum

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Position d'Uxellodunum carte de 1648 d'après Jules César
Position d'Uxellodunum carte de 1648 d'après Jules César

Uxellodunum est le nom d'un oppidum gaulois, situé dans le Quercy actuel. Il est surtout connu pour avoir été le lieu de la dernière bataille de la guerre des Gaules, en – 51.

Son nom signifie la « forteresse élevée » (uxel, élevé, et dunum, latinisation du gaulois dunon, forteresse - voir Dun (forteresse).

Sommaire

[modifier] L'état des régions Cadurque et Rutène sous César

Les routes Rutènes et Cadurques sous César (sur la carte Cahors = Cadurci = Uxellodunum)
Les routes Rutènes et Cadurques sous César (sur la carte Cahors = Cadurci = Uxellodunum)
La région sous César
La région sous César

[modifier] La bataille d'Uxellodunum

César reçoit les messagers
César reçoit les messagers

Un an après la reddition de Vercingétorix à Alésia, deux chefs gaulois, Lucterius et Drappès, suivis de quelques milliers d'hommes et poursuivis par le légat Caninius, se réfugièrent dans cette place forte des Cadurques, peuple dont Lucterius était originaire. Malgré la capture de leurs deux chefs, les assiégés tinrent tête aux Romains, et il fallut que César en personne s'en mêlât.

Ayant obtenu la reddition de la citadelle en détournant la source qui l'alimentait en eau, le chef romain fit couper les mains à tous les combattants adverses, afin de décourager de nouvelles révoltes.

[modifier] L'épisode décrit par Aulus Hirtius

Traduction du texte en latin [1] :

César combat Drappès
César combat Drappès

César était chez les Carnutes quand il reçoit coup sur coup plusieurs lettres de Caninius l’informant de ce qui avait été fait concernant Drappès et Luctérios, et de la résistance à laquelle s’obstinaient les habitants d’Uxellodunum. Bien que leur petit nombre lui parût méprisable, il estimait cependant qu’il fallait châtier sévèrement leur opiniâtreté,//...quant à lui, avec toute la cavalerie, il va rejoindre Caninius à marches forcées.

Son arrivée à Uxellodunum surprit tout le monde ; quand il vit que les travaux de fortification entouraient complètement la place, il jugea qu’à aucun prix on ne pouvait lever le siège ; et comme des déserteurs lui avaient appris que les assiégés avaient d’abondantes provisions de blé, il voulut essayer de les priver d’eau. Une rivière coulait au milieu d’une vallée profonde qui entourait presque complètement la montagne sur laquelle était juché Uxellodunum. Détourner la rivière, le terrain ne s’y prêtait pas : elle coulait, en effet, au pied de la montagne dans la partie la plus basse, si bien qu’en aucun endroit on ne pouvait creuser des fossés de dérivation. Mais les assiégés n’y avaient accès que par une descente difficile et abrupte : pour peu que les nôtres en défendissent l’abord, ils ne pouvaient ni approcher de la rivière, ni remonter, pour rentrer, la pente raide, sans s’exposer aux coups et risquer la mort. S’étant rendu compte de ces difficultés que rencontrait l’ennemi, César posta des archers et des frondeurs, plaça même de l’artillerie sur certains points en face des pentes les plus aisées, et ainsi il empêchait les assiégés d’aller puiser l’eau de la rivière.

Siège d'Uxellodunum
Siège d'Uxellodunum

Alors ils se mirent à venir tous chercher de l’eau en un seul endroit, au pied même du mur de la ville, où jaillissait une source abondante, du côté que laissait libre, sur une longueur d’environ trois cents pieds, le circuit de la rivière. Chacun souhaitait qu’il fût possible d’interdire aux assiégés l’accès de cette source, mais César seul en voyait le moyen il entreprit de faire, face à la source, pousser des mantelets le long de la pente et construire un terrassement au prix d’un dur travail et de continuelles escarmouches. Les assiégés, en effet, descendant au pas de course de leur position qui dominait la nôtre, combattent de loin sans avoir rien à craindre et blessent un grand nombre de nos hommes qui s’obstinent à avancer ; pourtant, cela n’empêche pas nos soldats de faire progresser les mantelets et, à force de fatigue et de travaux, de vaincre les difficultés du terrain. En même temps, ils creusent des conduits souterrains dans la direction des filets d’eau et de la source où ceux-ci aboutissaient ; ce genre de travail pouvait être accompli sans aucun danger et sans que l’ennemi le soupçonnât. On construit un terrassement de soixante pieds de haut, on y installe une tour de dix étages, qui sans doute n’atteignait pas la hauteur des murs (il n’était pas d’ouvrage qui permît d’obtenir ce résultat), mais qui, du moins, dominait l’endroit où naissait la source. Du haut de cette tour, de l’artillerie lançait des projectiles sur le point par où on l’abordait, et les assiégés ne pouvaient venir chercher de l’eau sans risquer leur vie si bien que non seulement le bétail et les bêtes de somme, mais encore la nombreuse population de la ville souffraient de la soif.

