Ennéagramme

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Figure ésotérique de l'ennéagramme
Figure ésotérique de l'ennéagramme

L' ennéagramme a été vulgarisé par Georges Gurdjieff qui y voyait « le symbole qui prend la forme d’un cercle divisé en neuf par des points, reliés entre eux dans un certain ordre par neuf lignes, exprime la loi de sept dans son union à la loi de trois ». Son nom vient du grec ennea qui signifie neuf et gramma dont le sens est figure.

Sommaire

[modifier] Histoire de l'ennéagramme

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L’ennéagramme apparaît dans l’enseignement de Gurdjieff en 1916[1].

Son existence ne fut rendue largement publique qu’avec la parution du livre d’Ouspensky, In Search of the Miraculous en 1949. C’est Ouspensky qui le premier greffa sur ce diagramme un système d’équivalences avec les fonctions du corps humain et les planètes. Puis dans The Theory of Eternal Life et The Theory of Celestial Influence, Rodney Collin-Smith, un de ses disciples fit correspondre l’ennéagramme au déroulement d’une vie humaine qu’il divisa en neuf périodes et à différents types psychologiques, selon une démarche assez similaire à celle qu’adoptait un autre partisan d’Ouspensky, Maurice Nicoll, dans Psychological Commentaries on the Teaching of G.I. Gurdjieff and P.D. Ouspensky.

Mais le responsable de la vulgarisation de l’ennéagramme fut Oscar Ichazo. En 1950, à La Paz, il découvrit l’œuvre d’Ouspensky et entra peu de temps après dans un groupe de disciples de Gurdjieff qui se réunissait à Buenos Aires. À partir des années 1950, Oscar Ichazo commença a regrouper autour de lui des disciples. Il effectua aussi de nombreux voyages au Népal, en Inde et en Afghanistan, affirmant qu’il y entra en contact avec les écoles qu’avait fréquentées Gurdjieff, que celles-ci lui permirent de consulter les « archives akashiques » et qu’elles le désignèrent comme le Qu tub, celui qui devait transmettre la connaissance à l’Occident.

En octobre 1969, à l’Instituto de Psicologia Applicada de Santiago du Chili, Ichazo donna une série de conférences sur l’ennéagramme comme une manière de dresser une carte de la psyché humaine et des caractères. Parmi les auditeurs se trouvait un certain Claudio Naranjo.

Celui-ci était un universitaire qui enseignait tant au Chili qu’en Californie. Il avait fréquenté un groupe Gurdjieff dans sa jeunesse au Venezuela et maintenant il participait aux travaux du Center for Biochemical Dynamics où l’on expérimentait les effets de nombreuses drogues psychédéliques. Séduit, il passa plusieurs mois à Arica dans l’Instituto de Gnosologia qu’y avait fondé Ichazo, y travaillant la méditation, les expériences psychiques, etc.

Retourné à Berkeley, en Californie, il consacra son temps à l’étude de l’ennéagramme effectuant des rapprochements avec les sept péchés capitaux des chrétiens, avec les signes zodiacaux et avec la typologie psychologique du Diagnotic and Statistical Manual of Mental Disorders. De là naquit sa propre version de l’ennéagramme. En 1971, il créa son école et la nomma les Seekers After Truth (« Chercheurs de vérité »). Oscar Ichazo de son côté entreprit la même année d’implanter son groupe aux États-Unis en publiant dans la grande presse des publicités où il promettait le satori en trois mois contre 3000 dollars.

En Californie, Naranjo rencontra Kathleen Riordan Speeth un docteur en psychologie comportementale, membre de la Gurdjieff Foundation et dont les parents eux-mêmes avaient travaillé avec Gurdjieff. Elle rejoignit rapidement les SAT, y acquit une place prééminente et finit par succéder à Naranjo quand celui-ci décida de retourner dans son pays d’origine.

Parmi ceux qui étudièrent avec Kathleen Speeth, Robert Ochs et Helen Palmer furent les responsables du passage de l’ennéagramme dans le grand public.

Robert Ochs était un jésuite qui enseignait à l’Université Loyola de Chicago. Il adapta l’ennéagramme à la doctrine catholique puis commença à l’enseigner dans le cursus universitaire. Dans le même temps, avec un autre membre de son ordre, le Père Pat O’Leary, il écrivit le premier livre sur ce sujet. Ce fut encore un jésuite, Richard Riso, qui écrivit le second. L’ennéagramme connut alors un tel effet de mode dans le catholicisme aux États-Unis qu’en 1989, Ichazo poursuivit en vain O’Leary ainsi qu’un certain nombre de prêtres et de religieuses qui avaient écrit sur l’ennéagramme pour violation des lois sur le copyright.

