Christologies pré-chalcédoniennes

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Dès la mort et la résurrection de Jésus, les premiers disciples se posent toute une gamme de questions, parmi lesquelles deux prédominent :

  • quel est le mode de relation de Jésus avec celui qu'il nomme son Père du Ciel ?
  • Comment Dieu communique-t-il avec ses créatures ?

Divers groupes, parfois très structurés, tentent d'apporter des réponses à ces questions.

Sommaire

[modifier] Les "Judéo-Chrétiens

« Le judéo-christianisme ancien est une formulation récente désignant des chrétiens d'origine juive qui ont reconnu la messianité de Jésus, qui ont reconnu ou non la divinité du Christ mais tous continuent d'observer la Torah. »
    —  S. Mimouni, Le judéo christianisme ancien, essais historiques 1998

Selon cette définition, il faut admettre que les Judéo-Chrétiens ne formaient pas un groupe homogène.

Il convient de noter en premier lieu que le groupe des Apôtres, y compris en y incluant Paul , est composé exclusivement de Juifs ayant reconnus en Jésus de Nazareth , après sa mort et sa résurrection, le Messie, le Sauveur, et même le "Fils de Dieu", expressions que l'on rencontre fréquemment dans les écrits apostoliques qui ont été regroupés sous le terme de Nouveau Testament . Cependant, du vivant même de Jésus, des "grecs", donc des goïm , ont été attirés par sa personnalité. La petite Eglise naissante a donc commencé à incorporer ces goïm, d'abord en les faisant devenir Juifs, puis (suite au " concile de Jérusalem" ) en les incorporant directement par le baptême. Ces premiers "Judéo-Chrétiens" sont appelés "nosrim" (nazaréens) ou " minim" (hérétiques) par les Juifs de la synagogue.

Le premier groupe de Judéo-Chrétiens est l'Eglise de Jérusalem, dirigée d'abord par Jacques le Juste puis par Siméon. Sa christologie ne diffère pas de celles des autres apôtres.

D'autres groupes Judéo-Chrétiens ont cependant existé, en divers lieux, souvent regroupés sous le nom générique d'"Hébreux" par les auteurs grecs ou latins postérieurs.

Les Nazaréens, établis en Palestine, ne se distinguaient des "pagano-Chrétiens que par l'observance rigoureuse des " mitsvoth" juives. Probablement proche de l'Eglise de Jérusalem, leur christologie était "orthodoxe".

Les Ebionites (les "Pauvres") étaient un groupe moins homogène que les Nazaréens. Etablis en Palestine, mais aussi jusqu'en Syrie, toutes les communautés n'avaient pas une christologie identique. si certains, comme les Nazaréens, reconnaissaient sa messianité, sa naissance virginale et sa divinité, d'autres au contraire n'admettaient que sa "messianité". Comme les Nazaréens, ils étaient des observateurs rigoureux des règles du Judaïsme.

Il convient de noter aussi l'existence des Elkasaïtes en Syrie et Mésopotamie. Croyant à la réincarnation, ils admettaient la messianité de Jésus.


[modifier] Les premiers Pères

[modifier] Les gnostiques

[modifier] élaboration

Les réponses élaborées sont diverses durant les 2 premiers siècles. La difficulté de bien connaître ces réponses tient au fait qu'elles ne sont connues que par l'entremise de ceux qui condamnèrent ceux qui les professèrent, i.e. les hérésiologues du IIe siècle. Une entrée dans ces mode de pensées s'est trouvée ouverte à partir de 1947, date de la découverte des papiers de Nag Hammadi.

