Hendrik Goltzius

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Autoportrait
Autoportrait
Horatius Cocles, gravure du cycle des Héros romains (1586)
Horatius Cocles, gravure du cycle des Héros romains (1586)
La main droite de Goltzius (1588)
La main droite de Goltzius (1588)
La Chute d'Icare, d'après Cornelis Cornelisz. van Haarlem (1588)
La Chute d'Icare, d'après Cornelis Cornelisz. van Haarlem (1588)
Hercule Farnèse (gravure exécutée d'après un dessin de 1591 et publiée en 1617)
Hercule Farnèse (gravure exécutée d'après un dessin de 1591 et publiée en 1617)
Portrait de Giambologna, pierre noire et sanguine sur papier (1591)
Portrait de Giambologna, pierre noire et sanguine sur papier (1591)
Mercure (1611)
Mercure (1611)
Loth et ses filles (1616)
Loth et ses filles (1616)
La Chute de l'Homme (1616)
La Chute de l'Homme (1616)
Jupiter et Antiope (1616)
Jupiter et Antiope (1616)
Cadmos tuant le dragon
Cadmos tuant le dragon

Hendrik ou Hendrick Goltz, connu sous la forme latinisée de son nom, Goltzius (15581er janvier 1617), est un dessinateur, peintre et graveur flamand. Ses gravures, très prisées, issues de ses propres dessins ou transposant les œuvres de ses contemporains, contribuèrent efficacement à la diffusion du maniérisme en Europe.

Sommaire

[modifier] Biographie

[modifier] Formation et ascension sociale d'un graveur renommé

Né en 1558 à Mühlbracht (auj. Bracht-am-Niederrhein, près de Venlo) dans le Duché de Juliers - à la frontière des Pays-Bas espagnols et de l'Empire germanique -, Hendrick Goltz appartenait à une véritable dynastie d'artistes. Son grand-père, Hubert Goltz le Vieux, était en effet déjà peintre, tandis que son grand-oncle, Syberdt Goltz était un sculpteur talentueux. Le père d'Hendrick, Jean Goltz, était également peintre (ou peintre verrier) et son autre fils, Jean, embrassa la carrière de peintre verrier. Le cousin d'Hendrick, Hubert Goltzius (1526-1583) fut quant à lui un artiste et un antiquiste renommé.

Alors qu'il était âgé d'à peine un an, une chute dans des charbons ardents lui laissa la main droite paralysée (infirmité qu'il décrira avec virtuosité dans un croquis de 1588). Il montra cependant un talent précoce pour le dessin et, en 1575, après avoir suivi dans un premier temps l'enseignement de son père, il entra comme apprenti dans l'atelier d'un graveur néerlandais réfugié à Xanten, Dirck Volkertszoon Coornhert, qu'il suivit en Hollande, s'installant à Haarlem en 1577. Tout d'abord chargé de transposer des dessins et des tableaux en gravures pour le compte de ses maîtres (Coornhert puis un élève de ce dernier, Philippe Galle), il devint rapidement capable d'imiter de nombreux styles artistiques. Vers 1579-1580, il épousa une riche veuve dont il adopta le fils, Jacob Matham (1571-1631). La fortune de son épouse lui permit de créer son propre atelier de graveur, à Haarlem, en 1582. Cette entreprise allait bientôt diffuser ses productions à travers toute l'Europe, brisant ainsi le monopole des éditeurs anversois.

Les gravures de Goltzius eurent dès lors un retentissment considérable à travers tout le continent et constituèrent une véritable mine d'innovations iconographiques pour un grand nombre d'artistes.

C'est en 1583 qu'il fit la connaissance d'un artiste flamand réfugié à Haarlem, Carel van Mander. Ce dernier - qui allait devenir le premier biographe de Goltzius - lui fit découvrir l'œuvre de Bartholomeus Spranger, dont l'hardiesse maniériste allait avoir une influence déterminante sur la sensibilité artistique du jeune graveur. En collaboration avec un peintre local, Cornelis Cornelisz van Haarlem, Goltzius et Van Mander fondèrent une académie de peinture destinée à permettre aux artistes néerlandais de rivaliser avec leurs confrères italiens.