Parallèlement à cette introduction de l’ennéagramme dans le catholicisme américain, une ancienne militante d’extrême gauche, Helen Palmer, entreprit de l’épurer de toutes références spirituelles ou religieuses et d’en faire une branche du mouvement du développement humain et de la psychologie du New Age. Elle réussit rapidement au-delà de toutes espérances vendant 200 000 exemplaires de son premier ouvrage et réussissant a faire héberger la First International Enneagram Conference par la prestigieuse Stanford University[2].

[modifier] Tracé de l'ennéagramme

Quatre éléments s’associent dans le tracé de cet ennéagramme. Il est important de préciser « cet » ennéagramme car graphiquement parlant des figures proches existent. Les ennéagrammes sont une famille d’êtres géométriques, au sens bourbakien du terme, et il faut préciser les caractéristiques de cet élément particulier.

Sera envisagé ici l'« ennéagramme de type G » que Georges Gurdjieff contribua à populariser en Europe. Sur l'origine de la figure, on sait seulement, d'après Gurdjieff, qu'elle était l'emblème de la fraternité ésotérique de Sarmung avec laquelle il prétend avoir été en contact.

Composition de l'ennéagramme de type G :

  • un cercle ;
  • neuf points équidistants sur ce cercle, numérotés de 9 (pôle nord) à 1, en descendant, dans le sens inverse des aiguilles d'une montre ; il n’y a pas de zéro visible sur l’ennéagramme ;
  • un triangle équilatéral inscrit dans le cercle, et dont un sommet est en haut, plein nord, coïncidant avec le point 9 (les autres sommets sont donc en 6 et 3).

Tels sont les trois premiers symboles : l’ennéade, le cercle, le triangle équilatéral. S’y ajoute un hexagone croisé tracé d’un seul trait, symétrique par rapport à l’axe vertical, également inscrit dans le cercle et joignant les six autres points dans l'ordre des chiffres permettant d’écrire le développement de la fraction périodique : 1/7, qui est 1/7 = 0,142 857… et ainsi de suite…

D'aucuns voient dans ce tracé la QUADRATURE du CERCLE, avec toute la symbolique attachée au compas (Temps/Ciel, toupie qui trouve son équilibre dans le mouvement, tradition nomade ; ÊTRE, le point d'interrogation : "je cherche plus loin" ; anima…) et à l'équerre (Espace/Sol, pyramide stable, tradition sédentaire ; AVOIR, le point d'exclamation : "j'affirme, je suis sûr"…)

L'ennéagramme de type G serait la projection en deux dimensions d'un "objet" parfaitement sphérique et complètement cubique, paradoxe qui trouve sa solution en quatre dimensions. Il est dit qu'il serait le « symbole de toute vie » : en sachant le lire il serait possible de connaître le rapport de toute chose ou être avec tout autre ; et contrôler/maîtriser ou mener à terme tout processus.

L'ennéagramme synthétise comment les deux lois fondamentales « de Trois » et « de Sept » ou « d'octave » (concepts du système de Gurdjieff) se combinent entre elles. Il importe de le concevoir (intellect), le sentir (centre émotionnel) et le ressentir en mouvement (corps/tripes).

La famille des ennéagrammes compte d’autres membres qui figurent parfois sur des tracés ésotériques :

  • l’ennéagone, polygone régulier convexe ;
  • l’ennéagramme extrapolé de l’étoile dite flamboyante, tracé d’un seul geste ;
  • l’ennéagramme extrapolé du sceau de Salomon, tracé de trois gestes et formé de trois triangles équilatéraux. Tel est le dessin proposé par le Jésuite Athanasius Kircher dans son Arithmologia en 1665.

[modifier] L'ennéagramme des personnalités

L'application la plus connue de l’ennéagramme de type G est celle qui est parfois nommée ennéagramme des personnalités. L’expression ennéagramme des personnalités vient de ce que le schéma est utilisable pour caractériser l’existence de neuf types fondamentaux.

Le progrès, par rapport aux systèmes statiques et un peu réducteurs des caractérologies traditionnelles, est de pouvoir :

  • nuancer ces types par leur démultiplication en sous-types, ou leur combinaison dynamique ;
  • mettre en évidence la coexistence au sein de chaque type d’une face obscure, ou de régression-échec, et d’une face lumineuse, ou d’exaltation-réussite, formant mosaïque binaire et capables de coexistence sous une troisième forme ;
  • proposer à chacun une voie de connaissance de soi en situation et de développement personnel, en quittant les postures figées du type principal et en identifiant ses autres talents et potentialités.

