Champignolles (Eure)

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Champignolles
Carte de localisation de Champignolles
Pays France France
Région Haute-Normandie
Département Eure
Arrondissement Arrondissement d'Évreux
Canton Canton de Rugles
Code Insee 27143
Code postal 27330
Maire
Mandat en cours
J.-M. Raynaud
Intercommunalité
Latitude
Longitude
48° 57′ 22″ Nord
         0° 45′ 45″ Est
/ 48.9561111111, 0.7625
Altitude 127 m (mini) – 183 m (maxi)
Superficie 2,62 km²
Population sans
doubles comptes
30 hab.
(2004))
Densité ~9 hab./km²

Champignolles est une commune française, située dans le département de l'Eure et la région Haute-Normandie.

"La commune de Champignolles, et plus précisément le bourg central, siège administratif des lieux, se présente comme l'espace rural rêvé. Tous les paramètres de la ruralité sont réunis, la topographie du site qui protège une vaste vallée ouverte où se déroule la Risle, les coteaux encadrés de bois, de futaies et de taillis, les maisons bien rangées aux proportions vernaculaires construites en pans de bois, silex et pierre.

Ce qui frappe avant tout, c'est la préservation tranquille du site, aucune perturbation liée à la dispense ou à l'intrusion de constructions en décalage avec l'esprit du lieu. La route qui descend à flanc de coteau depuis la départementale, se déroule au travers de la forêt. Le virage brutal découvre la première maison et la perspective sur le fond du vallon.

L'organisation du front bâti se réparti de part et d'autre de cette voie sans accotement. La mairie et l'église, puis quelques maisons amorcent le tissu. De l'autre côté de la voie une succession de maisons construites à l'alignement en long pan ou en pignon. Au départ du vallon, la route bifurque en deux branches et conduit d'une part vers le fond du tableau et d'autre part remonte à flanc de coteau vers le second hameau. Entre ces deux points, l'espace a été protégé de toute construction.

Ce point précis est le lieu où le peintre posera son chevalet. Depuis le fond de vallée la vision échelonnée du village montre une composition très fine de l'espace".[1]

Il est l’un des très rares villages de l’Eure qui a, jusqu'à présent, conservé son authenticité et le charme exceptionnel de ses bâtiments anciens et de ses paysages particulièrement pittoresques. Son bocage, héritier de deux mille ans d'histoire agraire, sa vallée humide, son écosystème sont des anthroposystèmes complexes.

Le plus souvent, lorsqu’on évoque Champignolles, on se réfère à sa douceur de vivre et à ses paysages de carte postale. Chantée par Jean de La Varende qui fait du pays d'Ouche le lieu privilégié de ses œuvres : […] « Voici les grâces secrètes de cette contrée. Le petit fleuve s'accoude à gauche sur une forte colline chargée d'arbres, mais cerne, à droite, une haute et lente moquette qui s'exhausse vers le Sud. L'eau l'entoure d'un trait pur et chantant » […][2] et par Philippe Delerm, […] « Eh bien Champignolles existe, je l’ai rencontré, et me demande comment j’avais pu l’ignorer aussi longtemps ». […] « il me semble qu'il y à là comme un bout du monde, assez d'espace et de secret pour enclore la vie […] »[3] Champignolles constitue une superbe étape permettant de découvrir toute la richesse de la remarquable vallée de la Risle.

Sommaire

[modifier] Géographie

Ce minuscule village du Pays d'Ouche (Uticus Pagus), situé en bordure de la rive droite de la Risle, est né des premiers défrichement entrepris par l'Homme.

La forme particulière du tracé de Champignolles, son contour haché qui entaille la forêt de Conches et sa superficie bien inférieure à celles des villages voisins, plaident en faveur d'une occupation du sol précoce et d'un essartage limité, œuvre d'un groupe humain restreint, de préférence à un défrichement de grande ampleur comme ceux que l'on verra plus tardivement à Beaubray, Sébécourt, Saint-Marguerite de l'Autel, Sainte-Marthe et au Fidelaire, les cinq paroisses royales de la forêt de Conches[4].