Parmi les questionnements et les plus intéressantes, dont l'évolution est perceptible à mesure qu'on s'éloigne de la contemporanéité de Jésus, signalons :

  • Ignace d'Antioche (35-107) insiste sur la réalité de la vie terrestre de Jésus.
  • Justin de Naplouse (Justin Martyr 105-135) recourt au terme logos, emprunté à la philosophie grecque, qui signifie la raison divine qui pénètre et gouverne le monde.
  • Le manichéisme, considérant que d'une part Dieu et le Bien et d'autre part le Monde et le Mal sont radicalement séparés, ne peut admettre un Jésus qui soit à la fois Dieu et homme. Contre cette séparation, Irénée de Lyon (120-140) affirme que Dieu veut partager sa vie avec l'homme et que donc la nature de l'homme n'est pas opposée mais volontairement adaptée à celle de Dieu et que tout cela est récapitulé en Jésus, Dieu et homme.
  • Origène (185-254) essaie de comprendre comment la nature humaine s'unit à la nature divine en Jésus. Pour lui, Jésus ne peut être vraiment homme sans âme humaine; la nature divine ne pouvait s'unir directement avec le corps.
  • le docétisme au IIe et IIIe siècle développe l'idée que l'humanité de Jésus n'est qu'une apparence. Sa postérité se retrouvera, plus tard, dans la pensée de Eutychès (378-453) dont se réclameront plusieurs églises monophysites
  • l'adoptianisme : Dieu adopte l'homme Jésus comme Fils, seulement lors de son baptême. Cette christologie s'appuie sur une version de Luc 3, 22, présente dans certains manuscrits, qui cite le psaume 2, 7 : « Tu es mon Fils, moi aujourd'hui, je t'ai engendré », au lieu de « Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi j'ai mis toute mon affection ».

[modifier] gnose

Sous le nom de gnostiques se trouvèrent réunies des doctrines bien différentes, en fait, toutes les doctrines condamnées. Il convient toutefois de distinguer :

  • une gnose pré-chrétienne dont Philon d'Alexandrie et ses thérapeutes seraient les principaux représentants.
  • Des chrétiens au sens large du terme, c'est-à-dire des gens qui connaissaient la tradition juive, qui avaient entendu parler de Jésus, et qui, s'ils interprétaient souvent son incarnation d'une manière très personnelle, croyaient peu ou prou à sa divinité ainsi qu'au caractère extraordinaire de son enseignement. Ils vivaient dans la partie la plus hellénisée de l'Empire romain d'Orient.

Initiés à la philosophie religieuse des Grecs, c'est-à-dire au néo-platonisme, au monothéisme de Sol Invictus ou à celui des maîtres de Plotin (comme Ammonius Saccas), aux religions à mystères. Le désir de sauvegarder à tout prix la transcendance, la pureté, la bonté de Dieu constitue l'essentiel, l'âme de leur doctrine. Les gnostiques ont fait de larges emprunts aux religions à mystères, surtout dans des développements ésotériques et l'élaboration d'une conception de la connaissance.

[modifier] quelques maîtres

[modifier] Valentin d'Alexandrie

Valentin était originaire d'Alexandrie qui, comme Basilide, dit que la Passion du Christ n'a pas eu d'autre but que d'opérer la discrimination des choses auparavant confondues.

La doctrine de Valentin nous est surtout connue par les citations des hérésiologues, par des fragments réunis sous le titre d'Extraits de Théodote, ainsi que par quelques-uns des textes découverts à Nag Hammadi.

Pour mieux marquer la transcendance de Dieu, les Valentiniens l'appellent tantôt le Dieu étranger, tantôt le Dieu lointain, tantôt le Dieu inconnu (Cf. Paul à Athènes). Ils placent ce Dieu au sommet d'un univers divin appelé Plérôme, ou lieu de la Plénitude. Ce Plérôme est constitué par des éons ou, puissances célestes qui entretiennent entre eux des rapports très complexes. Les Valentiniens professent un dualisme transcendantal au lieu d'un dualisme métaphysique ou dualisme des principes comme dans le Manichéisme.

Le dualisme des premiers gnostiques est plus radical : le monde pour eux est tout entier du côté des ténèbres ; il a été créé par une puissance sortie du Plérôme. S'il ne l'a pas créé lui-même, Dieu a au moins permis sa création.

La théorie valentinienne du salut repose tout entière sur l'idée de rédemption. Le Christ, élément pneumatique (de l'Esprit), s'est incarné. Parce qu'il n'a ni âme psychique, ni âme hylique et qu'il est d'une parfaite transparence et une condition essentielle de la gnose, et du salut. Il éveille l'élément pneumatique dans les âmes à savoir la gnose, à la fois libération et connaissance ; elle est la véritable naissance dont avait parlé Paul. On retrouvera quelques unes de ces idées, plus tard, chez certains courants Cathares.