Siège d'Uxellodunum
Siège d'Uxellodunum

Une aussi grave menace alarme les assiégés, qui, remplissant des tonneaux avec du suif de la poix et de minces lattes de bois, les font rouler en flammes sur nos ouvrages. Dans le même temps, ils engagent un combat des plus vifs, afin que les Romains, occupés à une lutte dangereuse, ne puissent songer à éteindre le feu. Un violent incendie éclate brusquement au milieu de nos ouvrages. En effet, tout ce qui avait été lancé sur la pente, étant arrêté par les mantelets et par la terrasse, mettait le feu à ces obstacles mêmes. Cependant nos soldats, malgré les difficultés que leur créaient un genre de combat si périlleux et le désavantage de la position, faisaient face à tout avec le plus grand courage. L’action, en effet, se déroulait sur une hauteur, à la vue de notre armée, et des deux côtés on poussait de grands cris. Aussi chacun s’exposait-il aux traits des ennemis et aux flammes avec d’autant plus d’audace qu’il avait plus de réputation, voyant là un moyen que sa valeur fût mieux connue et mieux attestée.

César, voyant qu’un grand nombre de ses hommes étaient blessés, ordonne aux cohortes de monter de tous les côtés à l’assaut de la montagne et de pousser partout des clameurs pour faire croire qu’elles sont en train d’occuper les remparts. Ainsi fait-on et les assiégés, fort alarmés, car ils ne savaient que supposer sur ce qui se passait ailleurs, rappellent les soldats qui assaillaient nos ouvrages et les dispersent sur la muraille. Ainsi le combat prend fin et nos hommes ont vite fait ou d’éteindre l’incendie ou de faire la part du feu. La résistance des assiégés se prolongeait, opiniâtre et, bien qu’un grand nombre d’entre eux fussent morts de soif, ils ne cédaient pas à la fin, les ruisselets qui alimentaient la source furent coupés par nos canaux souterrains et détournés de leur cours. Alors la source, qui ne tarissait jamais, fut brusquement à sec, et les assiégés se sentirent du coup si irrémédiablement perdus qu’ils virent là l’effet non de l’industrie humaine, mais de la volonté divine. Aussi, cédant à la nécessité, ils se rendirent.

//...En conséquence, il fit couper les mains à tous ceux qui avaient porté les armes et leur accorda la vie sauve, pour qu’on sût mieux comment il punissait les rebelles. Drappès, qui, je l’ai dit, avait été fait prisonnier par Caninius, soit qu’il ne pût supporter l’humiliation d’être dans les fers, soit qu’il redoutât les tourments d’un cruel supplice, s’abstint pendant quelques jours de nourriture et mourut de faim. Dans le même temps Luctérios, dont j’ai rapporté qu’il avait pu s’enfuir de la bataille, était venu se mettre entre les mains de l’Arverne Epasnactos : il changeait, en effet, souvent de résidence, et ne se confiait pas longtemps au même hôte, car, sachant combien César devait le haïr, il estimait dangereux tout séjour de quelque durée : l’Arverne Epasnactos, qui était un grand ami du peuple Romain, sans aucune hésitation le fit charger de chaînes et l’amena à César.

[modifier] La localisation

Uxellodunum sur la Dordogne
Uxellodunum sur la Dordogne
Uxellodunum sur le Lot
Uxellodunum sur le Lot

[modifier] Un débat tranché par l'archéologie ? …

Tout comme pour Alésia, l'emplacement exact de l'oppidum antique a fait l'objet d'âpres disputes entre différentes communes désireuses de s'approprier la gloire d'avoir été le dernier village à résister à l'envahisseur.