On y voit encore des champs et des prés enclos, conquis sur la forêt et posés sur des levées de pierres, portant des haies ou des rangées d'arbres qui témoignent du parti pris bocager qui constituait une réponse magistrale à la dégradation de l'humus et à l'érosion des sols lœssiques qui ont contribué au développement du Néolithique dans la région.

Idéalement adapté aux petites parcelles agricoles, le bocage offrait à la population, issue de l'essor démographique que connaît la Normandie du Xe au XIIIe siècle, outre la portion congrue que leur laissaient le seigneur, le clergé et le bordier, les ressources indispensables à sa survie : jardin (qui n'était pas soumis à la dîme et aux droits seigneuriaux), fruits, champignons, gibier.

La gestion de l'eau est un autre aspect remarquable du bocage. En saison humide, le fossé draine les sols. Accompagné du talus, il empêche le ruissellement des sols, et donc la destruction de la terre cultivable et contribue à conserver la Risle claire et pure où le poisson est resté longtemps abondant. La haie protège du vent susceptible de dévaster des cultures. Elle permettait aussi un apport de bois de chauffage et de construction. En saison sèche, le fossé hydrate le sol et augmente le rendement de la production agricole.

Le processus de genèse du village a été, bien entendu, lent et complexe ; cependant on voit encore que les fermes ou hameaux dispersés ont souvent été remplacées par des établissements groupés et organisés selon un plan régulier. Le village était entouré de grandes parcelles non clôturées destinées au labour. Chaque champ était morcelé en bandes étroites que se partageaient les villageois. Ces parcelles de taille plus ou moins égale – on en comptait encore plus de 450 au XIXe siècle – sont alignées le long de plusieurs axes principaux, comme on le voit sur le plan dressé en 1852 pour un barrage d'irrigation[5].

Le village disposait de pâturages communaux (les prés de Qimcampois, les prés de Champignolles) ainsi que de forêts (le bois de Champignolles, le Buisson Quesnel[6] ) pour le bois de chauffage et de construction, de mares (la mare Bos [7], la mare Bance).

Une partie des terres du village, 90 hectares, de type manoriales (peut-être le Manet ?[8]) appartenait au domaine du seigneur qu'il exploitait lui-même et sur lesquelles les habitants du villages étaient obligés de travailler un grand nombre de jours par an. Maintenant, agrandie de 30 hectares, elles sont devenues une propriété d'agrément, qui conserve encore les principaux éléments de la propriété seigneuriale : habitation, chapelle du XVe ou XVIe siècle où l'on trouve une Vierge à l'Enfant, des sculptures polychromes, pigeonnier, puits, communs…

Très certainement, à l'intérieur de l'espace bâti, certains emplacements sont préférés et de ce fait tôt occupés par les riches et les puissants. Cependant, aujourd'hui, comme la relation des hommes avec les terres et le seigneur, les droits d'usage des champs, des bois et des friches, l'organisation du village et de ses dépendances reste incertaine par manque de données.

Par contre, il est plus facile de voir ou de déceler les éléments constituants les pôles d'attraction de l'activité seigneuriale (les seigneurs y trouvant des sources de revenus comme le droit de banalité[9]), puis artisanale : un moulin à vent dont il ne reste rien, vraisemblablement construit sur un écart appelé aujourd'hui « près de Qimcampois[10] », un moulin à blé hydraulique, celui-là, construit en 1775[11], peut-être à l'emplacement d'un autre qui aurait été construit lui-même sur les ruines de celui détruit lors de l'expédition du duc de Lancastre[12] en 1356 ?, un pressoir, tous deux encore parfaitement conservés aujourd'hui, avec leurs canaux d'amenée.