Jésus était essentiellement pour eux celui qui révèle le vrai Dieu et non pas le Messie annoncé par l'Ancien Testament. Jésus avait bien pris la forme d'un esclave, comme il est dit dans les extraits de Théodote, mais cette forme n'était pour lui qu'une apparence. Jésus n'avait pas souffert réellement. Il n'était pas mort réellement. Le Christ était un l'éon céleste. (Cf théorie des émanations)

«Tout le gnosticisme est paradoxe, et c'est ce qu'on ne doit pas oublier pour le comprendre. Avant tout, c'est comme paradoxe qu'il faut comprendre le docétisme, c'est-à-dire cette négation de l'humanité du Christ, qui paraît d'abord être au christianisme tant de force et de valeur. Le docétisme exprime évidemment la volonté de nier l'apparent, l'immédiat: non, il n'a pas souffert; non, il n'était pas homme; non, il n'est pas mort. Mais il faut l'entendre ainsi: tout en souffrant, il n'a pas souffert; tout l'homme qu'il était, il était Dieu; tout en mourant, il n'est pas mort. C'est seulement ainsi qu'on peut expliquer les apparentes contradictions des gnostiques. Marcion, par exemple, enseignait à la fois le docétisme et que le Christ avait réellement souffert.» Simone Pétrement

[modifier] Marcion de Sinope (85-160)

Marcion était un esprit réaliste et par là, peut-être plus profond que Valentin. Il est le seul des grands gnostiques qui eut une influence durable, le seul qui aurait pu donner à l'Église une orientation différente de celle qu'elle a prise. caractérise sa doctrine:

"Une pensée profonde domine le christianisme de Marcion et l'a tenu à l'écart de tout système rationaliste, c'est la pensée que les lois régnant dan s la nature et dans l'histoire, que les actes de la justice ce ordinaire sont contraires aux actes de la miséricorde divine, et que la foi humble et l'amour du cœur sont l'opposé de la vertu orgueilleuse." A. v. Harnack , Marcion et le Marcionitisme


Marcion juge l'Ancien Testament très sévèrement, qu'il soit même allé jusqu'à soutenir que le Dieu bon, le Père que le Christ avait invoqué, ne devait pas être confondu avec YHWH. Ses adversaires ont tenté d'en faire un fanatique ; fils d'un évêque du Pont, c'était peu vraisemblable.

Son exégèse telle qu'elle se présente dans la lettre de Ptolémée à Flora, montre d'un souci des nuances regrettablement absent des textes des hérésiologues:

«Car si la loi n'a pas été donnée par le Dieu parfait lui-même, comme nous l'avons déjà dit, et certainement pas non plus par le diable (ce qu'il n'est même pas permis de dire), le législateur doit être un troisième qui existe à côté de ces deux autres. C'est le démiurge et le créateur de ce monde tout entier et de tout ce qu'il contient. Parce qu'il est, en son essence, différent des deux autres et se tient au milieu d'eux, on pourrait l'appeler à bon droit l'intermédiaire. Si le Dieu parfait est bon en son essence, comme il l'est effectivement, (car notre Sauveur a dit qu'il n'y avait qu'un seul Dieu bon, son Père, qu'il a révélé) et si l'être qui est par nature Adversaire est mauvais et méchant, caractérisé par l'injustice, alors celui qui se situe entre le Dieu parfait et le diable, et qui n'est ni bon ni assurément mauvais ou injuste, pourrait à proprement parler être appelé juste, parce qu'il est aussi l'arbitre de la justice qui dépend de lui.» A. Harnack, abrégé Précis de l'histoire des dogmes, Paris, Fischbacher, 1893

[modifier] Bardesane d'Edesse (154-222)

Voir : Bar-Daïssan, Nestorianisme, Monophysisme, Monothélitisme et Monoenergisme

[modifier] Voir aussi