Des recherches sont actuellement conduites :

  • sur les rapprochements entre l’ennéagramme et la morale chrétienne codifiée par les Pères du désert et leurs descendants spirituels, qu’il s’agisse de mystiques adeptes du soufisme ou de théologiens modernes ;
  • en musicologie sur les relations entre l'ennéagramme et les neuf modes du Chant grégorien ;
  • en sotériologie (l’économie du salut) sur la manière dont, à travers le témoignage des évangiles considérés comme recueil d’études de cas et de jeux de rôles, Jésus-Christ incarnerait la totalité circulaire de la nature humaine en étant capable des postures et des comportements des neuf types ; un disciple de Gurdjieff aurait d’ailleurs retrouvé dans la prière dite « Notre Père » la dynamique de l’ennéagramme ;
  • en Kabbale, sur les liens entre l’ennéagramme et l’arbre des sephiroth, études qui se concentrent sur le passage du 9 au 10, le cercle circonscrit à l’ennéagone représentant Malkout, le domaine de l’action.
  • sur l'application de l'ennéagramme à l'homéopathie, issus des travaux d'un médecin homéopathe.

L'ennéagramme des personnalités aurait été défini pour la première fois, sous une forme assez proche de ce qui est actuellement formalisé, enseigné et appris, dans les années 1960. Ensuite, des chercheurs en nombre exponentiellement croissant l'ont fait progresser, et ce essentiellement au sein de la culture occidentale. Le surgissement, la révélation au public lettré de cette structure opératoire mentale sont donc très récents.

De nouvelles compréhensions des ennéagrammes voient le jour, comme L'Ennéagramme de vie, L'Ennéagramme des intelligences innées, L'Ennéagramme des projets ou l'Ennéamorphologie, pour la reconnaissance visuelle des 9 profils de personnalités, l'ennéagramme symbolique et psycho-énergétique, permettant le décodage psycho-énergétique des types et des sous-types de l'ennéagramme.

[modifier] Un voyage dans l’ennéagramme

[modifier] Dans quelle mesure l’ennéagramme des personnalités peut-il aider au développement personnel ?

L’ennéagramme est originellement une tradition orale et plutôt ésotérique. Le passage à l’écrit et l’exotérisme s’est accompagné selon certaines personnes d’une dépréciation (le mème de la dépréciation par le passage à l’exotérisme est très courant).

Il faut en retenir que l’ennéagramme est une voie d’apprentissage et non une technologie : le chemin (et la préparation au cheminement) importe plus que la destination. Dit plus simplement, l’ennéagramme n’est pas une solution presse-bouton.

[modifier] Les neuf types de personnalité et leurs caractéristiques

À chacun des neuf pôles est attaché un type fondamental. Certains auteurs donnent à ce type un nom par exemple le « temporisateur », le « perfectionniste », le « cérébral »...

L'inconvénient majeur est que :

  • d'une part le même pôle, selon les auteurs, porte des noms différents, chacun voulant imprimer sa marque au système,
  • d'autre part, et surtout, chacun selon qu'il est par exemple cérébral ou perfectionniste, comprend le mot temporisateur de manière assez différente pour ajouter à l'édifice une seconde couche de babélisation.

Aussi la tradition conseille-t-elle sagement de conserver les numéros pour désigner les types fondamentaux. Toutefois, dans ce qui suit, et uniquement pour illustrer la présentation, des qualificatifs seront associés à chaque type pour le portraiturer.

Il faut d'abord signaler que le terme même de "type" fait débat. Certains parlent :

  • de base, évoquant ainsi une posture de départ pour un changement potentiel de comportement ;
  • d’ouverture, ou de porte, illustrant le fait que la connaissance du type permet et d'entrer en soi-même et d'accéder à l’autre ; pour les Soufis, il s’agissait bien des neuf portes de la connaissance d’Allah

Avant de décrire les neuf types fondamentaux, il est important de préciser que l'ennéagramme de personnalité ne réduit pas du tout une personne à son type. Au contraire, il est affirmé que :

  • le type pur n’existe pas : c’est un idéal abstrait ;
  • aucun type n’est bon ni mauvais en soi : c’est nous qui hiérarchisons ;
  • toute personne participe, en proportions variables et selon les circonstances, de quatre types.

Comprendre une personnalité, c'est prendre en compte les interférences dynamiques entre :

  • son type fondamental ;
  • l'un ou l'autre des deux types contigus sur le cercle ; cette aile contient des informations sur ses aspects secondaires ou enfouis ;
  • les deux types auxquels son type fondamental est connecté par le tracé de l’ennéagramme de type G ; ces types correspondent :
    • l'un à la manière dont la personnalité manifestée évolue sous stress, sous l'influence passive de ses passions ;
    • l'autre à la manière dont elle évolue quand elle est en confiance et contrôle activement ses passions.