Ce moulin qui aurait un temps été la propriété de l'abbaye de Lyre, sera vendu, pour la somme de 29 100 livres, le 15 avril 1791, à Jacques Bucaille[13], qui deviendra l'année suivante le premier maire[14] de Champignolles

L'impasse technologique de l’assolement triennal qui donne la priorité aux cultures de subsistance, la vaine pâture, l'accaparement des terres indivises, puis, plus tard, l'impossibilité d'utiliser le machinisme agricole sur des parcelles trop petites sont peut-être les raisons de la rareté des terres labourables à Champignolles.

Aujourd'hui, malgré les opérations d'aménagement foncier rural, les 262 hectares de la commune sont encore partagés en 221 parcelles dont beaucoup sont retournées à la nature, constituent un véritable « corridor biologique » nécessaire à la biodiversité et témoignent encore du génie industrieux du peuple qui l'habitait.

Champignolles est située dans une zone de biodiversité forte et appartient au pays Risle Charentonne dont l’un des quatre objectifs est de valoriser les ressources patrimoniales pour sauvegarder le cadre de vie et mettre en valeur l’image du Pays en s’appuyant sur des ressources de grande qualité pour apporter de la richesse au territoire.

Champignolles figure à l’inventaire de deux zones naturelles d'intérêt écologique (ZNIEFF) de type I et II et fait partie du dispositif Natura 2000 Risle, Guiel, Charentonne dont l'objectif est la restauration et la préservation de sites écologiques, dits remarquables du fait des habitats et espèces qu’ils abritent. Ceci, tout en considérant et en intégrant les activités humaines liées à ces sites.

[modifier] Histoire

[modifier] Introduction

Témoin intact des siècles passés, Champignolles, est occupée par l'Homme depuis des temps reculés. Devenue possession des seigneurs de Tosny vers la moitié du XIIe siècle, puis, à partir de 1202, de Robert Ier de Courtenay cousin germain de Philippe Auguste, Champignolles est une incessante évocation de l'histoire de la France et de la Normandie, depuis le Haut Moyen Âge, il y a plus de huit cents ans, et de savoir-faire anciens.

L'histoire de sa fondation en paroisse apporte une notable contribution à l'histoire de la Normandie du Haut Moyen Âge, à la fin de la Normandie anglaise (1087-1135) et à la fin de la Normandie des Plantagenêt (1135-1204).

[modifier] Les premiers habitants

Située sur la rive droite de la Risle, la paroisse de Champignolles a probablement été fondée durant le haut Moyen Âge, mais le lieu est occupée par l'Homme depuis des temps beaucoup plus reculés.

La découverte d'une hache de pierre « très grossièrement polie », signalée[15] par la Société normande d'études préhistoriques (SNEP) créée en 1893, témoigne d'une implantation humaine à Champignolles dès le néolithique, l'âge de la pierre nouvelle.

Le néolithique est considéré comme la période des débuts de l’agriculture : un climat plus clément ainsi que la diminution vraisemblable des ressources de la chasse et de la cueillette, amènent progressivement les populations à se fixer et à entreprendre la domestication d’espèces végétales et animales là où se trouvent les terres favorables à l'agriculture.

Ces agriculteurs qui utilisaient l'herminette, ne connaissaient pas l'araire et n'utilisaient pas la fumure - ils devaient changer de terre à chaque génération -recherchaient les terres propices à leur implantation.

Nul doute que les terres lœssiques[16], réputées favorables à l'agriculture aient contribué au développement du Néolithique dans la région.

Ils y construisaient des maisons dites « danubiennes » à la forte charpente et au toit de chaume. Ces maisons collectives présentaient un intérieur cloisonné et chaque pièce disposait d'un foyer. Les maisons devaient abriter plusieurs familles.

Période des premiers défrichements, du développement de l’usage de la céramique et de la pierre polie, le néolithique est également marqué par un grand essor démographique dû à une meilleure alimentation.

Les hommes du néolithique (5000-2000 avant J.-C.) qui domestiquaient les chèvres, les cochons et les équidés ont laissé plusieurs milliers de monuments mégalithiques appelés cailloux de Gargantua en France, témoins de leur religion centrée sur le culte des morts.

