Morvan Lebesque

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Morvan Lebesque (Nantes, 11 janvier 1911- Brésil, 4 juillet 1970), de son vrai nom Maurice Lebesque, était journaliste. Il est né à Nantes, dans la Cité des Ducs de Bretagne, quai Barbin (devenu quai Barbusse), et mena ses études secondaires au lycée Clemenceau, en étant condisciple de Julien Gracq. En 1930 il est rédacteur en chef à l'Écho de la Loire. Responsable pour le pays nantais du Parti autonomiste breton (PAB), il quitte ce dernier en 1931 et fonde, avec Théophile Jeusset, le mouvement et la revue Breiz da zont. Durant l'occupation, il travaille au journal indépendantiste L'Heure bretonne, puis à diverses revues à Paris où il rencontre et se lie d'amitié avec Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir. Après la Libération, il entre en 1952 au Canard enchaîné, et participe à partir de 1966 à la revue autonomiste Ar Vro, rivale de la revue progressiste et laïque Ar Falz.

Sommaire

[modifier] Citations

« Rien de plus haïssable que le provincialisme raciste de Barrès. »

« Max Jacob est-il moins breton pour nous parce qu'il est aussi juif ? »

« Il n'y a pas de centralisme démocratique. »

« Solidaire des rois qui ont colonisé mon pays ou des "républicains" bourgeois qui ont assassiné sa culture, jamais. Mais de Proudhon, mais de Jaurès, oui, certes, profondément, passionnément ! Quant aux Français, je n'ai même pas à leur être solidaire : je suis eux, je suis vous. Sans vous, mon combat breton n'a pas de sens. »

« Je souhaite en Bretagne beaucoup d'"étrangers", pour employer un mot qui pour moi n'a pas de sens ; je souhaite des Juifs, des Arabes, des Noirs, et nous ne logerons pas, nous, les travailleurs immigrants dans des bidonvilles ; ma patrie qui a résisté à quatre siècles de colonialisme n'a pas peur de devenir une terre d'accueil, elle ne craint que la désertion. »

[modifier] Nationalisme breton

En 1929, il est responsable pour le pays nantais du PAB (Parti autonomiste breton auquel il appartient de 1929 à 1931). En 1931, il scissionne avec Théophile Jeusset, et fonde le mouvement et la revue Breiz da zont, de tendance socialiste national breton. En décembre 1931, Jeusset lance l'éphémère Parti Nationaliste Breton Intégral. Morvan Lebesque, promu délégué général à la propagande, envoie un message au congrès constitutif : « Je fais le serment, de lutter de toutes mes forces pour l'établissement de la Nation bretonne et de l'État breton social-nationaliste » . Il écrira dans la première période de la revue Breiz da zont. Le thème de ses articles sont sur : le message qu'il voulait faire passer au congrès du PNBI dont le contenu est nationaliste-breton, un autre est sur « Le socialisme national breton » où le contenu est loin d'être typique du discours « fasciste » de gauche.

[modifier] Collaboration

[modifier] L'Heure bretonne

En août 1940, il est le premier rédacteur en chef de L'Heure Bretonne, le journal qui deviendra tellement collaborationniste et antisémite qu'il préféra arrêter d'y travailler et désertera alors le Parti national breton (PNB) tenu par Olier Mordrel. Il n'y reste donc pas longtemps (2 mois selon certains, 12 jours selon lui : cf. Chroniques de Bretagne, p.60). Il se défendra heureusement toujours de cette courte période en arguant « de sa naïveté et en assurant qu'il est parti dès qu'il s'est aperçu des velléités pro-allemandes du journal ». Il définira dans ce journal l'épisode de Mers el Kébir comme un « tableau rouge peint avec le sang des Bretons ». (29 septembre 1940). Et il est vrai que la plupart des marins qui ont succombé lors de ce drame terrible étaient bretons.

[modifier] Paris

Remonté sur Paris en septembre 1940, il survit en travaillant comme pigiste jusqu'en 1943 à Je suis partout, le journal collaborationiste de Robert Brasillach. Il fit paraître une nouvelle Le vieux, le 21 février 1941, et une chronique intitulée 150 ans de variétés du 21 mars au 2 juin 1941. Il écrit aussi dans Le Petit Parisien, qui publie du 6 au 11 octobre 1941 une série intitulée Un héros de la liberté, le Président Krüger, livre repris en volume la même année par Sorlot. Il remplit aussi la fonction de secrétaire auprès du critique dramatique de Je suis partout, Alain Laubreaux.

[modifier] Le Canard enchaîné

Il entre au Canard enchaîné en 1952, en connaissance de son passé de journaliste breton, en trouvant sa rubrique et son style, entre polémique et pamphlet, pessimisme actif et humanisme laïc. Albert Camus était son modèle. Il acquit rapidement une très grande popularité auprès des lecteurs du Canard enchaîné (il fut pour nombre de lecteurs un véritable directeur de conscience), mais se tint en marge de la rédaction. Il se contenta d'envoyer ses papiers par la poste ou par coursier et n'apparut plus que pour les grandes occasions. En 1960, on estima que ses articles étaient lus par les 350 000 acheteurs hebdomadaires du Canard enchaîné. Certains sont ronéotypés, imprimés sous forme de tracts, distribué dans des écoles ou affichés comme « journal mural » dans des ateliers. Une université américaine les a traduits et inscrits à son programme. On estime qu'en réalité, grâce à cette diffusion bénévole, le nombre de ses lecteurs dépasse le million.

