Journées des 5 et 6 octobre 1789

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Au cours des journées des 5 et 6 octobre 1789, le peuple de Paris va à Versailles pour demander du pain à Louis XVI, la Garde nationale est en retard, laissant dans un premier temps le roi face au peuple. Chargé de la sécurité du château, La Fayette est incapable d'empêcher son invasion meurtrière. Il sauve néanmoins à Versailles la famille royale qui est emmenée à Paris où vient s'établir aussi l'Assemblée constituante.

Sommaire

[modifier] Départ

Le prétexte de ces journées fut une démonstration contre la cocarde nationale, commise le 2 octobre à la suite d'un repas offert dans la salle de spectacle de Versailles, par les gardes du corps aux officiers du régiment de Flandres. Excité par ce bruit et par quelques autres rumeurs, le peuple de Paris, en proie à une disette, s'émeut, se porte en masse sur l’Hôtel de ville mal défendu par quelques gardes nationaux et, traînant à sa suite trois canons qu'il leur a enlevés, se met en marche pour Versailles sous la conduite d'un héros de la Bastille, nommé Maillard, en vomissant les imprécations les plus épouvantables contre la reine.

[modifier] La Fayette à Versailles

La Fayette, accouru trop tard pour empêcher ces premiers désordres, lutte toute la journée pour en limiter les conséquences. Enfin un ordre de la Commune de Paris l’envoie à Versailles ; il part à la tête de quelques gardes nationaux, auxquels se joignent plusieurs militaires dévoués à l'ordre et à la monarchie, et certains hommes des faubourgs qu'attirent l'espoir du pillage. Le roi, qui chassait à Meudon, avait été rappelé en toute hâte, mais aucune résistance n'était organisée, tandis que la foule grossissait rapidement. Il est dix heures du soir quand La Fayette débouche de la grande avenue de Paris à la tête de sa colonne. Le général fait prêter à ses hommes le serment d'être fidèles à la nation, à la loi et au roi, envoie des détachements de grenadiers pour garder les ponts de Sèvres et de Saint-Cloud, paraît à l’Assemblée nationale envahie depuis quelques heures par le peuple et, après avoir fait part à ses collègues des dispositions qu'il venait de prendre, se rend chez le roi. Son entrée cause quelque étonnement parmi les gardes suisses et un chevalier de Saint-Louis, d'une taille élevée, s'écria tout haut : «Voilà Cromwell! - Cromwell, répondit froidement La Fayette, ne serait pas entré seul ici.»

Son entretien avec le roi dure une demi-heure. Ses protestations de fidélité sont accueillies avec peu de faveur. Cependant, au sortir de cette conférence, il dit à plusieurs personnes qu'il a décidé le monarque à de salutaires concessions, dont le rappel des gardes françaises licenciées, car ayant participé aux journées révolutionnaires de juillet.

[modifier] La nuit du 5 au 6 octobre

Tout paraissant calme à l'intérieur et autour du château, La Fayette, après avoir pris quelques dernières dispositions, se retire vers quatre à cinq heures du matin à l'hôtel de Noailles pour y prendre du repos. Une demi-heure à peine s'était écoulée lorsque des cris signalent qu’une troupe d'assassins a pénétré à l'intérieur du château par une grille. Dirigés par des guides travestis, ils étaient parvenus jusqu'au grand escalier de marbre qui conduisait aux appartements de la reine. Deux gardes du corps sont tués ; onze autres résistent pendant que la reine se sauve dans l'appartement du roi. Mais la foule grossit et envahit le château, alors que La Fayette accourt à la tête de quelques grenadiers de la garde nationale et réussit à repousser les agresseurs.

Mais la foule, rassemblée sous les fenêtres du roi, demande à grands cris que la reine paraisse et somme impérieusement le roi de se rendre à Paris. Après avoir essayé de calmer les cris, La Fayette s'adresse à Marie-Antoinette et lui demande quelles sont ses intentions : « Je sais le sort qui m'attend, mais mon devoir est de mourir aux pieds du roi et dans les bras de mes enfants.»

La Fayette la conjure de se présenter avec lui sur le balcon. Elle y consent. Le général, ne pouvant dominer les cris de la multitude, baise sa main, comme pour annoncer au peuple que la réconciliation est complète, et le nom de Marie-Antoinette est porté aux nues par cette même populace qui, tout à l'heure, la menaçait de mort.

Louis XVI, après une délibération tumultueuse, se décide à se rendre à Paris. Le cortège insurrectionnel se met en marche, précédé des trophées de la journée, et suivi de la famille royale qu'accompagnent les gardes du corps, démontés, désarmés, humiliés.

[modifier] Le retour du roi à Paris

Après une courte pause à l'Hôtel de ville, le roi et sa famille s'installent aux Tuileries où rien n'était préparé pour le recevoir. Étonné lui-même de ce délabrement, La Fayette dit à la reine qu'il allait s'occuper d'y pourvoir. Je ne savais pas, répondit-elle dédaigneusement, que le roi vous eût nommé l'intendant de sa garde-robe.

[modifier] Le duc d'Orléans

Une procédure instruite par le Châtelet contre les fauteurs de l'insurrection inculpe assez gravement le duc d'Orléans, qui est incité à fuir par La Fayette dans une rencontre chez le ministre Montmorin. Le duc part pour Londres et ne revient en France que lors de la Fédération de 1790. Mais son éloignement ne décourage pas les efforts de ses partisans : des lettres adressées aux ministres dénoncèrent l'explosion imminente d'un complot tendant à placer sur le trône « un personnage puissant. » La Fayette ayant insinué au roi et à la reine que le soupçon ne pouvait regarder que le duc d'Orléans : « Il n'est pas nécessaire d'être prince, objecta Marie-Antoinette, pour prétendre à la couronne. - Du moins, Madame, répondit le général, je ne connais que le duc d'Orléans qui en voulût »

L'assemblée constituante n'avait pas tardé à suivre le roi à Paris ; mais ce double déplacement ne calma pas les esprits.

[modifier] Ambiguïté du rôle de La Fayette

Pour certains historiens, ces témoignages d'un entraînement passager seraient insuffisants, sans doute, pour absoudre La Fayette des reproches qui lui sont adressés au sujet de cet épisode de la Révolution française. Il faut remarquer, avant tout, que la marche de La Fayette sur Versailles avait été le résultat d'un ordre précis de la Commune de Paris. Placé par cet ordre dans une position mixte et presque équivoque entre la royauté, dont il semble menacer l'indépendance, et l’insurrection, La Fayette remplit, selon Michaud, tous ses devoirs.

On lui a reproché son sommeil dans la nuit du 5 au 6 octobre et on l'a stigmatisé, à cette occasion, du sobriquet de général Morphée.(Antoine de Rivarol)

Les événements des 5 et 6 octobre sont, selon les probabilités les plus graves, le produit des manœuvres de la faction d'Orléans, qui espérait déterminer ainsi la fuite de la famille royale. Or, tout le monde sait combien La Fayette était opposé à cette faction, dont il avait toujours repoussé les avances avec dédain (voir : Mémoires de La Fayette)

[modifier] Source

« Journées des 5 et 6 octobre 1789 », dans Louis-Gabriel Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne : histoire par ordre alphabétique de la vie publique et privée de tous les hommes avec la collaboration de plus de 300 savants et littérateurs français ou étrangers, 2e édition, 1843-1865 [détail édition]