De nombreux monuments mégalithes, encore visibles, parsèment d’une façon assez régulière la campagne normande, notamment, à quelques kilomètres de Champignolles, le dolmen druidique dit de Rugles à Ambenay et le menhir de Neaufles-Auvergny (appelé ici pierre de Gargantua), témoignent de leur présence.

Environ 800 à 900 ans avant J.-C., durant la protohistoire, une innovation technologique considérable vient bouleverser la société humaine : la métallurgie du fer. Il faudra moins d'un siècle pour que ces techniques, introduites par les peuples celtes du Hallstatt (nom d'une période de l'âge du fer), s’installent dans le sud de l'Allemagne, en Autriche, à l'est et à l'ouest de la France.

[modifier] Administration

Liste des maires successifs
Période Identité Parti Qualité
1792 Jacques Bucaille Premier maire Meunier
1936 Wenger  ?  ?
1983 à 2001 Claude Poulain Sans étiquette Éleveur
2001 à 2003 Guy Bernard Sans étiquette  ?
2003 à 2008 Jean-Michel Raynaud Sans étiquette Enseignant
Toutes les données ne sont pas encore connues.

[modifier] Démographie

Jusqu'au XVIIIe siècle - l'état civil a été instauré lors de la Révolution française, par le décret de l'Assemblée législative du 20 septembre 1792, en même temps que les tables décennales -, les sources manquent pour évaluer l'essor démographique de Champignolles. On peut donc penser que sa population a connu les mêmes fluctuations que celles de l'Europe de son époque : après une longue période de croissance économique et démographique particulièrement marquée entre le XIIe siècle et le tout début du XIVe, une chute brutale de sa population aux XIVe et XVe siècles suivie d'une remontée démographique au XVIe siècle, voire au XVIIe.

En 1790, Champignolles comptait 210 habitants. Puis, on observe un constant dépeuplement jusqu'en 1970 où il reste moins de 20 habitants dans le village, avec quelques remontées en 1820, 1835, 1850, 1857 et 1946. Entre 1790 et 1850, le village a perdu plus de 50% de sa population, contrairement à ses voisins qui ont vu leur population augmenter, à l'exception d'Ambenay, de Bois-Normand-près-Lyre, de la Neuve-Lyre, de Saint-Antonin-de-Sommaire et de la Vieille-Lyre qui eux aussi ont perdu en population, mais dans une moindre proportion (7 à 16 %). Aux même dates, l'actuel canton de Rugles a gagné 440 habitants. De son coté, le département de l'Eure a augmenté sa population, jusqu'en 1840.[17]

Les chiffres du recensement de 1836, s'ils sont exacts , montrent que la part la plus importante des activités des habitants de Champignolles est tournée vers le textile (54 fileuses et 2 tisserands). Les révolutions techniques et industrielles et de la conversion d'une grande partie de la Normandie à l'élevage au cours du XIXe siècle et du déclin des systèmes hydrauliques et de l'éclatement des systèmes valléens pourraient donc être la raison de cet exode. Un autre déplacement de population, antérieur celui-ci, est aussi à noter. Entre 1600 et 1640, on observe un brusque renouvellement des patronymes. Plusieurs événements historiques peuvent expliquer ce fait : - La guerre contre les Huguenots (1627-1629)[18]. – La Révolte des Nus-Pieds (1639), – La Fronde.

D'une façon générale, Champignolles a toujours été petite (aujourd’hui, elle est la commune la moins peuplée de Normandie), sous le Concordat (1801) elle aurait été réunie à la Vieille-Lyre. On trouve, à ce sujet, un procès verbal de 1808 décrivant le transfert d'une statue de Saint Gilles de l'église de Champignolles à celle de la Vieille-Lyre en raison de cette réunion. […] « Ceci ne plût guère aux habitant , qui reprochaient encore à la Vieille-Lyre ce « pillage » 50 ans plus tard… » […]. En 1853, une nouvelle tentative de réunion sera tentée par le Préfet. Les habitants de Champignolles la rejettent : « Considérant enfin cette inimitié formelle qui existe entre nous et les habitants de la Vieille-Lyre depuis notre réunion […] qui a été faite malgré nous, que notre église a été entièrement pillée par ces derniers » […].