[modifier] Ar Vro

Il participe en 1966 à la revue Ar Vro sous le pseudonyme de Yann Lozac’h, avec, des anciens de Breiz Atao et de Stur comme Meavenn, Jean-Marie Chanteau, Olier Mordrel, Alain Guel, Yann Kerlann. Il tient aussi la rubrique cinéma dans la revue Carrefour. Il participe au mensuel "Le Peuple breton", organe de l'"Union Démocratique bretonne", de 1968 à sa mort.

[modifier] La découverte ou l'ignorance, le théâtre

  • La chanson des Tri Yann, La découverte ou l'ignorance provient d'un texte écrit par Morvan Lebesque dans son livre Comment peut-on être Breton ? Voici l'extrait du livre (les guillemets et l'italique sont d'origine, les passages en gras sont ceux figurant dans la chanson de Tri Yann) :

« Le breton est-il ma langue maternelle ? Non : je suis né à Nantes où on ne le parle pas. Est-ce que je le parle ? Rarement, et pas assez bien pour l'écrire. Suis-je même breton ? Vraiment, je le crois et m'en expliquerai. Mais de « pure race », qu'en sais-je et qu'importe ?

  • "Vous n'êtes donc pas raciste ?
  • Ne m'insultez pas.
  • Séparatiste ? Autonomiste ? Régionaliste ?
  • Tout cela, rien de cela. Au-delà.
  • Mais alors, nous ne nous comprenons plus. Qu'appelez-vous breton ? Et d'abord, pourquoi l'être ?Question nullement absurde. Français d'état-civil, je suis nommé français, j'assume à chaque instant ma situation de Français ; mon appartenance à la Bretagne n'est en revanche qu'une qualité facultative que je puis parfaitement renier ou méconnaître. Je l'ai d'ailleurs fait. J'ai longtemps ignoré que j'étais breton. Je l'ai par moment oublié. Français sans problème, il me faut donc vivre la Bretagne en surplus ou, pour mieux dire, en conscience : si je perd cette conscience, la Bretagne cesse d'être en moi ; si tous les Bretons la perdent, elle cesse absolument d'être. La Bretagne n'a pas de papiers. Elle n'existe que dans la mesure où, à chaque génération, des hommes se reconnaissent bretons. À cette heure, des enfants naissent en Bretagne. Seront-ils bretons ? Nul ne le sait. À chacun, l'âge venu, la découverte ou l'ignorance.
Mais, par un juste retour des choses, cette identité qu'on nous dénie retrouve une rigueur qui manque aux cartes officielles. Expulsés du cadastre, nous retrouvons par force cette conscience en nous. Comment peut-on être breton ? On ne le peut pas. Et pourtant nous le sommes. Il nous faut donc perpétuellement nous interroger, a moins de vivre sans nous comprendre; au fond de nous, nous découvrons cette différence surprenante; nous l'analysons, nous en débattons; elle devient une expérience (...) telle qu'à chaque génération, il se trouve toujours des bretons pour la vivre et se la raconter entre eux. Et toujours, à quelques nuances près, ils en viennent au même récits : les rencontres passionnées, les premiers réflexes excessifs ou puérils, l'exaltation et le déchirement, puis le passage des sentiments à la raison, le long mûrissement de l'idée bretonne. Enfin, la conclusion : être breton signifie bien au-delà, servir de son mieux son temps et les hommes. Car cette conscience devient pour beaucoup d'entre nous engagement politique - et logiquement, engagement à gauche. Par le dépassement d'un sentiment breton primaire, elle s'élève à la politique générale et nous fournit une clef pour mieux la comprendre. Loin de retrancher, elle rassemble; elle signe des écrits ou des actes étrangers à la Bretagne, accordés au mouvement du monde. Nous lui donnons un nom, l'Emsav : réveil, résurrection. Définition d'une patrie, mais aussi de la démocratie, toutes deux inséparables.
Paradoxalement, sa mort civile atteste la Bretagne. Nous la pensons, donc elle est.  »
  • Il fait jouer quatre pièces de théâtre : La Découverte du Nouveau Monde (d'après Lope de Vega), Venise Sauvée (d'après Ottway), Les fiancés de la Seine et toujours d'actualité l'Amour parmi nous.

Il meurt au Brésil en juillet 1970 au cours d'une tournée de conférences sur la culture bretonne.

[modifier] Publications

  • Un héros de la liberté, Krüger le lion, Sorlot, 1941.
  • Jacques Cartier, découvreur de la Nouvelle France. Denoël. 1942. dessins de Dominique. Coll. La Fleur de France ; 4. Les Grands navigateurs
  • Soldats sans espoir, Laffont, 1947
  • La loi et le système, coll. L'Histoire Immédiate, Ed du Seuil
  • Premières chroniques du Canard, Pauvert, 1960
  • Camus par lui-même, coll Écrivains de Toujours, Ed du Seuil, 1963
  • La télévision entre les lignes, avec l'autoportrait d'un producteur Jean-Christophe Averty (en coll.avec Lucien Barnier), Casterman, 1967
  • Chroniques du Canard, Laffont, coll. Libertés, 1968
  • Comment peut-on être Breton ? Essai sur la Démocratie Française, Ed du Seuil, coll. L'Histoire Immédiate, 1970. Réédité en 1983, au Seuil, avec une préface de Gwenc’hlan Le Scouëzec - la couverture de la réédition porte un drapeau breton flottant au vent vers la gauche.
  • "Chroniques bretonnes", recueil de 2 entretiens et de 14 chroniques parues dans "Le Peuple Breton". Comprend aussi une chronique parue dans "La Nation bretonne", éd. Bretagnes, Taulé, 1983.

[modifier] Références


[modifier] Bibliographie

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