Par exemple, au type fondamental 9, sont associés deux ailes, les types 8 et 1, et deux types connectés, qui sont 3 et 6 d’après le tracé de l’ennéagramme.

À chaque type fondamental correspondent donc, dans l’approche la plus simple, de premier niveau (et à laquelle on se limitera dans le cadre de cet article), trois caractéristiques :

  • une dominante (état de base) ;
  • une régression (état d'échec) ;
  • une exaltation (état de réussite).

Le tableau qui suit montre ces associations :

Type Dominante Régression Exaltation
1 Perfection, le réformiste Colère, honte Sagesse, sérénité
2 Altruisme, le sauveur Orgueil, flatterie Humilité, liberté
3 Réalisation, le battant Mensonge Authenticité, espérance
4 Esthétisme, le créateur Jalousie, envie Originalité, équilibre
5 Observation, le penseur Avarice, cupidité Non-attachement, omniscience
6 Loyalisme, le gardien Peur, lâcheté Foi, courage
7 Curiosité, le généraliste Intempérance, gourmandise Sobriété, joie
8 Domination, le meneur Excès (luxure), impudence Innocence, vérité
9 Médiation, le pacificateur Paresse, indolence Harmonie, amour

Si nous lisons la liste des régressions, c'est-à-dire des comportements induits par l'abandon aux passions, nous pouvons la retrouver très proche de celle des sept péchés capitaux du système moral judéo-chrétien, le mensonge et la peur en plus.

Foi, espérance et charité se retrouvent aux sommets du triangle théologal des types 6 3 9…

Les neuf types fondamentaux sont par ailleurs et de plus répartis entre trois triades, triades dont les points centraux sont les pôles 3, 6 et 9 réunis dans le triangle.

Les trois triades correspondent aux trois centres : instinctif (le ventre) / social (le cœur) / cérébral (la tête). La répartition entre les triades est :

  • Centre instinctif : types 8 9 1
  • Centre social : types 2 3 4
  • Centre cérébral : types 5 6 7

[modifier] Notes

  1. Certains y ont vu une influence d’Athanasius Kircher (1601-1680), un jésuite passionné par Pythagore, la kabbale et le déchiffrement des hiéroglyphes qui fait figurer un symbole similaire dans son Arithmologia publié en 1665. C’est la seule référence à un proto-ennéagramme fondée sur une réalité historique appuyée sur un document connu. Les hypothèses faisant remonter cette figure à Pythagore, aux Pères du désert ou à une tarîqa soufie sont très fortement sujettes à caution.
  2. Christian Bouchet, Gurdjieff, éd. Pardès.

[modifier] Eléments bibliographiques

  • Eric Salmon - ABC de l'Ennéagramme, éd. Jacques Grancher, 2003.
  • G.I. Gurdjieff - Récits de Belzébuth à son petit fils, éd. du Rocher.
  • G.I. Gurdjieff - Rencontre avec des hommes remarquables, éd. du Rocher. (livre essentiellement "autobiographique" adapté au cinéma par Peter Brook en 1978)
  • G.I. Gurdjieff - La vie n'est réelle que lorsque "Je suis", éd. Stock.
  • Ouspensky - Fragments d'un enseignement inconnu, éd. Stock.
  • Christian Bouchet, Gurdjieff, éd. Pardès. (Importants chapitres sur l'ennéagramme et ses écoles).
  • Nicolas Tereshchenko - Gurdjieff et la quatrième voie, éd. Guy Trédaniel, 1991.
  • Claude G. Thompson - Le tarot sur l'ennéagramme de Gurdjieff, éd. Louise Courteau, 1999.
  • Pascal Ide - Les neuf portes de l'âme ou L'Enneagramme, éd. Fayard, 1999
  • Fabien & Patricia Chabreuil - Comprendre et gérer les types de personnalité, éd. Dunod, 2001.
  • Richard Rohr - Ennéagramme, les 9 visages de l'Ame, éd. Guy Trédaniel, 1989.
  • Frédéric Schmitt - Bernadette Bolléro - De l'Homéopathie à l'Ennéagramme, Ed. Charles Antoni L'Originel, 2006.
  • Maria Beesing, Robert Nogosek et Patrick O'Leary - L'Ennéagramme, un itinéraire de la vie intérieure, éd. Desclée de Brouwer, 1992.
  • René de Lassus - L'Ennéagramme, les 9 types de personnalité, éd. Marabout, 1997.
  • Helen Palmer - L'Ennéagramme au travail et en amour, éd. de l'Homme, 1996.

[modifier] Liens externes