Le 18 décembre 1867, le Conseil départemental prononce la réunion avec la Ferrière sur Risle. Apparemment, cette réunion fut de courte durée, si jamais elle fut effective. La commune apparaît autonome dans tous les documents ultérieurs.

Sous l'administration révolutionnaire, en 1790, Champignolles qui faisait partie du canton de la Ferrière (district de Verneuil) avec Sébécourt, Sainte-Marthe, Le Fidelaire, Quincarnon et Collandres, comptait 210 habitants.

En 1792, Champignolles fournissait trente-neuf citoyens actifs à la Garde Nationale, récemment réorganisée, du canton de La Ferrière. Cette garde comprenait huit cent quatre-vingts un citoyens répartis en quatorze compagnies.

En 1801, Champignolles, qui appartient désormais au canton de Rugles, ne compte plus que 175 habitants. Il faudra attendre le retour de la monarchie (1815) - le règne de Louis XVIII (1815-1825) représente une période de calme et favorise une certaine prospérité économique pour le pays -, pour que Champignolles regagne en population (180 habitants vers 1830). Cette embellie ne durera pas car, durant ce siècle instable politiquement (le XIXe), la Normandie vit des mouvements de fond.

En Normandie, à partir des années 1830, l'exode rural devient un sérieux problème. L'agriculture exige moins de bras. Les cultures céréalières reculent au profit des prairies. L'élevage des vaches et donc, la production de lait, de camembert et de beurre, deviennent les marques de l'agriculture normande, sans oublier le cidre. Les ruraux déracinés s'installent dans les zones urbaines et industrielles (région parisienne, agglomérations de Rouen et du Havre principalement), car les industries s'y multiplient et embauchent, notamment dans le textile, la métallurgie, les constructions mécaniques et la chimie. Les jeunes villes de Petit-Quevilly, de Déville, de Bolbec, d'Elbeuf se hérissent de cheminées d'usines crachant la fumée. Des foules d'ouvriers convergent dès l'aube vers ces nouveaux temples du travail.

Même si l'Eure se tient globalement à l'écart de ce puissant mouvement d'industrialisation, on observe un constant dépeuplement de Champignolles jusqu'en 1970 où il reste moins de 20 habitants dans le village, avec quelques remontées en 1835, 1850, 1857 et 1946.

Évolution démographique
(Source : INSEE[19])
1962 1968 1975 1982 1990 1999 2004
8 17 19 20 27 28 30
Nombre retenu à partir de 1962 : population sans doubles comptes

Depuis 1999, la population a augmenté de 2 habitants, soit une progression de 7,1%

[modifier] Lieux et monuments

Église Saint-Gilles–Saint-Loup des XIIe et XVIe siècles

L'église paroissiale Saint GillesSaint Loup qui se présente en terrasse, au bas de la route en pente de toit qui plonge sur le dévers de la colline et rejoint la Risle, ramassée dans ses arbres entourée de son cimetière clos d'un muret d'époque avec ses vieilles tombes où les lettres s'effacent, des pierres droites et d'autres qui se penchent et son if magnifique, est l'un des rares spécimens représentatifs intacts de l’architecture médiévale normande du Haut Moyen Âge dont les caractéristiques propres font du duché de Normandie une région à forte identité.

Le site de l’église, le cimetière et le lierre sont inscrits à l’inventaire supplémentaire des sites depuis le 22 avril 1932.