Certaines enluminures de manuscrits du Moyen Âge désignent Capdenac-le-haut, ensuite les géographes du siècle des lumières ont deux versions : les Hollandais comme Ortelius et Blaeu le situent sur la Dordogne, mais ignorent les rivières Lot et Aveyron, cette disposition sera mise à jour par un géographe français en 1692 [2], [3]. La version classique sur la rivière Lot est beaucoup plus diffusée.

Il semble que l'on ait là deux sites d'exceptionnelle importance qui tous deux pouvaient prétendre avoir accueillis la bataille :

  • Capdenac [4] de fort gaulois se transforme en fort et ville médiévale fortifiée et correspond géographiquement à la description de la topographie du texte latin. Jacques-Joseph Champollion, frère du célèbre déchiffreur des hiéroglyphes, concluait dans son ouvrage de 1820, Nouvelles recherches sur la ville gauloise d'Uxellodunum, que Capdenac-le-haut était l'antique Uxellodunum ; depuis lors, de nombreuses autres commissions sont arrivées à la même conclusion que Champollion. Une fontaine asséchée est visible sur le site, ainsi que les traces de galeries d'assèchement, ainsi que les restes de nombreux ouvrages de sièges romains. De nombreux et intéressants vestiges sont exposés dans un petit musée créé par l'APUC, dont la viste est gratuite. La nature de ces traces de galerie et des restes d'ouvrages ne fait pas l'objet d'un consensus au sein de la profession, et relève de l'opinion de leurs promoteurs. Le site de Capdenac n'est pas cependant retenu aujourd'hui par la communauté des historiens et archéologues.
  • le Puy d'Issolud qui par son importance archéologique et sa situation peut faire penser au lieu de cet illustre siège. De plus il peut aussi correspondre au point de chute d'hommes armés en déroute poursuivis par Caninius Rebilus qui sécurisait la zone de la vallée du Lot, en bouclant tous les accès des vallées débouchant de l'Aubrac à partir d'Anderitum et Adsilanum à l'Est, pour les empêcher d'atteindre la Narbonnaise. Ceci obligeait les rescapés d'Alésia, à passer à l'ouest du massif central où les Cadurques de Lucterios d'avant Alésia avaient plus d'une place forte. Des fouilles récentes autorisées par la DRAC ont été entreprises sur le site en 1997 et pendant 9 années consécutives à la Fontaine-de-Loulié sous la direction de Jean-Pierre Girault, archéologue bénévole de grande qualité. Ces fouilles ont confirmé les découvertes du XIXème siècle[5] et des années 1920 et 1930. Elles ont dégagées un nombre considérable d'armes romaines et de matériels typiques de la période de la guerre des Gaules (traits de catapultes, flèches à barbelures, clous de sandales)[6]. Ce matériel sert désormais de référence archéologique[7] et les résultats des fouilles de J.-P. Girault a été présentés et validés dans des colloques internationaux[8] ainsi que diffusés dans la presse de vulgarisation scientifique[9].

[modifier] Des débats qui continuent malgré l'accord des historiens et archéogues sur le Puy-d'Issolud

Si Capdenac a été cité comme proche de la description d'Hirtius, le Puy-d'Issolud à Vayrac convient aussi et peut désormais s'appuyer sur des trouvailles de matériel bien daté, à l'instar des sites de Gergovie et Alésia. Localement cependant la querelle n'est pas éteinte, et on a pu aussi avancer Saint-Céré[réf. nécessaire], Luzech[réf. nécessaire] ou autre ? D'autres[réf. nécessaire] citent les recherches menées par André David, l'inventeur de la grotte préhistorique du Pech Merle et son compagnon René Brondel, qui mettent en avant le roc de Colonjat dans la vallée du Vers, oppidum avéré à proximité de celui de Murcens mais un peu en aval sur l'autre rive. En tous cas, selon les écrits (plus particulièrement selon l'interprétation du texte latin d'Hirtius faite par l'APUC), il s'agit de trouver un oppidum rocheux, haut perché à l'emplacement d'une boucle d'une rivière formant une presqu'île, où la largeur maximum côté terre est de 300 pieds (environ 90 m) avec une source en son milieu à mi-hauteur.