[modifier] Le voyage en Italie (1590-1591)

Malgré son succès, Goltzius fut frappé de « mélancolie » (dépression) et, en dépit de la détérioration préoccupante de son état de santé, il choisit le voyage comme remède et prit le chemin de l'Italie à l'automne 1590. Son voyage, qu'il choisit de faire incognito[1] en passant par Hambourg et Munich, lui rendit effectivement la santé et lui permit d'enrichir ses ressources artistiques. Ce séjour italien, qui place Goltzius dans la tradition des artistes romanistes néerlandais, allait exercer une influence déterminante sur l'évolution de son art.

Arrivé à Rome le 10 janvier 1591 après être passé par Venise, Bologne et Florence, il y fut tellement absorbé par l'étude et le dessin des chefs-d'œuvre de la Rome antique (recueillis dans un Carnet d'esquisses romaines comprenant des dessins à la pierre noire ou à la craie blanche sur papier bleu et des dessins à la sanguine sur papier blanc[2]) qu'il ne s'alarma pas d'une épidémie de peste qui ravageait alors la ville. Il réalisa notamment une impressionnante étude de dos de l' Hercule Farnèse qui allait faire l'objet d'une gravure en 1617. Cette œuvre témoigne à la fois de l'intérêt de l'artiste pour les chefs-d'œuvre de l'Antiquité et des recherches qu'il consacra à l'anatomie et au rendu du relief. De même, les copies (gravées en 1592) qu'il fit des fresques en trompe-l'œil réalisées sur le Quirinal par Polidoro da Caravaggio, témoignent de cette dernière préoccupation, l'illusion du relief ayant été obtenue au moyen d'un clair-obscur novateur. Il grava également l'Isaïe de Raphaël.

Il quitta Rome au mois d'avril pour se rendre à Naples puis à Pouzzoles en compagnie de deux compatriotes. Revenu à Rome par les galères pontificales[3], puis par la route terrestre (une tempête ayant contraint le navire de relâcher à Gaète), Goltzius y rencontra de nombreux artistes et réalisa le portrait (à la pierre noire et la sanguine avec des rehauts blancs et des lavis colorés) de plusieurs d'entre eux (et notamment de ses compatriotes Jan van der Straet ou Giambologna).

Il repartit de Rome le 3 août 1591 et rentra chez lui en passant par Bologne, Venise, Trente et Munich. Son retour à Haarlem occasiona cependant une rechute contre laquelle Goltzius dut lutter au moyen de la consommation de lait de chèvre ou de femme et, surtout, par la pratique de promenades quotidiennes.

[modifier] Le « chef-d'œuvre » (1593-1594)

Il exécuta entre 1593 et 1594 un cycle de six planches - connu sous le nom de « chef-d'œuvre de Goltzius » - illustrant la vie de la Vierge et les premiers épisodes de l'enfance du Christ. Il s'y était appliqué à reproduire les styles de différents maîtres tels que Dürer, Lucas de Leyde, le Baroche, le Parmesan, Raphaël ou le Bassan. Le trait de Dürer était si bien imité dans la planche de la Circoncision que le facétieux graveur en profita pour jouer un tour aux connaisseurs en leur faisant croire à l'existence d'une œuvre inédite du maître allemand. Il ne put d'ailleurs prouver sa supercherie qu'en faisant remarquer aux connaisseurs dupés que le décor était celui de l'église Saint-Bavon de Haarlem et en leur signalant l'inclusion d'un autoportrait au troisième plan. Il monta un canular semblable en faisant passer son Adoration des mages pour une gravure de Lucas de Leyde[4].

[modifier] Une carrière de peintre tardive (1600-1617)

Bien qu'il ait utilisé des toiles préparées à l'huile dès les années 1580 pour réaliser de grandes compositions à la plume, ce n'est qu'en 1600, alors qu'il était déjà âgé de 42 ans, que Goltzius s'adonna à la peinture à l'huile. Tout d'abord profondément influencé par l'art maniériste raffiné de Bartholomeus Spranger, dont il grava plusieurs œuvres célèbres, Goltzius adopta très vite le style plus naturaliste propre aux artistes de l'Académie de Haarlem.

Goltzius eut pour élèves J. de Gheyn (1565-1629), son fils adoptif Jacob Matham (1571-1631) ainsi que Pierre de Jode (1570-1634) et Cornelis Drebbel (1572-1633).