Sa construction, vraisemblablement initiée dans la première moitié du XIIe siècle, commença, pour progresser d'abord à l'est, puis au nord et au sud, par le chevet en blocage de silex et grison surmonté d'un beffroi carré et artistiquement recouvert d’essentes à flèche polygonale dont la face sud, en raison de la disposition de ses ouïes, pourrait être vue comme une représentation allégorique du roi Arthur - qui est celle d’un roi qui est « primus inter pares » (« premier entre les égaux ») mais aussi souverain - (le mythe arthurien a beaucoup servi à Guillaume le Conquérant et à Henri II Plantagenêt).

La qualité de conception et d'exécution de sa charpente médiévale utilisant les techniques de construction navale en carène sa charpente de chêne d'un exceptionnel état de conservation, celle de son clocher avec sa flèche qui traduit avec élégance l'élan vers le ciel. Sur son piedouche, la console supporte tous les éléments décoratifs : girouette, boule représentant la sphère céleste et coq, symbole du reniement de saint Pierre.

L'équarrissage de ses bois vraisemblablement employés verts, la nature de certains assemblages, sa voûte en merrain monochrome, ses piliers cannelés sur chacune de leur face jusqu'à la base des doubleaux qui scandent le berceau brisé de la voûte et sa lancette ébrasée montre l'habilité des constructeurs de l'école normande que l'on retrouve dans un assez grand nombre d'églises d'Angleterre.

La seconde campagne (début du XIIIe siècle (?) qui correspond à la construction de l'abside, du transept, du chœur et de la croisée reprend le même parti que celui de la nef avec des distinctions qui s'observent notamment à l'extérieur (contreforts primitifs sans ressauts, un art de bâtir nouveau).

L'autre ou les autres campagnes (début et milieu du XVIe siècle) - que l'on doit peut-être à Georges d'Amboise ou à Guillaume d'Estouteville, mécènes prestigieux qui ont permis à la Renaissance d’éclore en Normandie - correspond (ent) à la construction du porche en charpente à sablières moulurées du XVIe qui donne l'accès à l'église par une très belle porte en plis de serviette (refaite au XVIIIe siècle, de la sacristie avec sa superbe lancette et à celle d'une chapelle carrée en silex habilement appareillé avec un magnifique pignon, en damier noir et blanc, de silex gris et de craie du plus bel effet avec angles et baies en pierre, contrefort en grès, ajoutée au début du XVIe siècle, à l’extrémité orientale de la nef, au sud. La fenêtre du pignon, « flamboyante et lancéolée, de grand style et sans doute œuvre d'un savant architecte bien loin des tâcherons »[20] est en tiers-point et à meneau, et possède un remplage et des moulures gothiques. Le gable du pignon, couronné par un fleuron circulaire et une croix antéfixe décorée de festons gothiques, offre un échiquier de silex taillés et de pierres disposées en damier.

Les rampants sont en pierre, flanqués de deux acrotères - lions ou mâtins chevelés et rampants, tourné à dextre, vers la lumière "ravis"… comme le "ravi" de la crèche par la venue de la « nouvelle clarté » Neu Helle devant l’enfant phébus, le Dieu Fils solaire… -.

L'unité architecturale qui se dégage de ses différente campagnes de construction est remarquable.

L'église est consacrée à saint Gilles, représenté en ermite avec la biche pour attribut, et à saint Loup (saint Leu) représenté en archevêque mitré tenant la crosse ou la croix à deux traverses.

À l'intérieur, on y trouve un tronc de six pieds percé de huit bouches à liards : présomption de pèlerinage à Saint Gilles, à Saint Loup (saint Gilles et saint Leu guérissent de la peu[21]) ou étape vers le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle par la Via Podiensis (Conches > le Puy, 577 km, Saint-Jacques, 1 333 km).

On y trouve aussi un haut-relief : la Transfiguration (classé MH, au titre objet le 10 juin 1907) avec ses statues de style maniériste, en pierres polychromes du XVIe siècle, représentent le Christ, Moïse, Élie, saint Jacques, saint Pierre et saint Jean.