Le 26 avril 2001 à Toulouse, faisant suite aux découvertes sur les fouilles de Jean-Pierre Girault à la fontaine de Loulié du Puy d'Issolud, le ministère de la Culture a annoncé officiellement que le site du Puy d'Issolud (Vayrac et Saint-Denis-lès-Martel) était celui d'Uxellodunum. Toutefois, les autres prétendants ne s'avouent pas vaincus et peuvent espérer d'autres expertises afin que de nouvelles fouilles permettent de clairement identifier le site d'Uxellodunum, sachant que depuis la fin du XVIe siècle Cahors, Luzech, Capdenac, et le Puy d'Issolud à Vayrac sont en lice. Il est à noter cependant que les techniques modernes de fouilles, les analyses et méthodes de datation ainsi que les connaissances scientifiques et archéologiques générales des archéologues contemporains permettent sans faire injure aux chercheurs et érudits d'autrefois d'en savoir beaucoup plus et de tirer des enseignements et conclusions de manière plus certaines, comme cela a été fait au Puy d'Issolud sous la direction de Jean-Pierre Girault. Néanmoins, l'association A.P.U.C de Capdenac-Le-Haut conteste l'officialisation en argumentant que leur site reste le plus vraisemblable, car d'après eux approchant le plus la description d'Hirtius,et déclarant que le site du Puy d'Issolud ne correspond pas à celle-ci. On retrouve là la confiance dans la seule philologie qui a aussi marqué les débats sur Alésia et Gergovie et qui ne correspond plus à l'état actuel de la recherche qui s'appuie sur la confrontation des sources écrites et du matériel archéologique[10]

[modifier] Références

  1. Le texte en latin Juli Caesaris Commentariorum de bello gallico - Liber primus.
  2. Plan géometrique du Puy d'Issolus ou l'on croit qu'etoit située la ville de Uxellodunum. Document Gallica.
  3. Carte de la Celtique de l'Aquitaine et de la Province romaine pour servir à l'intelligence de l'Histoire romaine et à celle des Conquêtes de Cesar dans la Gaule / Par Henri Liébaux (1730). Document Gallica.
  4. Les arguments avancés par Capdenac pour montrer qu'Uxellodunum se situait sur son territoire.
  5. BSEL - Avril-Juin 1999
  6. BSEL - Juillet-Septembre 1998 - J.-P. Girault
  7. Voir ainsi G.Renoux, J.-M. Pailler, F.Dabosi, « Première étude paléométallurgique des armes en fer du Puy d’Issolud (Lot) » La revue de Métallurgie, CIT, décembre 2001 articles/metal/pdf/2001/11/P1147.pdf
  8. J.-P. Girault, « Recherches à la Fontaine de Loulié (Saint-Denis-les-Martel, Lot). Nouveaux éléments sur la bataille d’Uxellodunum », Aquitania, Suppl. 14/1 : Les âges du fer dans le sud-ouest de la France (actes du colloque 20-23 mai 2004), 2007
  9. "Uxellodunum le dernier combat", L'Archéologue, 660, 2002, pp. 22-26
  10. « Régulièrement, la presse aime relancer le débat sur la localisation des sites d'Alésia de Gergovie ou de Bibracte : "science officielle" contre "gens du terrain" soucieux de donner tort à leur inventeur, Napoléon III . La polémique tient du combat d'arrière garde : au XIXe siècle, tout érudit local se devait de prouver que "son" site collait le mieux au récit de la Guerre des Gaules. Du désir à la réalité, il y a un fossé. Ou plutôt... des fossés, relevés par les archéologues. Aux savantes interprétations, ces derniers opposent mille faits objectifs : plans, armes, pièces d'équipement et projectiles d'artillerie datés de l'époque césarienne, inscriptions... Inexplicables hors du contexte de la Guerre des Gaules, ces objets sont évidemment absents des autres sites. Ils sont pourtant de ceux qui font toute la différence entre le "possible" et le "plausible". (extrait du catalogue de l'exposition de Bibracte "sur les traces de César") »[ http://gergovie.arafa.fr/]

[modifier] Liens externes

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