Il mourut le 1er janvier 1617 et fut enterré dans l'église Saint-Bavon de Haarlem, celle-là même qui avait servi de cadre à la Circoncision de 1594.

[modifier] Devise et emblème

Conscient de la valeur de son art et animé de la volonté d'indépendance propre aux créateurs passionnés et désintéressés, Goltzius adopta pour devise Eer boven Golt, ce qui signifie littéralement « l'honneur est au dessus de l'or » ou, par jeu de mot, « l'honneur est sur Golt[z] ». Il illustra cette devise en 1607, sur la page d'un album conservé à la Bibliothèque royale de La Haye, par un emblème représentant un angelot ou un petit génie ailé couronné de lauriers juché sur un caducée hermétique surmontant des sacs remplis de pièces d'or[5].

[modifier] Notes

  1. Cet anonymat était tout autant dicté par des considérations de sécurité que par l'esprit farceur et mystificateur du graveur, dont Van Mander (cf. bibliographie) nous rapporte le goût pour les quiproquos.
  2. Ces dessins romains sont conservés au Teylers Museum de Haarlem.
  3. Selon Van Mander (p. 184), Goltzius avait choisi ce moyen de transport afin de pouvoir croquer le travail des esclaves nus enchaînés à leurs rames.
  4. Il s'inspira à nouveau de la manière de ce maître pour son cycle de la Passion (1597).
  5. Patricia Falguières, Le Maniérisme - Une avant-garde au XVIe siècle, Gallimard, 2004, p. 31.

[modifier] Œuvres

[modifier] Gravures

  • L'histoire de Lucrèce (1578-1580)
  • Les Noces de Cupidon et Psychée, d'après Bartholomeus Spranger (1586-1587)
  • Cycle des Héros romains (1586)
  • Cycle des Quatre Disgraciés (Tantale, Ixio, Icare et Phaéton), d'après Cornelis Cornelisz van Haarlem (1588)
  • Le Grand Hercule (1589)

[modifier] Dessins

  • Main droite de l'artiste (1588) - Haarlem, Teylers Museum
  • Sine Cerere et Libero friget Venus (v. 1599 - 1602) - Philadelphie, Philadelphia Museum of Art

[modifier] Peintures

  • La Mort d'Adonis - Amsterdam
  • Allégorie de la Paresse - Bâle, Kunstmuseum
  • Danaé (1603) - Los Angeles, Los Angeles County Museum of Art
  • Adonis mourant (1609) - Amsterdam, Rijksmuseum
  • Mercure (1611) - La Haye, Mauritshuis
  • Minerve (v. 1611) - La Haye, Mauritshuis
  • Hercule et Cacus (1613) - La Haye, Mauritshuis
  • Vertumne et Pomone (1613) - Amsterdam, Rijksmuseum
  • Adam (v. 1613) - Hartford, Wadsworth Atheneum
  • Ève (v. 1613, pendant du précédent) - Strasbourg, Musée des Beaux-arts
  • Junon recevant de Mercure les yeux de Janus (1615) - Rotterdam, Musée Boymans-van Beuningen
  • Vertumne et Pomone (1615) - Cambridge, Fitzwilliam Museum
  • Jupiter et Antiope (1616) - Paris, Musée du Louvre
  • Loth et ses filles (1616) - Amsterdam, Rijksmuseum
  • La Chute de l'Homme (1616) - Washington, National Gallery of Art
  • Cadmos tuant le dragon (1616 ?) - Koldinghus (DK), dépôt du Statens Museum for Kunst

[modifier] Sources

[modifier] Bibliographie

  • Carel van Mander, Le livre de peinture, textes présentés et annotés par Robert Genaille, Hermann, Paris, 1965, pp. 175-194.
  • Carel van Tuyll van Serooskerken, « Hendrick Goltzius », Fiamminghi A Roma 1508|1608 - Artistes des Pays-Bas et de la principauté de Liège à Rome à la Renaissance, Société des Expositions du Palais des Beaux-Arts de Bruxelles - Snoeck-Ducaju & Zoon, Bruxelles - Gand, 1995 (ISBN 9053491643), pp. 200-209.

[modifier] Liens externes

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