On observera la déformation à dessein de certains éléments particuliers du corps de chacun des personnages (tête, yeux, mains,…) pour intensifier la stupéfaction des Apôtres à la vue de la blancheur éblouissante de Jésus : […] « Jésus, prenant avec lui Pierre, Jacques et Jean, alla sur la montagne pour prier. Or, tandis qu'il priait, l'aspect de son visage changea, ses vêtements devinrent d'une blancheur éblouissante, et voici que deux hommes parlaient avec lui. C'étaient Moïse et Elle, qui, apparus dans la gloire, parlaient de son départ, qui allait s'accomplir à Jérusalem. Pierre et ses compagnons étaient lourds de sommeil. Mais, restés éveillés, ils virent sa gloire et les deux hommes qui se tenaient là avec lui »[22][…].

On remarquera également l'aspect particulier (Obscenae ?) de certains éléments du décor (palmiers-dattiers).

La poutre de gloire qui sépare la nef du chœur (le Christ en croix, la vierge, et saint Jean sont en bois polychrome du XVIe siècle), qui montrent la Victoire du christianisme sur le judaïsme et l'antijudaïsme de la chrétienté du Moyen Âge.

En entrant à droite on trouve encore un bénitier en grès datant du XVe siècle. Sur le mur de gauche, une inscription datée de 1621 : « Ici gist la personne de Pierre de la Croix lequel deceda le jour Saint Vincent Mil sis cens vint et une vous qui ceci lize pries Dieu pour les trepasses ». Au nord, les fonts baptismaux octogonaux sont rehaussés d’une margelle (pierre du XVe siècle). Le coq du clocher y est posé : il a été descendu en 1985. Plus loin, à droite, on trouve une vierge à l’enfant en bois polychrome du XVIIe siècle.

Plus remarquable, on trouve une autre statue de vierge à l’enfant Jésus avec une colombe dans les mains, en pierre polychrome du XIVe siècle (classée MH au titre objet le 10 juin 1907). Couronnée, légèrement hanchée, vêtue d'un manteau qui finit en plis et dont le bord se replie comme un tablier, cette Vierge, le bâton fleuri dans la main droite et portant à gauche l'Enfant vêtu d'une chemise.et tenant un oiseau (la colombe du Saint Esprit ?) dans ses mains, répond au canon du gothique rayonnant (début du XIVe siècle jusqu'en 1380).

Les vestiges de son luxueux décor, fait de nombreux éclats d'émaux de plique. Les émaux de plique employés dans l'orfèvrerie de prestige s'échangeaient au prix de l'or ce qui explique sans doute la disparition[23] de toutes les plaquettes (viellis) qui parsèment la surface de cette œuvre de belle facture, témoignent de l'aspect luxueux qu'avait cette Vierge à l'Enfant.

Dans le chœur, on trouve un autel en bois peint en faux marbre avec un décor sur le devant représentant deux vases de fleurs encadrant un écusson avec la colombe du Saint Esprit, du XIXe siècle.

Le tabernacle est en bois polychrome, avec une statuette du Christ glorieux de style, avec une inscription Ecce Panis Angelorum du XVIIe siècle.

Le tableau du 1XIXe siècle (restauré), au-dessus de l’autel, représente le Sacré Cœur.

[modifier] Personnalités liées à la commune

[modifier] Notes et références

  1. Marie Minier, architecte urbaniste de l’État, chef du service départemental de l’Architecture et du Patrimoine de l’Eure, mars 2006.
  2. La Nation française n° 82 / 2 mai 1957 / Les Promenades / Champignolles.
  3. Promenades poétiques, Champignolles / De France, ou d’Angleterre, novembre 1993
  4. Selon Sébastien Lefèvre, université de Rouen, Archéo 27, Les Défrichements et l'occupation du sol en forêts de Conches-Breteuil.
  5. Plan pour un barrage d'irrigation par Bougarel, 3 février 1852 (Inv. C. Kollmann, Service régional de l'Inventaire, Édifices industriels, Vallée de la Risle)
  6. De Quesne : le chêne, arbre de haute futaie; d'où quesnel, chesnel, quesniau, petit chêne. Chêne vient de quercus par quercinus. Aussi prononçait-on avec raison et écrivait-on plutôt Quesne que Chesne. Ce mot a été employé fréquemment au Moyen Âge ; on employait encore plus souvent son diminutif Quesnel ou Chesnel comme nom propre ou comme nom de famille. Cf. Mémoires et notes de M. Auguste Le Prevost pour servir à l'histoire du département de l'Eure, recueillis et publiés par MM. Léopold Delisle et Louis Passy, Tome premier, Évreux, de l'Imprimerie Auguste Hérissey, janvier 1862.
  7. Du latin bos, bœuf Ancien nom Bos taurus (Linnaeus, 1758), ou Bos primigenius taurus, ou Bos primigenius f. taurus, est le nom scientifique donné à l'ensemble des bovins domestiques de l'Ancien Monde issus des différentes sous-espèces de Bos primigenius, l'aurochs sauvage.
  8. Ou manai, manerie, peut-être un dérivatif vocal de manoir, du latin manere (?)
  9. Servitude consistant dans l'usage obligatoire et public d'un bien appartenant au seigneur. (banalité des moulins, des fours à pain).
  10. Tous les auteurs sont d'accord pour estimer que le toponyme Qimcampois est lié à l'existence d'un moulin. Poist en français médiéval serait l'équivalent de « qu'il pèse », et Quiquempoist pourrait se traduire par : « À qui qu'il en pèse ». Cette explication est contestée par d'autres pour qui poist viendrait d'un verbe latin qui se traduit en français par piler, broyer, écraser, et Quincampoix signifierait « qui s'en écrase ».
  11. La souche de sa cheminée porte cette date. Selon S. Lagabrielle, qui a participé à l'inventaire général des monuments et richesses artistiques de la France en 1985, « Ce corps de bâtiment est antérieur dans ses parties basses, probablement [du] XVIIe siècle ». Source : Cl. Inventaire C. Kollmann, 85 27 1674 X.
  12. Henry de Grosmont (vers 1299-1361), comte de Derby, de Lancastre, de Leicester, de Lincoln, puis duc de Lancastre en 1351.
  13. Source : Pascaline Lamare, Champignolles.org.
  14. Sous la première République et le Directoire (1789 à 1799), les maires sont élus au suffrage direct pour deux ans et rééligibles, par les citoyens actifs de la commune, contribuables payant une contribution au moins égale à trois journées de travail dans la commune.
  15. Société normande d'études préhistoriques, bulletin de 1903, page 13, imprimé par Ancelle fils à Évreux
  16. Les principaux dépôts de lœss (limon d'origine éolienne, très fertile déposé lors de phases climatiques froides) conservés se trouvent en Normandie, au nord de la Bretagne et dans le Val de Loire, mais des traces en ont aussi été reconnues dans le Morbihan, notamment sur le site de Locmariaquer.
  17. Source École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS), en partenariat avec la Bibliothèque nationale (BNF), le Centre national de la recherche scientifique, CNRS, le Laboratoire de Démographie historique (LDH) et l'Institut national d'études démographiques (INED).
  18. Histoire du Parlement de Normandie, par A. Floquet, tome quatrième, Edouard Frères Éditeurs, Rouen, M DCCC XLI
  19. }}
  20. Jean de la Varende, Les Promenades, Champignolles, La Nation française, le 2 mai 1957)
  21. La peur.
  22. (Évangile selon saint Luc, 9, 28-33).
  23. Un recueil des travaux de la Société Libre de l'Agriculture Sciences, Art et Belles Lettres du département de l'Eure de 1844 signale […] : « que trop souvent on est obligé de négliger les offres ou de refuser les donations faute d'un local… […] Bernay néglige les débris du passé… […]. Monsieur Chassant signale aussi la vente d'émaux intéressants consentie par l'Église de la Vieille Lyre. »

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